Quel est l'intérêt de pardonner ?

ted

axiste a écrit :Pourquoi (pardonner) ou alors...pourquoi pas ?
http://www.vipassana.fr/Textes/JackKorn ... Pardon.htm
Franchement ! ça, je ne sais pas si je pourrais... :oops:
Avec des gamins de 14 ans, c'est sans doute possible, parce qu'on pardonne plus facilement à un enfant. :roll:
Mais j'imagine la même histoire avec des adultes ! :shock: La femme qui loge et qui soigne l'assassin de son mari... :mrgreen: Ca risquerait de jaser. :D

En tout cas, c'est un très beau texte. Pas trop long en plus. :D
Lupka

Compassion et pardon - par Jack Kornfield

Extrait de CD de Jack Kornfield sur le pardon. Traduction de Patricia Genoud.



Quelle que soit l'intensité de certaines circonstances, une transformation du cœur est possible.
Une fois, dans le train en allant de Washington à Philadelphia, je me suis trouvé assis à côté d'un homme afro-américain qui avait travaillé pour le département d'état en Inde puis avait quitté son poste pour s'occuper d'un programme de réinsertion pour de jeunes délinquants du District de Columbia.

La plupart des jeunes avec lesquels il avait à faire étaient des membres de gang qui avaient commis des meurtres. Dans son programme il y avait un jeune garçon de 14 ans qui avait tiré sur un jeune innocent et l'avait tué pour faire ses preuves face à son gang.

Au procès, la mère de la victime était assise impassiblement silencieuse jusqu'à la fin, alors que le jeune fut déclaré coupable. Après que le verdict fut prononcé, elle se leva lentement, fixa le jeune du regard et lui dit : " Je vais te tuer ".

Le jeune fut emmené dans un centre pour délinquants et y resta plusieurs années.
Après six mois, la mère de l'enfant tué alla rendre visite au détenu. Il avait vécu dans la rue avant le meurtre, et elle était la seule visite qu'il ait eu. Pendant un moment ils échangèrent quelques mots, et avant de partir elle lui lissa quelques sous pour qu'il s'achète des cigarettes.

Ensuite elle vint le voir régulièrement et lui apporta de la nourriture, des petits cadeaux.
Presque à la fin de la sentence de ses 3 ans passés en prison, elle lui demanda qu'est ce qu'il avait l'intention de faire à sa sortie. Il était extrêmement confus et très incertain, alors elle lui offrit du travail dans la société d'un ami qu'elle avait.

Ensuite elle lui demanda où il allait loger, et parce qu'il n'avait de famille vers qui aller, elle lui offrit l'usage temporaire d'une chambre vide dans sa maison.

Pendant 8 mois il vécut là, mangea la nourriture qui lui était offerte et travaillait à l'endroit qu'elle lui avait trouvé.

Un soir elle l'invita à venir discuter dans son salon, elle s'assit en face de lui et attendit, puis elle commença à parler. " Te souviens-tu, dans la salle d'audience, lorsque je t'ai dit que j'allais te tuer. " " Et comment ! Répondit-il. " " Et bien, je l'ai fait " et elle ajouta
" Je ne voulais pour rien au monde que ce garçon qui a tué mon fils demeure vivant sur cette terre. J'ai voulu qu'il meure. C'est pour cette raison que j'ai commencé à te rendre visite, que je t'ai trouvé du boulot et je t'ai accueilli chez moi. C'est ainsi que je me suis résolue à te changer. Et ce garçon là, il est mort, bien mort aujourd'hui. Donc maintenant que mon fils est mort et que le meurtrier est mort, j'aimerais te demander si tu serais d'accord de rester. J'ai une chambre et j'aimerai t'adopter si tu le veux bien. "

Et elle devint la mère du meurtrier de son fils, la mère qu'il n'avait jamais eu.







wow .... jap_8
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axiste
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Oui, ça fait réfléchir n'est-ce pas ?
Ce texte m'a marqué...j'avoue.
On se sent tout petit quelquefois, mais pourtant... love3
Cinq clefs pour la parole correcte :
- dire au bon moment, prononcer en vérité, de façon affectueuse, bénéfique et dans un esprit de bonne volonté."
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Flocon
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C'est une histoire assez frappante. Elle évoque certaines sociétés où un meurtrier doit prendre la place de la personne qu'il a tuée, dans sa famille et ailleurs. Mais je ne sais pas s'il s'agit vraiment d'un cas de pardon. :?:
Un sujet assez proche a récemment été traité au cinéma par Pedro Almodovar, sur le mode du thriller horrifique : quelqu'un a vu La piel que habito? On peut faire le rapprochement, en interprétant l'action de la mère de la victime comme une vengeance particulièrement raffinée, et non un pardon.
Quand on sonde les choses, les connaissances s'approfondissent.
Les connaissances s'approfondissant, les désirs se purifient.
Les désirs une fois purifiés, le cœur se rectifie.
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Kong Tseu
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yudo
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Si l'histoire est vraie, c'est un vrai pardon. Pardonner, c'est se défaire d'un bagage qui n'est pas le sien.
La responsabilité des élèves est d'empêcher le maître de se "prendre pour un maître".
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Flocon
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yudo a écrit :Pardonner, c'est se défaire d'un bagage qui n'est pas le sien
D'accord avec ça. Mais dans l'histoire, de quel "bagage qui n'est pas le sien" la femme se défait-elle?

J'ai l'impression, au contraire, qu'elle donne/impose au meurtrier de son fils tout ce qu'elle voulait pour ce dernier (nourriture, travail, statut de fils), sans pour autant se décharger elle-même de quoi que ce soit. On ne sait pas, en tout cas, si elle agit par amour ou par haine, et l'image qu'elle emploie elle-même le dit bien.

Cela dit, je ne souhaite pas polémiquer ni imposer un quelconque point de vue :oops: . Je trouve que c'est une histoire assez ambiguë mais cela n'engage que moi. Il me semble que le pardon bouddhiste ne suppose pas la transformation du coupable, comme ici où le meurtrier se retrouve changé par la femme en "fils de substitution", mais la transformation de la victime.

Pardonner, c'est travailler sur soi-même, et non sur celui qui nous a offensés. Je crois d'ailleurs que c'est pareil dans toutes les religions.
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Kong Tseu
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Longchen
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Un être humain me paraît trop complexe pour que suite à ce drame que cette mère a vécu ne subsiste strictement aucune
trace de haine (éventuellement refoulée), surtout en vivant sous le même toit que le meurtrier de son fils.
Elle dit que celui qui a tué son fils est mort parce qu’elle l’a changé ; en fait c’est faux, le meurtrier qui a tué son fils vit avec elle.
Je me demande comment une relation qui se construit sur cette base là va pouvoir évoluer (en partant du principe qu’il s’agisse d’une histoire vraie).
FleurDeLotus
L’instant présent 🙏
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Flocon
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Lupka, je ne comprends pas ce que tu veux dire. Tu te tais et tu quittes le fil parce que tu es choqué? :?:
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Kong Tseu
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axiste
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Oui, il est impossible de déceler des intentions qui ne sont pas écrites. La femme dit juste qu'elle voulait tuer le meurtrier, et c'est tout.

Alors il ne s'agit pas d'une mort physique mais d'une mort symbolique…et cette mort là on la vit tous les jours…
Est-ce une vengeance ?
Vouloir se défaire de sa souffrance …c'est peut être juste très humain…
Elle a trouvé une alternative en transformant sa souffrance, et c'est un vrai travail sur elle même: prendre la cause apparente de sa souffrance sous son toit, c'est accepter de la voir autrement…

Si elle avait tué physiquement le garçon, sa souffrance et celle des autres aurait été sans fin…une sorte de samsara…

Après, c'est vrai qu'on peut multiplier les regards à l'infini…
Ce texte nous dit l'impossible et nous le rend possible…
Est-ce une fiction ?
Je ne crois pas.
Mais on ne peut non plus en faire une généralité et en tirer des principes.

J'en resterai donc à mon premier regard: quand je l'ai lu, je ne me suis pas posée toutes ces questions…
J'ai vu ça: il y a juste deux êtres en souffrance qui ont trouvé un moyen de regarder leur souffrance autrement…pour la transformer…et ça forcément, ça interpelle…
Je ne sais pas si cette histoire est vraie...mais en tous les cas, elle parle bien de transformation intérieure.
Cinq clefs pour la parole correcte :
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