"Contes de sagesses du monde pour tout l'monde"...

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axiste
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Jack Kornfield, "Après l'extase, la lessive".(Je crois que tu l'as lu récemment)

Dedans, on y trouve relaté ce conte initiatique russe :

Baba Yaga est une vieille femme sauvage au visage de sorcière. Elle connaît tout et vit au plus profond de la forêt, faisant bouillir son chaudron. Lorsque nous partons à sa recherche, nous sommes effrayés car elle nous oblige à avancer dans le noir, à poser des questions dangereuses et à sortir de la logique et du confort.

Le premier à venir la trouver est un jeune homme. Il frappe en tremblant à la porte de la cabane. Baba Yaga lui demande: "Viens-tu de ton propre choix ou es tu envoyé par quelqu'un ?" Le jeune homme, encouragé dans sa quête par sa famille, répond: "Je suis envoyé par mon père".
Baba Yaga le jette alors dans le chaudron pour le faire cuire.
La prochaine à tenter sa chance est une jeune femme; elle voit le feu qui couve et entend les ricanements de Baba Yaga. Baba Yaga demande à nouveau: "Viens-tu de ton propre choix ou es-tu envoyée par quelqu'un ?" La jeune femme qui toute seule avait été attirée dans les bois pour voir ce qu'elle pouvait y trouver répond: "Je suis ici de mon propre choix." Baba Yaga la précipite dans le chaudron et la fait cuire aussi.
Plus tard, un troisième visiteur arrive, encore une jeune femme. Elle est profondément troublée par le monde et se présente devant la hutte de Baba Yaga au coeur de la forêt. Elle voit aussi de la fumée et sait qu'il y a grand danger. Baba Yaga lui fait face: "viens-tu de ton propre choix ou es-tu envoyée par quelqu'un ?"
Et la jeune femme répond sincèrement: "Je viens en grande partie de ma propre initiative, mais en grande partie aussi à cause des autres. Je suis aussi venue en grande partie parce que vous étiez ici, parce qu'il y a la forêt et pour une autre raison que j'ai oubliée. Mais en grande partie je ne sais pas pourquoi je suis venue."

Baba Yaga la regarde alors pendant un moment et dit:"Ca va" et elle l'invite à rentrer dans sa hutte.
Cinq clefs pour la parole correcte :
- dire au bon moment, prononcer en vérité, de façon affectueuse, bénéfique et dans un esprit de bonne volonté."
Katly

hé non je n'ai pas encore lu ce livre de JK et d'autres précédents "Bouddha mode d'emploi". Merci. :) Cette sorcière est bonne cuisinière. ;-) <<metta>>


La cithare du bonheur

C'était un homme droit et sincère qui cherchait le chemin du bonheur, qui cherchait le chemin de la vérité. Il alla un jour trouver un vénérable maître soufi dont on lui avait assuré qu'il pourrait les lui indiquer. Celui-ci l'accueillit aimablement devant sa tente et, après lui avoir servi le thé à la menthe, lui révéla l'itinéraire tant attendu : « C'est loin d'ici, certes, mais tu ne peux te tromper : au coeur du village que je t'ai décrit, tu trouveras trois échoppes. Là te sera révélé le secret du bonheur et de la vérité. »
La route fut longue. Le chercheur d'absolu passa maints cols et rivières. Jusqu'à ce qu'il arrive en vue du village dont son coeur lui dit très fort : « C'est là le lieu ! Oui, c'est là ! » Hélas ! Dans chacune des trois boutiques il ne trouva comme marchandises que rouleaux de fils de fer dans l'une, morceaux de bois dans l'autre et pièces éparses de métal dans le troisième. Las et découragé, il sortit du village pour trouver quelque repos dans une clairière voisine.

La nuit venait de tomber. La lune remplissait la clairière d'une douce lumière. Lorsque tout à coup se fit entendre une mélodie sublime. De quel instrument provenait-elle donc ? Il se dressa tout net et avança en direction du musicien. Lorsque, stupéfaction, il découvrit que l'instrument céleste était une cithare faite de morceaux de bois, des pièces de métal et des fils d'acier qu'il venait de voir en vente dans les trois échoppes du village.

A cet instant, il connut l'éveil. Et il comprit que le bonheur est fait de la synthèse de tout ce qui nous est déjà donné, mais que notre tâche d'hommes intérieurs est d'assembler tous ces éléments dans l'harmonie.

Conte soufi
Katly

Il y a très longtemps, dans la lointaine Chine, une vieille femme vivait sur un petit bateau amarré sur le fleuve Jaune. Elle s’appelait Li Na, et elle était calligraphe.
Li Na avait travaillé toute sa vie pour atteindre la perfection dans son art. Beaucoup de gens savent écrire. Mais seul un artiste parvient, par quelques traits sur le papier, à exprimer la vérité d’une chose.
En ce temps-là, vivait aussi dans la capitale de la Chine un empereur. Il habitait un palais immense, dont l’entrée était interdite aux gens ordinaires. Il était très riche, très puissant et très, très cruel. Même sa femme et ses enfants le craignaient.
Tout le monde, au contraire, aimait la vieille calligraphe. De toutes parts on venait admirer ses créations. « Écris-nous le signe de l’amour ! » lui demandait-on. Ou bien : « Nous voudrions offrir à notre mère un idéogramme qui lui rende sa gaieté ! » Alors Li Na trempait son pinceau dans l’encre noire et, avec des gestes élégants, traçait sur le papier l’idéogramme de l’amour, ou celui de la joie, ou celui du bonheur. Et tous s’en retournaient heureux et comblés.
Bonheur, joie, amour, amitié, pardon, tout cela Li Na l’avait ressenti de tout son être et pouvait l’exprimer dans un idéogramme. Mais parfois, il fallait à la vieille calligraphe des jours, ou des semaines, pour atteindre le sens profond d’un signe. Pour traduire la vérité d’une fleur, Li Na avait dû devenir elle-même une fleur. Éprouver ce que ressent une fleur lorsque la rosée se dépose sur les feuilles, lorsque s’ouvre lentement la corolle. Et lorsque, enfin, la fleur fane et perd ses pétales. Li Na maîtrisait son art à la perfection.
Li Na avait une élève, San Li, qui vivait avec elle sur le bateau. San Li savait déjà quel papier convenait le mieux pour tracer un idéogramme. Elle savait aussi préparer l’encre et avait reçu ses premières leçons de calligraphie.

*

Un matin, une grande agitation vint troubler les abords du fleuve Jaune.
L’empereur approchait de l’endroit où était amarré le bateau de la calligraphe. Cent guerriers précédaient le palanquin incrusté d’or, cent guerriers le suivaient, et cent guerriers encore le protégeaient de chaque côté.
L’empereur fit arrêter les porteurs devant le bateau de Li Na. Un serviteur appela la vieille femme :
― L’empereur t’ordonne de tracer pour lui un idéogramme. Il doit exprimer la grandeur de son empire, sa richesse infinie et sa puissance inébranlable !
Li Na poussa la porte branlante de son bateau et s’avança. Cachée derrière le montant de la porte, San Li tenta d’apercevoir l’empereur. Mais les rideaux tissés d’argent du palanquin le protégeaient des regards. Sa voix était puissante et sonore.
― Combien de temps te faudra-t-il ? demanda-t-il d’un ton impérieux qui fit trembler de peur San Li.
― Il me faudra le temps de comprendre la nature de votre puissance ! répondit la vieille calligraphe d’une voix ferme.
San Li admira le sang-froid de son professeur.
― Qu’un serviteur vienne dans une semaine chercher la calligraphie.
L’empereur frappa trois fois du pommeau de sa canne la paroi du palanquin, et, aussitôt, porteurs et guerriers se mirent en mouvement.
Les habitants, emplis de crainte, s’étaient cachés dans leurs maisons ou leurs bateaux. L’empereur sortait fort peu souvent de son palais, et rares étaient ceux qui l’avaient vu de leurs propres yeux. Comme le palanquin resplendissait ! Comme les guerriers semblaient invincibles ! Ils portaient les armes, sûrs de leur puissance, et le sol tremblait encore de leurs pas.


*


Depuis la visite de l’empereur, la vieille calligraphe était plongée dans un profond silence. Elle n’avait adressé la parole à personne, pas même à San Li. Assise sur le pont du bateau, elle réfléchissait. Comment pouvait-elle mesurer la grandeur de l’empire, elle qui jamais n’avait pénétré dans le palais impérial ? Comment pouvait-elle imaginer l’immensité des richesses de l’empereur, elle qui ne possédait rien ? Comment pouvait-elle comprendre sa puissance, elle qui jamais n’avait donné d’ordre ?
Lorsque le soleil se coucha sur le fleuve Jaune, Li Na était toujours assise au même endroit. Perdue dans ses pensées, elle fixait le fleuve.
Elle ne réagit pas lorsque San Li apporta un bol de riz et du thé parfumé. La tête penchée en avant, la vieille calligraphe s’était assoupie, et la lune faisait briller des reflets d’argent dans ses cheveux.
Une semaine s’écoula, et un serviteur du palais vint réclamer la calligraphie.
Désolée, la vieille dame secoua la tête :
― Je regrette, mais je ne peux répondre à la commande de l’empereur. Je n’ai jamais pénétré dans le palais impérial, je ne sais rien des cérémonies de la cour. Empire et puissance sont pour moi des mots étrangers. Peux-tu me rapporter un objet du palais ? Quelque chose que l’empereur touche chaque jour.
Le serviteur le promit. Une semaine plus tard, il apporta un riche tapis et un gobelet en or. Comme Li Na n’était pas visible, il les remit à son élève. Tremblante, San Li prit les précieux objets.
― Porte-les à ton professeur ! l’exhorta le serviteur de l’empereur. Mais prends garde de les souiller ou, pis, de les abîmer. L’empereur vous jetterait aussitôt en prison, toutes les deux !
Incapable d’articuler un mot, San Li hocha la tête.
― Je reviens dans une semaine ! Que la calligraphie soit alors achevée !
De nouveau, une semaine s’écoula, et le serviteur revint trouver la calligraphe.
― Je ne parviens pas à traduire sur le papier la puissance de l’empereur, dit la vieille dame d’une voix tremblante. Apporte-moi une épée ou une autre arme avec laquelle l’empereur fait sentir son pouvoir à ses ennemis.
― Je vais voir ce que je peux faire ! répondit le serviteur, et il s’éloigna sur son haut cheval. Quelques jours plus tard, il réapparut avec une lourde épée.
Li Na était assise, immobile et silencieuse. San Li découpait des feuilles de papier. Mais point de calligraphie, pas même une esquisse.
― Combien de temps te faut-il encore ? demanda le serviteur.
Comme la vieille dame ne répondait pas, il se tourna vers son élève :
― Quand la calligraphie sera-t-elle terminée ? L’empereur s’impatiente.
San Li haussa les épaules.
― Je ne sais pas, dit-elle timidement.
Le serviteur laissa s’écouler trois mois avant de reparaître sur la rive du fleuve Jaune. Cette fois, la vieille calligraphe allait enfin livrer son travail, pensait-il. Mais il se trompait.
― Li Na demande qu’on ne la dérange en aucun cas, lui annonça San Li. Reviens dans un mois, et tu pourras emporter la calligraphie de l’empereur.
L’homme fut saisi de peur. Quand l’empereur apprendrait que la calligraphie n’était pas terminée, il l’en rendrait responsable, à coup sûr.
― Pourquoi cela dure-t-il si longtemps ? demanda-t-il à la fillette.
― Li Na doit d’abord comprendre la puissance de l’empereur avant de prendre le pinceau. San Li baissa les yeux.
― La commande de l’empereur exige quelque chose de bien différent de tout ce que Li Na a peint jusqu’à présent, poursuivit-elle à voix basse.
Le serviteur hocha la tête pour montrer qu’il comprenait. Mais l’empereur, lui, comprendrait-il ? L’empereur ne comprit pas. Lorsqu’il vit le serviteur revenir les mains vides, il le fit jeter aussitôt en prison. On osait s’opposer à ses ordres ! Eh bien, il irait lui-même trouver la vieille calligraphe au bord du fleuve. Il irait lui-même chercher ce qui lui appartenait.

*

Vêtu avec magnificence, l’empereur se mit en route avec tout son équipage. En voyant les soldats s’approcher de la rive, les habitants s’enfuirent dans leurs embarcations. San Li aussi se cacha, terrorisée, dans la cuisine, lorsque le palanquin de l’empereur s’arrêta devant le bateau de la calligraphe. Accompagné de quatre gardes, l’empereur pénétra en personne dans l’habitation de Li Na.
― Où est la calligraphie que je t’ai ordonné de peindre ?
Li Na s’approcha. À la main, elle tenait un grand pinceau, d’où gouttait l’encre. Devant elle, était étendu un rouleau de papier. Sans un mot, sans un regard à l’empereur, elle se pencha et, en quelques gestes précis, traça sur le papier le signe de la puissance.
Saisi d’effroi, l’empereur fit un pas en arrière.
Ses gardes tirèrent leurs épées pour le protéger. Le signe de la puissance était violent et cruel, menaçant et hostile, dur et glacial. On aurait dit que toute la pièce était sous son emprise. Les gardes reculèrent en tremblant. L’empereur lui-même pâlit. Mais il s’efforça de ne pas montrer qu’il était impressionné.
― Pourquoi m’as-tu fait attendre des mois pour achever maintenant, en quelques secondes, la calligraphie ? demanda l’empereur, courroucé.
― Il m’a fallu ce temps avant de comprendre votre puissance, répondit la vieille calligraphe d’une voix douce, mais ferme.
Elle rangea le pinceau et regarda l’empereur droit dans les yeux. Puis elle prit son sceau et l’imprima sur le papier de riz, juste à côté de son œuvre. Des minutes s’écoulèrent dans un grand silence. L’encre sécha. Li Na fit signe à deux gardes de soulever le rouleau. Sans attendre l’autorisation de l’empereur, ils firent ce que la vieille femme leur avait demandé. L’empereur comprit alors qu’elle avait percé la nature de sa puissance. Il s’empressa de rouler le papier de riz, et se fit transporter en son palais.

*

Là, il se retira aussitôt dans ses appartements privés et ordonna que personne ne le dérange, pas même les ministres, pas même son épouse ni ses enfants. Il déroula devant lui, sur le sol, la calligraphie de la vieille Li Na et se mit à la contempler. Il sentit un grand froid s’insinuer dans son corps. Sa gorge était comme étranglée. C’était cela, le froid glacé de la peur. La poignée d’acier de la crainte. Le goût amer de la cruauté. Le pouvoir de la cupidité et de la violence.
Un silence de mort régnait sur le palais. Après une très longue attente, le premier garde de l’empereur s’approcha, hésitant, de la porte de l’appartement privé.
― Sa Majesté ne se sent pas bien ? demanda-t-il timidement.
Comme aucune réponse ne parvenait, le garde ouvrit prudemment la porte.
L’empereur fixait le sol, à l’endroit où était déroulée la calligraphie de Li Na. Et l’empereur de Chine pleurait ! Pas de sanglots, pas de gémissements, nul son ne franchissait ses lèvres. Les larmes roulaient silencieusement sur son visage.
― Est-ce cela le pouvoir de l’empereur ? Angoisse et peur ? Suis-je vraiment si cruel ? chuchotait-il.
Il aperçut le garde. D’un mouvement lent, infiniment lent, l’homme hocha la tête.
― Oui, Votre Majesté est cruelle.
Il avait parlé d’une voix ferme, en regardant l’empereur. L’empereur détourna les yeux de la calligraphie et fixa, médusé, son serviteur. Il dressa le poing, menaçant, en direction du garde. Tremblant de colère, il ouvrit la bouche. Mais il baissa le bras. Sans mot dire, il regarda le sol et se mit à pleurer.

*

Sur le bateau amarré sur le fleuve Jaune, la vieille calligraphe rangeait son matériel. Papier et pinceau, pierre à encre et sceau, tout retrouva sa place habituelle. Pour finir, Li Na étendit au sol le précieux tapis de l’empereur, posa le gobelet sur une étagère et déposa dans un coin l’épée incrustée de pierres précieuses. Elle souriait.
Le matin, le serviteur du palais était venu encore une fois.
― L’empereur te donne ces objets pour prix de ton travail, avait-il expliqué.
― Tu es allé en prison ? avait demandé San Li, curieuse. L’homme avait hoché la tête.
― Sa Majesté a libéré tous ceux qu’elle avait injustement emprisonnés. Depuis que la calligraphie de Li Na est accrochée dans son palais, l’empereur est devenu un autre homme.
Lorsque le serviteur fut parti, Li Na appela son élève.
― Petite San Li, dit-elle d’une voix douce, veux-tu apprendre le signe de la vérité ?
La fillette la regarda avec de grands yeux.
― Oh oui, j’aimerais bien l’apprendre ! répondit-elle avec enthousiasme.
Bien excitée, elle regarda la main de Li Na qui, calmement, prenait le grand pinceau.


Andrea Liebers
Li Na et l’Empereur


FleurDeLotus
Katly

Ces derniers contes zen :



Un merle chantait.

L'air était en paix ce matin là, la lumière douce et apaisante venait essuyer les larmes de rosée sur les toiles d'araignée. Le vieux moine inspira, expira en appréciant l'instant présent. Silencieusement et avec respect le jeune disciple vint se placer derrière son maître. Cela faisait quelques temps que le jeune homme était confronté au doute. Il ne comprenait pas pourquoi malgré tous ses efforts il progressait si peu, pourquoi il avait le sentiment que rien ne valait la peine, voir qu'il perdait son temps.
Le vieux moine, le regard droit, était assis, calme...
- Maître, malgré tous mes efforts, je doute ...
Le vieil homme se leva, sans un mot, et se dirigea vers une bâtisse près du monastère, le jeune disciple suivit.
Arrivé devant le bâtiment, un homme s'entrainait au tir à l'arc.
Le vieux moine s'assit, derrière lui le jeune disciple en fit de même. Le regard du maître englobait l'archer dans sa totalité...
- Qu’observes-tu ?...
- Je vois un homme qui s'entraine à l'arc...
- Que remarques-tu ?...
- Rien de spécial, il essaye d'atteindre la cible...
- Que fait-il pour ça ?...
- Il vise !...
- Pas seulement, vois tu, il doit d'abord tendre l'arc, ensuite tu as raison il doit viser...
- Je sais tout cela...
- Ce n'est pas tout, une chose est primordiale...
- Quoi donc ?...
- Il doit lâcher la flèche...
- Lâcher la flèche !! Mais c'est normal!...
- Oui c'est normal comme tu dis, ça coule de source dit le vieux moine en souriant. Pourtant combien d'entre nous oublions de lâcher notre flèche pour atteindre notre but ?...
- Je ne comprends pas tout...
- Le fait de tendre l'arc peut être rapproché de l'énergie, il en faut pour réussir à le tendre, le fait de viser peut être rapproché de l'intelligence et enfin lâcher la flèche peut être rapprocher du lâcher prise. Si nous mettons trop d'énergie à tendre l'arc nous risquons de casser l'arc, pas assez et la flèche n'atteindra pas son but. Si tu vises trop longtemps nous allons nous fatiguer et perdre beaucoup d'énergie...
- Pourtant certains y arrivent...
- Oui mais à quel prix ?
- Lâcher sa flèche demande d'avoir confiance, confiance en soi, en la vie. Celui qui doute a peu de chance d'atteindre son but et s'il y parvient ce sera avec beaucoup d'effort et de temps...
- Vous voulez dire que je mettrai très longtemps à atteindre mon but...
Le vieux moine sourit, un sourire de compassion
- Souviens toi le monde est ce que je pense de lui...
Le jeune moine garda le silence...
- Nous perdons de l'énergie à nous juger ou à juger les autres, juger divise. Si l'homme juge la femme et la femme l'homme il s'en suivra une division, pourtant lorsque l'homme et la femme éprouvent de l'amour l'un pour l'autre ils ne font qu'un et de cette unité jaillit une énergie inimaginable, la vie...
Le jeune disciple se dirigea vers l'homme qui s'entrainait, celui ci lui donna son arc, le jeune moine regarda la cible, tendit l'arc, visa, ferma les yeux et lâcha prise, la flèche atteint la cible...
Le vieux moine sourit se leva et reprit le chemin du temple, un merle chantait....



Butterfly_tenryu



Les framboises de l'instant présent


Un homme qui traversait un champ se trouva nez à nez avec un tigre. Il s’enfuit, le tigre à ses trousses. Arrivé au bord d’une falaise, il s’accrocha à une liane et se balança. Le tigre le flaira d’en haut.

Terrorisé, l’homme baissa les yeux : tout en bas, un autre tigre attendait, s’apprêtant à n’en faire qu’une bouchée. Deux souris, l’une blanche, l’autre noire, se mirent à ronger la liane, petit à petit.

Juste à côté de lui, l’homme aperçut une framboise qui promettait d’être savoureuse. Se tenant d’une main à la liane, il cueillit la framboise de l’autre. Elle était succulente !



Parabole Zen. En tout temps, vivre le moment présent dans sa plus belle expression est salvatrice. Peu importe ce qui va arriver… la plénitude entraîne un changement de conscience.



Butterfly_tenryu



En guise d’au revoir


« Un moine zen se disposait à parler sur la grande place du village. Il avait soigneusement rédigé son discours, et il s’apprêtait à le lire, quand un brusque coup de vent fit s’envoler les feuillets dans les branches du citronnier. Pris au dépourvu, incapable de retrouver le fil de son harangue, il dit :
« Mes amis, voici en résumé, ce que je voulais vous exposer : quand j’ai faim, je mange, quand je suis fatigué, je dors.
- Mais tout le monde ne fait-il pas comme vous, maître ? interroge quelqu’un dans la foule.
- Non ! pas de la même façon !
- Pourquoi, maître ?
- Quand les gens mangent, ils pensent à mille choses, quand ils s’endorment, ils pensent à leurs problèmes. Voilà pourquoi ils ne font pas comme moi ! »
Alors le moine descendit au milieu d’eux, recueillit les dons, et, à ceux qui le questionnaient encore, il répondit : « Quant aux détails, vous les trouverez dans les branches du citronnier… » »


Butterfly_tenryu


La harpe apprivoisée

« Dans le ravin de Lungmen se dressait autrefois, il y a très, très longtemps, un arbre Kiri qui était le véritable roi de la forêt. Il portait si haut la tête qu’il pouvait converser avec les étoiles et ses racines s’enfonçaient si profondément dans la terre qu’elles mêlaient leurs anneaux de bronze à ceux du dragon d’argent qui dormait au-dessous de lui. Et il arriva qu’un puissant magicien fit de cet arbre une harpe merveilleuse, dont le farouche esprit ne pourrait être apprivoisé que par le plus grands des musiciens. Durant longtemps l’instrument fit partie du trésor de l’empereur de Chine, mais aucun de ceux qui, tour à tour, avaient essayé de tirer de ses cordes une mélodie ne vit sa tentative couronnée de succès. En réponse à leurs efforts suprêmes il ne sortait de la harpe que de dures notes de dédain, peu en harmonie avec les chants qu’ils désiraient chanter. La harpe se refusait à reconnaître un maître.

Enfin vint Peiwoh, le prince des harpistes. D’une main délicate il caressa la harpe, comme lorsque l’on cherche à calmer un cheval rétif, et se mit à toucher doucement les cordes. Il chanta la nature et les saisons, les hautes montagnes et les eaux courantes; et tous les souvenirs de l’arbre se réveillèrent! De nouveau la douce brise du printemps se joua à travers les branches. Les jeunes cataractes, en dansant dans le ravin, souriaient aux fleurs en bouton. De nouveau l’on entendit les voix rêveuses de l’été avec leurs myriades d’insectes, et le joli battement de la pluie, et la plainte du coucou. Écoutez! un tigre a rugi et l’écho de la vallée lui répond. C’est l’automne; dans la nuit déserte, tranchante comme une épée, la lune étincelle sur l’herbe gelée. L’hiver maintenant, règne et à travers l’air plein de neige tourbillonnent des vols de cygnes, et des grêlons sonores frappent les branches avec une joie sauvage.

Puis Peiwoh changea de ton et chanta l’amour. La forêt s’inclina comme un ardent jeune homme perdu dans ses pensées. Là-haut, pareil à une altière jeune fille, volait un beau nuage éclatant; mais son passage traînait sur le sol de longues ombres, noires comme le désespoir. Le ton changea encore; Peiwoh chanta la guerre, les épées qui s’entre-choquent et les chevaux qui piaffent. Et dans la harpe se leva la tempête de Lungmen; le dragon chevauchait l’éclair, l’avalanche s’écroulait à travers les collines avec un bruit de tonnerre. Le monarque Céleste, extasié, demanda à Peiwoh quel était le secret de sa victoire. « Sire, répondit-il, ils ont tous échoué, parce qu’ils ne chantaient qu’eux-mêmes. J’ai laissé la harpe choisir son thème, et en vérité je ne savais pas si c’était la harpe qui était Peiwoh ou Peiwoh qui était la harpe. »

Le livre du thé, Okakura Kakuzô


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diffcilereveil shuuuuuuuuuuuuttttt
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Jadis vivait tranquille un mille-pattes affairé qui allait et venait sans le moindre état d'âme.

Mais vint un jour où un crapaud oisif qui l'observait, le voyant passer et repasser, eut l'idée savante de lui demander dans quel ordre mathématique il actionnait ses pattes.

« Vous allez dire que je suis curieux, mais comment se suivent-elles ? Dans quel ordre ? Est-ce par paires ? Ensemble ? Séparées ? »

L'insecte interloqué salua poliment et rentra songeur dans son trou, profondément troublé par cette question imprévue.

Il essaya de penser, de mettre des idées en ordre, dans un sens, et puis dans un autre, complètement déboussolé, bloqué.

Et bloqué à ce point que bloqué il resta, incapable désormais de remettre ses pattes en route, si bien qu'à la fin il en mourut de faim.

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Cinq clefs pour la parole correcte :
- dire au bon moment, prononcer en vérité, de façon affectueuse, bénéfique et dans un esprit de bonne volonté."
Katly

Le conte de l'arbre

Dans un pays aride, fut autrefois un arbre prodigieux. Sur la plaine, on ne voyait que lui, largement déployé entre les blés malingres et le vaste ciel bleu. Personne ne savait son âge. On disait qu'il était aussi vieux que la Terre. Des femmes stériles venaient parfois le supplier de les rendre fécondes, des hommes en secret cherchaient auprès de lui des réponses à des questions inexprimables et les loups lui parlaient, certaines nuits sans lune, mais personne jamais ne goûtait à ses fruits.

Ils étaient pourtant magnifiques, si luisants et dorés, le long de ses branches maîtresses pareilles à deux bras offerts dans le feuillage qu'ils attiraient les mains et les bouches des enfants ignorants. Eux seuls osaient les désirer. On leur apprenait alors l'étrange et vieille vérité. La moitié de ces fruits était empoisonnée. Or, tous, bons ou mauvais, étaient d'aspect semblable. Des deux branches ouvertes en haut du tronc énorme l'une portait la mort, l'autre portait la vie, mais on ne savait laquelle nourrissait et laquelle tuait. Et donc on regardait mais on ne touchait pas.

Vint un été trop chaud, puis un automne sec, puis un hiver glacial. Neige et vent emportèrent les granges et les toits des bergeries. Les givres du printemps brûlèrent les bourgeons, et la famine envahit le pays. Seul, sur la plaine, l'arbre demeura imperturbable. Aucun de ses fruits n'avait péri. Malgré les froidures, ils étaient restés en aussi grand nombre que les étoiles du ciel. Les gens, voyant ce vieux père solitaire miraculeusement rescapé des bourrasques, s'approchèrent de lui, indécis et craintifs. Ils interrogèrent son feuillage. Ils n'en eurent pas de réponse. Ils se dirent alors qu'il leur fallait choisir entre le risque de tomber foudroyés, s'ils goûtaient aux merveilles dorées qui luisaient parmi les feuilles, et la certitude de mourir de faim, s'ils n'y goûtaient pas.

Comme ils se laissaient aller en discussions confuses, un homme dont le fils ne vivait plus qu'à peine osa soudain s'avancer d'un pas ferme. Sous la branche de droite, il fit halte, cueillit un fruit, ferma les yeux, le croqua et resta debout, le souffle bienheureux. Alors tous, à sa suite, se bousculèrent et se gorgèrent délicieusement des fruits sains de la branche de droite, qui repoussèrent aussitôt, à peine cueillis, parmi les verdures bruissantes. Les hommes s'en réjouirent infiniment. Huit jours durant, ils festoyèrent, riant de leurs effrois passés.

Ils savaient désormais où étaient les rejetons malfaisants de cet arbre : sur la branche de gauche. Ils la regardèrent d'abord d'un air de défi, puis leur vint une rancune haineuse. A cause de la peur qu'ils avaient eu d'elle ils avaient failli mourir de faim. Ils la jugèrent bientôt inutile que dangereuse. Un enfant étourdi pouvait, un jour, se prendre à des fruits pervers que rien ne distinguait des bons. Ils décidèrent donc de la couper au ras du tronc, ce qu'ils firent avec une joie vengeresse.

Le lendemain, tous les bons fruits de la branche de droite étaient tombés et pourrissaient dans la poussière. L'arbre amputé de sa moitié empoisonnée n'offrait plus au grand soleil qu'un feuillage racorni. Son écorce avait noirci. Les oiseaux l'avaient fui. Il était mort.


(Conte de l'Inde, Henri Gougaud, L'arbre d'amour et de sagesse, Ed. du Seuil)

FleurDeLotus
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