Il y a des limites à la connaissance conventionnelle.

Sourire

J'ai relu...
FA a écrit : Percevoir un objet est par définition ignorer tout ce qui n'est pas cette objet .
Apoha ou pas, je tique là-dessus
S'agit-il de percevoir ou de définir, nom d'un figuier en caoutchouc synthétique ?
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Dharmadhatu
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Sourire a écrit :S'agit-il de percevoir ou de définir, nom d'un figuier en caoutchouc synthétique ?
:D Ca ne peut être que définir car le principe même d'une définition juste est d'écarter de l'ensemble des caractéristiques d'un phénomène tout ce qui n'en fait pas partie.

Dans Knowledge and Liberation, Anne Klein raconte l'anecdote suivante:

Le grand Maître indien Atisha était au Tibet et apprenait la langue locale. Un jour, il demanda comment s'appelait en tibétain un rocher. Ce qui lui fut dit.
Un jour, sur le chemin, il demanda à s'arrêter pour enlever le rocher qui était coincé entre ses orteils. :lol:

La désignation (et donc la définition) qu'il avait enregistrée n'excluait pas absolument tout ce qui ne faisait pas partie de l'ensemble des caractéristiques du rocher, en l'occurrence: la petite taille d'un caillou.

Un passage de cet excellent livre:
Apprendre à identifier un chat signifie aussi que l'on apprend ce que n'est pas un chat. Quand le nom 'chat' est initialement connecté à l'objet, il y a une élimination de ce qui n'est pas un chat, et le nom est appliqué, dans un sens, à ce qui reste. Si cette élimination n'est pas faite correctement, un emploi futur du terme sera erroné. Si un enfant, à qui l'on dit: "Ceci est un cheval", prend les caractéristiques d'un cheval comme étant la possession de quatre pattes, une crinière, une queue, et un museau longiligne, l'enfant en question pourrait voir plus tard un zèbre et penser qu'il s'agit d'un cheval à rayures. Cela pourrait venir du fait que 'rayures blanches et noires' n'aura pas fait partie des caractéristiques éliminées au moment de l'apprentissage du nom 'cheval'. Afin que le processus de désignation mène à un usage correct de la convention apprise, elle doit initialement être appliquée à une image mentale qui représente correctement ce qui doit être éliminé comme n'étant pas la chose ainsi désignée.
FleurDeLotus
apratītya samutpanno dharmaḥ kaścin na vidyate /
yasmāt tasmād aśūnyo hi dharmaḥ kaścin na vidyate

Puisqu'il n'est rien qui ne soit dépendant,
Il n'est rien qui ne soit vide.

Ārya Nāgārjuna (Madhyamakaśhāstra; XXIV, 19).
Sourire

C'est pourquoi je tique.
Le fait de ne pas savoir désigner un caillou autrement que par le mot "rocher" ne veut pas dire qu'on confond les deux objets et qu'on ne parvient pas à les percevoir chacun de façon distincte


Il y a sur ma terrasse des fleurs artificielles (récupérées d'un jour où elles sont tombées d'un balcon...)
La semaine dernière, un ami à moi les a crues vraies (malgré la saison). Problème de perception...
FA

Apoha ou pas, je tique là-dessus
S'agit-il de percevoir ou de définir, nom d'un figuier en caoutchouc synthétique ?
Je ne crois pas qu'il existe une forme de perception pure, qui serait dénuée d'a-priori conceptuel.
L'image que le cerveau élabore est toujours une interprétation de la réalité fondée sur des a-priori de type Bayésiens.
Ce fait est prouvé scientifiquement.

Si le cerveau hésite sur la manière d'interpréter une perception, il fait un choix interprétatif en ce fondant sur ce qui lui semble le plus probable.
Ce qui est efficace dans la majorité des cas, mais n'est pas un gage de succès à 100%.
Percevoir c'est donc déjà définir et conceptualiser. Et cela se produit à notre insu. On ne perçoit pas le monde tel qu'il est. Le cerveau élabore une représentation.
J'ai pourtant rappelé que dans le cas d'un Bouddha, la connaissance de tous les existants est directe, ce qui n'est pas le cas d'une conception.
Peut-être serait-il intéressant Dathu que tu précises bien ce que tu entends au juste par "Connaissance de tous les existants".

Qu'entends-tu pas "Existant" , qu' implique pour toi le fait de connaitre ces "existants".

Dans un monde Bouddhiste ou l'impermanence est fondement, la signification du mot "existant" mérite sans-doute d'être précisée.

FA
boudiiii !

FA# a écrit : Mais si vous préférez le Bouddha Star Treck....

Faut respecter ça !
tu préfères apparemment un Bouddha en "mi majeur" .
Ca se respecte .

jap_8
Boudiiii !

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axiste
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Vous voulez dire avec l'apoha qu'on ne fonctionne qu'avec des comparaisons et qu'elles sont essentiellement exclusives ? (oui, dans le sens que le chat appréhendé l'est par la conscience que l'on a du non chat, enfin de tout ce qui n'est pas lui…)
Pourtant, j'ai conscience du bleu non pas uniquement par les autres couleurs qui le nie, mais de façon simultanée parce que le ciel est bleu: il y a des mémoires répétitives utiles en moi qui me font fonctionner non pas de façon distinctive seulement mais en même temps par similitudes…et c'est direct comme des touches de piano qui s'activent…

Ca me rappelle un jeu lorsque j'étais enfant: sur les PIF que m'achetait ma grand mère, il y avait ce jeu qui consistait à trouver les différences entre deux images…un jour, le jeu fut changé par la consigne trouver les similitudes entre les images…à ce moment là, j'ai senti un basculement des choses: c'est comme si deux regards possibles se rencontraient pour arriver à connaître l'image.
Ce jour là, je me suis amusée à passer d'une consigne à l'autre et dans cette oscillation, j'ai trouvé que l'image ne changeait jamais mais que seule l'intention que j'avais au départ changeait tout…bon, en fait, c'était beaucoup plus rapide de trouver les similitudes que les différences…mais peut-être est-ce encore une sorte d'illusion construite sur mes images mentales…
Il m'a semblé pourtant depuis ce jour là qu'il est toujours plus direct d'inclure que d'exclure puisque le premier mouvement permet aux choses de se rejoindre en un point…
Mais bon, pour inclure les deux mouvements, ils sont sûrement complémentaires…c'est sans doute une oscillation nécessaire…
Percevoir c'est donc déjà définir et conceptualiser. Et cela se produit à notre insu. On ne perçoit pas le monde tel qu'il est. Le cerveau élabore une représentation.
cela m'apparait très "géométrique": on perçoit des formes, des couleurs, des dimensions, ou peut-être juste des énergies en mouvement…on met une orthographe dessus mais le phénomène, lui, est déjà parti ailleurs…
…alors oui, la question arrive comme tu le dis : c'est quoi un existant ?
Cinq clefs pour la parole correcte :
- dire au bon moment, prononcer en vérité, de façon affectueuse, bénéfique et dans un esprit de bonne volonté."
FA

La représentation que nous avons du monde est Bayésienne.

2 article passionnant sur le sujet !

http://webinet.cafe-sciences.org/articl ... e-aux-des/

http://webinet.cafe-sciences.org/articl ... -au-calcul


jap_8
FA
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Dharmadhatu
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FA a écrit :La représentation que nous avons du monde est Bayésienne.

2 article passionnant sur le sujet !

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jap_8
FA
:D Oui, celle que nous avons. Mais il faudrait prouver que ce soit le cas pour un Bouddha. Si la perception d'un Bouddha n'est pas différente de celle des êtres ordinaires, à quoi chercher à atteindre cet état ? Selon la philsophie mahayaniste indienne, un Bouddha est totalement dénué de conceptions. Elles sont remplacées par la sagesse discernante représentée par Amitabha.
Peut-être serait-il intéressant Dathu que tu précises bien ce que tu entends au juste par "Connaissance de tous les existants".

Qu'entends-tu pas "Existant" , qu' implique pour toi le fait de connaitre ces "existants".

Dans un monde Bouddhiste ou l'impermanence est fondement, la signification du mot "existant" mérite sans-doute d'être précisée.
En fait, ce qui est fondement dans le monde bouddhiste, c'est la vacuité, pas l'impermanence. L'impermanence n'est un fondement que pour les phénomènes produits.

Existant est synonyme de phénomène, de connaissable, de base établie, d'objet, d'objet de compréhension, etc...
Percevoir c'est donc déjà définir et conceptualiser. Et cela se produit à notre insu. On ne perçoit pas le monde tel qu'il est. Le cerveau élabore une représentation.
En fait, il y a une différence entre la perception et la conception: pour la première, il y a d'abord et avant tout un stimulus extérieur, organisé par un concept. Lors d'un concept, il y a d'abord une exclusion qui renvoie à quelque chose correspondant à ce qui a été perçu par le passé.
Axiste a écrit :Vous voulez dire avec l'apoha qu'on ne fonctionne qu'avec des comparaisons et qu'elles sont essentiellement exclusives ?
:D Oui, l'apoha (ou anyapoha) est une exclusion.
Pourtant, j'ai conscience du bleu non pas uniquement par les autres couleurs qui le nie, mais de façon simultanée parce que le ciel est bleu.
Ca dépend de ce qu'on entend par avoir conscience. Si c'est une perception directe, c'est seulement une exclusion implicite, puisque le bleu est implicitement l'opposé de des autres couleurs. Si c'est une conception (le souvenir du bleu), il s'agit d'une exclusion explicite: c'est par l'exclusion qu'on accède au concept.

L'exclusion me rappelle un jeu avec des images de personnes qui ont une barbe, des lunettes etc... Il faut trouver la bonne personne en éliminant toutes les autres.

FleurDeLotus
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Sourire

axiste a écrit :Pourtant, j'ai conscience du bleu non pas uniquement par les autres couleurs qui le nie, mais de façon simultanée parce que le ciel est bleu: il y a des mémoires répétitives utiles en moi qui me font fonctionner non pas de façon distinctive seulement mais en même temps par similitudes…et c'est direct comme des touches de piano qui s'activent…
C'est intéressant ce que tu dis là... Je pars sur un détail, mais... Dans "le Bleu" de Pastoureau, j'ai lu que dans les listes de couleurs de l'arc en ciel, les auteurs antiques ont oublié systématiquement le bleu.

Il n'en donne pas d'interprétation... C'est peut-être parce que le bleu est couleur du ciel et donc... Normal.

Dans un monde intégralement bleu, aurions-nous même la notion de couleur ?
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Dharmadhatu
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Sourire a écrit :Dans un monde intégralement bleu, aurions-nous même la notion de couleur ?
jap_8 C'est une question que je me pose souvent.

FleurDeLotus
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