Polir la tuile pour en faire un miroir

[Dumè Antoni]

Je suis loin d'être sûr que la version rinzai et soto soient aussi fondamentalement différentes.

Relativement au fait qu'il n'y a pas de Dhyana sans Prajna, c'est exactement la même vue. Ce qui est en revanche différent, c'est la mention "il n'y a rien à chercher" (au sens que nous serions naturellement éveillés) qui n'est pas celle du Rinzaï. Aucun zeniste sérieux ne se considérera éveillé et ne fera de la pratique d'une posture (zazen) l'équivalent du satori. Même Dôgen ne dit pas cela, si j'en juge par ce qu'affirmait Shunryu Suzuki. Car "faire comme si", ce n'est pas "être cela". Se considérer "être cela", je le répète et je rabâche : "c'est faire tomber la Vue dans la pratique" et c'est l'équivalent de prendre la maladie pour le remède. J'invite le lecteur à parcourir avec attention les 3 tomes des "essais sur le Bouddhisme Zen" de D.T. Suzuki pour constater que l'expression "prendre la maladie pour le remède" n'est pas de moi mais de très nombreux maîtres zen et patriarches qui s'élevaient avec vigueur contre ces "fous" qui pratiquaient "sans rien attendre". A moins de considérer D.T. Suzuki comme le considère Kaïkan...

Tokuda dit un jour à un ami, qui lui parlait de koans, que penser que le soto rejette les koans formels, est un malentendu.

C'est même tellement un malentendu que Dôgen invitait à pratiquer le kôan Mu. Que Shunryu Suzuki parle du "son d'une seule main" dans son premier livre, que Yasutani Roshi, Kapleau et Albert Low en faisaient/font l'essentiel de leur pratique, que le Zen — toutes écoles confondues — a fonctionné avec les kôans depuis le 11ème siècle. Cela étant la pratique du kôan dans le Rinzaï, depuis Hakuin, n'est plus ce qu'elle était pour tous les zenistes de toutes les écoles ; il en a fait une pratique réglementée/systématisée parce qu'il voyait des moines somnoler sur leurs zafu. Je ne dis pas que c'est mieux ou que c'est pire d'avoir réglementé/systématisé la pratique des kôans ; c'est juste différent. Et cette différence n'est pas dommage à mon avis. Elle est utile pour toutes les personnes qui pratiquent le Zen dans le but de s'éveiller à leur vraie nature parce qu'ils ne croient pas une seconde qu'elles soient naturellement éveillées. elles aimeraient bien le vérifier par elles-mêmes, qu'elles possèdent la nature de Bouddha. Car c'est bien de le dire et de le croire, mais c'est beaucoup mieux de le réaliser.

[ted]

Quand j'étais étudiant en informatique, j'avais du mal à comprendre le modèle OSI (Open Systems Interconnection) en sept couches de l'ISO (International Organization for Standardization). Déjà que je confondais ISO et OSI, lol

Mais non, qu'on m'expliquait, ceci est vrai au niveau "Réseau", mais n'est pas vrai au niveau "Liaison de données". Mais cela redevient juste au niveau "Applicatif" etc...

Après avoir fait quelques crises d'angoisses, j'ai pigé un peu mieux le truc.

Pratiquer "sans but" est valable au niveau des couches basses du modèle.
Parce qu'au niveau applicatif (niveau 7) on a un but : entrer dans le premier jhana, avoir le kensho, le satori, trouver l'éveil. Se libérer de la souffrance. Et ce but doit être très clair (la Vue) et associé à une forte détermination.

Mais au niveau des "couches basses" du modèle, quand on s'assied (ou quelle que soit la posture du corps), on est dans les couches de niveau 2 et 3. Ces couches n'ont aucune connaissance du niveau applicatif. Mieux, elles s'en moquent totalement ! Elles font du transport et de la liaison de données. C'est tout.

A ce niveau là, on vide ses pensées. On abandonne toute conceptualisation. Tout projet d'éveil et de devenir Bouddha. On va jusqu'à oublier pourquoi on est assis là. On se contente de prendre conscience de la couche physique (niveau 1) et d'assurer une totale fluidité aux niveaux 2 et 3, sans interventionnisme. Ici et maintenant. On pratique sans but. Parce que la notion de but est étrangère aux couches basses du modèle.

[Dumè Antoni]

Ta présentation en rapport avec tes études d'informatique n'est pas dénuée d'intérêt.

A ce niveau là, on vide ses pensées. On abandonne toute conceptualisation. Tout projet d'éveil et de devenir Bouddha. On va jusqu'à oublier pourquoi on est assis là. On se contente de prendre conscience de la couche physique (niveau 1) et d'assurer une totale fluidité aux niveaux 2 et 3, sans interventionnisme. Ici et maintenant. On pratique sans but. Parce que la notion de but est étrangère aux couches basses du modèle.

C'est ce qu'on appelle le "Gedo Zen", c'est à dire le Zen "extérieur à la voie". Certains s'en servent pour être plus performant au boulot, plus "cool", plus "zen" (comme disait Zazie). Mais je ne pense pas que ce soit le Zen Sôtô, je veux dire "le vrai zen sôtô" . Dôgen se retournerait dans ses cendres sinon.

[ted]

[yudo]

Je te ferai remarquer que sur le forum zen-et-nous que tu diriges, c'est exactement l'inverse : la contribution au Rinzaï frise les 0% tandis que le Sôtô, ou plus exactement le Deshimarisme (ce qui n'est pas pareil à mon sens, et des contributeurs sur ton forum l'affirment sans complexe), atteint les 100%.

Je pense que cette affirmation est fausse. Je suis, je pense, un important contributeur sur le forum dont tu parles, et je trouve insultant de me faire traiter de deshimariste, ce d'autant que je suis à peu près sûr d'être l'auteur de ce terme...

[Dumè Antoni]

Je pense que cette affirmation est fausse. Je suis, je pense, un important contributeur sur le forum dont tu parles, et je trouve insultant de me faire traiter de deshimariste, ce d'autant que je suis à peu près sûr d'être l'auteur de ce terme...

Désolé, je te prie de m'excuser, ce n'est pas à toi que je pensais (idem pour Lausm, d'ailleurs) mais globalement au fait que sur Zen-et-nous, on y parlait quasi exclusivement du Sôtô, et comme Kaïkan en est l'administrateur et qu'il est de l'AZI, et que par ailleurs il est le contributeur le plus zélé du forum en question, j'ai fait un raccourci regrettable. Quoi qu'il en soit, cela ne change rien au fait que question "publicité" (pour employer le terme de Kaïkan), le Rinzaï est nettement moins bien placé que le Sôtô.

[ted]

Ahahaha trop drôle

Si ça fait rire tant mieux...
Mais ce n'était pas mon intention.
Simplement essayer de lever l'ambiguïté qui se profile derrière l'injonction "pratiquer sans but"... Pratiquer sans but, à mon avis, c'est une recommandation technique... Pas une Vue.

[yves]

love2

je ne sais pas si je serai capable de reprendre l'explication, mais le sens est superbe