L'état naturel

FA

Texte agréable à lire malgré le parfum qu'il dégage...
C'est un fait bien connu des psychanalyste que la caca,
et le premier objet qu'on est si fier de produire,
A ce qu'il paraît. :lol:
Dumè Antoni

Ce texte est pour moi tout à fait consternant, même s'il est par ailleurs bien écrit, façon moderne, quoi... pour montrer que le Zen, ça s'inscrit dans le "ouais, c'est cool". Mais ce n'est pas du Zen du tout ce texte. C'est à la limite du Zen "hors de la voie" ; du "Gedo zen". Je parlais de déclin du Zen et/ou du Dzogchen. On en a là un exemple significatif, même si ça se veut une métaphore. C'est le discours fat d'un punk pseudo désabusé, parabolisé "maître zen" par un jeu de circonstances qui n'intéresse personne d'autre que celles et ceux qui se reconnaissent dans le genre. Je sens que je ne vais pas me faire des amis, mais je m'en fiche. Mare de lire des torchons pareils sous le label zen. Voilà, c'est dit..
FA

Bon ce qui est mesquin dans son texte, c'est qu'il se résume à dire, qu'il sait faire des cacas plus beaux et plus puants que ceux de tout le monde,
Et que comme technique de marketing il y a mieux...Du reste je pense que sa métaphore, comme toute métaphore a des limites...
Il en profite pour torpiller quelque figures du marché spirituel : Ken, Deepak, Ekhart...etc,
Il s'en prend même aux spécialistes du Bouddhisme, c'est dire...il ratisse large.
Ca rappelle le vieux film de Kun Fu :"veux-tu apprendre ce qu'est le Vrai et authentique Kun Fu ? , si tu viens dans mon école tu découvrira le vrai secret..."
Dumè Antoni

Je tiens à préciser que ce n'est pas contre la métaphore scatophile que je m'insurge, mais l'équation qu'elle sous-tend : « Eveillé = profondément ordinaire ». Pour illustrer le soit-disant caractère ordinaire de l'éveil, l'auteur s'est bien sûr inspiré des défécations de son chat en faisant le parallèle entre les gens "constipés" et ceux – rares selon lui – qui ne le sont pas. Je dirai qu'outre que ce personnage ne connaît évidemment rien de l'éveil, car il confond ordinaire et naturel, il ne semble pas bien connaître non plus les gens ordinaires. Sans doute parce que se considérant comme un maître zen, il se croit plus ordinaire que les autres, une sorte de plus blanc que blanc coluchien en somme. Les gens sont tous, sans exception, des gens ordinaires, qu'ils soient constipés ou non. Ce que les gens ne sont pas, en revanche, comme lui-même (et bien d'autres égarés) ne l'est pas manifestement, c'est éveillés. Il n'y a rien de commun entre le fait de caguer de façon la plus ordinaire qui soit, et en se torchant le brin en plus, et la réalisation de son état naturel. L'éveil n'a rien à voir avec l'ordinaire, parce que nous sommes tous ordinaires et peu – très très peu – sont éveillés. Bien sûr, Lin Tsi (Rinzaï) disait que l'éveillé "dort quand il a sommeil, pisse quand il a envie de pisser et mange quand il a faim..." ; cela signifie que l'éveillé n'est pas encombré par des raisonnements, des questionnements, des inquiétudes... inutiles. Mais cela ne signifie pas qu'il suffit de chier quand on en a envie ou pisser quand on en a envie que l'on est éveillé, sinon, c'est confondre le doigt et la lune, l'ombre et l'objet, le cuivre et l'or... la maladie et le remède.
Robi

Dumè Antoni a écrit : Bien sûr, Lin Tsi (Rinzaï) disait que l'éveillé "dort quand il a sommeil, pisse quand il a envie de pisser et mange quand il a faim..." ; cela signifie que l'éveillé n'est pas encombré par des raisonnements, des questionnements, des inquiétudes... inutiles. Mais cela ne signifie pas qu'il suffit de chier quand on en a envie ou pisser quand on en a envie que l'on est éveillé, sinon, c'est confondre le doigt et la lune, l'ombre et l'objet, le cuivre et l'or... la maladie et le remède.
Bonjour Dumé,
je ne vois pas vraiment que Lin Tsi disait que l'éveillé "dort quand il a sommeil, pisse quand il a envie de pisser et mange quand il a faim", j'y vois plutôt qu'il invitait (à travers ses célèbres invectives) ceux qui voulaient bien l'entendre (pour ne pas dire ses disciples...) à adopter cette attitude à être ordinaire afin de s'éveiller (en gros il ne dit pas soyez éveillé et vous serez ordinaire, mais plutôt il dit soyez ordinaire et vous serez éveillé. Ordinaire signifiant, comme tu le dis très justement, sans raisonnement questionnement etc...).
J'y vois aussi à travers ses formules comme: "il n'y pas de place pour l'effort", "ne vous affairez pas", "aucune loi à réaliser, aucune voie à réaliser", "que vous manque-il?" (sous entendu à l'instant), "rien de spécial à faire", "aucune discipline à cultiver", "détachez-vous de tout", etc... je pourrai encore continuer... J'y vois donc aussi une sorte d'invitation à l'abandon du désir même d'éveil (évoqué précédemment) afin de le trouver au moment même de cet abandon...

(quant au texte -Brad Warner- pseudo zen ci-dessus, oui c'est à chier... :lol: )
Dumè Antoni

Robi a écrit :je ne vois pas vraiment que Lin Tsi disait que l'éveillé "dort quand il a sommeil, pisse quand il a envie de pisser et mange quand il a faim", j'y vois plutôt qu'il invitait (à travers ses célèbres invectives) ceux qui voulaient bien l'entendre (pour ne pas dire ses disciples...) à adopter cette attitude à être ordinaire afin de s'éveiller.
Rinzaï (Lin Tsi) appelait l'éveillé "l'homme sans affaire" (ou sans encombrement). C'est exactement l'homme qui vit, à chaque instant, dans l'état naturel. Mais ce n'est pas donné à tout le monde, loin s'en faut ! Il n'a jamais invité ses adeptes à se comporter d'une manière ordinaire, mais les renvoyait toujours à leur état naturel, ce qui n'est pas du tout du tout la même chose. Il faut donc faire très attention à ne pas confondre les mots car dans le langage courant, ordinaire et naturel sont souvent confondus. Lin Tsi ne s'est pas éveillé en devenant ordinaire. Il a beaucoup étudié le Bouddhisme, des années durant, avec des questionnements qui l'empêchaient sans doute de dormir, de manger... jusqu'à son éveil. Il n'y a qu'à voir comment se comportent actuellement les moines en monastère avec leurs kôans (je veux parler de l'école Rinzaï du Zen, bien sûr) ; ils n'arrivent parfois plus à manger ou à dormir tant ils sont absorbés. Hakuin s'est usé au point d'en être malade, pour réaliser sa vraie nature. Bankei idem, lui qui pourtant, après son satori, disait qu'il suffisait de s'asseoir sur le tatami et de "se tenir comme un viant Nyoraï" (Tathâgata). Bankai n'encourageait pas là à un zazen "sans objet" ou qui consiste à voir défiler les pensées comme des nuages dans le ciel. Se tenir comme un vivant Nyoraï, c'est être et se comporter selon sa vraie nature de Bouddha, laquelle n'est "ordinaire" qu'en façade. La recherche de sa vraie nature (ou de l'état naturel), dans le Zen en tout cas, ne consiste pas à devenir une sorte d'épicurien glandeur, se couchant quand il a sommeil ou mangeant quand il a faim... Même Lin Tsi (comme tous les maîtres zen, du reste) suivait et respectait les règles monastiques avec rigueur et discipline quand il était devenu un "Maître National". Souvent les gens l'imaginent comme une sorte d'ermite dépravé, mais ce n'était jamais le cas. Il ne faut donc pas confondre "l'homme sans affaire" de Lin Tsi (celui qui "entre et sort par les portes des sens") qui est le Tathâgata, et l'homme ordinaire, lequel est tout un chacun pris dans ses encombrements divers, sinon, on confond, comme je le disais plus haut, la maladie et le remède.
Dumè Antoni

Voici ce que disait précisément Lin Tsi (chapitre 15 des instructions collectives) :
« Ce qu'il faut aux apprentis actuels, c'est avoir confiance en eux-mêmes. Gardez-vous de chercher en dehors de vous-mêmes : vous tomberiez toujours dans le piège des objets, qui sont vaines poussières, et vous seriez en toute chose incapable de discerner le bien du mal. S'il y a, par exemple, des Buddha ou des Patriarches, ce n'est que dans les vestiges de l'Enseignement. »

Il est clair que Lin Tsi n'encourageait pas à ne pas chercher, mais à ne pas chercher en dehors de soi-même, ce qui n'est évidemment pas du tout la même chose. Il mettait en garde les adeptes contre l'étude des sutras ou des textes avant d'avoir réaliser sa vraie nature (à noter que l'interdiction d'étudier les sutras ou de lire des textes est toujours d'actualité dans les monastères zen rinzaï, même si des moines profitent de leurs moments libres en dehors des monastères pour s'abreuver de littérature : lire "Itinéraire d'un maître zen venu d'Occident" pour en avoir un exemple concret). Donc, cesser de chercher sa vraie nature n'a jamais au grand jamais été d'actualité dans le Zen, y compris sous Lin Tsi. Bien au contraire. Et si vous avez un doute à ce sujet, je vous invite à vous inscrire à une sesshin à la Falaise Verte avec Taïkan Jyoji comme maître. Vous m'en direz des nouvelles. :mrgreen:
Robi

Dumè Antoni a écrit : Il n'a jamais invité ses adeptes à se comporter d'une manière ordinaire, mais les renvoyait toujours à leur état naturel, ce qui n'est pas du tout du tout la même chose.
Pour moi si, il les renvoyait bien à se comporter de manière ordinaire... Mais de manière ordinaire dans le sens où tu l'as toi-même précisé, c'est-à-dire sans questionnements, sans raisonnements et sans inquiétudes inutiles, pour reprendre tes mots.

Voici des extraits de ce qu'il disait, chacun jugera ainsi par lui-même:
"Adeptes de la voie, dans la voie du bouddha il n'y pas de place pour l'effort. Soyez juste ordinaires et ne vous affairez pas. Déféquez, urinez, habillez-vous, mangez, quand vous êtes fatigués allez vous coucher. Les imbéciles en riront, les sages comprendront. De toute situation, soyez le maître, tout endroit où vous vous trouvez est votre demeure véritable, vos allées et venues n'y changeront rien. Alors, vos habitudes les plus ordinaires, qui généralement vous mènent droit aux cinq enfers, deviennent spontanément le grand océan de libération."

"Adeptes de la voie, si vous voulez marcher en méditation, marchez, si vous voulez vous asseoir en méditation, asseyez-vous, sans la moindre pensée dans l'esprit de rechercher un quelconque fruit à votre pratique. Différentes écoles proclament qu'il y a une voie à cultiver, une loi à réaliser. Quelle loi réaliser, quelle voie cultiver? Dans votre fonctionnement ici à cet instant précis, que vous manque-il, que voulez-vous ajouter?"

"Adeptes de la voie, le disciple digne de ce nom comprend sur le champ que fondamentalement il n'y a rien de spécial à faire. C'est par manque de confiance que vous ne cessez de vous précipiter en quête de quelque chose."

"Adeptes de la voie, quand je dis qu'il n'y a aucune vérité à trouver à l'extérieur, les disciples qui ne comprennent pas se mettent aussitôt à chercher une explication à l'intérieur. Ils s'assoient face à un mur, la langue pressée contre le palais, parfaitement immobiles, prenant cela pour la voie du bouddha et des patriarches. Quelle immense erreur! Si vous prenez cet état d'immobilité silencieuse pour la vérité, vous faites de l'ignorance votre maître."

"Adeptes de la voie, si vous n'êtes pas assez confiants, égarés vous laissez les dix milles phénomènes autour de vous vous entraîner dans leurs virevoltes. Impossible dans ces conditions d'être libre. Mais si vous mettez un terme à la recherche incessante de votre esprit, vous ne serez plus différents du bouddha et des patriarches. Vous voulez savoir qui sont le bouddha et les patriarches? Ils ne sont autres que vous-mêmes, ici présents en ce moment précis, qui êtes en train de m'écouter."
Dumè Antoni

Les extraits que tu sites n'indiquent pas qu'il faut se tenir dans l'ordinaire pour être éveillé, comme s'il y avait une relation de cause à effet, mais d'être en phase avec sa vraie nature, laquelle, bien évidemment, n'est affectée d'aucune complication.

Ces extraits renvoient donc au jeu simultané de la Triple Discipline (développé par Huineng, le 6ème patriarche) :
1) Le mental, en tant qu’il est le vrai Soi (en tant qu’il est « non-mental »), est libre de souillures. Tel est le précepte (Sîlâ) du vrai Soi.
2) Le mental, en tant qu’il est le vrai Soi (en tant qu’il est « non-mental »), est libre de troubles. Telle est la méditation (Dhyana) du vrai Soi.
3) Le mental, en tant qu’il est le vrai Soi (en tant qu’il est « non-mental »), est libre d’erreurs. Telle est la sapience (Prajna) du vrai Soi.

Il est évident que quand on réalise la véritable nature du "mental" (ou "non-mental" ou de l'esprit) qui est l'Etat Naturel (libre de souillures, de troubles et d'erreurs), il n'y a pas à se comporter d'une façon particulière. Je rappelle que Lin Tsi se situe à la 5ème génération des grands maîtres zen après Huineng. Il est donc normal qu'il en adopte les principes ou l'usage (la notion d'usage ou de fonction est très importante dans le Zen car elle est directement rattachée à Prajna). Lin Tsi s'est particulièrement fait remarquer sur sa manière directe de voir dans sa vraie nature, réfutant même la pratique de zazen. Cela ne signifie pas que zazen, qui est l'expression même de la recherche de sa vraie nature, ne soit pas indiquée pour ses adeptes. Je peux témoigner, en tant qu'adepte du Rinzaï depuis près de 36 ans, que zazen fait partie du quotidien des adeptes et des maîtres, avec ou non un kôan pour développer "l'esprit d'investigation" sans lequel il ne peut y avoir d'éveil (satori ou kensho). Quand on lit Lin Tsi, on est sur un fil de rasoir. Il faut faire très attention car on peut facilement se blesser.

Que ce soit clair : quand je dis qu'il ne faut pas confondre ordinaire et naturel, je n'entends pas que le naturel n'est pas ordinaire, mais que l'ordinaire n'est pas nécessairement naturel. Il n'y a donc pas réciprocité exacte. Ce n'est pas parce que les montagnes restent des montagnes pour des gens ordinaires et pour des éveillés, que les éveillés sont des gens ordinaires. Il faut les considérer comme l'expression du Nirmanakaya. Sans cela, on commet, je pense, une faute grave. Le Nirmanakaya, c'est le Bouddha (ou Bodhisattva) dans le monde (Samsara). Il se comporte de la manière la plus ordinaire qui soit, mais nul ne peut prétendre atteindre à un tel niveau de Sagesse s'il n'a pas réalisé sa vraie nature. Ce qui signifie clairement qu'on ne peut exercer de Sagesse (comme la Compassion au sens du Bodhisattva) si l'on n'est pas imprégné de Prajna, c'est à dire si l'on n'est pas un Bouddha ou un Bodhisattva (à ce stade, le Bodhisattva est assimilable au Nirmanakaya) parfaitement accompli.

Cela étant dit, je me rends compte qu'on s'efforce, à chaque fois que l'on en a l'occasion, de démontrer que le Bouddhisme ou le Zen, c'est quelque chose de simple à accomplir. On reprend là l'idée des adeptes de l'AZI et d'autres issus d'une certaine école du Bouddhisme Zen (voire de certaines écoles du Dzogchen à ce que j'ai cru comprendre) que je ne reconnais pas. Je n'ai nullement envie de m'embêter avec ce genre de débat ou polémique. Il me semble, quant à moi, que j'ai fait à peu près le tour de la question sur ce qu'on nomme "l'Etat Naturel". Ça n'a rien à voir avec l'état ordinaire. C'est même très précisément le contraire. Merci pour ces échanges ; j'espère qu'ils seront éclairants aux lecteurs.
Robi

Dumè Antoni a écrit :Les extraits que tu sites n'indiquent pas qu'il faut se tenir dans l'ordinaire pour être éveillé, comme s'il y avait une relation de cause à effet, mais d'être en phase avec sa vraie nature, laquelle, bien évidemment, n'est affectée d'aucune complication.
Si le mot "éveillé" te gêne va pour "être en phase avec sa vraie nature". Mais ça n'y change rien, il les invite bien à se tenir dans l'ordinaire... pour être en phase avec sa vraie nature (comme une relation de cause à effet: se maintenir dans l'ordinaire = être en phase avec sa vraie nature).
Dumè Antoni a écrit :Cela étant dit, je me rends compte qu'on s'efforce, à chaque fois que l'on en a l'occasion, de démontrer que le Bouddhisme ou le Zen, c'est quelque chose de simple à accomplir.
Ce n'est certes pas mon cas, car si je considère plutôt simple de se plonger dans l'ordinaire momentanément, ça l'est beaucoup moins de s'y maintenir.
Verrouillé