Je pense qu'on vit une époque de grande confusion en ce qui concerne les enseignements du Bouddhisme, si on cherche à dire comme le font certains, que tel courant Bouddhiste est meilleurs qu'un autre.
C'est méconnaitre le fait, que les Upayas du Bouddhisme ont apporté leur remèdes à des préoccupations spécifiques propres à des époques spécifiques. Le risque est grand aujourd'hui, où par le biais d'internet, on accède en trois clic de souris aux doctrines de tous les courants Bouddhistes passés, de faire son marché et de ne piocher dans le corpus Bouddhiste que ce qui nous intéresse, et donc ce n'est pas le chemin de Bouddha que nous trouvons, mais le reflet de notre propre ego toujours en quête de confort intellectuel.
Le Zen de SenXiu n'est pas moins honorable que celui de Huineng, et penser que le message de Huineng est plus vrai que celui de SenXiu, c'est tomber dans le piège, de ce pourquoi l'enseignement du Mahayana a émergé. C'est s'accrocher aux doctrines, et aux enseignements et revient à porter sur son dos le radeau qui nous a fait traverser les eaux (ou pas ).
La gatha de Huineng, n'est pas plus ultime que celle de SenXiu, car comme l'a dit Huineng lui-même, il y a des êtres qui ont de grandes dispositions, et il y a des êtres ayant des dispositions plus modestes.
Dans le même registre les enseignements radicaux de Lin Tsi ne s'adressent pas à des débutants, mais à des moines, c'est à dire à des gens cultivés qui ont déjà tranché leurs principaux attachements à la vie mondaine mais qui s'empêtrent dans la jungle inextricable des doctrines et des concepts.
Les bodhisattva qui ont pleinement satisfait aux dix étapes de leur carrière sont comme des salariés. Ceux qui ont atteint l'éveil merveilleux sont des gaillards enchaînés. Les saints arhat et les bouddha-pour-soi sont de la merde, l'éveil et le nirvâna, des pieux à attacher les ânes. C'est seulement, parce que vous n'êtes pas parvenus à concevoir la vacuité de toutes les pratiques qu'il y a en vous cet obstacle. Un véritable religieux liquide ses actes au fur et à mesure. Il s'habille au hasard ; lorsqu'il veut marcher, il marche ; lorsqu'il veut s'asseoir il s'assied et ne songe pas à désirer ou à chercher le fruit du Bouddha.
Les trois Véhicules et le dodécuple enseignement sont de vieux papiers bons à se torcher. Le Bouddha est un corps de métamorphose fantasmagorique, les patriarches, de vieux bonzes. Vous ne pensez qu'à vous tourner vers l'extérieur et à chercher auprès d'autrui, quêtant des marchepieds : vous vous trompez ! Vous ne pensez qu'à chercher le Bouddha. Le Bouddha est un nom. Et celui-là même qui court, cherche, le connaissez-vous seulement ? Si vous rencontrez un Bouddha, tuez-le ! Si vous rencontrez un patriarche, tuez-le ! Si vous rencontrez un arhat, tuez-le ! Si vous rencontrez un père et une mère, tuez-les ! C'est là le moyen de vous délivrer, c'est là l'évasion, l'indépendance.
Il y a une phrase qui résume tout l'enseignement du Mahayana dans ce paragraphe :
C'est seulement, parce que vous n'êtes pas parvenus à concevoir la vacuité de toutes les pratiques qu'il y a en vous cet obstacle.( Lin Tsi )
L'eau chauffe progressivement mais entre en ébullition soudainement. Il n'y a pas de voie abrupte sans progression préalable ou sans disposition karmique favorable.
Voilà aussi pourquoi penser la "Nature de Bouddha" comme un invariant métaphysique tapis au fond de chaque être comme un fait "allant de soi" est à mon sens une erreur fondamentale.
FA