Dharmakaya

shalistamba

En tout cas, tu as gagné une place dans ma liste des membres ignorés.
Déjà! Nous n'avons même pas parlé de l'amour inconditionnel. En tout cas, saches que malgré nos différents, je t'aime quand même. Je te souhaite de vivre dans la joie et la paix.
Dumè Antoni

Je souhaiterais relever un passage des entretiens de Lin Tsi (Rinzaï) à propos du Triple Corps et du lien que ce Triple Corps entretient avec l'homme.
Lin Tsi a écrit :Voulez-vous ne pas différer du Buddha-Patriarche ? Gardez-vous seulement de chercher en dehors de vous-même. Le rayonnement pur émanant de votre propre esprit à chacune de vos pensées, c'est là le Buddha en son Corps de Loi (Dharmakaya) qui est votre propre maison ; le rayonnement sans différenciation subjective qui émane de votre esprit à chacune de vos pensées, c'est là le Buddha en son Corps de Rétribution (Sambhogakaya) qui est votre propre maison ; le rayonnement sans différenciation objective qui émane de votre esprit à chacune de vos pensées, c'est là le Buddha en son Corps de Métamorphose (Nirmanakaya) qui est en votre propre maison. Ces Trois Corps ne sont autres que vous-mêmes qui êtes là, devant mes yeux, à écouter la Loi (Dharma). Mais c'est seulement en ne courant pas chercher à l'extérieur que vous aurez un tel pouvoir [...] Ces Trois Corps ne sont que des noms, des mots ; ce ne sont ainsi que des points d'appui dépendants. Les anciens l'ont dit : "Les Corps de Buddha ne diffèrent qu'en dépendance du sens qu'on leur attache ; les Terres de Buddha n'existent que du point de vue de la substance". Il est clair que les Corps et les Terres, qui sont en réalité des choses, n'existent comme tels qu'en tant que reflets.
Et dans le Sutra de l'Estrade (Huineng)
Huineng a écrit :Pour voir en vous-mêmes le Buddha en ses Trois Corps, dites : "Je prends refuge dans le Corps de Loi (Dharmakaya) qui est en mon propre corps matériel (rupâ kaya) ; je prends refuge dans le Corps de Rétribution (Sambhogakaya), qui est en mon propre corps matériel ; je prends refuge dans les milliards de Corps de Transformation (Nirmanakaya) qui sont dans mon propre corps matériel.
Dans ces deux passages relevés (à propos du Triple Corps), il est clair que Lin Tsi (Rinzaï) s'inspire de Huineng (ce qui est normal). La nature de Bouddha doit donc être recherchée dans son propre corps matériel (et non ailleurs). C'est pourquoi l'on dit que chacun possède son propre Dharmakaya (mais pas seulement, puisque c'est du Triple Corps qu'il est question). Supposer l'existence d'une nature de Bouddha qui existerait en dehors de son propre corps matériel est donc la plus grosse illusion et erreur que l'on puisse commettre. Supposer la nature de Bouddha (ou le Dharmakaya) indépendante du corps matériel, indépendante de sa propre existence individuelle est donc une vue erronée. Certains pensent que la nature de Bouddha subsisterait quand tout a disparu ; c'est là la confondre avec un Dieu des religions éternalistes. La nature de Bouddha, c'est son propre corps, et donc son propre karma. Si le karma est mauvais, pas de réalisation de la nature de Bouddha, donc pas de nature de Bouddha. Si le karma est favorable, alors il y a réalisation et donc nature de Bouddha.

Dans les entretiens de Huineng, celui-ci déclare : "Le Buddha en ses Trois Corps est dans votre propre maison (c'est à dire en vous-même) ; tout le monde les possède. Mais, votre esprit étant égaré, vous ne voyez pas la vraie nature de Buddha qui est en vous, et vous cherchez au dehors le Tathâgata en ses Trois Corps;"

Ce qui précède signifie que la réalisation de la nature de Bouddha nous échappe quand nous la cherchons en dehors de nous-mêmes. Mais puisqu'elle n'existe pas en dehors de nous-mêmes, alors cela veut dire que nous n'avons pas la nature de Bouddha tout simplement parce que nous ne la cherchons pas là où elle se trouve (c'est à dire en nous-même). Quand Joshu dit au moine que le chien n'a pas la nature de Bouddha (dans sa réponse "Mu"), il veut dire que le moine cherche la nature de Buddha en dehors de lui-même. Car, dans ce contexte, le chien est le chien et non le moine. Le chien ne cherche pas sa nature de Bouddha (du moins, on peut le supposer) ; seul le moine la cherche. Mais en supposant qu'elle se trouverait dans le chien (comme dans tous les êtres sensibles), il commet l'erreur de penser qu'il existerait une nature de Bouddha identique à la sienne, mais dans le corps du chien. Ceci revient à supposer l'existence d'une nature de Buddha en dehors de son propre corps matériel, ce qui est une erreur.

Il faut comprendre aussi que le "Mu" de Joshu ne contredit pas le "U" (c'est à dire le oui) dans une autre version du kôan, en ce que l'on peut en effet affirmer que le chien n'est pas exempt de la nature de Bouddha, puisque tous les êtres sensibles la possèdent. Mais le chien (du moins on peut le supposer) n'en a rien à cirer de sa nature de Bouddha. C'est pourquoi, le chien n'a aucun intérêt dans le kôan. Ce qui compte, c'est de savoir si nous, nous avons notre nature de Bouddha. Si nous ne l'avons pas, ce n'est pas parce qu'elle n'est pas en nous, mais parce que nous la cherchons hors de nous-mêmes, c'est à dire là où elle n'est pas.
Dernière modification par Dumè Antoni le 19 février 2016, 14:07, modifié 1 fois.
shalistamba

je prends refuge dans les milliards de Corps de Transformation (Nirmanakaya) qui sont dans mon propre corps matériel.
Qu'il y ait des " milliards de Corps de Transformation (Nirmanakaya)" n'implique nullement qu'ils soient différents. Il faudrait alors dire en quoi ils diffèrent.
il commet l'erreur de penser qu'il existerait une nature de Bouddha identique à la sienne, mais dans corps du chien. Ceci revient à supposer l'existence d'une nature de Buddha en dehors de son propre corps matériel, ce qui est une erreur.
Que j'ai la même nature de bouddha que le chien n'implique nullement que je la cherche en dehors de moi. Il me suffit de constater qu'elle est en moi mais aussi en l'autre.
Dumè Antoni

Pour finir (provisoirement) ce que j'exprimais plus haut, je dirais que la nature de Bouddha est intimement liée au karma de chacun, ce qui veut dire que réaliser sa vraie nature n'est qu'une question de volonté, de confiance en soi, et non d'une quelconque transmission de flamme. Il suffit de lire l'histoire de Yamanashi pour s'en rendre compte. On pense que si nous n'y parvenons pas, c'est à cause de notre karma comme si celui-ci était déterminant (une sorte de destin, en somme, contre lequel nous ne pourrions rien). Nous naissons certes avec un karma (nous ne serions pas nés sinon), et donc avec un handicap plus ou moins lourd, mais cela ne signifie pas que nous sommes privés d'éveil à cause de notre mauvais karma. Notre karma est mauvais tout le temps que nous le considérons comme tel. Lin Tsi (Rinzaï) insistait beaucoup sur la confiance en soi, non pas comme une sorte de méthode Coué, mais comme la compréhension que notre nature de Bouddha commence et se termine avec nous, dans notre corps ici et maintenant et pas ailleurs.
Lin Tsi a écrit :Adeptes, voulez-vous voir les choses conformément à la Loi ? Gardez-vous seulement de vous laisser égarer par les gens. Tout ce que vous rencontrez en dehors de vous-mêmes, tuez-le. Si vous rencontrez le Buddha, tuez le Buddha ! Si vous rencontrez un patriarche, tuez le patriarche ! Si vous rencontrez un Arhat, tuez l'Arhat ! Si vous rencontrez vos pères et vos mères, tuez vos pères et vos mères ! Si vous rencontrez vos proches, tuez vos proches ! C'est là le moyen de vous délivrer, et d'échapper à l'esclavage des choses ; c'est là l'évasion, c'est là l'indépendance !
Serge Zaludkowski

Ouahhh, quel fil ... si j'étais pas si faignant je lirai tout. Demain peut être ...

Puissent tous les êtres trouver le bonheur et le chemin qui y mène ...
FA

En somme situer la nature de Bouddha en dehors de soi-même, équivaut à la considérer comme un objet, et à entretenir ainsi une forme de dualité qui nous en éloigne.
Tout ce que vous rencontrez en dehors de vous-mêmes, tuez-le. Si vous rencontrez le Buddha, tuez le Buddha ! Si vous rencontrez un patriarche, tuez le patriarche ! Si vous rencontrez un Arhat, tuez l'Arhat ! Si vous rencontrez vos pères et vos mères, tuez vos pères et vos mères ! Si vous rencontrez vos proches, tuez vos proches ! C'est là le moyen de vous délivrer, et d'échapper à l'esclavage des choses ; c'est là l'évasion, c'est là l'indépendance !
Tuer Bouddha, pères et mères en tant qu'objets, doté d'une nature propre.
Ainsi il n'y a plus d'objet,
Tout est sujet, Rien que reflet au sein de mon propre esprit, et on est alors au centre de soi-même.
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jules
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Tout est un, faut juste faire sauter les cloisons.
Dumè Antoni

Fa a écrit :En somme situer la nature de Bouddha en dehors de soi-même, équivaut à la considérer comme un objet, et à entretenir ainsi une forme de dualité qui nous en éloigne.
C'est même plus vicieux que ça, à mon avis. C'est en faire une sorte de "tout", à la fois extérieur et intérieur à soi même. C'est, en d'autres termes, en faire une sorte de Dieu, et l'on comprend bien que le Théravada ne puisse pas cautionner la notion de nature de Bouddha — du moins quand la nature de Bouddha est comprise sous cette forme. Cela étant, il est difficile, pour un Occidental en particulier mais aussi un Oriental baigné dans les religions monothéistes, de faire abstraction de la notion de "Soi" absolu, au sens où l'entendent les éternalistes. Du reste, il est fréquent de lire des expressions comme "Vérité relative" et "Vérité absolue" et d'associer la dernière à la nature de Bouddha — quelquefois simplement désignée sous le terme d'"Absolu". C'est une erreur grossière qui prend sa source dans les mauvaises traductions de textes bouddhistes par certains lettrés ou intellectuels occidentaux ou non, qui se sont servi de leurs propres repères culturels ou cultuels (généralement éternalistes) pour les reproduire et les coller de façon inconsidérée sur la nature de Bouddha. Certains s'imaginent que le Bouddhisme est une sorte de "nouveau testament" de l'Hindouisme. Il suffit de lire "Hindouisme et Bouddhisme" d'Ananda k. Coomaraswamy pour s'en rendre compte. Cette erreur est régulièrement partagée, y compris par certains pratiquants bouddhistes (mahayanistes) de longue date, voire des maîtres réputés, ce qui me paraît inquiétant.
Ainsi il n'y a plus d'objet,
Tout est sujet, Rien que reflet au sein de mon propre esprit, et on est alors au centre de soi-même.
Non, Fa. La fin de la dualité sujet/objet ne consiste pas à restaurer, en quelque sorte, le sujet et d'éliminer l'objet. Et par ailleurs "être au centre de soi-même" est une phrase ambiguë qui peut être comprise comme une forme d'éternalisme (qui fait que le soi résiste à l'expérience de la non dualité). Fais gaffe à la façon dont tu dis les choses, car je suis désolé, une nouvelle fois, de considérer tes propos comme du new age.

Je te suggère d'étudier le koân : "Toutes choses retournent à l'Un ; à quoi l'Un retourne-t-il ?"
Jules a écrit :Tout est un, faut juste faire sauter les cloisons.
Même remarque qu'à Fa, Jules. Cette expression est new age et erronée.
shalistamba

Je n'ai pas la même traduction
Lin-tsi déclara :

« Adeptes, voulez-vous voir les choses conformément à la Loi ? Gardez-vous seulement de vous laisser égarer par les gens. Tout ce que vous rencontrez, au-dehors et (même) au-dedans de vous-mêmes, tuez-le.
Ce qu'il faut tuer c'est l'illusion, notamment celle de croire que l'on a réalisé l'éveil une fois pour toute. Pourquoi A. D. a-t-il supprimé "au-dedans de vous-mêmes" à votre avis?
shalistamba

Question subsidiaire:

N'est-ce-pas le rôle du sangha de dégriser les gens qui planent à cent-mille?
Certes je suis, d'une certaine façon, un troll, mais au moins je le sais, je ne me fais pas d'illusion là-dessus.
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