Voir le Dharma au quotidien

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Dharmadhatu
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ardjopa a écrit :
Est-ce qu'on peut dire que réaliser le non-soi des phénomènes, c'est bien, mais que réaliser le non-soi de la personne c'est mieux ?
Chercher à connaitre le monde entier, avant de se connaitre "soi-même", c'est comme aller partout dans le monde
demander où est passé notre pendentif que l'on croit avoir perdu, mais qu'on l'a en fait toujours gardé autour du cou,
et qu'il ne nous a jamais quitté Butterfly_tenryu
:D Ceci n'est valable que si on envisage une différence de subtilité quant aux deux types de non soi. Ce qui signifie qu'on n'a pas touché la cible et qu'on s'endort tranquillement en ayant perçu l'absence d'une chaussette sous le lit alors qu'on avait peur d'une araignée sous le lit.

FleurDeLotus
apratītya samutpanno dharmaḥ kaścin na vidyate /
yasmāt tasmād aśūnyo hi dharmaḥ kaścin na vidyate

Puisqu'il n'est rien qui ne soit dépendant,
Il n'est rien qui ne soit vide.

Ārya Nāgārjuna (Madhyamakaśhāstra; XXIV, 19).
klesha

Dans un premier temps, il est plus facile de comprendre la vacuité des phénomènes extérieurs mais si on en reste là, ce n'est, somme toute, qu'une compréhension.Même si c'est bien ça ne suffit pas. Il faut la vivre, la réaliser. Quand on réalise la vacuité du "je", celle des phénomènes extérieurs ne pose, de facto, plus aucune difficulté. La vacuité (je parle de l'expérience pas de la spéculation intellectuelle à son sujet) présente donc un double aspect. Le premier est extérieur et la plupart des gens imagine que c'est le seul. Le second est, plutôt qu'intérieur (même si ça sonne bien par rapport à "extérieur"), comme un retournement. Quand on le réalise (pas seulement quand on imagine l'avoir compris, ce qui est insuffisant), quand on en a l'expérience, la vacuité "extérieure" devient évidente puisqu'il n'y a plus de "je" pour saisir quoi que ce soit. Ça décoiffe.
Chaque véhicule a ses propres méthodes. La visualisation en est une.
L'étude et la pratique doivent aller de paire sinon, les compréhensions, qui ne sont que des idées, s'estompent, passent et s'en vont un jour pour être remplacées par une autre, plus "sexy".
FA

Le premier est extérieur et la plupart des gens imagine que c'est le seul. Le second est, plutôt qu'intérieur (même si ça sonne bien par rapport à "extérieur"), comme un retournement. Quand on le réalise (pas seulement quand on imagine l'avoir compris, ce qui est insuffisant), quand on en a l'expérience, la vacuité "extérieure" devient évidente puisqu'il n'y a plus de "je" pour saisir quoi que ce soit. Ça décoiffe.
Pour ce retournement, on peut évoquer l'image du rêveur, qui se rendant compte qu'il rêve, et qu'il ne diffère pas du contenu du rêve lui-même, s'éveille.

jap_8
Fa
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Dharmadhatu
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klesha a écrit :Dans un premier temps, il est plus facile de comprendre la vacuité des phénomènes extérieurs mais si on en reste là, ce n'est, somme toute, qu'une compréhension.Même si c'est bien ça ne suffit pas. Il faut la vivre, la réaliser. Quand on réalise la vacuité du "je", celle des phénomènes extérieurs ne pose, de facto, plus aucune difficulté. La vacuité (je parle de l'expérience pas de la spéculation intellectuelle à son sujet) présente donc un double aspect. Le premier est extérieur et la plupart des gens imagine que c'est le seul. Le second est, plutôt qu'intérieur (même si ça sonne bien par rapport à "extérieur"), comme un retournement. Quand on le réalise (pas seulement quand on imagine l'avoir compris, ce qui est insuffisant), quand on en a l'expérience, la vacuité "extérieure" devient évidente puisqu'il n'y a plus de "je" pour saisir quoi que ce soit. Ça décoiffe.
Chaque véhicule a ses propres méthodes. La visualisation en est une.
L'étude et la pratique doivent aller de paire sinon, les compréhensions, qui ne sont que des idées, s'estompent, passent et s'en vont un jour pour être remplacées par une autre, plus "sexy".
jap_8 Il faut aussi envisager deux types de vacuité, dont l'une est très facile à réaliser. Mais la vacuité de soi est très difficile à percevoir directement.

FleurDeLotus
apratītya samutpanno dharmaḥ kaścin na vidyate /
yasmāt tasmād aśūnyo hi dharmaḥ kaścin na vidyate

Puisqu'il n'est rien qui ne soit dépendant,
Il n'est rien qui ne soit vide.

Ārya Nāgārjuna (Madhyamakaśhāstra; XXIV, 19).
ted

Dans theravada, il me semble que la réalisation de la vacuité de soi est une expérience qu'ils appellent " la dissolution ".

Puisque le sujet du fil est le Dharma au quotidien, j'ai pas l'impression qu'il s'agit du genre d'expérience qu'on fait quotidiennement. :D Il est dit qu'une peur terrible, une sorte de panique absolue, s'empare du pratiquant à ce moment là. :shock: :)

brrrrrrr !!! :)
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Flocon
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Je crois en effet qu'on s'éloigne du dharma au quotidien tel que le vit le pratiquant lambda, sans compter qu'on tombe un peu trop, peut-être, dans la théorie du bouddhisme.

Je reviens sur cette histoire de sensations, perceptions, volitions, pensées : agréables ou désagréables, c'est pareil. Pour rester sur mon histoire de pain, je m'étais trompée en croyant l'avoir raté, et à la sortie du four, il était finalement magnifique :shock: . Gonflé, doré, superbe. :cool: La cuisson avait gommé les imperfections du tressage... D'où bien sûr, des sensations, perceptions et compagnie très agréables. Ouf. :lol:
Mais le problème reste le même.

Dans le Chan tel que je le pratique, on essaie à chaque fois non seulement d'observer avec attention, mais d'"éclairer de l'intérieur" tout ce qui se produit dans l'esprit, car on estime que la seule observation n'est pas suffisante. Je n'ai pas en tête la formule chinoise exacte et je ne pense pas que la donner serait très utile dans ce fil, puisqu'on n'est pas dans l'érudition : on la traduit parfois aussi par "briller à travers" les phénomènes, c'est peut-être mieux. En tout cas c'est une pratique qu'on développe en méditation, puis qu'on applique hors méditation et qui est très efficace. Elle est un peu difficile à décrire, mais je pense qu'elle s'apparent à vipassana dans le theravada.
Est-ce que ça vous évoque quelque chose?
Et concrètement, que faites-vous par exemple, au fil de la journée, quand des sensations s'élèvent?
Quand on sonde les choses, les connaissances s'approfondissent.
Les connaissances s'approfondissant, les désirs se purifient.
Les désirs une fois purifiés, le cœur se rectifie.
Le cœur étant rectifié, on peut réformer sa personne.

Kong Tseu
Katly

Bonjour Flocon,

Hormis mes "exploits" :oops: concernant la peur, la panique, pour l'instant je n'ai pas d'expériences récentes à décrire sur ce qui concerne précisément ta question ?... Bien que je connaisse l'impermanence de l'humeur, le mécontentement, entre autres comme durant ma séance de Qi gong ce matin ( sur vidéo ). Lorsque je souhaite être souple, effectuer un mouvement fluide et qui ne vient vraiment que si je suis attentive, présente, à mon souffle et en laissant être. Cela après plusieurs répétition de la même pièce de mouvement. Donc, patience, persévérance,indulgence... et ne pas se fier à une première impression négative sur soi-même et ce que l'on fait. Je pense que lorsqu'on fait cela pour soi-même, on le fait pour les autres, en cas de colère par exemple contre quelqu'un qui veut bien faire.
Parfois aussi, je ne me suis pas réveillée assez tôt pour méditer longtemps, je suis mécontente, très contrariée et je me dis qu'il y en a pour la journée.Si ça me déprime un peu, je vais jusqu'à me dire que je n'ai pas vécu et que tout le reste est insignifiant et dérisoire. Alors qu'en fait non, pas du tout. Je n'ai médité que quinze minutes mais profondément. Et au cours de la journée, dans l'activité quotidienne, je peux vivre aussi une méditation profonde. Au final, j'ai médité bien plus de quinze minutes et au-delà de la demi-heure prévue. Et je me sens encouragée pour méditer une heure bientôt.

Aussi le fait que l'on puisse avoir la meilleure intention du monde et que cela donne un résultat d'apparence médiocre et qu'ensuite, cette chose peu satisfaisante ( comme un pain ) sous l'action et l'effet d'un autre phénomène ( la chaleur du four ) cela se révèle autrement, réussie et belle. Un bon et beau pain.
Lorsqu'on fait un pain, il y a l'intention et les sentiments durant l'action de pétrir la pâte. Mais pas seulement, il y aurait pu y avoir une panne de gaz ou d'électricité... cela aurait-il soulevé plus de colère ? de dévalorisation ?
Mais non, au final l'intention de réaliser un bon pain a été réalisé. :D love_3
Ton expérience me rappelle beaucoup, mes cours de poterie...
Bref, en général, je m'efforce de voir ce qui est. De ne pas me fier à une première impression ou des apparences négatives et d'accepter que c'est mon esprit qui fige ou forme les choses ainsi.
Cela peut-être très important pour se pardonner ou pardonner aux autres.
klesha

Ah ah Flocon, tu tombes dans le travers que tu viens de dénoncer en nous parlant Chan ! youpi_333
Dans dharma au quotidien, il y a "quotidien" et "dharma". En soi, le titre est éloquent, non ? Il montre bien (merci Dharmadhatu) le cloisonnement que nous vivons entre l'étude du dharma et la "vraie" vie. Et toute la question est là : comment intégrer notre pratique. C'est certainement le plus difficile. C'est très difficile, bien plus que la méditation. Comment faire pour qu'il n'y ait pas ce hiatus ? C'est pour cela, Flocon, que je parle du rappel, de la vacuité, etc. Bien évidemment, ça paraît loin des anecdotes plaisantes du quotidien mais ça ne l'est pas, c'est le cœur de la question ( à mon avis du moins).
Pour parler "quotidien", cela fait des années que je médite, tous les jours au minimum une heure par jour. Cela m'a apporté énormément mais parfois... au volant de ma voiture (chacun sait que la voiture est l'excroissance de l'homme, quasiment un symbole phallique !), il m'arrive d'avoir une réaction vive, voire très vive et condamnable. "Quelqu'un d'autre" a pris ma place... Et le pire, c'est que cet "autre" est totalement insaisissable parce que vide. Mais je ne m'en suis pas souvenu et je ressens de l'aversion pour cette autre qui n'existe pas, c'est un comble. Il n'y a pas de pratiquant lambda parce que ça voudrait dire qu'on mesure le pratiquant à l'aune de sa compréhension purement intellectuelle. La sagesse, que l'on ne peut pas accumuler intellectuellement, est au-delà. Et pourtant, elle n'est pas étrangère à la patience, à l'humilité, etc...
Sur certains points, je rejoins ardjorpa (ne te réjouis pas trop vite ! ) dans sa vision du monde, de la vie et des hommes. Dans la méditation de Vajrasattva, la sagesse est représentée par sa parèdre, Nyema Karmo. Elle tient un crâne ouvert sur un cerveau et un couteau : elle tranche sem, l'esprit ordinaire.
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Flocon
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Merci de vos réponses.
Klesha, oui, je comprends ce que vous voulez dire. La formule "pratiquant lambda" était mal choisie (c'était moi-même que je désignais ainsi évidemment : mais ce n'est qu'une tournure un peu simplette).

Votre anecdote sur la conduite est intéressante : si j'ai bien saisi, lorsque vous agissez d'une façon qui vous paraît incompatible avec le Dharma (mettons, en insultant un autre conducteur), vous ressentez cet acte comme commis par "quelqu'un d'autre" que vous détestez tout en pensant qu'il n'existe pas? J'ai entendu parler de ce genre de dissociation comme d'un effet possible -et temporaire- de la méditation, mais je ne l'ai jamais vécue.
Ce serait une projection mentale du "faux soi", l'idée que vous vous faites du atta nié par le bouddhisme? Cela me fait penser à ce que Ted racontait dans un autre fil, qu'il avait ressenti la présence d'un "corps de souffrance" extérieur à lui-même (c'est un peu autre chose et en même temps, le processus me paraît comparable).
Quand on sonde les choses, les connaissances s'approfondissent.
Les connaissances s'approfondissant, les désirs se purifient.
Les désirs une fois purifiés, le cœur se rectifie.
Le cœur étant rectifié, on peut réformer sa personne.

Kong Tseu
klesha

D'abord, je n'insulte personne ! Mais, je ressens parfois le comportement d'un autre conducteur comme agressif et ce ressenti provoque en moi une sorte d'agacement, infondé. C'est une réaction-réflexe qui prouve par la même qu'elle est coproduite et conditionnée et qu'elle ne correspond pas à un soi quelconque. Donc, ça veut dire que par moments (trop longs et trop souvent, hélas), je "colle" à ces fabrications mentales, je suis elles qui n'ont aucune existence inhérente. Ça peut faire naître de l'aversion. C'est de moins en moins fréquent quand on se dit que c'est normal : dans le quotidien, à moins d'être complètement réalisé, nos actes sont coproduits et conditionnés. Nous sommes dans cette entité psychophysiologique à laquelle nous avons donné un nom et dans laquelle la sagesse n'apparaît pas spontanément. Il faut, d'une part, cultiver les paramitas et réduire petit à petit ces réactions-réflexes et, d'autre part, méditer car il y a un effet post-méditation, c'est vrai.
Pour le "corps de souffrance" de Ted, je ne sais pas. Je n'ai pas de connaissance de cette notion
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