Comment lire un sutta

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cgigi2
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Inscription : 27 janvier 2006, 18:00

Au cours de nos lectures nous devons constamment garder à l’esprit quelques principes généraux ainsi qu’un certain nombre de questions permettant de situer le Sutta par rapport à notre condition présente, notre pratique et notre but.

Principes généraux
Il n’existe aucune traduction définitive d’un Sutta.
Aucun Sutta ne contient tous les enseignements.
Il est vain de chercher à savoir si un Sutta rapporte exactement les paroles prononcées par le Bouddha.
Si l’on est rebuté par un Sutta il faut le mettre de côté provisoirement et le relire plus tard, jusqu’à ce qu’il évoque une réponse et qu’il soit signifiant pour notre pratique.
Un bon Sutta est celui qui incite à en abandonner la lecture. Puisque le but de la lecture des Sutta est d’inspirer à développer une vue correcte, à vivre une vie de qualité et à méditer efficacement, si l’on ressent la nécessité de poser le livre et d’essayer immédiatement, le Sutta aura rempli son office.
Lire un Sutta à voix haute du début à la fin est une bonne pratique.
Essayer de remarquer les différents niveaux d’enseignement du Sutta, en contemplant la façon dont le Bouddha dans son exposé utilise lui-même et met en application ce qu’il prône.
Ne pas sauter les répétitions même si elles paraissent ennuyeuses et lourdes. Elles possèdent souvent de légères variations qu’il ne faut pas négliger.
Discuter du Sutta avec un ami sur la Voie ou un membre de la Communauté monastique.
Apprendre un minimum de pāli afin de creuser les différentes acceptions des mots, leur étymologie, pour être à même de comprendre et jauger les différentes traductions proposées par les auteurs.
Lire ce que les commentateurs, anciens ou modernes, ont écrit à propos du Sutta.
Offrir au Sutta le temps de la maturation. Un Sutta n’est pas une énigme à résoudre sur le champ, il peut se révéler sous ses différents aspects longtemps après sa lecture.
Les questions en filigrane
Les Sutta ne constituent pas un livre de recettes. Il faut bien comprendre qu’en lisant un Sutta on jette un œil (ou une oreille) sur ce que le Bouddha est en train d’enseigner à quelqu’un d’autre. Il a constamment adapté ses exposés aux besoins de l’auditoire concerné et les Textes font référence à des situations réelles ; il est par conséquent fondamental d’estimer si la situation des auditeurs du Sutta est similaire à la nôtre afin de juger si ce Sutta nous est nécessaire et d’appliquer au mieux les injonctions du Bouddha.

Les questions suivantes ne sont pas destinées à nous transformer en exégètes mais simplement à utiliser le Sutta comme une parole vivante adaptée à notre vie.

Quel est l’environnement du Sutta ? Le lieu, l’époque, la saison, les évènements préludant à l’exposé, etc. ?
Quelle est l’histoire et son importance dans l’exposé ?
Qui est à l’origine du Sutta ? Le Bouddha lui-même, une question posée, un débat ?
Qui enseigne et quel est son niveau de réalisation ? Le Bouddha, un disciple laïc, un bhikkhu, un arahanta ?
À qui les enseignements sont-ils destinés ? Un moine, une nonne, un disciple laïc, les suivants d’une autre tradition religieuse ? Quel est leur niveau de compréhension et de réalisation spirituelle ?
Quelle est la méthode de présentation des enseignements ? Un exposé formel, un ensemble de questions-réponses, la relation d’une histoire ancienne, un verset ? La méthode d’enseignement fait-elle partie intégrante du message enseigné ?
Quel est l’enseignement essentiel du Sutta ? Quelle est sa place dans l’édifice général, et comment s’insère-t-il dans notre propre pratique ?
Comment le Sutta se termine-t-il ? Les auditeurs sont-ils satisfaits, atteignent-ils un certain niveau de réalisation ?
Qu’est-ce que le Sutta peut nous offrir ? La question la plus importante demeurant celle-ci : quelle leçon pouvons-nous tirer de cet exposé ? Car c’est avant tout le cœur, et non l’intellect, qui doit être transformé.
D’après le site Internet : http://www.accesstoinsight.org

Avec metta
gigi
Ici et Maintenant pleine attention à la pleine conscience
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yudo
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Oui, il est, je pense, néfaste de s'imaginer qu'un sutta/sûtra rapporte précisément et sans l'ombre d'un doute la parole du Bouddha. Quand bien même cela serait le cas, si on ne tient pas compte du contexte etc., on va passer à côté de l'essentiel.

Le texte du docteur Mettanando Bikkhu sur le Parinirvana Sutta est très instructif à cet égard, en nous montrant, et cela de la part d'un moine théravadin, les strates qui ont pu être ajoutées aux textes en des temps parfois très anciens. (Voir: http://www.forum-bouddhiste.com/viewtopic.php?f=61&t=6835) Je rappelle aussi le témoignage d'une personne ayant accompagné les dernières années de Ueshiba Morihei qui s'amusait des légendes fantastiques qu'on avait créées sur ce dernier, en disant "si cela avait été le cas, je m'en serais aperçu".

De même des historiens ont remarqué que, pour des événements aussi proches de nous que la Seconde Guerre Mondiale, un certain nombres d'inexactitudes ont déjà eu le temps de se glisser dans des livres d'histoire très officiels et respectés.

Donc, ce n'est pas la lettre des suttas/sûtras qui doit nous intéresser (et il en va de même de ce que racontent les kôans), mais bien les leçons de vie que ces textes contiennent.

Je rappelle enfin que les Fables de Lafontaine, quoique fabuleuses (et sans l'ombre d'un doute) sont presque toujours plus parlantes que des histoires véridiques, parce qu'elles arrivent à donner un visage à des concepts.
La responsabilité des élèves est d'empêcher le maître de se "prendre pour un maître".
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tirru...
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Inscription : 07 juin 2004, 19:30

Et afin d'appréhender plus en profondeur le Bouddha humain, non divinisé mais surtout débarrassé de son aspect légendaire, je conseille vivement la lecture du livre "Le Bouddha historique" de Hans Wolfgang Schumann :
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Cette oeuvre de référence de H W Schumann retrace la vie du fondateur du bouddhisme débarrassé de ses aspects légendaires. Grâce à une profonde connaissance du canon bouddhique, de l’histoire indienne et une familiarité palpable avec le pays, l’auteur replace les grands événements de la vie du Bouddha dans leur déroulement chronologique et dans leur environnement social, politique et religieux. Il nous fait découvrir un homme à la fois mystique, rénovateur religieux, prédicateur, organisateur d’un ordre religieux, ainsi que ses contemporains, disciples moines ou laïcs, et l’atmosphère d’une époque qui a vu naître l’un des messages spirituels les plus puissants de l’histoire de l’humanité.
Un ouvrage qui se lit aisément, nous fait découvrir une personnalité extraordinaire et nous permet de mieux comprendre l’enseignement du bouddhisme originel, les raisons de son succès et de son développement futur. Une lecture indispensable pour tous ceux qui s’intéressent au bouddhisme.
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axiste
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Yudo a écrit :
Donc, ce n'est pas la lettre des suttas/sûtras qui doit nous intéresser (et il en va de même de ce que racontent les kôans), mais bien les leçons de vie que ces textes contiennent.
jap_8

Comme des miroirs multiples qui nous envoient leurs éclats en facettes.
On ne les lis jamais deux fois pareil car nous y sommes à chaque fois, et si différents toujours. Les mots ne bougent pas sous le regard, mais nous, certainement…

Merci Tirru pour la référence du livre
Cinq clefs pour la parole correcte :
- dire au bon moment, prononcer en vérité, de façon affectueuse, bénéfique et dans un esprit de bonne volonté."
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