Fa a écrit :En quoi ce que j'ai écris te semble contredire ta vision des choses ? Crois-tu donc que la vacuité n'a aucune fonction liée au Dharma ?

En fait, la logique s'établit selon trois domaines: causalité, nature et de non-observation.
La vacuité est le dharmata, la nature même des existants, des dharmas.
Selon la vision bouddhiste (et donc, pas que la mienne),
tout ce qui est capable d'accomplir une fonction (skt.
artha-kriya; tib.
deun djé nupa) est synonyme de "chose", "produit", "impermanent", "cause", "effet" etc...

Or la vacuité est un phénomène incomposé (
asamskrita;
du ma djé), et donc
permanente, tout comme le nirvana, tout comme le nirvana naturel aussi, synonyme dans le Sutrayana indien de l'espace des phénomènes (
dharmadhatu;
tch'eu ying), l'ainsité (
tattva;
dékhonanyi), le
dharmata (
tch'eunyi) etc...
Il faut bien sûr tenir compte du contexte scriptural parce que selon la vue du Bouddhisme tantrique (surtout
Anuttarayoga-tantra), il ne s'agit plus seulement de la claire lumière objet (ontologique), mais de la claire lumière sujet (un niveau d'esprit primordial), qui dans ce cas est impermanente car est une affirmation (et non plus la négation non-affirmative, forcément permanente, du corpus des Sutras).
<<metta>> Conclusion: la vacuité est une absence exclusive, elle est permanente et ne peut à ce titre opérer aucune fonction. Sinon elle changerait... comment le pourrait-elle ? en devenant plus petite, plus grande, plus rouge, plus vide, plus rapide, etc. qu'à l'instant immédiatement précédent ?
L'esprit par contre (plus ou moins subtil, selon les stades de réalisation) est bien un phénomène impermanent et capable d'opérer la fonction de reconnaître la réalité telle qu'elle est.
Ce que j'ai découvert peut se résumer par la formule :
Vérité Conventionnelle + Vacuité = Fonction.
Si tu considères les choses sous l'angle de leur fonction en ce monde, tu vois les vérité conventionnelle et ultime simultanément.
Ca ne fonctionne pas (joke !

) puisque le Bouddha (Cf.
Dhammapada) expose clairement les Sceaux du Buddhadharma, dont le premier énoncé ainsi:
Tout
composé est impermanent (sarva
samskara anitya).
Il existe donc des phénomènes conventionnels incomposés et donc permanents:
ils n'opèrent aucune fonction. Même une généralité (
samanya) peut être permanente et n'opérer aucune fonction.
Bref,
vérité conventionnelle impermanente + vacuité = fonction est la vue bouddhiste.
(le + vacuité étant un pléonasme pour qui a réalisé l'élimination du voile cognitif, selon le Prasangika-madhyamaka).
Un Bouddhiste comprenant la vacuité, ne devrait jamais se poser la question :
Est-ce que telle chose existe ou bien est-ce que telle autre existe réellement.
*
Toute personne ayant appréhendé directement la vacuité ne se pose plus la question de savoir si telle chose
existe réellement (sauf dans un contexte didactique comme le fait Arya Nagarjuna). Tout pratiquant sur la voie de la méditation analytique pourrait se poser cette question, souvent, et selon des angles multiples.

Et surtout: toute personne, bouddhiste ou non, ayant réalisé la vacuité, directement ou non, ne peut faire autrement que de se poser si telle ou telle convention existe. Sinon toute convention serait une vérité, ou bien toute convention serait fausse.
Pour les prasangikas comme Nagarjuna ou Chandrakirti, toute vérité est fausse au regard de la vérité ultime (la vacuité) qui est dite "ultime" car non trompeuse.
Par contre, au sein des conventions mondaines, il y a bien des distinctions à faire: sinon il s'ensuivrait par voie de conséquence qu'un daltonien qui passe au rouge aurait tout autant raison qu'un non daltonien qui passe au vert. Il n'y aurait plus de problème d'approvisionnement en eau dans le monde puisqu'il suffirait de trouver (ou fabriquer) des mirages pour aller s'abreuver...
Mais il ne devrait se poser la question Est-ce que telle chose fonctionne ? Est-ce que telle chose est utile ?
En effet, et la réponse bouddhiste est au début de ce post. Pour complément: ce n'est pas parce que quelque chose est utile que c'est un outil.
La vacuité n'est utile pour une conscience que si elle est appréhendée (ou mieux: réalisée) par ladite conscience. Or ce n'est autre que la fonction de l'esprit de [re-]connaître. S'il ne le fait pas, ni lui ni la vacuité ne sont sotériologiquement utiles (d'ailleurs l'esprit est toujours utile, que ce soit en vain ou bien constructif).
