Florent a écrit :la simultanéité n'est pas forcément le niveau ultime de la réalité

Personnellement, je substitue le "pas forcément" par un "pas du tout".
et on pourrait se demander d'ailleurs si il y a un niveau ultime et/ou relatif de la réalité.
Nombre de Sutras exposent un niveau relatif et un niveau ultime de la réalité, comme le
Satyadvaya Sutra, le
Samdhinirmocana Sutra, etc...
Par exemple, le
Pitraputrasamagama Sutra dit:
Telles sont les deux réalités des connaisseurs du monde;
Connais-les par toi-même sans les entendre d'autrui.
Ce sont la réalité de surface et l'ultime;
Et il n'existe nulle troisième réalité.
De même, les prasangikas s'accordent sur ce point:
Sans s'appuyer sur le conventionnel, on ne peut comprendre l'ultime....
Nagarjuna
Les deux volets de la réalité sont la réalité conventionnelle et l'ultime.
Shantideva.
Il est de même possible de voir ces deux aspects de la réalité par l'examen personnel; nous constatons tous que nous agissons, parlons, pensons etc. Mais si nous examinons la véritable nature de ces actes et de leurs agents, nous accédons à la vérité ultime et par là-même pouvons désigner le premier constat comme relevant de la vérité conventionnelle.
Et pour revenir à ta position tu n'es en effet pas nihiliste toujours, mais parfois tu l'es et d'autres fois non,
Il est normal de le penser lorsque les deux niveaux de réalité ne sont pas clairement dessinés.
c'est la toute la problématique des sutras de la prajnaparamita qui affirme tout et son contraire, c'est surement très utile à un certain niveau ( mais pas de réalité), mais en même temps on comprend rapidement que ces sutras ne sont pas des enseignements définitif, mais bien provisoire.
Je ne peux qu'inviter tout lecteur intéressé par cette question à étudier certains textes comme l'
Akshayamati-nirdesha Sutra:
Quels sont les Sutras de sens définitif ? Quels sont les Sutras de sens interprétable ? Les Sutras dont l'enseignement est destiné à l'entrée dans la voie sont dits de sens interprétable; les Sutras dont l'enseignement est destiné à l'entrée dans le fruit sont dits de sens définitif. Ceux qui enseignent l'établissement du relatif sont dits de sens interprétable; ceux qui enseignent l'établissement de l'ultime sont dits de sens définitif.
Or le
Hridaya Sutra et les autres
Prajñaparamita Sutras exposent bien l'ultime; ils sont donc définitifs.
Selon le raisonnement il est tout aussi possible de déterminer cela, par exemple, Djé Tsongkhapa a posé d'innombrables arguments dans le
Lekshé Nyingpo afin de démontrer que les Sutras du 2ème Tour de Roue (dont font partie les
Prajñaparamitas) sont bien définitifs.
Chakyam a écrit :Définition de l'Ainséité : Le Bouddha a enseigné que tous les êtres sont des bouddhas, recouverts d’une obscurité momentanée alors que la véritable identité de tous les êtres vivants, pas seulement des êtres humains, est un état d’ainseité (suchness) inconditionnée. C’est la nature originelle telle qu’elle est, pure et parfaite.

Ceci est l'ainsité selon le 3ème Tour de roue: la nature de Bouddha, qui est une affirmation, mais celle dont je parle est l'ainsité du 2ème Tour de roue, la vacuité en tant que négation non-affirmative. Et c'était aussi celle dont tu voulais parler en citant le
Hridaya Sutra puisque celui-ci n'évoque que cette négation (pas de... pas de... pas de...)
Le chapitre sur la telléité (ainsité) de la
Prajñaparamita en 8000 versets dit:
Ah ! Vainqueur transcendant, destinée à la non-production, cette doctrine est sans lieu. Ah ! Vainqueur transcendant, destinée à l'absence de toute naissance, cette doctrine est sans production.

Donc: si l'on parle au niveau ultime, pas de simultanéité;
si l'on parle au niveau conventionnel, on peut parler de simultanéité de deux phénomènes qui n'entretiennent pas de relation causale, mais on ne peut parler de simultanéité de la cause et de son effet, sinon celui-ci apparaît sans cause.
Par ailleurs, tu cites Florent. En attendant qu'il réponde, peut être, à tes demandes, je précise que ta dernière question « soit on accepte, soit on nie.... » pose une alternative tronquée. Ce n'est pas l'un ou l'autre ou l'autre et l'un. Pourquoi ?
Ce qui est, c'est la manifestation phénoménale en même temps que l'absence de Nature propre et il devient inutile de se réfugier derrière un hypothétique niveau de réalité dans la mesure où la réalité est précisément non-duelle et vacuiste. C'est entretenir la confusion.
Je crois que la confusion est déjà dans tes propres mots cher Chakyam, la confusion des deux niveaux de vérité; tu dis
Ce n'est pas l'un ou l'autre ou l'autre et l'un et juste après tu parles de
manifestation phénoménale et d'
absence de Nature propre, or la manifestation phénoménale est une
affirmation des conventions, et l'absence de nature propre est une
négation, mais pas des conventions, de leur nature propre. Donc il n'y a pas de tiers inclus, puisque tu affirmes quelque chose et nies autre chose; ce n'est pas à la fois l'affirmation et la négation de la même chose.
Pendant la méditation, les 18 domaines sont toujours présents et manifestent leur absence de Nature propre. La Conscience - toujours conscience de quelque chose - réalise cette vacuité fondatrice non pas à l'issue d'un calcul mais au cours d'un approfondissement de ce qui est.
Ca dépend de quelle méditation on parle. Les sens peuvent être présents au cours de la pratique de shamatha, mais non manifestes, il s'agit d'une perception non certifiée, je le vérifie régulièrement lorsque je n'entends plus le bruit du vent si ma concentration est assez équilibrée.
Je pars mercredi prochain en Inde et j'aurais aimé avoir plus temps pour discuter avec vous de tout ça, mais ce débat ne peut se faire que lorsque nous ne mélangeons pas les deux niveaux de vérités.

Etes-vous ok sur le fait que ces deux niveaux de vérité sont distincts au niveau relatif et qu'ils ne sont pas duels au niveau ultime ?
Amitié
