A celui qui sait entendre...

longchen2

Je reprends une partie d’un post de Flocon de ce matin sur un autre topic car quelque chose qui m’interpelle à été abordé:
Flocon a écrit :Bien sûr, Axiste, ça marche de la même façon avec une branche, ou avec ce qu'on veut. C'est pour ça que Dôgen écrivait que les arbres et les pierres sont des Bouddhas qui prêchent la loi à qui sait l'entendre.
Il n'y a pas lieu de prendre mon message de façon trop grave, il se veut souriant : mais le fond en est sérieux.
(...)
viewtopic.php?p=29951#p29951
J’ai entendu quelque chose de semblable, exprimé à peine différemment. Lorsque je l’avais entendu, honnêtement, j’avais été un peu surpris, et je n’avais pas réellement compris ce que l’enseignant voulait dire par là.

Je ne pourrais pas vraiment participer à ce topic que j’ouvre, par méconnaissance du propos, mais si les un(e)s et les autres veulent l’alimenter je les en remercie par avance.
J’ouvre ce topic dans Zen, mais cela doit concerner plus d’une tradition il me semble.
Katly

Cela m'interpelle aussi. Merci Longchen.

Pour moi la forêt est un bodhisattva... un oiseau qui surgit un bouddha...
Le vent, l'eau, le bruissement des feuilles, la pluie, l'orage, également... etc
Mais cela ne fait pas très longtemps que j'ai remarqué qu'un marteau-piqueur est un bouddha aussi pour moi.
Quand j'entends ce son si désagréable et que je vois ce pauvre secoué du matin au soir là-dessus pour nous construire des rues de bitume, pour nous, je ressens le son et tout son labeur.
Comme aussi les pleurs colériques d'un enfant, les klaxons d'énervement, les sirènes de pompiers... des fois ça fait trop de bruits du monde...

"Le silence ne craint pas le bruit" signature de ted. <<metta>>
longchen2

Dans le cas du bruissement d'une feuille par exemple, jusque là c'est d'accord et je pense que tous les humains (et les animaux aussi) entendent le même son s'ils sont confrontés au même phénomène ; mais peut-on dire pour autant que ce bruissement sera comme un enseignement pour certains, comme un Bouddha pourrait donner un enseignement à des disciples en employant les mots. C'est curieux quand même.
Car il est question que dans ces choses là on puisse entendre à Loi (certes à qui sait entendre)....
Je m'interroge quand même, souvent je repense à cette histoire.
Katly

Et bien, aussi loin que je me souvienne, j'entendais comme ça, mais je ne savais pas que c'était entendre vraiment, je crois même que je finissais par penser que c'était le contraire, que j'entendais mal, en ayant été forcer à oublier d'entendre ainsi.
Aussi ce que cela m'enseignait, je n'avais ni mots, ni nom pour le formuler. Et même encore maintenant, même si j'y reconnais comme un enseignement du Bouddha.
Et je pense que c'est comme ça pour tout le monde.
Et puis c'est assez fugitif, jamais pareil, sans y penser, cela n'a pas de mots, c'est quelque chose de silencieux qui passe par le son, le bruit. On ne l'entend vraiment que lorsque l'esprit est calme et clair, c'est pas tout le temps parfois on est confus, stressé, sans recul.
Si on va dans une forêt pour se retirer d'autres bruits du monde, on peut les entendre quand même, soit par trop de pensées en n'étant pas là, soit à travers les bruits de la forêt où l'on est vraiment présent. Attention, présence, vision profonde, compréhension peuvent suivre.
Une intention d'ouverture, d'écoute aussi joue...
Peut-être les musiciens, les poètes savent cela aussi. La musique des sons, des mots ne viennentt que lorsque certains sont à la fois retirés et présents, lorsque la conscience est claire, reliée à l'intérieur, au coeur, il y a silence, vision, compréhension et la mélodie peut s'écrire mieux. Ils savent aussi que si ce qu'ils jouent, écrivent les touche, ce sera entendu, et touchera aussi.
La nature, avec le cosmos ont une musique naturelle, c'est plus facile, directement proche.
Dans le cas d'un bruit désagréable, on passe comme au-dessus pour mieux voir, écouter, comprendre de l'intérieur.

Enfin, tout ça c'est le peu que je sais et comprend petit à petit.
Katly

En tous cas merci à Flocon qui en dira plus sûrement sur ce passage de Dôgen, les sons, les signes, de la nature, du monde.
Il suffit d'entendre une abeille parfois...
longchen2

Il y a des zenistes sur Nangpa et comme Dôgen est un très grand maître du zen soto, tout ce qu'il a pu dire a dû faire l'objet de nombreux commentaires.
Peut être s'agit-il de se relier à ce qui nous entoure comme le ferait un poète, c'est ce que je comprends de ton message. jap_8
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axiste
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Je sais pas pour entendre, je ne suis pas assez calée, mais se relier c'est très enseignant...

Je vois un truc un peu comme ça (avec des paraboles mais j'ai pas vu comment écrire autrement...):

C'est comme si l'on se baignait dans des endroits différents, nous retenons les mouvements que nous avons fait, mais pas vraiment les mouvements en réalité: nous savons ce qu'est une mer calme parce qu'elle nous l'a imprimée, nous faisons d'ailleurs la planche depuis ce jour là ... cette mer là nous l'a enseigné… nous n'avons jamais quitté cette mer parce que ce calme est si profondément ancré en nous que tout le reste est oublié: nous sommes ce calme totalement.

D'autres fois, c'est une petite risée et nous savons quelle vigilance elle appelle: ces vents sont doux mais musicaux, ils nous disent quelque chose, c'est un appel lointain: nous ne pouvons plus faire la planche les yeux fermés, nous gardons les yeux ouverts…c'est une promesse de quelque chose qui se lève, un appel au changement...et nous sommes ce changement.

D'autres fois c'est un roulis de vagues qui déferlent, nous avons passé un temps incroyable à calculer leur force, à évaluer leur puissance, leur hauteur, leur teneur, et nous savons laquelle va nous basculer totalement, laquelle va nous faire plonger, laquelle nous aimons prendre de front ou glisser avec…ce sont des mémoires que nous appliquons partout en les transférant d'un domaine à un autre. Nous sommes ces multiples visages, ces vagues qui nous traversent nous ont donné leur vibrations, leur intensité, leur flux et c'est la mer entière que nous avons reconnue dans leur danse … notre peau l'a bue et lue à livre ouvert…et pas qu'elle !

Bref, on pourrait faire la même chose avec tous les éléments, avec les montagnes, les lacs, les planètes et les systèmes qui les meuvent, sa famille, ses amis, ou son travail…avec n'importe quelle constellation. Donc aussi avec notre corps et la respiration...
Et l'on peut passer de l'une à l'autre également, toutes ces choses nous enseignent.
Sans elles, nous ne serions pas.

Sans l'extérieur, pas de sens ni de conscience.
C'est insensé de critiquer le monde.
Nous sommes ce monde.
Il n'y a pas d'intérieur ni d'extérieur.
Si nous détruisons le monde
nous nous détruisons nous mêmes.
Il ne faut pas éteindre la flamme.

love3
Cinq clefs pour la parole correcte :
- dire au bon moment, prononcer en vérité, de façon affectueuse, bénéfique et dans un esprit de bonne volonté."
onmyway

Esperer connaitre le monde et sa multiplicité
Sans se connaitre soi
Celui qui le perçoit
C'est comme chercher de l'eau dans le désert des jours durant
En oubliant la présence de sa gourde qui est dans son sac

Celui qui sait entendre, n'a plus besoin de sons
Celui qui sait voir, n'a plus besoin de visions
Celui qui sait sentir, n'a plus besoin de sensations
Celui qui sait se taire, n'a plus besoin de parler
Celui qui sait ce qu'il est, n'a plus rien à apprendre
lausm

C'est dans le sansui kyo, le sutra des rivières et des vallées, que Dogen causait de ça.

j'ai trouvé un commentaire intéressant là :
http://books.google.fr/books?id=M2Fr5oP ... en&f=false

Il n'y a pas de traduction française sur le commerce, je sais que Tokuda lors de sa dernière sesshin, l'a commenté pendant une semaine, et qu'il n'a fait que commenter "san" et "sui"! A en épuiser le sens!

Le Kei sei sanshoku parle aussi de ça, mais je n'ai pas de traduction française sur le net.
longchen2

Une semaine d’enseignement sur ce point, cela me paraît effectivement beaucoup. A trop vouloir commenter on peut en arriver à faire dire à un maître du passé ce qu’il n’a jamais dit ou voulu dire. Mais un enseignant qualifié a l’œil suffisamment aiguisé pour ne pas s’en laisser compter sur ce point.
Je vais relire bien consciencieusement ce que le texte que tu as donné en lien Lausm dit exactement.

En première lecture je trouve au passage que c’est quelque chose qui pourrait interpeller notre ami Onmyway ;-)
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