2.1.1 Qu’est-ce que l’esprit ?
«La seule réalisation du sens de l’esprit
Englobe toutes compréhensions ;
Alors que tout connaître
Sans réaliser le sens de l’esprit
serait la pire (ignorance).»
Jamgön Kongtrül Lodrö Tayé, Le Résumé des points essentiels.
Nous avons tous le sentiment d’avoir un esprit et d’exister mais notre compréhension de celui-ci et de son mode d’existence est habituellement pour le moins vague et confuse. Nous disons bien : « J’ai un esprit », « Je suis », « J’existe », nous nous identifions à un « moi », un « je », auquel nous attribuons des qualités. Mais nous ne connaissons véritablement ni la nature de cet esprit, ni celle de ce « moi ». Nous ignorons en quoi ils consistent, comment ils fonctionnent, et globalement, qui nous sommes fondamentalement.
Le paradoxe fondamental
Dans la quête de l’esprit, le point essentiel est de reconnaître sa nature, en commençant par questionner, au niveau le plus profond, ce que nous sommes réellement. Ceux qui examinent vraiment leur esprit et qui considèrent profondément ce qu’il est sont extrêmement rares. Et pour ceux qui essayent de le faire, l’examen s’avère difficile : recherchant et observant ce qu’est notre esprit, nous n’arrivons pas à le cerner véritablement, nous ne le trouvons pas vraiment.
Nul doute que, d’un point de vue scientifique, beaucoup de réponses pourraient être données pour définir ce qu’est l’esprit. Mais nous ne parlons pas ici de ce type de connaissance.
Le problème fondamental est qu’il n’est pas possible que l’esprit se connaisse lui-même, car celui qui cherche, le sujet, est l’esprit lui-même, et l’objet qu’il se propose d’examiner est aussi l’esprit ! Il y a là une situation paradoxale ! Je peux me chercher partout, dans le monde entier, sans jamais me trouver, car je suis ce que je cherche.
Le problème est le même que d’essayer de voir notre propre face : nos yeux en sont extrêmement proches, mais ils ne peuvent pas plus la voir qu’ils ne peuvent se voir eux-mêmes. Nous n’arrivons pas à connaître notre propre esprit, tout simplement parce qu’il est trop près ! Un proverbe du dharma dit : « L’œil ne voit pas sa propre pupille. » De même, notre propre esprit n’a pas la capacité de se voir lui-même : il nous est tellement proche, tellement intime, que nous ne pouvons pas le discerner !
Ce n’est qu’en sachant faire le détour qui consiste à utiliser un miroir que nous pourrons voir notre propre face. De même que pour se voir lui-même l’œil doit avoir recours à cet objet particulier, l’esprit pour s’étudier lui-même doit faire appel à un moyen particulier qui joue le rôle du miroir dans lequel il peut découvrir son vrai visage : ce moyen est le dharma tel que nous le transmet un guide spirituel. C’est dans la relation que nous entretenons avec l’enseignement et cet ami spirituel ou ce guide que l’esprit va pouvoir s’éveiller petit à petit à sa nature véritable et finalement dépasser le paradoxe initial, en découvrant un autre mode de connaissance. Cette découverte s’effectue dans diverses pratiques, dites de méditation.
En quête de l'esprit
L’esprit est quelque chose d’étrange. Les Orientaux le situent traditionnellement au centre du corps, au niveau du cœur. Les Occidentaux le localisent dans la tête ou dans le cerveau. Bien qu’étant justifiées sous divers points de vue, ces localisations sont imparfaites. Fondamentalement, l’esprit n’est pas plus dans le cœur qu’il n’est dans le cerveau. L’esprit habite le corps, mais ce n’est qu’illusoirement qu’il peut être localisé à tel ou tel endroit. Essentiellement, on ne peut dire qu’il se trouve en un point particulier de la personne, où que ce soit.
La recherche n’est pas simple car, en plus de la situation paradoxale que nous venons d’exposer, dans laquelle le connaisseur ne peut se connaître lui-même, l’esprit, dans sa nature essentielle, n’est pas descriptible : il n’a pas de forme, pas de couleur, ni de caractéristiques grâce auxquelles on pourrait dire : « voilà ce qu’il est ».
Chacun d’entre nous peut pourtant développer une expérience de la nature de son esprit, en s’interrogeant sur ce qui observe : sur l’observateur, le connaisseur, le sujet qui expérimente les pensées et les différentes sensations. Où se trouve-t-il exactement ? Quel est-il ? Il s’agit d’observer l’esprit en lui-même : où est-il ? Qui suis-je ? Que suis-je ? Le corps et l’esprit sont-ils un ou différents ? Mes expériences se déroulent-elles à l’intérieur ou à l’extérieur de l’esprit ? L’esprit et ses pensées sont-ils distincts ou sont-ils la même chose ? Si oui, comment ? Si non, comment ? Cette recherche se conduit dans la méditation, en relation étroite avec le guide qui nous indique ce qui dans cette exploration est juste et ce qui est erroné ; cela peut durer plusieurs mois, voire plusieurs années.
Dans cette quête approfondie, le guide spirituel nous dirige progressivement vers l’expérience de la véritable nature de l’esprit. Elle est difficile à comprendre et à réaliser car, fondamentalement, elle n’est pas quelque chose qui puisse être appréhendé au moyen de concepts ou de représentations. L’étude principale de l’esprit ne peut se faire par la théorie ; il faut recourir à l’expérience pratique de la méditation, observer encore et encore cet esprit afin d’en pénétrer la véritable nature.
Dans les pratiques méditatives, il existe une double approche : l’une pourrait être dite analytique, et l’autre contemplative. La première est faite d’interrogations comme celles qui viennent d’être mentionnées. Si l’on prolonge cette recherche sans se lasser en étant guidé avec compétence, une certaine compréhension croît.
Dans la seconde approche, l’esprit reste simplement au repos en sa propre lucidité, sans contrainte ni artifice. Cette pratique dépasse toutes les formes d’analyses précédentes, en faisant sortir de la sphère des concepts et en ouvrant à une expérience immédiate1. Au terme de ces méditations, se fait la découverte de l’esprit comme étant essentiellement vide, ce qui signifie qu’il est vide de déterminations, vide de caractéristiques, telles que : forme, couleur, aspect, etc. : sa nature est au-delà des représentations, des concepts, des noms et des formes. Pour essayer d’évoquer cette vacuité, la notion la plus proche serait celle d’indétermination ou d’ouverture de l’espace : l’esprit est vide, ouvert comme l’espace, omniprésent. Mais ce n’est qu’une image et comme nous le verrons plus tard, il n’est pas seulement vide…
Pour l’instant, je voudrais insister sur l’importance capitale de la connaissance de l’esprit et sur ses fruits.
L’esprit est ce que nous sommes et ce qui expérimente bonheur et souffrance. Il est « ce que je suis et vis ». Il est ce qui éprouve les différentes pensées et sensations, ce qui est soumis aux émotions plaisantes ou déplaisantes, ce qui expérimente désir, aversion, etc. La compréhension véritable de sa nature est libératrice ; elle nous dégage de toutes les illusions et, par conséquent, de l’origine des douleurs, des peurs et des difficultés qui constituent notre lot quotidien.
Prenons un exemple : si nous avons l’illusion qu’un malfaiteur est un bienfaiteur, il peut alors nous tromper, nous abuser et nous faire du mal. Mais dès lors que nous le reconnaissons comme malfaiteur, il nous devient possible de ne pas être dupés : en le démasquant nous pouvons éviter d’être exposés à ses méfaits. Le malfaiteur est ici l’ignorance de ce que nous sommes véritablement ; ou, plus précisément, l’illusion de l’ego, d’un soi. Et la connaissance qui le démasque est celle de la nature de l’esprit : elle nous libère de ses illusions et de ses conditionnements douloureux.
Cette connaissance de l’esprit et de sa nature est la base et le fondement du dharma du Bouddha, de tous ses enseignements.
http://www.buddhawiki.fr/bwiki/bin/view/VoieDuBouddha/
La conscience
S'indigner, s'irriter, perdre patience, se mettre en colère, oui, dans certains cas ce serait mérité. Mais ce qui serait encore plus mérité, ce serait d'entrer en compassion.
Je crois que ce texte répond à toutes mes questions.
merci pour ce texte

merci pour ce texte

Mais si nous le cherchons, nous ne pouvons le trouver nulle part en nous : ni dans notre tête ni dans notre corps ni où que ce soit ou comme quoi que ce soit. De cet autre point de vue, il semblerait qu’il n’existe pas. Ainsi, d’un côté l’esprit semble exister mais, d’un autre, il n’est pas quelque chose qui existe vraiment.
Aussi longues et poussées que soient nos investigations, nous ne pourrons jamais lui trouver de caractéristiques formelles : il n’a ni dimension ni couleur ni forme ni quoi que ce soit de tangible. C’est en ce sens qu’il est dit « vide », parce qu’il est essentiellement indéterminable, inqualifiable, au-delà des concepts du mental, et en cela comparable à l’espace tout ouvert, sans centre ni périphérie.
Cette nature indéfinissable est « vacuité-ouverture », c’est la première qualité essentielle de l’esprit. Elle est l’au-delà de la connaissance illusoire qui, elle, nous fait expérimenter l’esprit comme un moi pourvu des caractéristiques que nous nous attribuons habituellement.
Mais il faut être vigilant ! Car dire que l’esprit est vacuité-ouverture n’est pas le réduire à quelque chose d’inexistant, au sens d’inopérant.
Comme l’ouverture de l’espace, l’esprit pur n’est pas localisable, il est omniprésent et omnipénétrant : il embrasse et pénètre toute chose. De plus, il est au-delà du changement et sa nature vide est indestructible, intemporelle.
http://www.buddhawiki.fr/bwiki/bin/vie ... dha/23#23a
Guéshé Kelsang Gyatso l'exprime de plusieurs manières dans son ouvrage Océan de Nectar qui est un commentaire du Guide du chemin du milieu de Chandrakirti, qui est lui-même un commentaire de La sagesse fondamentale du chemin du milieu de son maître Nagarjuna.
Aussi Khenpo Tsultrim Gyamtso indique dans son ouvrage Les deux réalités :
Il est clair que les adeptes de l'école conséquentialiste [madhyamika-prasangika] ne soutiennent ni l'existence ultime de la conscience base-de-tout ni celle de la conscience qui se perçoit elle-même. Ceci est expliqué dans le texte appelé L'Introduction à la voie médiane, où Chandrakirti réfute très nettement l'existence de la conscience de base et de la conscience qui se perçoit elle-même. Mais après cela, il y a eu des débats, car certains maîtres tibétains ont déclaré que la conscience de base et la conscience aperceptive ne pouvaient même pas être posées conventionnellement (Guélougpa), tandis que d'autres expliquaient qu'il n'y avait aucune contradiction dans le fait de soutenir qu'elles existaient de manière conventionnelle (Nyingmapa, Kagyupa, certains Sakyapa).
S'indigner, s'irriter, perdre patience, se mettre en colère, oui, dans certains cas ce serait mérité. Mais ce qui serait encore plus mérité, ce serait d'entrer en compassion.
y a pas de qui ted...pour personne, la conscience est juste là et je pense que simplement la résumé à l'obtention d'information c'est limiter à mon avis sa portée. Par exemple je la comparais à un espace d'accueil infini, elle est disponible à toutes expériences, à toutes apparitions gratuitement... comme un miroir, ou un écran.Une conscience sert à obtenir de l'information.
Mais pour qui ?![]()
En disant : "la conscience est juste là", est-ce qu"on ne la positionne pas en arrière-plan de l'univers ? Un peu comme une conscience océane ? Et en faisant abstraction de l'expérience méditative qui témoigne :
- de l'apparition de la conscience et de sa disparition régulière.
- d'un mode de perception hors-conscience propre à la bouddhéité (c'est inexplicable).
Je suis d'accord qu'il y a un aspect vaste et lumineux, spacieux, qu'on retrouve chez tous les terminaux. Un peu comme la luminosité d'un écran allumé, sans image.
Est-ce que cette clarté (perception intelligente), vaste, lumineuse et joyeuse n'est pas simplement la nature du terminal ? Quand il réussit à évoluer suffisamment pour ne pas être obscurci par les saisies égotiques ? N'est ce pas le simple reflet de la bouddhéité ?
A ce stade, une conscience n'est plus nécessaire. Pourquoi faire ? Après tout, pour qu'il y ait conscience, il faut qu'il y ait dualité : séparation sujet/objet.
Cette clarté spacieuse, lumineuse, joyeuse, je crois que c'est ce que le Dzogchen appelle "l"Etat primordial ". L'essence de tous les Bouddhas.
Les consciences sont les témoins du samsara et donc de l'erreur primordiale.
Tel un radeau, elles sont abandonnées quand l'autre rive est atteinte.
- de l'apparition de la conscience et de sa disparition régulière.
- d'un mode de perception hors-conscience propre à la bouddhéité (c'est inexplicable).
Je suis d'accord qu'il y a un aspect vaste et lumineux, spacieux, qu'on retrouve chez tous les terminaux. Un peu comme la luminosité d'un écran allumé, sans image.
Est-ce que cette clarté (perception intelligente), vaste, lumineuse et joyeuse n'est pas simplement la nature du terminal ? Quand il réussit à évoluer suffisamment pour ne pas être obscurci par les saisies égotiques ? N'est ce pas le simple reflet de la bouddhéité ?
A ce stade, une conscience n'est plus nécessaire. Pourquoi faire ? Après tout, pour qu'il y ait conscience, il faut qu'il y ait dualité : séparation sujet/objet.
Cette clarté spacieuse, lumineuse, joyeuse, je crois que c'est ce que le Dzogchen appelle "l"Etat primordial ". L'essence de tous les Bouddhas.
En fait, la conscience, ou plutôt, les consciences, sont au service de l'erreur. En tout cas, elles apparaissent dans un mode où l'ignorance prédomine. Où le flux et ses terminaux baignent dans l'ignorance.Serge Zaludkowski a écrit :"En réponse à la question de Vajrasattva concernant la nature de la dimension de la réalité (dharmakaya) et de la lumière de la sagesse, le Maître affirme que la dimension de la réalité est l'absence de concrétisation de l'univers, et l'inconcevable lumière de la sagesse n'en est pas différente et est aussi vaste que cela. Cette lumière est au-delà la comparaison avec l'éclat des bouddhas ou avec le soleil et la lune : c'est notre propre rayonnement de sagesse infini".
- Le Merveilleux État Primordial - The Marvelous Primordial State, (page 63) -
viewtopic.php?f=134&t=9030
Les consciences sont les témoins du samsara et donc de l'erreur primordiale.
Tel un radeau, elles sont abandonnées quand l'autre rive est atteinte.
Davi a écrit plus haut :
Parler de tout ça est sans fin...J'aime bien discuter et débattre, mais à un moment ça me fatigue un peu
On se donnera rendez-vous quand on serait éveillé, et on en reparlera alors si tu veux ::mr yellow::
.Il est clair que les adeptes de l'école conséquentialiste [madhyamika-prasangika] ne soutiennent ni l'existence ultime de la conscience base-de-tout ni celle de la conscience qui se perçoit elle-même. Ceci est expliqué dans le texte appelé L'Introduction à la voie médiane, où Chandrakirti réfute très nettement l'existence de la conscience de base et de la conscience qui se perçoit elle-même. Mais après cela, il y a eu des débats, car certains maîtres tibétains ont déclaré que la conscience de base et la conscience aperceptive ne pouvaient même pas être posées conventionnellement (Guélougpa), tandis que d'autres expliquaient qu'il n'y avait aucune contradiction dans le fait de soutenir qu'elles existaient de manière conventionnelle (Nyingmapa, Kagyupa, certains Sakyapa)
Parler de tout ça est sans fin...J'aime bien discuter et débattre, mais à un moment ça me fatigue un peu

En fait, il y a deux moments dans la méditation : un moment pour l'analyse, un autre moment pour la contemplation comme c'est dit plus haut :
Donc, ces discussions que nous avons ne sont pas vaines, mais il faut les soumettre à la méditation. Avec l'analyse, on arrive à une vue plus dégagée en éliminant certaines conceptions erronées que nous avons à propos de la réalité, lesquelles ne tenant pas à l'analyse sont éliminées. Par le maintient de notre attention sur cette conclusion nous renforçons cette réalisation. Quand nous perdons la clarté de cette réalisation nous retournons à l'analyse. Ainsi de suite, jusqu'à ce que la réalité apparaisse dans sa grande clarté et ne nous quitte plus.
S'indigner, s'irriter, perdre patience, se mettre en colère, oui, dans certains cas ce serait mérité. Mais ce qui serait encore plus mérité, ce serait d'entrer en compassion.
C'est exactement ce que je pense, que la conscience n'est pas nécessaire, mais en précisant qu'elle n'est pas nécessaire et même qu'elle est un obstacle relativement au fait de réaliser sa véritable nature.Ted : A ce stade, une conscience n'est plus nécessaire. Pourquoi faire ? Après tout, pour qu'il y ait conscience, il faut qu'il y ait dualité : séparation sujet/objet.
Cependant c'est tout de même la conscience qui va nous permettre -pour prendre un exemple- d'être touché réellement par la souffrance animale, je dis "réellement" car cette prise de conscience ne pourra pas omettre qu'une action soit entreprise dans le sens d'aider les animaux, une action telle la résolution de devenir végétarien en l'occurrence : dans ce sens, la conscience est nécessaire il me semble.