Quelle est mon expérience?? (cf trois messages plus haut)
C'est une question piège que tu me poses, et mon but n'est pas en fait de donner "ma" réponse, mais d'essayer de trouver ce qui peut nous unir, même si bien sûr je suis subjetctif, avec une expérience particulière.
Dans le zen soto, on parle plus d'une attitude éveillée, que de l'éveil en soi. J'ai même entendu Tokuda dire qu'à la limite on s'en fout...mais il dit ça, à partir d'une pratique enracinée...ce que ça veut dire c'est que se prendre le chou sur l'éveil, l'idée de ce que c'est, n'est pas bien utile.
La question nous renvoie sans cesse à comment on s'éveille nous. Si je regarde quelqu'un en me disant "ouah putain l'aut', comme il est éveillé!", qui dit que je ne délire pas???
A la fin, j'ai envie de dire qu'en parler ici et poser la question, est carrément inutile, car c'est un truc injustifiable. J'ai envie de dire que quand ça pue l'Eveil, on le sait à plein nez et on ne peut expliquer pourquoi. Par contre on se dit que le mec ou la fille qui nous montre ça, on voudrait devenir pareil, développer les mêmes facultés, qualités.
Mais ça peut changer. J'ai suivi quelqu'un en qui j'avais confiance, je comptais sur sa capacité d'éveil. A la fin, j'en suis revenu. Je compte plus sur ma capacité d'éveil. Qui me conduit à rechercher quelqu'un qui me semble éveillé. Mais comme j'ai changé, mes critères ont changé.
Un copain me disait que Tokuda parlait de Bodaishin (l'esprit d'éveil, qui recherche l'éveil), en ces termes : "100 fois, 1000 fois, 100000 fois remettre bodaishin en route." ou une formule du genre.
Avec Dume on n'en parle pas de la même façon, parce qu'on n'a pas reçu la même pédagogie à ce propos.
La principale critique que j'émettrai sur ce qu'en dit le rinzai d'après ce que j'ai compris des propos de Dume (et mes propos ne se veulent pas gratuitement polémique, mais faire avancer un débat calmement et paisiblement), c'est qu'on risque d'en faire un absolu, et par là de le réifier, le poser en objet de culte. Mais après, entre les mots, et tout ce qu'on ne dit pas et ne voit pas qui structure et conditionne un discours (comme le quotidien de vie avec un maître, les pratiques plus concrètes, la vie quotidienne dans les temple, les relations aux autres, etc....), on ne peut juger hâtivement. Parfois il y a un discours, et tout ce qu'il se passe autour équilibre le discours.
Le soto évacue le problème très simplement : il renvoie l'éveil à la pratique elle-même. Si on bloque sur l'éveil, c'est une stagnation qui peut devenir pathogène et très toxique : on s'enivre au satori, ça devient une drogue dure. Un truc qui enfle l'ego encore plus, au lieu de le résorber. Alors on renvoie l'éveil à la cuisine, on épluche les légumes éveillé. On va nettoyer les toilettes éveillé. Etc...ça évite de transformer cela en orgueil. C'est une stratégie comme une autre.
L'éveil, en fait, c'est à la foi absolu, c'est ce que pointe le discours de Dume. Et en même temps, ça peut être relatif.
je crois que les deux sont valables.
et si on a pondu les voeux de bodhisattva, c'est pour pouvoir utiliser l'élixir précieux de l'éveil, pour l'emmener dans le monde et aider.
Après, l'action sociale de l'éveil, n'est pas tourné vers l'extérieur : ces attitudes sont laissées aux choix personnels de chacun.
Par contre, en partageant et transmettant la pratique, on favorise la possibilité de tourner son regard vers l'intérieur. Et les opportunités de désengagement sociaux. Pas au sens commun, mais au sens large de ne pas se répandre et disperser dans des relations extérieures à soi, mais retrouver un vrai lien à soi...qui permettra alors de tisser des liens à l'autre de meilleures qualités, plus essentiels, moins commerciaux et intéressés.
Alors forcément, l'action sociale éveillé peut ne pas sembler engagée socialement.
Alors que je pense qu'elle l'est bien plus profondément. MAis plus discrètement, car tournée vers l'intérieur.
Et je pense que ça crée beaucoup de bienfaits, mais c'est discret, donc peu visible, donc peu reconnu.
Mais ça marche, à mon avis.
et puis, l'expérience éveillée, à mon avis, c'est que c'est mieux de ne pas trop se prendre la tète avec.
Quelle est votre expérience concernant les Éveillés?
Merci pour ta contribution!
Et je tiens à te rassurer, il n'y a pas de piège dans la question, même si je sais qu'adresser cette question a des implications profondes sur toute sa pratique. Et ta subjectivité est ici la bienvenue, après tout on parle de TES expériences. Mais d'un autre côté, tes efforts de trouver des points communs entre diverses traditions sont bien sûr appréciés.

Et je tiens à te rassurer, il n'y a pas de piège dans la question, même si je sais qu'adresser cette question a des implications profondes sur toute sa pratique. Et ta subjectivité est ici la bienvenue, après tout on parle de TES expériences. Mais d'un autre côté, tes efforts de trouver des points communs entre diverses traditions sont bien sûr appréciés.
Est-ce que tu peux expliquer pourquoi tu voudrais faire pareil et de quelles facultés et qualités tu parles (on dirait que c'est difficile de l'exprimer en mots, mais si tu parviens à en parler au moins en partie, ce serait déjà très bien!).lausm a écrit :J'ai envie de dire que quand ça pue l'Eveil, on le sait à plein nez et on ne peut expliquer pourquoi. Par contre on se dit que le mec ou la fille qui nous montre ça, on voudrait devenir pareil, développer les mêmes facultés, qualités.
Ça me semble raisonnable, je pense que la moitié de la recherche spirituelle est de savoir ce que l'on veut, et seulement l'autre moitié est vraiment d'essayer de l'obtenir.Mais ça peut changer. J'ai suivi quelqu'un en qui j'avais confiance, je comptais sur sa capacité d'éveil. A la fin, j'en suis revenu. Je compte plus sur ma capacité d'éveil. Qui me conduit à rechercher quelqu'un qui me semble éveillé. Mais comme j'ai changé, mes critères ont changé.
Ça me rappelle le dicton Zen que je paraphrase approximativement: "avant l'Éveil, on coupe du bois, après l'Éveil, on coupe du bois"Le soto évacue le problème très simplement : il renvoie l'éveil à la pratique elle-même. [...] on renvoie l'éveil à la cuisine, on épluche les légumes éveillé. On va nettoyer les toilettes éveillé.
Je pense que je saisis ce que tu veux dire. L'action sociale est un effet dérivé, conséquence d'un travail intérieur. Un peu le "que tu soies ce que tu veux que le monde devienne"...si on a pondu les voeux de bodhisattva, c'est pour pouvoir utiliser l'élixir précieux de l'éveil, pour l'emmener dans le monde et aider.
Après, l'action sociale de l'éveil, n'est pas tourné vers l'extérieur : ces attitudes sont laissées aux choix personnels de chacun.[...]Alors forcément, l'action sociale éveillé peut ne pas sembler engagée socialement.
Alors que je pense qu'elle l'est bien plus profondément. MAis plus discrètement, car tournée vers l'intérieur.
Et je pense que ça crée beaucoup de bienfaits, mais c'est discret, donc peu visible, donc peu reconnu.
Mais ça marche, à mon avis.
Je me rends compte que je n'ai pas encore demandé, à Antodune ses propres expériences, donc voici: Si jamais tu as croisé des maîtres zen de ta tradition, quelles ont été tes expériences?
- Dharmadhatu
- Messages : 3690
- Inscription : 02 juillet 2008, 18:07
Cathrine a écrit :Ton insistance, cette volonté de vouloir " débattre" à tout prix , m'inquiètent.
Es tu sincère? Cherches tu à semer le trouble sur le forum?Es tu un troll?


Merci à Iskander pour son sens de l'à propos et la profondeur de ses réflexions.
Bises à tous.
Amitié

apratītya samutpanno dharmaḥ kaścin na vidyate /
yasmāt tasmād aśūnyo hi dharmaḥ kaścin na vidyate
Puisqu'il n'est rien qui ne soit dépendant,
Il n'est rien qui ne soit vide.
Ārya Nāgārjuna (Madhyamakaśhāstra; XXIV, 19).
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Puisqu'il n'est rien qui ne soit dépendant,
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Ārya Nāgārjuna (Madhyamakaśhāstra; XXIV, 19).
Personnellement, je suis de l'avis de Dumè, et comme il a bien exposé ses raisons, auxquelles je peux adhérer, je n'y reviens pas. Un point intéressant peut-être : dans certaines écoles bouddhistes, comme le Zen Sôtô, ou le Chan chinois actuel (qui unifie les équivalents chinois de Rinzaï et Sôtô), non seulement les éveillés peuvent agir de façon immorale aux yeux des êtres ordinaires, mais on va jusqu'à affirmer que des éveillés peuvent être des animaux -munis de tout leur comportement animal. Comment alors les reconnaître à des traits sociaux, moraux, etc. ? Le critère de reconnaissance est ailleurs, évidemment.
Quand on sonde les choses, les connaissances s'approfondissent.
Les connaissances s'approfondissant, les désirs se purifient.
Les désirs une fois purifiés, le cœur se rectifie.
Le cœur étant rectifié, on peut réformer sa personne.
Kong Tseu
Les connaissances s'approfondissant, les désirs se purifient.
Les désirs une fois purifiés, le cœur se rectifie.
Le cœur étant rectifié, on peut réformer sa personne.
Kong Tseu
Bonjour,Sourire a écrit :C'est bien pour ne pas partir de ce postulat que je reviens à la question de définir un être éveillé...
un être éveillé c'est quelqu'un qui a réalisé selon une expérience directe que le réel se décline en deux Réalitées ou deux vues (deux vérités est-il aussi parfois dit). Ces deux Réalités sont une Réalité relative et une Réalité absolue.
La Réalité relative a pour caractéristique d'être composée (relatif signifiant par là "en relation"). Elle peut être appréhendée selon une "vue erronée" ou "une vue juste".
La Réalité absolue a pour caractéristique d'être non-composée. Elle ne peut être appréhendée que par la "vue juste".
Avec les deux vues d'appréhension de ces deux réalités on a donc les combinaisons suivantes:
Un être qui ne dispose que de la "vue erronée" ne voit que la Réalité relative voilée par l'illusion, il ne voit qu'une Réalité illusiore: c'est le samsara.
Un être qui déploie une "vue juste" appréhende la réalité Relative telle qu'elle est, il l'appréhende sans illusion, c'est comprendre la co-production conditionnée ou l'interdépendance des phénomènes.
Cet être par cette même "vue juste" parvient à la Réalité absolue: c'est le nirvana.
Cordialement,
Il me semble que cette discussion retrouve une certaine sérénité ; on peut donc continuer à dialoguer sans problème.
Alors, quel est ce langage de l'éveil ? Dans le Zen Rinzaï, depuis Hakuin, ce langage a été officialisé, en quelque sorte. C'est le protocole de passage des kôans. Les kôans sont des textes courts qui mettent en avant des problèmes insolubles par la logique. On parle d'aporie, mais ce n'est pas exactement ça. Le kôan est l'expression du langage de l'éveil. Il existe plusieurs kôans ; on en dénombre quelques 1700. Mais dans le Rinzaï, on utilise essentiellement deux recueils : le Pi-en-lou (Recueil de la Falaise Verte - en fait bleue mais peu importe) qui comporte 100 "cas" et le Ou-mêm-kouan qui en comporte 48.
Un exemple de "langage de l'éveil" (cas 63 et 64 du Pi-en-lou) :
63) Dans un monastère, sous l'autorité du maître Nansen, les bonzes se disputaient la propriété d'un chat. Le maître ayant eu vent de cette dispute saisit le chat et brandit une épée. Il dit aux moines : "dites quelque chose (de Zen) sinon je coupe ce chat en deux". Les moines restant muets, le maître pourfendit le chat.
64) Joshu, disciple de Nansen, était absent lors de cette histoire. Quand il rejoignit le maître dans le monastère, quelques temps plus tard, ce dernier lui conta l'histoire du chat pourfendu. Joshu alors s'inclina, mit ses sandales sur sa tête et sortit. Nansen dit alors : "Si vous aviez été là, le chat aurait été sauvé".
Le "langage de l'éveil", ici, est la "réponse de Joshu" (le sandales sur la tête). Si on analyse ce cas à la lumière de la logique, on voit bien que Nansen viole les préceptes puisqu'il tue le chat. Mais c'est, bien évidemment, un cas exprimé dans la langage de l'éveil et non dans le langage dualiste et logique.
A partir de ce cas, le maître peut, en sanzen, interroger son élève en lui demandant pourquoi Joshu met les sandales sur sa tête. Hakuin (autre grand maître zen, réformateur du Rinzaï), qui commente le cas juge que Nansen a mal agit. Tout le monde est d'accord ? Eh bien il dit qu'il aurait du tuer le chat tout de suite sans demander aux moines de dire quoi que ce soit. Etes-vous toujours d'accord avec Hakuin ? Pourquoi ?...
Dans le contexte du Japon, je propose, pour celles et ceux qui ne l'auraient pas vu, de (re)voir les films "Apocalypses" (en 6 épisodes de mémoire) et qui traitent de l'histoire de la guerre 39/45. Le 5ème (ou 6ème ?) épisode parle du Japon. Le commentateur dit que les militaires alliés étaient étonné de la façon dont combattaient les japonais. La conclusion étaient qu'ils maîtrisaient le "Bushido" (l'art de la guerre). Mais qu'est-ce que ça signifie, dans le contexte ?
Voici ma lecture :
Imaginons que nous rencontrions un homme atteint d'une maladie incurable. Cependant, au lieu de se plaindre et d'avoir peur, il est calme, serein. Il a "lâché prise". Nous sommes, bien évidemment, remplit de respect pour cet homme, pour son courage, pour la façon dont il accepte l'inéluctable. Intimement, nous souhaitons pouvoir mourir comme lui, si nous étions atteints d'une maladie incurable. Bien sûr, il a du passer par plein d'états mentaux : la colère, la peur, puis l'abandon... Et enfin l'acceptation.
Qui a formé les soldats japonais au Bushido ? Les maîtres zen. Qui les a formés à se battre jusqu'au bout (face à la maladie de la guerre) et à accepter leur sort sereinement (la mort) ? Les maîtres zen... En peu de temps, ces maîtres zen ont réussi à faire en sorte que des millions de soldats se présentent au combat comme nous voudrions nous, personnellement, affronter l'agonie d'une maladie mortel. Pensez-vous toujours que ces maîtres étaient des individus infâmes et sans coeur ? Pensez-vous qu'ils violaient les préceptes ? C'est une question difficile qui requiert peut-être le langage de l'éveil pour y répondre... En tout cas, il faut y réfléchir avant de condamner (je sais bien que ce n'est pas ton cas, mais, en général, cet épisode a démoli plus d'un zeniste).
Eh bien, quand un maître zen rinzaï (je m'efforcerai de le préciser car les protocoles ne sont pas les mêmes dans le sôtô) est en sanzen (entretien individuel) avec son élève, il va lui parler le "langage de l'éveil" (c'est d'ailleurs très bien que tu aies utilisé cet exemple du langage). Si l'élève comprend ce langage, alors, il est considéré comme éveillé ou, tout du moins, avoir fait une expérience zen suffisante pour comprendre le sens général du langage. Par voie de conséquence, celui qui ne parle pas ce langage ou qui ne le comprend pas est considéré comme non éveillé du point de vue du Zen Rinzaï. Note que l'élève qui a fait une expérience zen profonde (de type kensho) va parler d'emblée le langage de l'éveil. Le maître le comprend immédiatement. Si le maître ne le comprend pas, cela signifie que l'élève a dépassé le maître. Le cas s'est trouvé avec Bankei, par exemple (qui fut un grand maître zen rinzaï) qui eut d'énormes difficultés pour trouver un maître zen qui comprenne son langage (le langage de l'éveil). Mais d'autres exemples aussi sont connus.Iskander a écrit :Attention, je ne dis pas reconnaître un éveillé, mais voir qu'un être n'est pas éveillé (c'est très différent). Par exemple, je peux vérifier sans difficulté que quelqu'un ne comprends pas le chinois, alors même que moi non plus je ne le comprends pas. Il suffit de lui donner la traduction en chinois d'un livre que je connais, et lui demander de me lire des passages, ou de prendre un livre en chinois dont un chinois m'a expliqué de quoi il en retournait, et demander à cette personne ce qu'il en est. Un état a des conséquences qui peuvent être détectables même pour ceux qui ne sont pas capables de distinguer directement les états.
Alors, quel est ce langage de l'éveil ? Dans le Zen Rinzaï, depuis Hakuin, ce langage a été officialisé, en quelque sorte. C'est le protocole de passage des kôans. Les kôans sont des textes courts qui mettent en avant des problèmes insolubles par la logique. On parle d'aporie, mais ce n'est pas exactement ça. Le kôan est l'expression du langage de l'éveil. Il existe plusieurs kôans ; on en dénombre quelques 1700. Mais dans le Rinzaï, on utilise essentiellement deux recueils : le Pi-en-lou (Recueil de la Falaise Verte - en fait bleue mais peu importe) qui comporte 100 "cas" et le Ou-mêm-kouan qui en comporte 48.
Un exemple de "langage de l'éveil" (cas 63 et 64 du Pi-en-lou) :
63) Dans un monastère, sous l'autorité du maître Nansen, les bonzes se disputaient la propriété d'un chat. Le maître ayant eu vent de cette dispute saisit le chat et brandit une épée. Il dit aux moines : "dites quelque chose (de Zen) sinon je coupe ce chat en deux". Les moines restant muets, le maître pourfendit le chat.
64) Joshu, disciple de Nansen, était absent lors de cette histoire. Quand il rejoignit le maître dans le monastère, quelques temps plus tard, ce dernier lui conta l'histoire du chat pourfendu. Joshu alors s'inclina, mit ses sandales sur sa tête et sortit. Nansen dit alors : "Si vous aviez été là, le chat aurait été sauvé".
Le "langage de l'éveil", ici, est la "réponse de Joshu" (le sandales sur la tête). Si on analyse ce cas à la lumière de la logique, on voit bien que Nansen viole les préceptes puisqu'il tue le chat. Mais c'est, bien évidemment, un cas exprimé dans la langage de l'éveil et non dans le langage dualiste et logique.
A partir de ce cas, le maître peut, en sanzen, interroger son élève en lui demandant pourquoi Joshu met les sandales sur sa tête. Hakuin (autre grand maître zen, réformateur du Rinzaï), qui commente le cas juge que Nansen a mal agit. Tout le monde est d'accord ? Eh bien il dit qu'il aurait du tuer le chat tout de suite sans demander aux moines de dire quoi que ce soit. Etes-vous toujours d'accord avec Hakuin ? Pourquoi ?...
Le Non-né est, par essence, libre de souillure (il est "pur" si tu préfères) ; Si on le réalise et qu'on "s'installe" en Lui, que ce soit dans le monde duel ou en samadhi, durant zazen, on est libéré du samsara. Samsara et Nirvana sont les deux côtés d'une même pièce. On agit donc en toute liberté. Mais cela n'est compréhensible que pour le sage, pas pour celui qui n'a pas réalisé le Non-né. Aussi, il ne faudrait pas se prendre pour quelqu'un de libéré et s'amuser à pourfendre les chats, par exemple.si le Non-né implique le 1er précepte, quelle est la nature de cette implication? Le Non-né implique la compréhension du premier précepte, son adhésion, ou son exécution? Et comment voir ça dans le contexte particulier du Japon militariste.
Dans le contexte du Japon, je propose, pour celles et ceux qui ne l'auraient pas vu, de (re)voir les films "Apocalypses" (en 6 épisodes de mémoire) et qui traitent de l'histoire de la guerre 39/45. Le 5ème (ou 6ème ?) épisode parle du Japon. Le commentateur dit que les militaires alliés étaient étonné de la façon dont combattaient les japonais. La conclusion étaient qu'ils maîtrisaient le "Bushido" (l'art de la guerre). Mais qu'est-ce que ça signifie, dans le contexte ?
Voici ma lecture :
Imaginons que nous rencontrions un homme atteint d'une maladie incurable. Cependant, au lieu de se plaindre et d'avoir peur, il est calme, serein. Il a "lâché prise". Nous sommes, bien évidemment, remplit de respect pour cet homme, pour son courage, pour la façon dont il accepte l'inéluctable. Intimement, nous souhaitons pouvoir mourir comme lui, si nous étions atteints d'une maladie incurable. Bien sûr, il a du passer par plein d'états mentaux : la colère, la peur, puis l'abandon... Et enfin l'acceptation.
Qui a formé les soldats japonais au Bushido ? Les maîtres zen. Qui les a formés à se battre jusqu'au bout (face à la maladie de la guerre) et à accepter leur sort sereinement (la mort) ? Les maîtres zen... En peu de temps, ces maîtres zen ont réussi à faire en sorte que des millions de soldats se présentent au combat comme nous voudrions nous, personnellement, affronter l'agonie d'une maladie mortel. Pensez-vous toujours que ces maîtres étaient des individus infâmes et sans coeur ? Pensez-vous qu'ils violaient les préceptes ? C'est une question difficile qui requiert peut-être le langage de l'éveil pour y répondre... En tout cas, il faut y réfléchir avant de condamner (je sais bien que ce n'est pas ton cas, mais, en général, cet épisode a démoli plus d'un zeniste).
La foi qu'il est possible de s'éveiller en une seule vie (ce qui suppose accepter la voie "abrupte" du Zen), je suppose.qu'est ce qui motive ceux qui sont encore sur la voie, et n'ont pas encore maîtrisé le jeu simultané de la Triple Discipline (qui implique le Non-né, si j'ai bien compris)? Les Zénistes qui n'ont pas encore atteint l'Éveil, et qui donc ne comprennent pas le Zen, qu'est ce qui les pousse à poursuivre cette voie qu'ils ne comprennent pas?
C'est vrai que c'est un risque à courir. Mais si on est bien accompagné, par un maître zen compétant, ce risque est bien identifié. En revanche il est exact qu'on fait du kensho, dans le Rinzaï, une priorité absolue dans la pratique. Mumon Yamada (le maître de T. Jyoji) lui disait en sanzen : "sans le kensho, vous n'êtes rien". Autrement dit, sans le kensho, tout n'est que discours vain. Les yeux ne voient pas, les oreilles n'entendent pas. Ou, devrais-je dire : "les oreilles ne voient pas et les yeux n'entendent pas".Lausm a écrit :La principale critique que j'émettrai sur ce qu'en dit le rinzai d'après ce que j'ai compris des propos de Dume (et mes propos ne se veulent pas gratuitement polémique, mais faire avancer un débat calmement et paisiblement), c'est qu'on risque d'en faire un absolu, et par là de le réifier, le poser en objet de culte.
J'ai déjà croisé des maîtres zen puisque je suis en contact fréquent avec celui qui est actuellement le supérieur du Centre Zen de la Falaise Verte (T. Jyoji). Mais j'ai aussi rencontré un homme qui, pour moi (à titre personnel, donc) est un véritable Bouddha vivant, c'est Taistu Kohno Roshi, le supérieur actuel de la branche Myoshin-ji du Zen Rinzaï (la plus importante branche au Japon en terme de nombre de monastères et temples, plus de 3000).Iskander a écrit :Je me rends compte que je n'ai pas encore demandé, à Antodune ses propres expériences, donc voici: Si jamais tu as croisé des maîtres zen de ta tradition, quelles ont été tes expériences?
Dernière modification par antodume le 02 mars 2012, 23:56, modifié 1 fois.
- Dharmadhatu
- Messages : 3690
- Inscription : 02 juillet 2008, 18:07
Flocon a écrit :non seulement les éveillés peuvent agir de façon immorale aux yeux des êtres ordinaires, mais on va jusqu'à affirmer que des éveillés peuvent être des animaux -munis de tout leur comportement animal. Comment alors les reconnaître à des traits sociaux, moraux, etc. ? Le critère de reconnaissance est ailleurs, évidemment.

Amitié

apratītya samutpanno dharmaḥ kaścin na vidyate /
yasmāt tasmād aśūnyo hi dharmaḥ kaścin na vidyate
Puisqu'il n'est rien qui ne soit dépendant,
Il n'est rien qui ne soit vide.
Ārya Nāgārjuna (Madhyamakaśhāstra; XXIV, 19).
yasmāt tasmād aśūnyo hi dharmaḥ kaścin na vidyate
Puisqu'il n'est rien qui ne soit dépendant,
Il n'est rien qui ne soit vide.
Ārya Nāgārjuna (Madhyamakaśhāstra; XXIV, 19).
Je pense justement que le critère pour reconnaître ces dits êtres éveillés, c'est que justement on sort d'une pensée basée sur des critères, sur des objets identifiables et évaluables...en gros tout le contraire de notre fonctionnement social, ou plutôt même pas le contraire mais ne pas du tout suivre cette convention sociale.
En gros, il reste quoi??
La relation.
Un truc qui n'est ni quelque chose ni rien.
je soulevais le point auquel Dume a répondu du risque de réification de l'Eveil, d'en faire un absolu. Ce qui tempère ce risque est donc la relation, avec le maître, avec la communauté, d'où le refuge en les trois trésors (conclusions miennes).
je dirais que le critère de reconnaissance est en fait l'éveillé en soi qui reconnaît l'éveillé en l'autre. Donc en fait, pas de critères.
Mais une reconnaissance directe, intuitive : on Voit.
Tokuda, à la sesshin que j'ai faite, avais dit à un moment, reprenant ce que dit Rommeluère dans son bouquin, que le bouddhisme n'existe pas. Bien sûr, il dit ça, et il ne cesse de parler de bouddhisme. Mais ce que ça veut dire, c'est que ce n'est pas seulement une idée. Le bouddhisme n'existe que parce qu'il est pratiqué, réalisé. C'était le sens, à mes yeux, de la parole de Dogen, quand il dit que pratique et réalisation sont unes.
Donc deux jours après, je branche Tokuda à table en lui demandant ce qui lui faisait dire un truc comme "le bouddhisme n'existe pas". Et très gentiment, et très maîtrezenement, il a remis en place le zozo qui faisait le malin en moi avec les mots, en me répondant, en rigolant : "oh...word are not important!". Les mots ne sont pas importants! Ca ne m'a absolument pas fait mal, je ne me suis pas senti ni pris dans un truc magistral, ni dans un rejet : c'était très ordinaire. Il m'aurait dit qu'il y avait des patates à éplucher que je crois que ç'aurait été pareil pour moi!
Mais il ne m'a pas répondu, pas éludé la question, ni donné rien à l'alimenter : face au mur mec!!
En fait, le peu que je le connaisse, j'ai remarqué qu'il distingue très bien ce qui est de l'ordre du discours, et des actes, et n'entretient aucune confusion entre les deux : les mots servent clairement à amener à la pratique en silence. La pratique en silence peut s'exprimer avec les mots. Et un dialogue constant entre les deux, pour faire avancer le schmilblik.
Je voulais rebondir sur ce que Dume explique des maîtres zen du Japon pendant la guerre. Cette question a soulevé d'immenses controverses dans le zen en France, après le bouquin de Brian Victorai, zen at war.
Personnellement, je pense que ce qu'ils ont fait était injuste, voire, si on pense moralement, mal.
Après, quand Dume explique le contexte socio politique, les positions de chacun, on peut imaginer que chacun a fait ce qu'il pouvait là où il était. Que certains cadres étaient inamovibles.
Donc juger a posteriori, c'est facile. La question n'est pas de juger de l'éveil des personnes : elle est de savoir si soi-même on veut faire pareil ou pas. Par exemple, je ne voudrais jamais avoir à dire qu'il faut brandir l'épée au nom du bouddhisme. Je ne crois pas une seconde à cela. Mais je peux comprendre que certains l'aient fait. Et ma question est , comment rester nous-mêmes éveillés, donc pouvoir ne pas reproduire les erreurs du passé.
Lors de cette affaire, on avait critiqué Kodo Sawaki. Mais c'est facile d'extraire un texte du contexte. En cherchant, on a pu voir qu'en fait Kodo Sawaki, a exprimé l'absurdité de la guerre, qu'il a vécu.
La question est, si ces maîtres avaient la possibilité et la liberté, dans leur cadre, de pouvoir remettre en cause celui-ci, et donc une vraie liberté pour leur éthique. et aussi, l'évolution de la conscience humaine à cette époque. Il y a des discours qu'on pouvait tenir il y a cinquante ans, et qui aujourd'hui ne passeraient pas. C'est tout ça qu'il faut voir, je crois.
L'éveil n'est pas une garantie, mais on peut faire voeu de retenter sa chance de l'éveil. On peut tomber, et se relever et se remettre en marche. Ca veut dire savoir admettre ses erreurs, savoir pardonner. Savoir aussi qu'on a des limites, et que parfois on restera obtus sur certains points qu'on ne dépasse pas...avec la meilleure volonté du monde.
Ah, l'éveil!! On en cause comme si on savait ce que c'est, z'avez remarqué??
En gros, il reste quoi??
La relation.
Un truc qui n'est ni quelque chose ni rien.
je soulevais le point auquel Dume a répondu du risque de réification de l'Eveil, d'en faire un absolu. Ce qui tempère ce risque est donc la relation, avec le maître, avec la communauté, d'où le refuge en les trois trésors (conclusions miennes).
je dirais que le critère de reconnaissance est en fait l'éveillé en soi qui reconnaît l'éveillé en l'autre. Donc en fait, pas de critères.
Mais une reconnaissance directe, intuitive : on Voit.
Tokuda, à la sesshin que j'ai faite, avais dit à un moment, reprenant ce que dit Rommeluère dans son bouquin, que le bouddhisme n'existe pas. Bien sûr, il dit ça, et il ne cesse de parler de bouddhisme. Mais ce que ça veut dire, c'est que ce n'est pas seulement une idée. Le bouddhisme n'existe que parce qu'il est pratiqué, réalisé. C'était le sens, à mes yeux, de la parole de Dogen, quand il dit que pratique et réalisation sont unes.
Donc deux jours après, je branche Tokuda à table en lui demandant ce qui lui faisait dire un truc comme "le bouddhisme n'existe pas". Et très gentiment, et très maîtrezenement, il a remis en place le zozo qui faisait le malin en moi avec les mots, en me répondant, en rigolant : "oh...word are not important!". Les mots ne sont pas importants! Ca ne m'a absolument pas fait mal, je ne me suis pas senti ni pris dans un truc magistral, ni dans un rejet : c'était très ordinaire. Il m'aurait dit qu'il y avait des patates à éplucher que je crois que ç'aurait été pareil pour moi!
Mais il ne m'a pas répondu, pas éludé la question, ni donné rien à l'alimenter : face au mur mec!!
En fait, le peu que je le connaisse, j'ai remarqué qu'il distingue très bien ce qui est de l'ordre du discours, et des actes, et n'entretient aucune confusion entre les deux : les mots servent clairement à amener à la pratique en silence. La pratique en silence peut s'exprimer avec les mots. Et un dialogue constant entre les deux, pour faire avancer le schmilblik.
Je voulais rebondir sur ce que Dume explique des maîtres zen du Japon pendant la guerre. Cette question a soulevé d'immenses controverses dans le zen en France, après le bouquin de Brian Victorai, zen at war.
Personnellement, je pense que ce qu'ils ont fait était injuste, voire, si on pense moralement, mal.
Après, quand Dume explique le contexte socio politique, les positions de chacun, on peut imaginer que chacun a fait ce qu'il pouvait là où il était. Que certains cadres étaient inamovibles.
Donc juger a posteriori, c'est facile. La question n'est pas de juger de l'éveil des personnes : elle est de savoir si soi-même on veut faire pareil ou pas. Par exemple, je ne voudrais jamais avoir à dire qu'il faut brandir l'épée au nom du bouddhisme. Je ne crois pas une seconde à cela. Mais je peux comprendre que certains l'aient fait. Et ma question est , comment rester nous-mêmes éveillés, donc pouvoir ne pas reproduire les erreurs du passé.
Lors de cette affaire, on avait critiqué Kodo Sawaki. Mais c'est facile d'extraire un texte du contexte. En cherchant, on a pu voir qu'en fait Kodo Sawaki, a exprimé l'absurdité de la guerre, qu'il a vécu.
La question est, si ces maîtres avaient la possibilité et la liberté, dans leur cadre, de pouvoir remettre en cause celui-ci, et donc une vraie liberté pour leur éthique. et aussi, l'évolution de la conscience humaine à cette époque. Il y a des discours qu'on pouvait tenir il y a cinquante ans, et qui aujourd'hui ne passeraient pas. C'est tout ça qu'il faut voir, je crois.
L'éveil n'est pas une garantie, mais on peut faire voeu de retenter sa chance de l'éveil. On peut tomber, et se relever et se remettre en marche. Ca veut dire savoir admettre ses erreurs, savoir pardonner. Savoir aussi qu'on a des limites, et que parfois on restera obtus sur certains points qu'on ne dépasse pas...avec la meilleure volonté du monde.
Ah, l'éveil!! On en cause comme si on savait ce que c'est, z'avez remarqué??

Comme des enfants le nez collé à la vitrine d'un chocolatier qui dégusteraient les petits personnages en chocolat noir et en sucre de toutes les couleurs qui la décorent...lausm a écrit :Ah, l'éveil!! On en cause comme si on savait ce que c'est, z'avez remarqué??
Alors qu'ils ont l'habitude du nutella.