Peut-on être heureux en abandonnant ses responsabilités ?

Gab

Flocon a écrit :Pour moi, la réponse est "non", sans détour. L'abandon est une forme de fuite, et il n'y a pas de bonheur dans la fuite de quoi que de soit, de toute façon. :)
Je suis de cette opinion! Butterfly_tenryu Butterfly_tenryu
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axiste
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PS : Tiens, finalement, il me vient un exemple tout con dont j'ai été victime moi-même chose sur laquelle je me suis quand-même largement amélioré, c'est en musique. Quand en groupe, ça ne décollait pas, que la musique ne voulait pas s'émanciper, j'avais cette tendance à en prendre toute la responsabilité. La conséquence était que je jouais d'autant plus nerveusement, plein de notes et fort...D'où peut-être quand même, que la musique ne décollait effectivement pas Là ça y'est je me replace au milieu mais bon, là je nous laisse le soin de faire la part des choses
En musique, le plus difficile est d'écouter, écoute qui permet de trouver la place juste. Les musiciens savent à quel point, la musique peut être le lieu de difficultés égotiques, lesquelles font écho dans la vie de tous les jours, à une manière de se positionner face aux autres, "face", qui doit devenir "avec" justement.
love_3 merci pour l'image...

et pour vos mots à tous comme des étincelles qui traversent...

Même si les mots ne disent rien non plus… :cool:

Dès qu'ils arrivent leur photographie est comme un paysage mort. Les mots sont aussi le passé…
Quand on n'a pas le temps de penser, il n'y a plus que le mouvement: dedans, une grande vigilance et attention se déploient…
C'est silencieux.

Alors répondre à la question est comme un numéro d'acrobatie délicat…
"peut-on être heureux en abandonnant ses responsabilités"
, ... c'est quoi être responsable et puis de quoi ?

En général il y a beaucoup de pensées en nous et tout autour de nous: c'est comme une radio toute brouillée. Pourtant quand les mots arrivent, l'évènement est déjà déformé. Mais aussi sans cette déformation on ne verrait rien…
C'est comme une boucle: l'évènement, la situation, le silence, les mots, le recul, la déformation et le réajustement …on bascule tout le temps et ça nous entraine comme un courant..
Il y a des milliers de paramètres dans les situations.
Etre responsable, mais de quoi ? De la situation ? Elle se présente à nous… de la préhension qu'on y met ? De l'attention qu'on y met, de la vigilance qui s'y déroule ? Car elle se déroule elle aussi…

Il y a toutes ces voix à l'intérieur: laquelle écoutons nous, selon quels paramètres ?
Est-ce que je recherche une satisfaction personnelle (urgence, court terme bien souvent, et quelquefois ça peut être justifié: par exemple, si je dois m'extraire d'une situation momentanément parce que j'ai besoin d'un recul pour voir plus clair) ou est-ce que je suis déjà libre de la situation et que puisque j'en suis affranchi je n'y place aucun intérêt personnel(et dans ce cas la vision plus claire) ?

Il y a toujours plein d'avis et d'opinions extérieures et on doit faire avec elles comme avec les voix intérieures…les écouter et pas à la fois, les prendre dans notre silence et voir leur écho, leur résonance, leur extinction, leur portée, leur aboutissement aussi…
Quelquefois elles présentent des clés.
Souvent. Même si elles sont pas des clés directes, ça va dépendre de ce qu'on en fait, de leur écho qui va se transformer lui aussi…à l'infini…

On est responsable et pas responsable à la fois.
Ce n'est pas antinomique: c'est un mouvement qui se résorbe sur lui même, comme une boucle à laquelle on pourrait voir deux côtés, mais en fait c'est juste le mouvement de la boucle et il n'y a pas non plus de côtés…

On pourrait dire aussi qu'il n'y a pas de voix intérieures et extérieures: c'est juste un concert et on entend comme on peut à l'instant "t" les notes qui s'égrènent et qu'on souffle en même temps pour parfaire un accord…quelque part c'est tout mélangé et puis quand on écoute on entend plus distinctement et on sépare les sons pour les traiter: c'est de l'information et on va y répondre…

Mais le mot responsable est pareil: c'est juste un mot distinct qui n'a rien de distinct.
Une sorte de boucle toujours inachevée…

Mais bien entendu, nous sommes tous responsables.
Il y a un équilibre global sur lequel nous veillons…

Est-ce que l'équilibre global se fait parfois au détriment du particulier ?
J'aurais tendance à croire que plus l'équilibre à un niveau infinitésimal est possible, plus ses répercussions au niveau global se réalisent, rendent possible l'équilibre général…la réalité qui présente son tapis étant toujours la meilleure possible à l'instant x pour l'ensemble…

En ce sens, nous serions responsables des milliards de petites situations qui se présentent dans nos systèmes: familiaux, corporels, psychiques, etc….comme un socle ou des fondations pour l'ensemble…alors on ne souhaite pas abandonner tout ça…mais c'est sûr, c'est pas simple toujours ! crysmiley :oops: :)

Quelquefois on abandonne quand même parce que cela se présente ainsi. On peut déléguer aussi. FleurDeLotus
Cinq clefs pour la parole correcte :
- dire au bon moment, prononcer en vérité, de façon affectueuse, bénéfique et dans un esprit de bonne volonté."
ted

La responsabilité m'a l'air inséparable de la notion de compétence...
Me semble que si on est responsable, mais pas compétent, on a deux choix :
- céder sa place
- ou acquérir de la compétence

Par exemple, s'occuper d'une personne âgée, très malade, c'est un métier.
On a beau avoir toute la compassion du monde, il faut être là quasiment 24h/24. Connaître les gestes. Eviter les erreurs.
Comment acquérir une telle compétence, sans perdre nos autres responsabilités ?

Etre père ou mère, c'est être présent quand l'enfant ou l'ado a besoin de nous. Pas toujours facile quand on a d'autres responsabilités.

Je crois qu'on peut être responsable, ou choisir d'être responsable de nombreuses choses. Mais qu'il y a une limite à ce que nous pouvons faire sous peine de devenir incompétents.

On le voit bien avec ses politiciens qui cumulent des mandats et qui sont injoignables localement. :???: Ces parents débordés par leurs activités professionnelles et qui ne voient même pas grandir leurs enfants. :-( Ou ces personnes passionnées par un loisir quelconque et qui n'ont plus de temps à consacrer à leur famille. :cool:

La question étant : quelle responsabilité abandonner quand on est débordé ? Car, tôt ou tard, faut faire un choix. :???:
Alors, y a t'il des responsabilités qu'on ne devrait pas abandonner ? jamais ! Mais lesquelles ?
Question de morale ? Que dit le bouddhisme à ce sujet ?
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axiste
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Oui, les meilleures intentions du monde ne viendront jamais à bout des situations difficiles si on ne s'y met pas à plusieurs.Elles relèvent d'un travail d'équipe. Sinon, on ne dort plus et on ne vit plus.
Et on risque de lâcher les autres responsabilités si les choses nous dépassent peu à peu: on ne peut -être partout.

(en ce moment j'ai mon beau père à la maison et il a des crises hallucinatoires surtout la nuit. Le problème c'est qu'elles sont souvent violentes et menaçantes pour lui. On en arrive à des situations impossibles pour lui (il est malheureux et en plus il est très conscient et lucide entre ses crises qu'il ne maîtrise pas)…et pour nous également, (par exemple mon mari dans son travail a besoin de vigilance et s'il ne dort plus correctement…!?)

C'est fatiguant parce que mon beau père est sur-actif pour fuir ses visions: quand son esprit n'est pas dirigé vers un but, qu'il est vacant ou flottant, les hallucinations -souvent terribles- apparaissent:alors c'est souvent la nuit aussi…cette nuit, c'était un meurtre…je ne l'ai su que ce matin au petit déjeuner, il me l'a raconté. Pour lui c'était réel vraiment, alors ce sont des instants de terreur.
Nous l'avons accueilli parce que suite à une crise il avait fait huit kilomètres de marche dans la ville pour fuir ses visions. Nous on pensait qu'il s'était perdu: en fait, il était affolé complètement. C'est difficile de voir quelqu'un souffrir ainsi et d'être quasi impuissant, surtout une personne nonagénaire, on aimerait qu'elle soit en paix
Nous savons que la solution ne sera pas traitée par nous seuls: mais par toute la famille après délibération, et à l'écoute de professionnels. Nous savons aussi que la solution ne sera pas celle qu'on souhaite, mais un compromis entre toutes les choses qui déroulent leur existences…pour l'instant, on fait comme on peut …sachant que la situation devra trouver un estuaire et que nous sommes toujours dans le provisoire...
Etre père ou mère, c'est être présent quand l'enfant ou l'ado a besoin de nous. Pas toujours facile quand on a d'autres responsabilités.
Oui, idem…

Quand on veut être responsable de tout on n'est plus responsable de rien…

La notion de compétence est très utile. Seulement, elle est parfois aussi sclérosante ….parce qu'à force de se réfugier derrière ce mot on finit par ne plus distinguer les autres mots…les situations sont des champs de possibilités, pas des étiquettes.
Parfois une personne qui n'a pas les compétences reconnues trouve un bout de chemin pour dénouer: un regard auquel on avait pas adhéré jusqu'à lors, une fenêtre qu'elle ouvre qu'on n'avait pas vu...

En tous les cas, c'est certain, mieux vaut être entouré et dans ceci n'importe quelle situation: c'est le seul moyen de voir plus clair face à une situation difficile.

Et quand ça ne suffit pas, quand les meilleures volontés du monde se sont associées et épuisées sur la situation, c'est dommage: mieux vaut passer le relais bien avant d'en arriver là.
L'équilibre de l'ensemble est toujours à préserver.
Bouddhisme ou pas…d'ailleurs oui, je ne sais pas ce que répond le bouddhisme à ta question...
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- dire au bon moment, prononcer en vérité, de façon affectueuse, bénéfique et dans un esprit de bonne volonté."
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Flocon
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Axiste, toute ma sympathie. Heureusement, il existe actuellement de très bons traitement par neuroleptiques pour les problèmes d'hallucinations, donc j'espère que ton beau-père pourra être vite soulagé et que vous pourrez prendre des décisions avec un minimum de sérénité. loveeeee

Sinon, je n'ai pas de réponse à propos d'un discours spécifique sur la responsabilité dans le bouddhisme. Je ne sais pas si ça existe. :?: Il y a des suttas qui traitent des responsabilités spécifiques aux divers groupes sociaux de l'Inde ancienne, mais je ne connais rien de général en la matière.

Il me semble que la notion fondamentale en matière d'actes, pour les bouddhistes, est l'intention, qui doit être bienveillante, avec en plus une distinction entre actes purs ou nobles, c'est-à-dire dégagés des poisons de l'avidité, de la haine et de l'ignorance, et actes souillés ou vils (ou "ordinaires" dans une terminologie moins sévère :lol: ). Le tout me paraît constituer une grille de lecture assez différente de celle de la responsabilité, tout comme, d'ailleurs, de celle de la morale au sens courant du terme.
Quand on sonde les choses, les connaissances s'approfondissent.
Les connaissances s'approfondissant, les désirs se purifient.
Les désirs une fois purifiés, le cœur se rectifie.
Le cœur étant rectifié, on peut réformer sa personne.

Kong Tseu
lausm

Il me semble qu'effectivement, l'ambiance du dharma est moins axée sur une morale....mais sur la compréhension.
Responsabilité, ce mot pèse. On a l'impression qu'on va être jugé au coin de la rue.
L'autre jour, j'ai été faire changer mes pneus...le gars, en payant, m'a dit que je recevrai un mail avec un questionnaire qualité...au passage il m'a demandé quelle note je donnerais entre 0 et 10...j'ai dit 8-9. Il m'a répondu en me disant qu'aux US, en dessous de 9 c'est pas bon, et moins de 6 égale 0!
J'avais envie de lui demander à combien il noterait le stress de l'équipe après 5 ans à ce régime!
Mais derrière tout ça, à aucun moment il n'a écouté ce que j'avais à dire sur le travail en tant que tel, ni ne m'a interrogé sur le contenu....c'est tout dire!

Il me semble que c'est la conscience qui est le maître mot.
L'autre jour, j'ai eu une patiente qu'on a suivi à domicile dans le cadre de l'hospitalisation à domicile, gérée par une équipe du CHU....le premier jour, quelle pression l'infirmière a mis!...tout est dramatisé, ça donne une importance aux actes à faire....et après je dédramatise, pour faire la même chose, sans le bruit et la fureur....mais là on peut écouter s'exprimer les vraies demandes, etc...
Responsabilités, ça donne un sentiment d'intensité, on voit de l'action....c'est rassurant, et en même temps ça évite de laisser se manifester ce qui voudrait le faire quand tout se calme : l'angoisse de la mort, de la perte, de n'être plus rien.....c'est tellement plus rassurant de trouver des petits symptômes qu'on dramatise pour se focaliser dessus et donner de l'importance à sa fonction!...mais là, on entre dans une relation d'objet, on n'écoute plus le sujet.
On entre dans le faire, pas dans l'être.
L'important, c'est d'être, dans le "faire", d'agir avec la conscience, avec sagesse et compassion, avec cette intention, comme dit Flocon.
Et ne pas trop en faire avec la notion de responsabilité, ce nouveau stress moderne.
On a toujours eu des responsabilités.
Il s'agit de faire au mieux avec ce qu'on est et là où on en est.
De toutes façons, si on veut abandonner une responsabilité qui est vraiment notre, elle nous rattrape un jour!
Katly

Les parents vieillissent certains assez bien d'autres moins bien ou très mal. Ils ne vieillissent pas forcément ensemble, pour ceux qui sont divorcés. Plus ou moins éloignés et entourés de frères et soeurs.
Dans le travail, il n'est pas souhaitable de se charger de responsabilités au-delà de ses limites et compétences et de ce qui incombe. On arrive parfois dans un métier déjà mal en point comme du "service industrialisé" à la chaine. Parfois c'est ce qu'on demande pourtant et on peut être mené au burn out, à une pression agressive et guerrière de bataille compétitive quotidienne, qui tient par la motivation de l'argent, du matériel, de la réussite et de la reconnaissance sociale. Certains(es) n'ont pas le choix, c'est ça ou rien de mieux ou pire. Entre le refus de cette situation avec ses risques, cette forme de désobéissance et le compromis, pas facile d'avoir un équilibre d'être heureux(se). On a pas toujours le boulot qui nous correspond aussi.
Il y a des métiers ou d'autres ne veulent pas céder leur place ou la partager, ce n'est pas toujours une question de compétences ou de prise de retraite.

La responsabilité envers les enfants diminue quand ils prennent les leurs, leur décisions, leurs choix... etc Il y a la responsabilité matérielle et sociale.
Mais la relation responsable profonde avec eux c'est toute la vie, on ne saurait être heureux(se) sans cela, car elle ne s'abandonne pas elle est dans notre conscience et dans notre coeur.
Plus on avance dans le temps et plus c'est une relation d'adulte à adulte et une question de maturité.
Dernière modification par Katly le 26 décembre 2013, 18:00, modifié 1 fois.
Katly

Bon, j'ai voulu écrire un truc hier concernant la responsabilité dans le bouddhisme, on peut y voir :


Une responsabilité en entraine une autre.

Les responsabilités sont liées aussi à des conditionnements.

La responsabilité envers soi-même est liée à la responsabilité envers les autres, à la dépendance, à l'interdépendance et à la maîtrise de soi.

Certaines responsabilités sont impermanentes.


Il y a les responsabilités matérielles, sociales et morales, celles envers le monde.


Elles concernent l'attachement, l'égo et aussi le zèle, la négligence, le pouvoir, le fanatisme, la "compassion stupide", les limites, la culpabilité, l'accablement, la surcharge ( débordement ), la fuite.

La fuite qui est aussi la démission négative, l'abandon, l'oubli, l'égoïsme, l'inconscience.


La compétence, l'acquisition, "l'esprit du débutant", le dévouement.

L'humilité, le lâcher-prise, l'honnêteté envers soi-même et les autres ( respect de ses limites et celles des autres. )


La décompression : s'accorder du temps et de l'espace, être disponible pour l'essentiel, vivre aussi pour soi, se réaliser, s'accomplir dans une passion, un idéal, une aspiration...


Il y a la responsabilité d'abord humaine.
La responsabilité liée à notre conscience morale profonde qui passe par le coeur et la sagesse, à chaque instant et qui sera présente à la fin de notre vie.
ted

En fait, quand j'associe "recherche de bonheur" et "absence de responsabilité", se profile la tentation de la culpabilité.
lausm

Responsabilité est souvent entachée de culpabilité.
Responsable, ça vient du latin respons, ça signifie "répondre de" quelque chose.
Ca veut dire en fait être simplement là à ce qu'on fait.
Plein de gens le font sans y penser.
et parfois dès qu'on y pense, on se sent responsable, mais on n'est plus vraiment là, mais perdu dans l'idée de ce que les choses devraient être pour être bien.
et quand on se sent coupable, on peut utiliser ses responsabilités pour essayer de corriger des erreurs passées, et du coup on est à côté du besoin réel de la situation. Car on agit conditionné par une histoire.
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