Renaissance incompatible avec le bouddhisme?

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michel_paix
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Dharmadhatu a écrit :
michel_paix a écrit :J'ai un peu de mal a saisir...

A ce que j'ai compris la "tasse" est une notion, c'est l'esprit qui la fait "vivre" en t'en que tasse, c'est ce que l'on appel la vérité conventionnelle, ultimement la tasse n'a simplement jamais exister, il n'y a qu'une forme vue, qui est vacuité. Et pour finir, de la vacuité sa n'existe pas.

??

<<metta>>
jap_8 La forme vue elle non plus n'a jamais existé ultimement. Elle n'existe qu'en dépendance d'une désignation "forme vue".

Amitié FleurDeLotus
Qu entend tu par designation ? Car meme sans identifier la forme celle ci est malgrer tout.
:)
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Dharmadhatu
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Michel a écrit :Qu entend tu par designation ?
jap_8 Appellation, imputation.
Car meme sans identifier la forme celle ci est malgrer tout.
Si la forme existait sans dépendre d'une désignation, elle aurait un soi et on tombe dans une vue absolutiste.

Sans être désignée, elle n'est pas la forme, il n'y a que la base d'imputation de la forme (qui n'est pas non plus appréhendée comme telle).

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apratītya samutpanno dharmaḥ kaścin na vidyate /
yasmāt tasmād aśūnyo hi dharmaḥ kaścin na vidyate

Puisqu'il n'est rien qui ne soit dépendant,
Il n'est rien qui ne soit vide.

Ārya Nāgārjuna (Madhyamakaśhāstra; XXIV, 19).
namgyal

chakyam a écrit :
chakyam a écrit: seulement l'éternité de l'ici et maintenant.

oui, abandonner les catégories. et même les paires opposées


Ne sommes-nous pas en plein paradoxe ? Si nous abandonnons les catégories, de quoi, de qui et comment parlerons-nous ? En effet les catégories permettent, par l'expressivité des mots, d'énoncer une/des pensées, de les faire partager et d'apporter une éventuelle critique; s'en priver nous interdirait de participer et de réaliser notre niveau de la loi.

Par ailleurs, quelquefois, par leur beauté expressive, leur justesse de désignation et leur adéquation à telle ou telle situation, elles nous donnent l'impression d'une autonomie de vie qui nous fait perdre de vue qu'elles sont principalement des moyens habiles.

Tu l'a suggéré il y a quelque temps par le Sutra du Coeur. Tous les éléments ont l'aspect du Vide et cependant dans notre vie quotidienne et relationnelle ils apparaissent en tant qu'aspect conventionnel que pourtant on ne peut réduire à néant. Bien au contraire ils font partie intégrante du réel même si leurs formes est vide et le Vide leurs formes.

C'est pourquoi le non-dualisme est fondamentale. Il n'est pas le juste milieu entre deux aspects contradictoires ; il est le centre – sans point fixe – qui justifie et explicite la possibilité de ces deux aspects qu'il ne s'agit pas de bannir car ce serait les doter d'une existence autonome qu'ils n'ont pas, mais au contraire de les conjuguer dans une relation de tiers inclu

FleurDeLotus
Très juste ce que tu dis chakyam.Tous les éléments sont dépourvus d'existence propre ( plus exacte que de dire "vide" tout court). Cependant, ils apparaissent en tant qu'aspects conventionnels et oui on ne peut pas les réduire à un néant, à un rien. Bien sur que nier les catégories et les opposés n'est pas une attitude juste de l'esprit et ne peut qu'appauvrir notre expérience de la réalité conventionnelle. Les catégories, les concepts, les paradoxes sont nécessaires pour l'exercice de la pensée et pour rendre compte de la richesse de la vie.
On ne peut pas pratiquer correctement la voie sans s'appuyer sur la réalité conventionnelle. on est d'accord.
Ce que je voudrais ajouter, c'est que le tétralème de Nagarjuna est très difficile à saisir intellectuellement. C'est un outil dialectique très puissant,très efficace mais pas à la portée de tous. Qui dans sa réflexion intellectuelle est capable de conjuguer les opposés dans une relation de tiers exclu? Je confesse, pas moi..(rire). Alors je suis bien content que quelqu'un puisse le formuler pour affiner ma compréhension.
Ici sans trop développer, je pense à la pratique principale de l'école Gelukpa le Lamrim(Tsongkapa) dont le coeur est une méditation sur la vacuité basée sur la dialectique du tétralème de Nagarjuna. C'est une voie par étapes . Dans l'école Shangpa Kagyu la pratique principale est chiné (pacification mentale) associée à laktong (vision profonde) mais on utilise pas d'objet intellectuels, tels que la vacuité. C'est une voie directe assez proche du zen. Donc ben oui Abandonner les catégories et les paires d'opposées, n'est pas à faire dans un sens nihiliste,sans discernement; c'est toujours dans le cadre de la pratique, et c'est valide à un moment donné, dans un but précis: libérer l'esprit.
FleurDeLotus
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Dharmadhatu
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Namgyal a écrit :Ici sans trop développer, je pense à la pratique principale de l'école Gelukpa le Lamrim(Tsongkapa) dont le coeur est une méditation sur la vacuité basée sur la dialectique du tétralème de Nagarjuna.
jap_8 Oui et aussi sur les Bhavanakramas de Kamalashila.

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michel_paix
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Bonjour dharmadhatu, ce sont des elements tres interessant, mais j aimerais d avantage de precision sur ce que tu appel designation, ce qui me semble un element que j ignore.
:)
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Dharmadhatu
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michel_paix a écrit :Bonjour dharmadhatu, ce sont des elements tres interessant, mais j aimerais d avantage de precision sur ce que tu appel designation, ce qui me semble un element que j ignore.
jap_8 Un objet conique et ouvert a chacune de ses extrémités est désigné "entonnoir" par le cuisinier:

Image

... "porte-manteau" par le bricoleur:

Image

... ou encore "chapeau" par le fou:

Image

:arrow: La base d'imputation est la même, mais la désignation est différente.

(Précision importante: quand j'écrivais En ce moment, il n'y a pas la vacuité (= l'absence) du froid, or il y a bien l'impression du froid., je voulais dire qu'au moment où j'écrivais, le temps n'était pas spécialement froid: il s'agissait de la vacuité du froid et pas de la vacuité d'existence inhérente du froid.)

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namgyal

chakyam a écrit :
Or, je considère à tort ou à raison – c'est sans importance réelle – que cette notion de renaissance n'est pas d'origine bouddhiste (importée au Tibet de la religion Bön) (...)
tant que ne seront pas réalisés que ces caractérisations réifiées sont l'expression d'un Égo et non d'une conscience (laquelle d'ailleurs, y'en à au moins 8...) et tant que la réalité des Renaissances ne sera pas comprise comme une réalité de désignation d'une imposture métaphysique que seule « l'ici et maintenant » permet de débusquer...
mais !! chut ! J'ai pas le droit d'en parler
Je partage ce point de vue "politiquement" incorrect. Pour préciser ton propos, c'est la tradition des Tulkus, des lamas réincarnés du Tibet qui n'est pas bouddhiste mais vient bien comme tu le dis du Bön et qui a introduit dans le bouddhisme la notion de renaissance. Je m'étonne d'ailleurs que cette notion ait pu au fil du temps devenir si importante dans les préoccupations des bouddhistes.
Il me semble pourtant d'après ce que je connais du hinayana et du mahayana ( bouddhisme tibétain exclu, par voie de conséquence) que les choses sont claires. Pour le Bouddhisme, il n'y a pas d'âme (Atma), pas de soi, anatta .
S'il n'y a pas d'âme, il ne peut y avoir de réincarnation, de renaissance . La tradition des tulkus du bouddhisme tibétain s'appuie sur une interprétation de la coproduction conditionnée pour expliquer qu'il puisse y avoir renaissance sans qu'il y ait pour autant une âme qui perdure. L'analogie classique, de la mangue : un noyau de mangue donnera naissance à un nouveau manguier qui manifestera de nouveau les caractères de la mangue d'origine, sans que pour autant un seul atome de cette mangue ait été transmis. Le karma est donc comparable au code génétique : c'est une information qui est transmise, ce n'est pas une entité durable qui transmigre de corps en corps. que chaque nouvelle vie va être fortement (mais pas totalement, quoi et en quelle proportion?) influencée par son Khamma, la somme des actions d'une vie, oui, le bouddhisme l'admet . Est-ce suffisant pour étayer la notion de renaissance ? Ca n'engage que moi, mais je n'ai jamais été convaincu par la lecture tibétaine de la coproduction conditionnée que je perçois à tort ou à raison comme un artifice scolastique. (Dommage, j'aurais tant aimé y croire..). Je précise que je ne m'élève pas contre la tradition des Tulkus, c'était juste pour étayer mon propos, sans esprit de polémique. Bon, temps pis pour un des préambules du post d'Iskander
Inévitablement au cours de ce genre de discussion, quelqu'un dira que ce qui importe est la pratique ici et maintenant
mais oui...
tant que la réalité des Renaissances ne sera pas comprise comme une réalité de désignation d'une imposture métaphysique que seule « l'ici et maintenant » permet de débusquer...
shuuuuuuuuuuuuttttt FleurDeLotus
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michel_paix
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Bonjour dharmadhatu,

Merci, j'aimerais soulever deux point que nous avons abordé, pour en connaitre bien sûr tes commentaires:

→ La base d'emputation et la vacuité [co-production] sont une et meme chose, mais la designation elle n'est pas la vacuité.

→ A ce que j'ai compris si tout phenomènes conditionnés sont constament "en devenir" alors ceux-ci sont donc vide d'essence propre, c'est la désignation qui va emplir ce vide "d'un quelque chose".

<<metta>>
:)
Florent

@ Namgyal

Je suis tout à fait d'accord avec toi, la coproduction conditionnée n'est absolument pas une explication de la réincarnation ou de la renaissance, en fait elle s'intéresse uniquement au présent et à ce qui ce passe dans l'instant.
Il suffit de lire un texte comme celui de buddhadasa pour le comprendre.

http://www.dhammadelaforet.org/sommaire ... aticca.pdf
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Dharmadhatu
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jap_8 Bonjour les amis,

La notion de renaissance qui serait importée du Bön dans la tradition bouddhiste tibétaine tronque inévitablement le corpus scriptural bouddhiste en son entier car les Kammavibhaga Suttas (Maha- et Cula-) sont très clairs sur l'exposé des renaissances explicitement fait par le Bouddha.

Comment expliquer alors que les Théravadins acceptent les renaissances alors même qu'ils n'acceptent pas une grande partie du corpus indo-tibétain comme étant buddhavacana (parole du Bouddha) ? Cela signifie-t-il que le Bön aurait aussi influencé les pays d'Asie du Sud Est ? Cette éventualité est évidemment sujette à caution...

Quelle que soit l'interprétation traditionnelle des 12 liens de production dépendante, il y a un fait commun à toutes ces interprétations: avant le devenir (bhava), la naissance (jati), la vieillesse et la mort (jaramarana), il y a d'abord ignorance (avidya), formations karmiques (samskara), conscience conditionnée (vijñana) etc.... Or si ces nidanas préexistent au devenir et à la naissance, il y a donc bien une continuité avant cette existence présente.
Buddhadasa a écrit :Le mot viññāna se réfère aux six formes de
consciences sensorielles qui naissent au contact des six sens.

Cette interprétation signifierait que le Bouddha a évoqué l'effet avant la cause elle-même quant à ce point, or il a explicitement dit que la conscience conditionne le nom et la forme qui conditionne les 6 sens.
From consciousness as a requisite condition comes name-&-form. From name-&-form as a requisite condition come the six sense media.

http://www.accesstoinsight.org/tipitaka ... .than.html
Le Bouddha a donc expliqué la continuité de la conscience comme étant la condition antécédente (skt. samanantara pratyaya; tib. dématag kyèn) à n'importe quel type de perception.

:arrow: Bref, remettre en question la notion de renaissances dans le Bouddhisme c'est affirmer que les Kammavibhaga Suttas par exemple ne font pas partie du Corpus pali et ont été rajoutés à l'insu de nombreux disciples du Bouddha.
Michel a écrit :→ La base d'emputation et la vacuité [co-production] sont une et meme chose, mais la designation elle n'est pas la vacuité.
Cher Michel, pourrais-tu s'il te plaît clarifier ton propos ? J'ai bien parlé de base d'imputation et non d'emputation.
→ A ce que j'ai compris si tout phenomènes conditionnés sont constament "en devenir" alors ceux-ci sont donc vide d'essence propre, c'est la désignation qui va emplir ce vide "d'un quelque chose".
En fait la désignation est la preuve que les phénomènes sont vides. Et la vacuité est la preuve que les phénomènes sont de simples désignations.



Amitié FleurDeLotus
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