Mauvais genre : un éditorial du Monde des Religions

Compagnon

Virginie Larousse publié le 27/06/2017

Elles sont chrétiennes, juives, musulmanes, bouddhistes, agnostiques ou athées. Les unes revendiquent leur attachement à une tradition spirituelle, les autres rejettent en bloc la religion, jugée par essence phallocrate. Mais toutes se rejoignent sur un point : celui de bousculer, de l'intérieur ou de l'extérieur, les institutions dépositaires du dogme. Pour, in fine, libérer les femmes, trop souvent reléguées à l'arrière-plan pour des motifs religieux. Ou prétendument religieux. De fait, si les textes sacrés ont pu contribuer à fixer dans le marbre des usages de ces temps très lointains où ils ont été écrits - par des hommes et pour les hommes -, ils ont parfois bon dos. Il est tellement commode de justifier les pratiques inégalitaires par le « respect de la tradition » ! C'est pourquoi certaines croyantes s'attachent à montrer que non seulement Dieu n'est pas misogyne, mais qu'Il, ou plutôt Elle, est même féministe - après tout, pourquoi parler du divin au masculin, observent quelques-unes de ces militantes ?

La tâche risque d'être longue, car on ne peut pas dire que les choses aillent forcément dans le bon sens. Simone de Beauvoir a dû se retourner dans sa tombe en apprenant que l'Arabie saoudite avait été élue, en avril dernier, membre de la Commission des droits des femmes de l'ONU, organe chargé de travailler à « la promotion de l'égalité hommes-femmes et l'autonomisation des femmes ». Un scandale quand on sait que, sous prétexte de respecter la sharia, les Saoudiennes ont l'obligation d'avoir un tuteur masculin prenant les décisions importantes en leur nom tout au long de leur vie... En outre, que penser du Synode sur la famille organisé par le Vatican en 2014-2015, au cours duquel la voix des femmes a été quasi inaudible - seules trois religieuses et quelques laïques avaient été conviées ? Comment ne pas être perplexes devant les affaires de chantage au divorce qui touchent la communauté juive orthodoxe, où les femmes sont otages du bon vouloir de leur époux en cas de séparation ? On pourrait multiplier à l'envi les exemples de « sexisme religieux », lequel concerne également les traditions non monothéistes telles que le bouddhisme ou le taoïsme. Le machisme ne connaît pas les frontières. Et les (très rares) cas de religions matriarcales qui ont pu être mentionnés semblent relever davantage du mythe que de la réalité.

Aussi y a-t-il eu, depuis les époques les plus reculées, des femmes - et quelquefois des hommes ! - qui ont oeuvré à faire bouger les lignes. Chacune à sa manière, avec sa sensibilité propre. Par la piété, par l'érudition, par la plume ou les armes, par le recours au droit : ces passionarias forcent l'admiration, quand bien même on peut ne pas cautionner certaines de leurs méthodes. Ce combat, des femmes le mènent au péril de leur vie. L'une d'elles s'appelait Ruqia Hassan Mohammed. Jeune habitante de Raqqa, en Syrie, elle a défié les djihadistes en racontant son quotidien de « citoyenne de seconde zone » sur les réseaux sociaux, au nez et à la barbe de ces soi-disant religieux. Elle a été exécutée à l'automne 2015. Non loin de là, d'autres femmes poursuivent la lutte dans les rangs du PKK. À armes égales avec les hommes. Reste à savoir si cette émancipation gagnée à la (dé)faveur d'un conflit perdurera une fois la crise passée.


Note personnelle : si l'on pratique le bouddhisme avec sincérité, si l'on accepte le principe du cycle de renaissances, alors nous avons été par le passé des 2 sexes et notre sexe actuel n'est que transitoire. Donc tout forme de sexisme est nul et non avenue, le corps n'est qu'un apparence temporaire, le "flux de conscience" est asexué.
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