Florent a écrit :Et pour la coproduction conditionnée, si tu l'envisageais sous un angle "instantanéiste" cad les 12 facteurs qui peuvent se réunir en une seule et même chose tu comprendrais rapidement pourquoi il n' y a justement pas de causalité.
Florent a écrit :malheureusement beaucoup d'école bouddhistes et surtout les tibétains en ont fait une roue qui explique les réincarnations, ce qui constitue à mon avis une des nombreuses dérives que connaît aujourd'hui le bouddhisme.
Chakyam a écrit :la dérive tibétaine
color_3 Sans doute ne savez-vous pas, chers amis, qu'il n'y a pas de mot pour "réincarnation" en tibétain, et qu'il est donc difficile de vouloir mettre sur le dos du Bouddhisme tibétain des dérives concernant l'enseignement authentique du Bouddha. "Renaissance" est plus juste.
Chakyam a écrit :en ont fait une doctrine intenable et en tous cas absolument indémontrable.
Bizarrement, jusqu'à maintenant, c'est le contraire qui n'a pas été démontré; personne sur ce forum ou ailleurs n'a pu montrer une cause et son effet substantiel qui entretiendraient une nature dissemblable. On n'a encore jamais vu de fleur de lotus naître d'un caillou ni de phénomène cognitif (la conscience mentale subtile) naître de ce qui est purement matériel (le corps). De simples assomptions ne sont pas des arguments.
L'exposé des renaissances, comme je l'ai précédemment montré est déjà donné par le Bouddha dans le corpus du Véhicule fondamental (les
Kammavibhanga Suttas, les
Jatakas...) mais aussi est confirmé par le Mahayana; un exemple:
Pour la renaissance,
(La personne) voilée par l'ignorance
Effectue les trois formes de composants.
Ces actes déterminent sa destinée.*
Conditionnée par les composants,
La conscience s'installe dans les destinées.
La conscience installée,
Le nom et la forme se constituent.
Avec la constitution des nom et forme
Les six bases de la connaissance viennent à l'existence.
En dépendance des six bases de la connaissance
Apparaît le contact.
(La conscience) s'engendre uniquement
En raison de l'oeil, de la forme visible et de l'attention [les 3 conditions que j'ai évoquées précédemment, note perso].
Ainsi, en dépendance des nom et forme,
S'engendre la conscience.
La réunion des trois:
Le nom, la forme visible et la conscience,
Cela est le contact.
Du contact provient la sensation....
_________________________
* Punarbhavaya samskaran avidya-nivrtas tridha,
abhisamaskurute yams tair gatim gacchati karmabhih
Je vous fais grâce de la suite qui est tout aussi explicite. Il s'agit du début du chapitre XXVI du
Madhyamakashastra de Nagarjuna. Au vu de ceci, on peut clairement voir que les 12 liens apparaissent conventionnellement les uns des autres et non pas simultanément (comment un être aussi lucide que Nagarjuna pourrait-il l'envisager d'ailleurs ?). De plus, il explique par cela les renaissances (pali:
punabbhava; skt.:
punarbhava) enseignées par le Bouddha.
Chakyam a écrit :Devant une telle opposition langagière confortée et soutenue par d'autres messages où l'on retrouve la même dialectique exclusive (soit l'un soit l'autre – cf. mess du 9/12 de D à 10h05) je ne peux que m'incliner et surtout la regretter.
Tu devrais donc regretter cette méthode employée par le 14ème Patriarche de la tradition Zen.
Chakyam a écrit : ne pas réfléchir à partir de l'ultime et seulement à partir de lui consiste à penser le cosmos à partir d'une terre plate alors que nous savons qu'elle est ronde.
Vyavaharam anashritya paramartho na deshyate,
Paramartham anagamya nirvanam na dighamyate.
Sans s'appuyer sur le conventionnel, on ne peut comprendre l'ultime,
Sans réaliser l'ultime, on ne peut atteindre nirvana.
Nagarjuna.
De la même façon, on ne prenant en compte que l'ultime, on devient absolutiste au regard de celui-ci et nihiliste au regard des conventions, la voie médiane est perdue.
Chakyam a écrit :L'ultime ne peut être « relatif »
Voilà qui montre une adhésion à un ultime absolu. Le remède contre l'adhésion erronée à une quelconque existence absolue se transforme en poison, puisque son existence relative est niée. Il serait bon de se pencher plus sérieusement sur le chapitre XXIV du
Madhyamakashatra et en particulier les strophes 8 à 11.

Je répète que ce n'est pas parce que certains bouddhistes n'acceptent pas l'exposé bouddhiste des renaissances qu'ils doivent transformer à leur guise le Buddhadharma afin qu'il "colle" à leur opinion et mettre sur le dos du Bouddhisme tibétain une pseudo dérive pour la simple raison que celui-ci est l'un des justes héritiers de la pensée du Bouddha puisque cette tradition s'appuie sur ses enseignements, les commentaires de Maîtres indiens comme Arya Nagarjuna (prophétisé par le Bouddha lui-même comme allant expliciter sa pensée ultime) ainsi que sur le raisonnement. A tel point d'ailleurs qu'elle est aussi nommée "tradition indo-tibétaine".
M'étant personnellement appuyé sur les écritures authentiques et sur le raisonnement, je conclue cette discussion. Berzin résume parfaitement cette question d'ailleurs:
http://www.berzinarchives.com/web/fr/ar ... _lite.html
Merci les amis, c'était très instructif.
Chaleureusement
