31. A petits actes, grands effets.

ted

Dans la série : Les questions de Milinda (merci Gigi)
31. A petits actes, grands effets.

  • — Nâgasena, vous autres bouddhistes prétendez que l'homme qui aurait fait le mal pendant toute sa vie, s'il conçoit, au moment de sa mort, une pensée dirigée vers le Bouddha, renaît parmi les dieux. je ne puis le croire. Vous dites aussi que, pour avoir tué un seul être vivant, on tombe en enfer. Cela non plus je ne puis le croire.
    — Réponds à ceci, mahârâja. Une petite pierre, sans le secours d'une jonque, peut-elle flotter sur l'eau ?
    — Non.
    — Mais cent charges de pierres, placées sur une jonque, peuvent-elles flotter ?
    — Oui.
    — La jonque, ce sont les bonnes actions.
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Là, j'ai du mal à suivre. Doit t'on en conclure qu'un seul acte bénéfique peut effacer une multitude de Karmas négatifs ?
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Flocon
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Effacer, non, en tout cas ce n'est pas cette image qui est la plus souvent employée dans les textes que je connais.
C'est plutôt celle d'une forme d'équilibrage "pondéral" -on parle de karma "lourd" pour désigner le fruit de certains actes, comme ceux qui précipitent en enfer -d'où la figure de la jonque. La dernière pensée à la mort est considérée comme plus puissante que les autres en termes de karma à cause des conditions dans lesquelles elle se produit, qui sont favorables à ce que son fruit se développe tout de suite -du moins c'est ce que j'ai cru comprendre. C'est assez logique si l'on considère la doctrine du karma dans son ensemble.
Quand on sonde les choses, les connaissances s'approfondissent.
Les connaissances s'approfondissant, les désirs se purifient.
Les désirs une fois purifiés, le cœur se rectifie.
Le cœur étant rectifié, on peut réformer sa personne.

Kong Tseu
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yudo
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Flocon a écrit :Effacer, non, en tout cas ce n'est pas cette image qui est la plus souvent employée dans les textes que je connais.
C'est plutôt celle d'une forme d'équilibrage "pondéral" -on parle de karma "lourd" pour désigner le fruit de certains actes, comme ceux qui précipitent en enfer -d'où la figure de la jonque. La dernière pensée à la mort est considérée comme plus puissante que les autres en termes de karma à cause des conditions dans lesquelles elle se produit, qui sont favorables à ce que son fruit se développe tout de suite -du moins c'est ce que j'ai cru comprendre. C'est assez logique si l'on considère la doctrine du karma dans son ensemble.
J'approuve.
La responsabilité des élèves est d'empêcher le maître de se "prendre pour un maître".
passager

Pour ce qui est du " lourd" , ça tient du fait que ce soit accompagné de l'esprit d'Eveil dit-on dans les Lam-rim...
FleurDeLotus

...et ça irait de même pour certains actes non-vertueux sur des actes vertueux...

J'ai entendu des traductions qui parle quand même de " anihiler" , tellement le karma est " lourd"...

" un instant de colère détruit, anihile ,...,toutes pensée vertueuses précédentes."
...à chercher pourquoi... :roll:
ted

Désolé, je ne comprends pas le coup de la dernière pensée "vertueuse" qui effacerait le karma de toute une vie... :oops: :roll:
Passagère m'avait expliqué un truc à ce sujet sur b.xooit, mais j'ai eu du mal à suivre...
Si quelqu'un veut bien essayer de m'expliquer...

Je comprends qu'on puisse brûler pas mal de Karma, en une séance de méditation par exemple, avec un samadhi très profond. Est-ce que c'est quelque chose d'analogue ?
Dans ce cas là, il faudrait faire une pratique spéciale au moment de la mort ? Ou avoir passé sa vie dans un état méditatif plus ou moins constant ?
Ce serait une dernière pensée offerte sur un plateau d'argent, si j'ose dire... ? :roll:
passager

Désolé, je ne comprends pas le coup de la dernière pensée "vertueuse" qui effacerait le karma de toute une vie...
à moins de faire la purification par 3 actes, on n'efface pas un karma.
Mais les karmas accumulés précédement ne sont pas effacées, ils donneront leur fruit juste "un peu plus tard"....
Dans ce que dit flocon, la dernière est plus puissante et ça peut être cette dernière qui vat définir la rennaissance suivante.Donc, elle est " prioritaire", d'où le conseil de mourrir dans un état d'ésprit relativement paisible.
il semblerait logique que grosso modo, l'esprit subtil garderai la dernière image mentale , que l'esprit grossier aurait produit avant de "disparaître"....
ted

passager a écrit :Dans ce que dit flocon, la dernière est plus puissante et ça peut être cette dernière qui vat définir la rennaissance suivante.Donc, elle est " prioritaire", d'où le conseil de mourrir dans un état d'ésprit relativement paisible.
il semblerait logique que grosso modo, l'esprit subtil garderai la dernière image mentale , que l'esprit grossier aurait produit avant de "disparaître"....
Je ne vois pas pourquoi la dernière pensée serait plus puissante, sauf si on est dans un état méditatif assez profond... :shock:
- Pour une personne qui ne pratique pas au moment de sa mort, je voyais plutôt la dernière pensée comme une sorte de "bruit de fond" égal à la moyenne des pensées et des tendances qui auront dominé sa vie.
- Pour une personne qui a pratiqué pendant sa vie et qui pratique au moment de sa mort, il est sans doute profitable de plonger l'esprit dans le calme et d'introduire une pensée bénéfique dans ce champ. Mais faut s'entrainer à faire ça bien avant.
passager

Je ne vois pas pourquoi la dernière pensée serait plus puissante, sauf si on est dans un état méditatif assez profond...
Parce que c'est la dernière justement et donc la plus fraîchement retenue par la partie subtil de l'esprit qui "continue"....
Je pense que c'est facile d'attribuer cela aux pensées non-vertueuses : elles sont courantes et habituelles en nos esprits.Pas besoin de méditation profonde pour les fixer , elles le sont déjà.

Pour la pensée vertueuse, en effet , elles se font plus rares , donc il y aurait besoin en effet de méditer, pour les fixer en notre esprit.

Le problème, c'est qu'a priori , au moment de la mort, il y aurait la dernière image mentale que l'esprit grossier produit, et il y a aussi l'image mentale produite par l'esprit subtile.... :?:
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Flocon
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Ce n'est pas moi qui dis quoi que ce soit, Ted, c'est la représentation que le bouddhisme propose du processus mental au moment de la mort. L'abhidharma décrit tout ça très en détails : et comme Passager le rappelle, l'image mentale qui agit vraiment et conditionne la renaissance ne se situe pas au niveau conscient mais à un niveau plus profond du psychisme. L'expression "dernière pensée" que j'ai employée un peu vite est donc partiellement inexacte :oops:. Il vaudrait mieux que quelqu'un qui connaît vraiment bien le sujet te l'explique -Tirrù peut-être, ou Passagère?
En ce qui me concerne, je n'ai pas d'avis personnel sur ce point sauf qu'il y a une logique acceptable à l'oeuvre dans une telle représentation.
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Kong Tseu
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tirru...
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Le spécialiste dans l'Abidhamma, c'est Viriya du forum Metta. C'est assez pointu :
La conscience de la mort s'appelle cutti citta. Juste après la disparition de cuti citta, apparait immédiatement patisandhi citta (renaissance ou lien de renaissance) suivi de bhavanga citta (facteur de maintien de la vie). Ce dernier sera présent tout au long de la vie entrelacé avec l'apparition des autres citta.

Ces 3 types de cittas sont en fait identique en qualité mais joue un rôle différent suivant le moment d'apparition dans le processus de renaissance.

Ainsi contrairement aux bouddhisme tibétain, il n'y a pas de stades intermédiaires ou de lieu de transition.

Ce qui est intéressant est ce qui précède le Cuti citta.
Citation:

On peut comparer la vie à une bougie allumée. L’extinction de la flamme (mort) se produit par l’épuisement de la mèche, de la cire, des deux à la fois ou par un coup de vent.

a) āyukkhaya : fin de l’espérance de vie alors qu’il reste encore de la force kammique. Si le kamma générateur est très fort il recrée une vie dans le même monde. (épuisement de la mèche)
b) kammakkhaya : le kamma générateur (janaka) de la vie est épuisé alors que l’espérance de vie n’est pas encore atteinte. (épuisement de la cire)
c) ubhayakkhaya : les deux sont épuisés (épuisement de la cire et de la mèche)
d) upacchedaka : un kamma obstruant vient couper le fil de la vie (coup de vent)


Quelqu’un qui est sur le point de mourir, au moment de la mort, par la force de son kamma, fait l’expérience d’une des trois choses suivantes par l’un des six sens (image, son, odeur, goût, toucher, pensée).


1. Kamma
Ici la personne se souvient d’une action commise dans sa vie qui va déterminer la vie suivante. Cette action peut être :

· Action lourde de conséquences (garukamma) = action au résultat obligatoire après la mort : = 5 crimes crapuleux et absorptions
· Action proche de la mort (asanna kamma) = action faite juste avant la mort
· Action habituelle (acinna kamma) = action faite habituellement
· Action indéfinie (kattata kamma) = action indéfinie de cette vie ou d’une vie quelconque.

Le Kamma apparaît à la porte de l’esprit.


2. Kamma Nimmitta
Ici la personne revit une image, un son, une odeur, un goût, une sensation qui avait accompagné une action.

1. Upaladdha : objet principal. Exemple : monastère qu’on a offert ou animaux qu’on a tués.
2. Upakarana : objet secondaire. Exemple : offrandes et robes qu’on a offert avec le monastère ou filet qui a servi à pêcher les poissons.

Le kamma nimitta peut être une quelconque perception des six sens.


3. Gati Nimitta : Le gati nimitta, étant toujours une image réelle, se présente à la porte de l’esprit comme un rêve. Ici la personne perçoit soit un symbole de la future sphère où elle va renaître soit des objets de cette sphère :
    • 1. Upalabhitabba : l’endroit où on va renaître
      2. Upabhoga : objets, habitants, résidences, parcs de cet endroit



Processus de pensée au moment de la mort

Ensuite le flux de conscience se tourne continuellement vers l’objet présent (par exemple l’utérus de notre future mère), comme s’il coulait et s’inclinait vers lui, conformément au Kamma sain ou malsain qui est sur le point de mûrir selon l'endroit où on va renaître.

Par conséquent quand la mort (cuti citta) se produit l'objet alors présent aux portes des six sens devient l’objet de la conscience de renaissance (patisandhi) et du facteur de la vie (bhavanga).

La mort dans le Bouddhisme est la fin de la vie, āyu et de la chaleur usma mais ce n’est pas la destruction de l’être.

La force générée par le kamma est comparable à un courant électrique.

Ce courant subsiste mais l’appareil qu’il alimente change : ampoule électrique, machine à laver, radio etc. De la même façon, notre corps change mais la force kammique reste constante. Le générateur de cette force est le désir : désir d’avoir du plaisir et d’éviter la souffrance ou désir de vivre.

La renaissance est immédiate comme une onde émise est immédiatement reçue par un poste de radio. Il y a toujours un endroit pour nous pour renaître car le nombre des êtres est infini.

La vie se transmet comme la flamme d’une bougie à l’autre ou un poème du professeur à l’élève.

Tout notre caractère et tout notre kamma est transmis d’une citta à l’autre comme les gênes qui sont dans chaque cellule en entier.


Citta Santati - le flux de la conscience

Ainsi, pour ceux qui ont pris une renaissance, une conscience semblable à celle de la mort survient juste après la conscience de renaissance et a le même objet. En l’absence de processus de pensée cette conscience se produit à répétition, sans interruption, de façon à former comme un flux qui se propage jusqu’à la mort suivante. Cette conscience étant un facteur essentiel de la vie, on l’appelle facteur de vie ou bhavanga. A la fin de la vie cette conscience remplit la fonction de conscience de la mort. Puis une nouvelle conscience de renaissance apparaît et ainsi la roue de l’existence continue à tourner. Dans la nouvelle vie aussi il y a conscience de renaissance, facteur de vie, processus de pensée et conscience de la mort.

Les personnes éveillées, se disciplinant longtemps, comprennent l'impermanence (de la vie), et réalisent l'état éternel, le nibbana. Ils tranchent complètement les attaches à l’existence et atteignent la Paix Suprême.


source=indavati


Vue sous l'angle des fonctions:

Kicca Sangaha

Les Citta (conscience) et Cetasika (facteurs mentaux concomittants) peuvent aussi classés suivant leurs fonctions (kicca).

Ces fonctions, au nombre de 14, sont énumérées comme suit

1. patisandhi –kicca : Renaissance ou lien-de-renaissance
2. bhavanga –kicca : Facteur de vie ou de maintien de la vie jusqu’à la mort
3. avajjana –kicca : appréhension, direction de l’esprit vers l’objet
4. Dassana-kicca : fonction visuelle
5. Savana-kicca : fonction auditive
6. Ghàyana-kicca : fonction olfactive
7. Sàyana-kicca : fonction gustative
8. Phusana-kicca : fonction du toucher
9. sampaticchana –kicca : réception, réceptivité
10. santirana –kicca : sondage, investigation
11. votthapana –kicca : détermination ou décision
12. javana-kicca : impulsion
13. tadarammana -kicca : enregistrement ou répétition
14. cuti-kicca : mort


Durant notre vie, tous nos cittas remplissent les fonctions de 3 à 13 avec bhavanga citta qui joue le rôle de maintien de la vie.
Les patisandhi citta, bhavanga citta, cutti citta sont le même citta mais qui prend des noms différents suivant leur rôle dans le processus de pensée.

A la fin de la fonction 14 - cuti (mort) , apparaît immédiatement la fonction 1) le citta patisandhi (renaissance ou lien de renaissance) qui suit immédiatement 2) bhavanga citta dont le rôle est d’assurer le maintien de la vie.
Ces 3 fonctions de citta différentes sont en fait le même citta qui assure des fonctions différentes suivant l’endroit où il se trouve.
------------------------------------------------------------------------------ Image Sabba danam dhammadanam jinati - Le don du Dhamma surpasse tout autre don ImageDhammapada
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