Hokyo Zanmaï traduit par Pierre Taïgu Turlur

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AncestraL
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Voici l'Hokkyo zanmaï, le poème du Patriarche Chinois Tozan. Un texte souvent malmené et trahi. Le voici dans une langue qui s'efforce de l'honorer et lui rendre son inépuisable richesse. Je proposerai des commentaires et des enseignements à son sujet cet été durant la sesshin de Paris.

Chant de la précieuse conscience-miroir

L'ineffable vérité de ce qui est tel quel vous a été intimement confiée par les Bouddhas et Patriarches
Puisqu'elle est vôtre désormais, il vous incombe de la protéger et préserver
neige amoncelée dans un bol d'argent, blanc héron dérobé par la claire lune
Semblables en apparence, ils diffèrent pourtant, indistincts ils se reconnaissent
Les mots ne sauraient l'exprimer, pourtant il suffit d'un instant pour la manifester
Agissez et vous êtes piégé, manquez et vous hésitez et doutez
Il est erroné de vous détourner ou de vous approcher, c'est comme une grande sphère de feu
Peignez-la de mots choisis et immédiatement elle s'en trouve souillée
Elle resplendit dans la nuit la plus noire et disparaît à l'aube
Principe qui régit toutes choses, elle soulage et ôte toute souffrance
Bien que dénuée de toute fabrication, elle n'est pas inexprimable
Comme lorsque l'on se tient face un précieux miroir, forme et reflet se contemplent
Vous ne pouvez vous reconnaître en elle, mais à la vérité elle n'est autre que vous-même
À l’image d’un nouveau né, elle est dotée des cinq sens
Elle ne va ni ne vient, ne s'élève ni ne demeure
« Baba wawa » ces paroles font-elles sens ou pas?
Finalement rien n’est ici exprimé la justesse manquant encore aux mots Dans l’hexagramme de l’illumination, l'absolu et le relatif s'interpénètrent
Les lignes empilées font trois, une fois transmutées elles font cinq
Ainsi des cinq saveurs de la plante Chih, ainsi des cinq branches du sceptre Vajra
Merveilleusement enlacés dans le réel, question et réponse s'avancent ensemble
Intime avec l'essence et le chemin, embrassez le territoire et conformez-vous à la Voie,
Vous devriez vous y appliquer et ne la pas négliger
Naturellement pure et d'une subtile profondeur, elle ne relève ni de l'illusion ni de l'éveil
Dépourvue de causes et de conditions, libérée du temps et des saisons, cette sérénité illumine
Si fin que cela s'immisce même sans qu'il y ait d'espace , si inconcevablement vaste
Une différence aussi tenue qu'un cheveu et l'harmonie s'en trouve brisée
Maintenant la voie graduelle et la voie soudaine se distinguent
Et les chemins vers la source, pratiques et doctrines apparaissent
Que les enseignements soient compris ou non, la réalité continue de couler
Paisible au dehors, troublé au dedans, tel le poulain entravé ou le rat en sa cachette
Les sages du passé éprouvèrent de la bienveillance et leur offrirent le Dharma
Égarés par les vues fausses, ils prennent le noir pour blanc
Il suffit que l'illusion s'évanouisse pour que de lui-même le coeur se réalise
Si vous voulez mettre vos pas dans les traces anciennes, suivez les sages du passé
Pour réaliser voie des Bouddhas il vous faut contempler l'arbre dix kalpas durant
Tel un tigre blessé ou un cheval boiteux
Aux plus malhabiles des tables de Jade et des robes décorées
À ceux dotés de la merveilleuse vision panoramique, ils sont tels le simple chat ou le buffle blanc
L'archer légendaire Yi atteint la cible à cent mètres
Mais quand deux flèches se touchent en plein vol, est-il encore question d'une quelconque habileté?
L'homme de bois chante et la femme de pierre se lève et danse
Ni la discrimination ni l'émotion ne sauraient l'atteindre, encore moins la pensée
Le ministre sert son seigneur, l'enfant obéit à ses parents
La désobéissance n'honore en rien le lien filial, le refus de servir bafoue la loyauté
Gardez votre pratique secrète, usez-en discrètement, ressemblant au fou ou à l'idiot
Continuez à vivre de cette manière c'est être appelé maître parmi les maîtres.


traduction du moine Taïgu, avril 2018.
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