Dharmakaya

shalistamba

Je n'ai jamais disqualifié Deshimaru sous ce prétexte-là, mais sur certains de ses dires à propos du satori, de la comparaison de Bouddha et de Dieu... "
Ce que dit Deshimaru du satori s'accorde avec ce que dit Dogen mais ne s'accorde pas avec ce qu'en disent les adeptes du rinzai. Pour la comparaison de Bouddha et de Dieu, il me semble que nous sommes d'accord... Encore que la manière dont le bouddhisme parle du Dharmakaya comme "base" s'accorde assez bien avec ce que dit Saint Thomas d'Aquin sur la différence entre l'Etre et l'étant. L'Etre est ce qui fait être chaque étant. Tout ce qui est a donc une part divine même le bâton à merde. Mais pour le christianisme Dieu est extérieur à la création alors que Deshimaru identifie Dieu et le Cosmos (un peu comme chez Spinoza). Bref, il vaudrait mieux éviter ce genre de comparaison hasardeuse.
De plus, s'il a largement contribué à développer le Zen sôtô en Europe, celui-ci s'est nécessairement construit sur les bases de sa propre réalisation, dont on sait à présent qu'elle n'a jamais été attestée par un maître de son vivant. La seule chose qui a été reconnue, c'est son travail de "missionnaire" en quelque sorte. Et de fait, ses trois principaux disciples ont fait valoir ce travail pour qu'ils soient reconnus à leurs tours comme des "maîtres". Bien évidemment, le Rinzaï ne choisissant pas ses maîtres sur ce genre de critères, on comprendra bien que je sois réticent au Zen sôtô de l'AZI, mais pas au Zen Sôtô de Dôgen.
Il me semble que ce n'est pas la première fois dans l'histoire du zen que la transmission se fasse de manière rétro-active un peu comme quand on juge d'un arbre à ses fruits. Je ne suis pas certain de me faire ordonner un jour... J'ai également un peu de mal avec Kodo Sawaki... Même si Kodo Sawaki avait transmis le Shiho à Deshimaru, de mon point de vue, ça n'aurait rien changé. D'après ce que j'ai pu constater le shiho n'est pas toujours un cadeau. Mais ce que je dis est de l'ordre du sentiment... Je n'ai aucune preuve. Je me méfie naturellement d'un côté comme de l'autre.
On doit faire la supposition qu'il l'a, sinon, on est dans le gros n'importe quoi et le sujet n'a pas d'intérêt.
C'est bien mon problème et le problème de toute religion... le premier pas est aveugle. Mais même dans le christianisme le doute accompagne toujours la foi.
Dumè Antoni

shalistamba a écrit :Ce que dit Deshimaru du satori s'accorde avec ce que dit Dogen mais ne s'accorde pas avec ce qu'en disent les adeptes du rinzaï
Le satori est le satori, et celui du rinzaï est conforme à celui qui est décrit dans le Chan (voir les essais sur le Bouddhisme Zen de D.T. Suzuki pour quelques exemples et explications), et je ne crois pas que Dôgen ait eu un satori d'un genre différent. En revanche, je suis plus que sceptique sur le prétendu satori de Deshimaru que personne n'a attesté en dehors de lui-même et de ses élèves (parce qu'ils n'avaient pas trop la possibilité de le contredire). Cependant, ce n'est pas parce que personne ne l'a attesté que je suis sceptique, mais parce qu'il a fait de zazen l'expression du satori, à l'instar de ce qu'affirmait Dôgen sans doute, sauf qu'il a laissé ses élèves croire qu'ils "pratiquaient le satori", sans qu'ils aient la possibilité de confronter leur pratique à celle d'un maître qualifié qui aurait pu faire la distinction entre un véritable satori (ou kensho) et un makyo. Quand je lis certains forums zen où les adeptes considèrent qu'il n'y a "rien à faire de spécial" parce qu'ils "pratiquent l'éveil", je dis qu'ils prennent la maladie pour le remède.
Il me semble que ce n'est pas la première fois dans l'histoire du zen que la transmission se fasse de manière rétro-active un peu comme quand on juge d'un arbre à ses fruits.
Je ne sais pas si l'AZI est un fruit qui a le goût du Zen. Je suis mal placé pour en parler. Mais ce dont je suis sûr, c'est que tous nient le kensho, ce qui — de fait — rend leur pratique suspecte, de mon point de vue.
shalistamba

Si je n'avais pas lu Kapleau ou d'autres auteurs qui ont une position plus nuancée je nierais également le Kensho. Dogen parle de l'éveil mais ne parle jamais, autant que j'en ai lu, du Kensho. S'il parle de la Vue Juste c'est pour dire que Rinzai (gigen) ne l'avait pas.

Il faudrait que je recherche où mais Éric Rommeluère, disciple de Deshimaru, dit que la voie se situe entre deux satori.
n revanche, je suis plus que sceptique sur le prétendu satori de Deshimaru que personne n'a attesté en dehors de lui-même et de ses élèves (parce qu'ils n'avaient pas trop la possibilité de le contredire). Cependant, ce n'est pas parce que personne ne l'a attesté que je suis sceptique, mais parce qu'il a fait de zazen l'expression du satori, à l'instar de ce qu'affirmait Dôgen sans doute, sauf qu'il a laissé ses élèves croire qu'ils "pratiquaient le satori", sans qu'ils aient la possibilité de confronter leur pratique à celle d'un maître qualifié qui aurait pu faire la distinction entre un véritable satori (ou kensho) et un makyo.
Encore une fois, Deshimaru n'a jamais dit qu'il avait eu le satori... effectivement parce qu'il considère que zazen est l'éveil. Ce que l'on déduit de la lecture de Dogen. Dogen rejette tous les pouvoirs psychiques autres que préparer le thé et je ne sais plus quoi de très ordinaire. Il n'y a pas de différence pour lui entre Makyo et Kensho.
Quand je lis certains forums zen où les adeptes considèrent qu'il n'y a "rien à faire de spécial" parce qu'ils "pratiquent l'éveil", je dis qu'ils prennent la maladie pour le remède.
Je n'ai pas le temps... je file au Dojo là maintenant... Mais oui là nous sommes d'accord des fois je suis consterné par ce que j'entends autour de moi.
Vive les seishins silence
Dumè Antoni

Je serai absent à partir de ce soir pendant ~ 7 jours et serai privé d'internet et d'ordinateur. Je ne pourrai donc répondre aux contributions qui me seraient éventuellement adressées. Je prendrai connaissance de celles-ci, s'il y en a, à mon retour.
shalistamba

Au moins une chose est certaine c'est que, quand on pratique l'illumination silencieuse, on ne dit pas d’âneries. Je me demande ce que je fais ici d'ailleurs...
ted

shalistamba a écrit :Au moins une chose est certaine c'est que, quand on pratique l'illumination silencieuse, on ne dit pas d’âneries. Je me demande ce que je fais ici d'ailleurs...
Un jour, à l'université, dans un groupe de travail, j'ai posé une question vraiment stupide. :oops: Je m'en suis rendu-compte peu après et, tout gêné, je me suis excusé auprès du groupe. Je leur ai promis alors de me taire désormais. J'avais vraiment honte d'avoir dit quelque chose d'aussi idiot. :)

Un étudiant m'a dit alors :
"Non, il vaut mieux que tu t'exprimes ! Si tu restes assis, tout seul, dans ton coin, sans dire ce que tu penses, tu ne sauras jamais si tu penses des conneries !"

:)
Les forums ça sert un peu à ça. C'est comme les groupes de travail.
Quand on a raison, on accumule du mérite à avoir aidé les autres.
Quand on a tort, on en ressort un peu moins con.
Avatar de l’utilisateur
tirru...
Messages : 2032
Inscription : 07 juin 2004, 19:30

shalistamba a écrit :Je me demande ce que je fais ici d'ailleurs...
Lorsqu'il m'arrive de temps à autre de surprendre mon égo en flagrant délit je me pose ce type de question et après réflexion et recul, la question me parait superflue au même titre que tout ce que je crois savoir !
Ted a écrit :Les forums ça sert un peu à ça. C'est comme les groupes de travail.
Quand on a raison, on accumule du mérite à avoir aidé les autres.
Quand on a tort, on en ressort un peu moins con.
Il y a une part de vérité dans ce que tu dis à mon sens !
------------------------------------------------------------------------------ Image Sabba danam dhammadanam jinati - Le don du Dhamma surpasse tout autre don ImageDhammapada
shalistamba

Pour moi ça reste une sorte de koan:
Comme si on était suspendu a une branche par la bouche si on ne parle pas on ne peut répondre à la grande question qui nous est posé et si on parle on tombe.

Lors de seichin j'apprécie vraiment les repas en silence (d'autant plus par contraste avec les repas où nous pouvons parler et dire n'importe quoi) mais la contre partie du silence c'est qu'une fois revenus dans le monde laïc nous sommes susceptibles de dire n'importe quoi. Par exemple lors d'une rencontre inter-bouddhiste l'un d'entre-nous (du dojo où je vais) a dit : "il n'y a pas de voie, nous sommes depuis toujours éveillé, il n'y a rien à faire". Non seulement cela contredit la 4ème des nobles vérités mais en plus c'est précisément ce que Dogen dénonce sous le terme de naturalisme comme étant "hors de la voie". C'est d'autant plus douloureux pour moi que c'est quelqu'un que j'apprécie énormément qui dit ça et qui pratique depuis de nombreuses années, un moine, en plus. Et moi? Qui suis-je pour le contre-dire?

Certes, chez Dogen, l'éveil est paradoxal car il se fait sous forme passive, simplement s'assoir. On peut donc en conclure un peu vite qu'il n'y a rien à faire. Mais il dit aussi qu'il faut être attentif aux relations circonstancielles ce qui inclut un rapport particulier à la nature (qui prêche le Dharma) aux autres ( préceptes, paramita, sangha, relation maître-disciples, relation moines-laîcs) aux textes (les sutras et les koans). Il n'y a donc pas rien à faire. Le non-agir se pratique activement. Et souvent dire, c'est faire.
Avatar de l’utilisateur
tirru...
Messages : 2032
Inscription : 07 juin 2004, 19:30

Bonjour Shalistamba,
shalistamba a écrit :C'est d'autant plus douloureux pour moi que c'est quelqu'un que j'apprécie énormément qui dit ça et qui pratique depuis de nombreuses années, un moine, en plus. Et moi? Qui suis-je pour le contre-dire?
Il convient donc au pratiquant sincère d'être attentif aux paroles, aux actes et aux pensées également, dans le bouddhisme Theravada cela fait partie intégrante des préceptes pour laïcs et sous forme d'effort et d'entrainements quotidien 'sikkha'. La tendance naturelle à se complaire dans le confort et la sécurité matériel et mental renforce les attachements si difficile à débusquer et génère dukkha.

anjalimetta
------------------------------------------------------------------------------ Image Sabba danam dhammadanam jinati - Le don du Dhamma surpasse tout autre don ImageDhammapada
shalistamba

oui.

C'est également ce que je pense avoir compris du bouddhisme Theravada à l'écoute dEmmanuel Ollivier.

http://www.bouddhismes.net/Conference_2 ... 5_Soiree-1

Dans le zen, nous avons un peu trop tendance à réduire le zen à zazen. C'est pourquoi nous avons intérêt à être également à l'écoute des autres traditions.
Répondre