Bonjour,
Je me dois, dès l'abord, vous remercier de votre intérêt à tel point d'ailleurs que je vous donne pleinement raison de l'ensemble de vos opinions, même si pour certaines, elles attirent quelques remarques... que je préciserai, plus tard.
« Raison » tant que vous penserez :
- être identique, en lisant ce mail, à ce que vous étiez ce matin au réveil
- être identique, aujourd'hui, à ce que vous étiez hier
- être identique, demain, à ce que vous étiez avant- hier
- être identique, dans une semaine, à ce que vous êtes aujourd'hui ou la semaine dernière
etc etc …
Cette identité, pour intéressante qu'elle soit, fonde l'ensemble de votre positionnement au monde et vous fait vous accrocher à vos opinions qui certes sont bonnes puisque ce sont les vôtres en négligeant totalement qu'en principe, sur un site bouddhiste, elles doivent aider à la délivrance de ceux qui les lisent.
Le font-elles ? S'accrocher à une réponse que l'on juge méprisante, c'est de l'orgueil et du respect mal placé. S'étonner, au nom du Bouddha, que certains vont y croire pour s'abstenir d'une réponse impossible par manque d'expérience ou incapacité, c'est de l'outrecuidance. Théoriser sur la causalité c'est essayer de sauver les meubles par l'exposé d'une « vérité » d'évidence, tellement évidente d'ailleurs qu'elle est fausse, en refusant d'entrer dans le monde réel de l'impermanence causale en statufiant les images mentales.
T'en fait autant allez-vous me répondre ! Sans aucun doute sauf que j'essaie de faire comprendre et admettre les pratiques de la non-dualité qui implique la vigilance, l'expérimentation et l'acceptation dans sa vie quotidienne et ses conceptions philosophiques d'un certain nombre de principes de raison dont, pour ma part, j'ai déjà rendu compte dans mes multiples posts, qu'il suffit de consulter...pour mieux critiquer.
Exemple, la causalité. Que la graine donne le fruit, que la bûche donne la cendre n'implique aucunement une causalité mais seulement un changement d'état. En faire une loi naturelle, la loi du renouvellement par Renaissance implique précisément une permanence dénoncée plus haut que le principe de vacuité et d'anatman devrait en toute conséquence bannir.
Autre démonstration. On nous explique qu'il y a un lien entre la graine et la fleur. Soit ! Mais lequel ? Est-ce le lien constitué par la présence de la terre, de la température de la main qui a déposé la graine en terre, du soleil qui darde ses rayons, de la pluie qui l'inonde, de l'humidité ou sécheresse de l'air, de la présence du vent et sa vitesse au moment de la plantation, au moment de la croissance ou au moment de la récolte et que sais-je encore ? Le résultat est l'impossibilité de définir et spécifier la cause éventuellement première des causes adjuvantes ce qui, au delà et en deçà de votre pétition de principe la réduit à néant par pléthore de conditions dont personnes ne peut déduire la pertinence.
Autre démonstration, de type bouddhiste cette fois. Il s'agit de NAGARJUNA et du premier chapitre de son ouvrage : stances du milieu par excellence (Madhyamaka-karikas), je cite :
1-10 – étant donné que des entités dépourvues de nature propre n'ont pas d'existence, la formule « ceci étant, cela est » est inadéquate. Guy BUGAULT, le commentateur écrit : «
s'il n'y a plus, à proprement parler, d'identité, comment dire « ceci, cela (…), si les choses n'ont plus d'être en soi, alors toute idée de relation entre des choses tombe. Son corrélat, l'idée d'être-à-partir d'autre chose disparaît du même coup. La relation cause-effet n'a plus de sens »
Ainsi donc, pour expliciter encore mieux la fausse causalité graine-fleur, il nous faut convenir que leur relation est interdépendante mais pas causale car tant que la graine est graine elle n'est pas fleur et quand la fleur est fleur, la graine a disparu, de la même manière dira DOGEN que la bûche tant qu'elle est bûche est à un niveau de la loi et que la cendre, quand elle est cendre est à un autre niveau de la loi en application de la Vacuité qui les constitue (KU) selon laquelle la Forme est vide et le Vide est forme (
Shiki Soku ze Ku et Ku Soku ze Shiki - ) en japonais
Pour en terminer, cette fois-ci, je vous propose l'examen du Chapitre 16-1 «
Est-ce que les composants (samskaras) transmigrent ? Non, si on les pose comme permanents ! Mais ils ne transmigrent pas non plus s'ils sont impermanents » et pour répondre aux considérations du Bardo du rêve et du Bardo du sommeil le 16-3 «
Tandis qu'il transmigre d'appropriation en appropriation, il serait (dans l'intervalle) privé d'existence. Privé d'existence et de ses groupes d'appropriation, qui sera t-il ? qui transmigrera ? »
Il importe donc, après avoir intégré intellectuellement la notion de vacuité que vous conformiez votre expérience, vos raisonnements, votre pratique et vos attitudes à l'absence d'encrage, non pas dans la réalité conventionnelle et pratique mais dans une réalité que vous estimeriez supérieure qui ne serait, qui n'est, qu'une projection hallucinatoire d'un moi qui se vexe, qui s'estime méprisé parce que contrarié, qui préfère l'amour et l'amitié à une autre vérité qui dénonce sa propre tromperie mais qu'il est tout de même préférable de sauvegarder, pour une prochaine fois, dans une autre vie, même s'il est source de souffrance dont la disparition serait sa propre éradication.
