Conseils de méditation

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Dharmadhatu
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Inscription : 02 juillet 2008, 18:07

"Pourquoi l’esprit est-il sujet à la confusion, à l’inattention, au laxisme, à la faiblesse et à la léthargie ? Avant tout parce que, d’une manière générale, nous sommes accoutumés à des états d’esprit malsains depuis des temps sans commencement. Mais le fait de vous installer dans ce sur quoi vous méditez peut aussi mener au relâchement et à la léthargie. Deuxièmement, le moment ou la saison où vous méditez peut induire la paresse et la léthargie. Troisièmement, si vous méditez avec des compagnons qui ont laissé leurs voeux tantriques se détériorer, cela peut faire obstacle à votre propre pratique et susciter laxisme et léthargie. Quatrièmement, votre régime alimentaire peut aussi donner naissance à ces problèmes. Cinquièmement, si votre posture est mauvaise durant les sessions de méditation et même entre les sessions, cela peut aussi induire relâchement et léthargie. Enfin, si vous méditez de manière incorrecte, la pratique elle-même peut induire le relâchement et la léthargie. Vous disposez donc de beaucoup d’excuses en ce qui concerne le relâchement et la léthargie.

Concernant l’environnement, pour éviter le relâchement et la léthargie, il est important de ne pas méditer dans un endroit trop encaissé, dans une vallée profonde ou dans tout autre lieu en contrebas ou enclavé. Il faudrait plutôt méditer dans un lieu ouvert et spacieux. Vous éviterez également les endroits qui ont été pollués de diverses manières, par exemple par des occupants qui auraient brisé leurs engagements tantriques. Si vous trouvez que votre environnement semble faire obstacle à votre pratique, purifiez-le. Vous pouvez y parvenir en y brûlant de l’encens rituel ou en appliquant n’importe quelle autre méthode de purification. Soyez vous-même attentif à ne pas le contaminer. Concernant l’époque, pour méditer, la période estivale peut s’avérer plutôt léthargique, à cause de la chaleur, et le printemps peut susciter un sentiment de paresse qui mène au relâchement et à la léthargie. Ces deux saisons ne sont donc pas les meilleures pour méditer. Au Tibet, on préférait généralement méditer à l’automne et en hiver.

Au quotidien, le meilleur moment pour méditer sera, d’une manière générale, tôt le matin ; ou le soir, qui vient en deuxième position. Il n’est pas tellement bon de méditer pendant la période chaude de la journée parce que cela entraîne relâchement et léthargie. Concernant la nourriture, il est important que vous observiez un régime approprié qui ne vous alourdit pas et ne vous rend ni létahrgique ni somnolent. Vous pouvez aussi bénir votre nourriture en récitant des prières ou au moins Om Mani Padmé Hum. Assurez-vous de toute façon que votre régime alimentaire est correct, et purifiez votre nourriture en la bénissant.

Quant à la posture, il n’est généralement pas recommandé de méditer allongé si vous êtes sujet au relâchement et à la léthargie, car vous étendre vous donnera envie de dormir. Asseyez-vous bien droit sans vous avachir et redressez-vous. Enfin, concernant la technique méditative elle-même, notamment pour les débutants, si vous essayez de rester simplement assis là à fixer l’espace sans objet de méditation, la technique elle-même - maladroitement appliquée - pourrait vous mener à la torpeur et à la divagation mentale, de sorte que vous perdriez votre temps. En procédant ainsi, vous ne réussirez qu’à tomber dans un déluge de bavardage intérieur ou à vous endormir pour de bon. Pour parer ce danger, il importe que vous soyez conscient de la manière correcte de pratiquer. Dans cette technique particulère, vous laissez réellement reposer votre conscience dans l’espace en face de vous ; mais votre conscience doit s’accompagner des trois qualités que sont l’attention, l’introspection et la vigilance. Si vous pratiquez ainsi, ces problèmes seront évités.

Le relâchement, la léthargie et la faiblesse constituent un enchaînement dégénératif. Il existe une autre suite du même ordre liée à l’agitation, la dispersion et la culpabilité. Lorsque l’agitation s’installe, il se peut que vous vous rappeliez toutes sortes de choses liées au passé. Les souvenirs envahissent l’esprit, vous vous y accrochez et ils vous emportent. Non seulement vous vous souvenez de choses qui se sont produites dans le passé, mais vous compliquez le problème en élaborant à leur sujet. Puis l’esprit saute au futur et se met à penser à toutes les choses qu’il va falloir faire, et enfin il passe aux choses qui se produisent à présent. L’esprit vagabonde ainsi en s’agitant au gré des trois temps. Quand cela se prolonge, cela peut vous mener à un sentiment d’inconfort au coeur et d’anxiété qui peut être associé à un déséquilibre mental. La dépression peut surgir, au point de la ressentir physiquement dans votre coeur. Tels sont les symptômes de l’agitation."

Gyatrul Rinpoché, La Clé du sens profond (commentaire d'un terma de Guru Padmasambhava).

FleurDeLotus
apratītya samutpanno dharmaḥ kaścin na vidyate /
yasmāt tasmād aśūnyo hi dharmaḥ kaścin na vidyate

Puisqu'il n'est rien qui ne soit dépendant,
Il n'est rien qui ne soit vide.

Ārya Nāgārjuna (Madhyamakaśhāstra; XXIV, 19).
Lupka

Si tu me permets je rebondis sur ce textes concernant la méditation:
Dhamma de la forêt a écrit :Traduit par Hervé Panchaud
Extrait d’un enseignement donné par Ajahn Chah en Angleterre, en 1977
.

Samadhi est capable d’apporter au méditant beaucoup de bienfaits, mais il peut aussi causer beaucoup de mal. On ne peut pas dire que samadhi n’apporte que l’un ou que l’autre. Pour quelqu’un qui manque de sagesse, samadhi est plein de périls ; mais pour celui qui est sage, samadhi peut apporter de grands bienfaits, il peut conduire à la vision pénétrante

Ce qui peut être dangereux pour le méditant, c’est l’absorption dans le samadhi (jhana), la concentration avec un calme profond et soutenu. Ce type de samadhi apporte une grande paix. Là où il y a paix, il y a la joie. Quand la joie est présente, apparaissent l’attachement et le désir de s’en saisir. Le méditant ne veut plus contempler autre chose, il se complaît dans cette sensation agréable.
Si nous pratiquons depuis longtemps, nous avons pu développer la capacité d’entrer très facilement dans ce type de samadhi. Aussitôt que nous commençons à nous concentrer sur l’objet de notre méditation, l’esprit entre dans un état de calme, et nous ne voulons plus ressortir de cette sensation de calme pour aller étudier autre chose. Nous restons piégés par ce sentiment de bonheur. C’est un danger pour quiconque pratique la méditation.

Nous devons utiliser « upacara samadhi » (la concentration d’approche) : là, nous entrons dans le calme et lorsque l’esprit a atteint un niveau de calme suffisant, nous « sortons » et observons les activités extérieures. (Par « activités extérieures », nous entendons toutes les impressions sensorielles, par opposition à « l’inactivité intérieure » de l’absorption – jhana – où l’esprit ne « sort » pas vers les impressions sensorielles extérieures).

Regarder les sensations extérieures avec un esprit apaisé peut nous ouvrir à la sagesse. C’est très difficile à expliquer et à comprendre, parce que cela ressemble presque à la pensée et à l’imagination ordinaires. On pourrait penser que si une pensée est présente, alors l’esprit n’est pas en paix, mais dans ce cas, la pensée prend place au sein même du calme. La contemplation est présente, mais elle ne perturbe pas la paix de l’esprit. Nous pouvons évoquer une pensée afin de la contempler. Nous apportons la pensée à la conscience afin de pouvoir l’étudier en profondeur ; ce n’est pas une idée qui arrive au hasard ou qui s’invite à notre esprit, c’est quelque chose qui émerge d’un esprit en paix. Cela s’appelle « la conscience dans le calme et le calme dans la conscience ». S’il s’agissait de pensées ordinaires, l’esprit ne resterait pas calme, il serait perturbé. Mais je ne suis pas en train de vous parler d’une pensée ordinaire, je parle d’une sensation qui émerge d’un esprit en paix. C’est ce que l’on appelle « contemplation ». La sagesse naît de là.

Il existe donc deux types de samadhi : l’un qui est bénéfique, et l’autre qui est mal orienté. Dans le mauvais samadhi, l’esprit entre dans un état de calme, mais il n’y a pas du tout de présence consciente. On peut rester assis pendant deux heures, ou même un jour entier, mais l’esprit ne sait pas où il se trouve, ni ce qui se passe. Il ne sait rien. Il y a le calme et rien d’autre. C’est comme un couteau bien aiguisé qui serait à votre disposition et dont vous ne vous serviriez pas. Ce type de calme est trompeur parce qu’il n’y a pas d’attention à soi-même. Le méditant peut penser qu’il a atteint le niveau ultime de la méditation, alors il ne se soucie plus de chercher autre chose. A ce niveau, samadhi peut être un ennemi. La sagesse ne peut survenir parce qu’il n’y a aucune conscience de ce qui est bon ou néfaste.

Avec le juste samadhi, peu importe le niveau de calme atteint, il y a toujours l’attention. Il y a la pleine conscience et la claire compréhension. C’est cette forme de samadhi qui peut conduire à la sagesse, on ne peut s’y égarer. Les pratiquants doivent bien comprendre cela. Nous ne pouvons pas nous passer de cette attention, elle doit être présente du début à la fin. Ce type de samadhi est sans danger.
Vous pouvez vous demander : « Où apparaît le bienfait ? Comment la sagesse naît-elle du samadhi ? » Lorsque le juste samadhi a été développé, la sagesse peut émerger à tout moment. Quand l’œil voit une forme, quand l’oreille entend un son, le nez sent une odeur, la langue goûte une saveur, le corps fait l’expérience d’un contact ou l’esprit ressent des impressions mentales – et quelle que soit la posture – l’esprit reste avec la pleine connaissance de la vraie nature de ces impressions sensorielles et il ne se laisse pas entraîner par elles.

Quand l’esprit est baigné par la sagesse, il ne vagabonde pas. En toute circonstance, nous sommes pleinement conscients de l’apparition de la joie et de l’insatisfaction (dukkha). Nous laissons aller ces deux sensations, nous ne nous y agrippons pas. On appelle cela « la pratique juste présente dans toutes les postures ». Ici, l’expression « toutes les postures » ne fait pas référence aux positions corporelles seulement, mais aussi à l’esprit qui est en permanence dans la pleine conscience et la claire compréhension de la vérité. C’est ce que nous nommons « la vision pénétrante », la connaissance de la vérité.

Il y a deux sortes de paix : l’une est grossière, l’autre plus subtile. La paix qui vient de samadhi est d’une forme grossière. Quand l’esprit est en paix, il y a de la joie. L’esprit prend alors cette joie pour de la paix. Mais la joie et l’insatisfaction naissent et se transforment. Nous sommes toujours dans le domaine du « samsara » (le cycle incessant de la naissance et de la mort), parce que nous continuons à nous accrocher à ces sensations. La joie n’est pas la paix, la paix n’est pas la joie.

L’autre forme de paix est celle qui vient de la sagesse. Ici, nous ne confondons pas la paix avec la joie ; nous avons conscience de l’esprit qui contemple et qui considère aussi bien la joie que l’insatisfaction comme des états de paix. La paix qui naît de la sagesse n’est pas la joie, mais elle est ce qui voit la vraie nature de la joie et de l’insatisfaction. Il n’y a pas d’attachement à ces états de joie et d’insatisfaction ; l’esprit s’élève au-dessus d’eux.
Tel est le vrai but de toute pratique bouddhiste.
FleurDeLotus

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Dharmadhatu
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Inscription : 02 juillet 2008, 18:07

jap_8 Très complémentaire, merci Lupka.

FleurDeLotus
apratītya samutpanno dharmaḥ kaścin na vidyate /
yasmāt tasmād aśūnyo hi dharmaḥ kaścin na vidyate

Puisqu'il n'est rien qui ne soit dépendant,
Il n'est rien qui ne soit vide.

Ārya Nāgārjuna (Madhyamakaśhāstra; XXIV, 19).
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