chercheur a écrit : ↑21 août 2017, 07:32
Et quand on arrive à se dégager de cette 3ème pensée que reste-t-il ?
Il faut un observateur. Pour prendre conscience de l'absence fantasmée de pensée entre deux pensées. Mais cette prise de conscience nécessite... une conscience issue de l'observateur.
Pour tenter d'observer ce qui se passe, l'observateur évolue vers une forme d'observation pure, sans intention.
Pour ne pas polluer/contaminer ce qu'il cherche à observer, il est obligé d'abandonner ses propres facteurs mentaux, de s'oublier lui même. Sa conscience se fera alors de plus en plus subtile. De moins en moins dépendante des agrégats.
Comme il ne peut pas analyser cet état, sous peine de réinjecter une tonne de facteurs mentaux et de pensées discursives et imagées dans le processus, il ne peut que "vivre" cet état. C'est donc une forme de glissade karmique, comme une personne qui s'élance pour traverser en enfilade des pièces au sol glissant. Elle prend un max d'élan et ziiiiouououououououuuu ! Elle glisse sans pouvoir contrôler sa trajectoire.
De même, avant la pratique méditative, il aura fallu manifester une intention claire et précise de ce qu'on souhaite faire. Sous forme de voeu, d'engagement, de rites, de visualisation etc ... En associant bien à la réalité qu'on cherche, la Vue bouddhique qu'on est supposé vérifier. La Vue est très importante pour toucher la cible. Sinon, on programme une ballade dans nos fantasmes.
Le Bouddha s'est assis et a annoncé sa ferme intention de trouver l'éveil. D'échapper à la vieillesse, à la maladie et à la mort. De tout ce qu'il a pu faire, c'est cette déclaration d'intention qui était peut-être le plus important ! C'est cette détermination (une "détermination inébranlable" disait Maître Dogen) qui va contribuer à "colorer" les facteurs mentaux restants et les consciences restantes, alors même que la pensée analytique et discursive aura disparu.
C'est une forme d'autoprogrammation. Qui n'est sans doute pas tellement différente de celle d'une Intelligence Artificielle évoluant vers la Singularité ?

C'est l'autoprogrammation d'une métamorphose.
La réalisation de la Vraie Nature de l'esprit n'est pas une information qu'on découvre en cherchant entre deux pensées ou en
vipassanant le fonctionnement des agrégats. C'est la "façon de chercher " qui épuise les phénomènes mentaux, qui épuise le samsara. En résumé, le chemin, c'est le but. Le but, c'est le chemin.
D'où l'importance de l'étude, de la pratique, de la volonté d'éveil, de la bodhicitta, de la Vue, du doute lucide (qui permet de ne pas s'arrêter en chemin).
Pour résumer, il faut une claire détermination de vouloir trouver ce qu'il y a entre deux pensées, si on veut espérer une réponse. Il faut payer de sa personne en quelque sorte. C'est une ballade d'où l'égo ne revient pas. Après avoir choisi une voie bouddhiste (Zen, Theravâda, Vajrayana, Dzogchen), on adhère à la Vue propre à cette Voie, et on pratique en accord avec les instructions données par le maître.
S'il y a des préliminaires à faire, on les fait. S'il y a des préceptes moraux à respecter, on les respecte, et s'il n'y a rien de particulier à faire à part ne pas être distrait, alors, on ne se laisse pas distraire.
L'approche consistant à chercher entre deux pensées, à tomber sur Hishiryo (appelée aussi conscience des tréfonds) puis à partir en Samadhi, est plus typique du Zen. Mais elle peut être utilisée en tant que pratique secondaire dans Theravâda ou Dzogchen.