LA CONCEPTION BOUDDHIQUE DE L’HOMME ET L’ATTITUDE DU BOUDDHISME A L’ÉGARD DU RACISME ET DES CASTES

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LA CONCEPTION BOUDDHIQUE DE L’HOMME ET L’ATTITUDE DU BOUDDHISME A L’ÉGARD DU RACISME ET DES CASTES


L’homme n’est que l’un des êtres doués de sensibilité qui peuplent l’univers.

Pour l’École bouddhiste Theraväda, comme pour l’école Mahäyäna, l’homme n’est que l’un des êtres doués de sensibilité qui peuplent l’univers.(...)

Si l’on considère l’immensité de l’espace cosmique et le nombre infini des mondes, dont les mondes humains ne forment qu’une très petite partie, les questions raciales semblent vraiment insignifiantes.(...)

Réprimandant certains moines qui s’estimaient supérieurs aux autres parce qu’ils étaient plus réputés et plus riches, le Bouddha les comparait à des vers de terre nés et nourris dans le fumier, et qui s’estimeraient de ce fait supérieurs.

L’homme doit acquérir l’humilité

Dans une telle perspective cosmique, l’homme qui rampe à la surface de la terre en essayant d’y subsister doit au moins acquérir l’humilité.(...)

Au cours de notre évolution samsarique nous naissons des centaines de fois sous la forme d’animaux et nous n’atteignons que très rarement à l’existence humaine.

Dans l’ordre cosmique, la naissance sous la forme d’un être humain est un évènement rare. Les hommes ont donc le devoir de tirer le meilleur parti possible de cette précieuse existence humaine.

Ils ont la capacité de découvrir par eux mêmes les vérités les plus profondes concernant le cosmos.

Une personne y est parvenue : c’est le Bouddha, qui est à la fois le meilleur des hommes et le plus évolué de tous les êtres doués de sensibilité.(...)

(...)Ceux qui atteignent à ces sommets ne sont ni des prodiges de la nature ni les heureux élus de quelque divinité : Ce sont des hommes qui ont travaillé, au cours de nombreuses existences, à développer leur nature intellectuelle, morale et spirituelle. Ce qu’ils ont réalisé est à la portée de chacun. Et non seulement les hommes, mais tous les êtres doués de sensibilité - si inférieurs soient-ils - peuvent devenir des bouddhas car la nature d’un bouddha (bouddha-bhava) est toujours présente en eux, dit le Mahäyäna.(...)

Nul n’a le droit de mépriser ses semblables

Ne serait-ce que pour cette raison, nul n’a le droit de mépriser ses semblables car toutes les créatures sont soumises aux lois de l’existence et possèdent, au fond, la même nature et les mêmes possibilités, bien qu’elles se trouvent à des stades différents de développement et ne se développent pas toujours au même rythme.

(...) En prenant conscience à la fois de notre condition commune et des possibilités qui sont en nous, nous comprenons que chacun a le devoir d’aider ses semblables et que nul n’a de raison légitime de les mépriser.


1- L'unité Biologique de l'humanité et la réfutation du racisme


Pour montrer la valeur et la dignité de l’existence humaine, le bouddhisme met spécialement l’accent sur les occasions et les possibilités de perfectionnement qui s’offrent à l’homme.

L’humanité ne forme qu’une seule espèce.

Il souligne aussi l’unité de l’espèce humaine, qu’il différencie des règnes animal et végétal : dans les règnes animal et végétal, on peut distinguer diverses espèces, mais l’humanité ne forme qu’une seule espèce.

Ce point de vue se trouve confirmé de façon éclatante par les découvertes de la biologie moderne.

Le Bouddhisme s’oppose nettement à certaines théories du XVIII et du XIX siècle, d’après lesquelles les races humaines comme les espèces animales pourraient être classées en supérieures et inférieures et mine les fondements mêmes des doctrines racistes qui divisent les êtres humains en groupes plus ou moins isolés et considèrent que les diverses caractéristiques humaines sont entièrement déterminées par des facteurs génétiques.

Le passage ci-dessous est une critique de la théorie brahmanique des castes ; il montre incidemment que les brahmanes revendiquaient la supériorité pour des motifs d’ordre génétique.

« Nous avons une controverse au sujet des différences dues à la naissance, ô Gautama ! Bharadvaja dit qu’on est brahmane de naissance, et moi je -dis qu’on l’est par ses actes ; saclie cela, ô toi qui vois tout. »

« Nous sommes incapables de nous convaincre l’un l’autre ; aussi sommes-nous venus à toi, dont on célèbre la parfaite sagesse. - Je vais t’expliquer dans l‘ordre, ô Vasettha, dit Bhagavat, la répartition exacte des êtres vivants selon les espèces, car ces espèces sont innombrables. »

« Tu connais les herbes et les arbres ; bien qu’ils ne le manifestent pas, ils portent des signes distinctifs selon les espèces et leurs espèces sont innombrables. »

« Tu connais les vers, les papillons et les fourmis ; ils portent des signes distinctifs selon les espèces, et leurs espèces sont innombrables. »

« Tu connais les quadrupèdes, petits et grands ; ils portent des signes distinctifs selon les espèces, et leurs espèces sont innombrables ».

« Tu connais les serpents qui rampent sur la terre ; ils portent des signes distinctifs selon les espèces, et leurs espèces sont innombrables ».

(...)

« Chez ces espèces, les signes distinctifs de l’espèce abondent ; mais il n’y a pas de signes qui distinguent les espèces chez les hommes. Ni dans la chevelure, la tête, les oreilles, les yeux, la bouche, le nez, les lèvres ou le front. Ni dans le cou, les épaules, le ventre, le dos, les hanches, la poitrine, les organes génitaux féminins ou les relations sexuelles. Ni dans les mains, les pieds, les paumes, les ongles, les mollets, les cuisses, la couleur ou la voix, il n’existe de signes qui permettent de distinguer parmi les hommes des espèces ».

« Il existe des différences entre les autres êtres qui possèdent un corps mais, entre les hommes, les différences sont purement nominales ».

(...)

Ainsi donc, selon le Bouddha, on ne peut classer les hommes en différents genres ou espèces, comme on le fait pour les herbes, les arbres, les vers, les papillons, les poissons, les quadrupèdes, les oiseaux, etc.

Sur ce point, Gautama est d’accord avec la biologie moderne qui envisage que les Anthropidae sont représentés par un seul genre et par une seule espèce : l’homme.

Cette conclusion est d’autant plus remarquable que Gautama n’a pas été induit en erreur par l’accident de la couleur.

Le Bouddha montre ensuite que les distinctions faites entre les hommes ne répondent pas à des différences biologiques fondamentales, mais à des classifications conventionnelles.

Les distinctions fondées sur la couleur de la peau (uanna), la nature des cheveux (kesa), la forme de la tête (sisa) ou la forme du nez (nasa) n’ont rien d’absolu. On rejoint presque ainsi la position de la science moderne.(...)

Le bouddhisme s’accorde donc avec les enseignements de la biologie moderne, qui ont ruiné les doctrines racistes et démontré l’unité biologique de l’espèce humaine.

Lorsque le bouddhisme nous invite à traiter tous les hommes et toutes les femmes, quelle que soit leur race ou leur caste, comme s’ils étaient notre père, notre mène, notre frère ou notre soeur, comme les membres d‘une même famille, il proclame une vérité profonde et non un simple précepte moral.

(...)

Il existait cependant, à l’époque du Bouddha, des philosophies racistes et celles-ci sont critiquées dans les textes bouddhiques

Le Bouddha nie l’existence de types humains fixes, génétiquement déterminés. Il admet le libre arbitre et la capacité de l’homme à devenir moral ou immoral, heureux ou malheureux, à se transformer ou à dégénérer.


2- La dignité et l'égalité des hommes : Critique du Système des Castes


Le bouddhisme combat les préjugés et les discriminations de caste:

On voit que le bouddhisme admet l’unité biologique de l’espèce humaine et se refuse à reconnaître l’existence de groupes raciaux génétiquement différents.

Le bouddhisme combat les préjugés et les discriminations de caste en les ignorant dans la pratique et en ruinant leurs fondements théoriques à l’aide d’arguments rationnels.

Ci après ; les arguments scientifiques, moraux et religieux invoqués par le bouddhisme contre la théorie brahmanique des castes.

Arguments biologiques.

L’argument biologique essentiel est qu’il n’existe pas d’espèces humaines, comme il existe des espèces animales et végétales, et que l’humanité ne forme qu’une seule espèce.

L’Ambattha Sutta (Sermon sur Ambattha) montre que la notion de pureté de caste, si chère au coeur des brahmanes, n’est qu’un mythe.

Ambattha, un jeune brahmane, était si fier de sa haute naissance qu’il négligeait les règles de la courtoisie en parlant au Bouddha, qui n’était pas brahmane.

Le Bouddha lui répond en mettant en doute la pureté de ses origines : « Si l’on remontait à tes ancêtres paternels et maternels, lui dit-il, on s’apercevrait que l’un d’eux était l’enfant d’un jeune esclave sakya »


Arguments sociologiques.

Pour combattre les théories brahmanistes, on peut aussi rechercher la nature et les origines véritables de la société et des castes.

Dans la conception hindouiste, statique, de la société, le système traditionnel des quatre castes (prêtres, soldats et administrateurs, marchands et agriculteurs, serviteurs) est considéré non seulement comme absolu, fondamental et nécessaire à la société, mais encore comme voulu et institué par Dieu (Brahma).

Le bouddhisme primitif propose, au contraire, une conception dynamique, évolutive de la société. Le système des quatre castes n’est pas absolu.

Les textes bouddhiques insistent sur le fait que les brahmanes ne naissent pas autrement que les autres hommes. (...)

Le bouddhisme considère les castes comme des catégories professionnelles, d’origine historique, et attribue la persistance des préjugés et des discriminations de caste à l’influence des prêtres brahmanes.(...)

La théorie des castes, que les brahmanes essaient d’imposer à la société pour justifier et perpétuer les préjugés et les discriminations fondés sur la religion, est qualifiée à maintes reprises par les textes bouddhiques de pur instrument de propagande.(...)

Le bouddhisme défend contre le brahmanisme la cause de l’égalité sociale des hommes, en se fondant sur la structure effective de la société à cette époque.(...)

Contrairement aux brahmanes, qui cherchaient à faire de la religion un monopole, les bouddhistes forment une société idéale où tous les hommes, quelle que soit leur condition sociale ou leur naissance, sont libres d’entrer dans les ordres religieux et peuvent prétendre de ce fait aux mêmes honneurs.(...)

D'après le bouddhisme, tous les hommes, sans distinction de caste ou de race, ont des droits égaux et méritent de bénéficier de possibilités égales de développement, car ils appartiennent tous à la société humaine.(...)

La condition sociale de chacun est déterminée non par la caste ou la race, mais par la fortune - qui permet d’avoir des serviteurs de toute origine.
Tous doivent être égaux devant la loi.
Les aptitudes ne sont pas déterminées par la naissance. La valeur morale de chacun doit être reconnue par la société, sans distinction de caste. Tous les hommes doivent bénéficier de possibilités égales de développement moral et spirituel puisque tous sont susceptibles d‘un tel développement.

C’est en ces termes que le bouddhisme proclame l’égalité de tous les hommes en tant que membres de la société humaine.(...)


Les arguments ethniques et religieux.

Comme nous l’avons vu, le bouddhisme invoque les faits historiques pour contester aux brahmanes toute prérogative spéciale en matière de religion. Il démontre que les brahmanes ne sont pas, comme ils le prétendent, les enfants élus de Dieu et les seuls susceptibles d’être sauvés - car les gens de toutes castes, s’ils en trouvent la possibilité, peuvent atteindre à la perfection spirituelle et faire leur salut.(...)

Tous les hommes sont égaux au regard de la loi morale. Ils sont jugés en fonction du bien et du mal qu’ils ont fait, et non d’après leur condition sociale ou leur naissance.(...)



3- L'Unité spirituelle de l'humanité


Au point de vue biologique, l’humanité forme une seule espece. Membres d’une même société, tous les hommes méritent d’avoir les mêmes droits et les mêmes possibilités, et en particulier celles de développement moral et spirituel.(...)

Tous les hommes, quelle que soit leur race, sont voués à la maladie, à la décrépitude et à la mort

Ce qui unit les hommes, c’est le sentiment de leur destin commun et de leur condition commune. Tous les hommes, quelle que soit leur race, sont voués à la maladie, à la décrépitude et à la mort ; et ils sont tous soumis aux mêmes désirs : désir de satisfactions sensuelles, désir de vie ou d’immortalité personnelle, désir de domination ou de mort.

Sans cesse, ils aspirent à la sécurité et au bonheur, mais, en cherchant à satisfaire leurs désirs, ils ne font que s’agiter dans une inquiétude perpétuelle.

Le Bouddha a dit : « C’est au plus profond de nous-mêmes que se trouve le but final de tous nos efforts ; c’est en nous que nous découvrirons la paix et le bonheur éternels qui nous permettront de réaliser nos plus hautes aspirations. »

Tous les hommes, quelle que soit leur caste ou leur race, doivent et peuvent se sauver eux-mêmes.(...)

Lorsqu’on veut établir des distinctions entre les hommes, ce qui compte ce n’est pas la forme des membres, la couleur de la peau, l’origine ou la condition sociale, mais la position de chacun par rapport à son but - qui est aussi le but commun de l’humanité et la source du vrai bonheur et de la parfaite santé mentale.

Pour le bouddhisme, les êtres humains ne sont supérieurs ou inférieurs que selon leur degré de perfection morale et spirituelle, indépendamment de toute considération de race ou de caste. Et celle distinction même n’a rien de rigide, puisque chacun change constamment et a le pouvoir de devenir meilleur ou pire.

L’une des caractéristiques de ces êtres supérieurs est qu’ils ne revendiquent aucune supériorité morale ou spirituelle et qu’ils n’ont aucune prétention personnelle. Certes, ils ont conscience de leur supériorité, mais ils n’en font pas étalage, car il est dit que ceux qui ont réalisé leur salut cessent de se considérer eux-mêmes comme étant« supérieurs ».

Les êtres moralement et spirituellement inférieurs, au contraire, se ferment toute possibilité d’éveil spirituel et de progrès moral en revendiquant une supériorité illusoire et en créant ainsi, pour leur propre malheur, et celui des autres, des divisions artificielles entre les hommes.

Les hommes ne sont supérieurs ou inférieurs qu’en raison de leur valeur morale et spirituelle ; mais cette classification elle-même est sujette à modifications, les hommes pouvant changer et changeant en fait.

Nous n’avons donc le droit de mépriser personne. Le criminel le plus endurci - comme le voleur paria Angulimala qui fut converti par le Bouddha - peut avoir de profondes qualités naturelles, et subir en peu de temps une complète transformation spirituelle.
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LA POLITIQUE DU BOUDDHISME A L’ÉGARD DU PROBLEME DU RACISME ET DES CASTES


Comme on l’a vu dans le chapitre précédent,
le bouddhisme a toujours proclamé l‘unité de l’humanité et nié que la naissance puisse ou doive constituer un obstacle au développement personnel et spirituel.

Les distinctions de race et de caste sont sans doute commodes, mais trompeuses, et n’ont en tout cas rien d’absolu.

D’après le bouddhisme, les différences de caste correspondent seulement à des différences de profession ; or, il semble qu’à l’époque on était encore relativement libre de choisir sa profession, voire d’en changer. Les préjugés et les discriminations de caste n’étaient pas encore définitivement établis ; les brahmanes s’occupaient précisément de formuler les sanctions religieuses et juridiques nécessaires pour assurer la perpétuation du système existant.

Dans cette conjoncture, nous voyons que le Bouddha et ses disciples ne tiennent aucun compte de la naissance pour l’admission dans l’Ordre monastique et s’efforcent au contraire, par la persuasion et l’exemple, d’éliminer les préjugés et discriminations de caste suscités par les brahmanes.

« Le Bouddha ignore entièrement et absolument aussi bien les privilèges que les incapacités qui s’attachent à la naissance, à la profession ou à la condition sociale ; et il ne tient compte d’aucun des interdits ou des prescriptions arbitraires de caractère »

Des gens de toutes castes étaient admis dans l’Ordre monastique, et ils devaient même changer de nom et de titre pour éviter de rappeler leur rang et- leur naissance.


On raconte, par exemple, que des moines, pénétrés de l’importance de leur rang, voulurent monopoliser des logements au détriment d’Anciens de l’Ordre.

Le Bouddha leur demanda :

- Dites-moi, frères, qui mérite le meilleur logement, la meilleure eau, le meilleur riz ? - Quelques-uns répondirent : Celui qui était noble avant d’entrer dans la communauté
- D’autres : Celui qui était à l’origine un brahmane, ou un homme riche ».

Et le Bouddha leur dit : « Dans la religion que j’enseigne, la préséance en matière de logement, et en toute matière analogue, n‘appartient pas à celui qui était noble, ou brahmane, ou riche avant d’entrer dans l’Ordre. »


Parmi les membres les plus éminents de l’Ordre monastique, on compte des représentants des « basses » castes:
Upali - le plus compétent après le Bouddha pour tout ce qui touche aux règles de l’Ordre; avait exercé le métier de barbier, l’un des plus méprisés de ceux qui étaient réservés aux « basses » castes.
Les nonnes Punna et Punnika avaient été esclaves.(...)


Comment le Bouddha s’adressait-il aux hommes et aux femmes des conditions les plus humbles, pour leur faire prendre conscience du patrimoine spirituel dont sont riches tous les êtres humains, même s’ils sont méprisés par certains qui les jugent voués aux travaux serviles ?

A ce propos, le mieux est de citer les paroles de quelqu’un qui a accèdé à cette conscience, non par la grâce, mais par son effort : personnel.

Voici les vers, que Sunita le balayeur, a composé pour raconter sa vie et son élévation spirituelle :

Humble est le clan ou je suis né, Infimes étaient mes ressources, misérable mon sort, vile ma tâche : je balayais les fleurs fanées.
Nul ne se souciait de moi, j’étais méprisé, insulté ; J’humiliai mon esprit et courbai la tête Vénérant une belle légende populaire.
C’est alors que je vis venir l’illuminé, Entouré et suivi de son escorte de bhikkhus (moines), illustre héros pénétrant dans la grande cité de Magadha.
Je déposai mes corbeilles et mon joug, et je vins là où je pouvais faire ma soumission ;
Et pour moi, dans sa grande bonté, Le Chef des hommes fit halte.
Prosterné à ses pieds, me tenant là, Je priai le Maître de m’autoriser à entrer dans l’Ordre Et à le suivre, lui, le Maître de toutes les créatures.
Et lui, dont la tendre miséricorde veille sur le monde entier, Me répondit : "Viens, bhikkhu" dit-il, Me conférant ainsi l’ordination.

Et seul, retiré dans les profondeurs des forets, Animé d’un zèle inlassable, j’appliquai les paroles du Maître, Les conseils du Conquérant.
Et voici que, pendant la première veille de la nuit, surgirent de lointains souvenirs de la chaîne des vies passées.
Et pendant la veille du milieu de la nuit, l’oeil des cieux, La vision céleste se clarifia.
Et pendant la dernière veille de la nuit, je fis éclater Les ténèbres de l’ignorance.
Puis, comme la nuit faisait place à l’aurore Et que se levait le soleil, vinrent Indra et Brahma, Me rendant hommage, les mains jointes :

« Gloire à toi, noble fils des hommes ! Gloire à toi, ô le plus haut parmi les hommes ! Toutes les ivresses sont mortes pour toi ; Et tu es digne, noble Seigneur, de recevoir des dons. »
Et le Maître, me voyant entouré et suivi D’une escorte de dieux, un sourire se jouait sur ses lèvres, Me dit ces mots : « Grâce à la discipline d’une vie simple, à l’austérité, A la maîtrise de soi, l’homme devient saint ; C’est là la sainteté suprême ! »



En enseignant aux moines et aux nonnes de l’Ordre à réaliser le plein épanouissement de leurs facultés spirituelles, non seulement on ne faisait pas appel aux sentiments de caste ou de race, mais on considérait ces sentiments comme des obstacles à la vision spirituelle et à la vie morale.


Dans l’Ordre bouddhiste, il n’existait aucune distinction fondée sur la naissance. Les moines et les nonnes se rendaient chez des gens de toutes castes, pour prêcher ou prendre leurs repas - non sans s’exposer à des désagréments.

Il arriva au Bouddha d’être injurié par des brahmanes auxquels il demandait un repas, et lorsqu’on voulait savoir quelle était sa race ou sa caste, il répondait invariablement :
« Ne m’interrogez pas sur ma naissance »

Il lui arriva de parcourir des villages de brahmanes sans obtenir la moindre parcelle de nourriture.

Ses disciples l’imitaient, ignorant les distinctions et les pratiques de caste dans leurs rapports avec leurs semblables.

Ananda - l’un des plus proches disciples du Bouddha et son porte-parole lors du 1er Concile - est le héros de l’histoire suivante:

Ce jour-là, le vénérable Ananda s’habilla de bonne heure et, prenant son bol et son manteau, il pénétra dans la grande cité de Stravasti pour y demander l‘aumône. Ayant fait sa tournée et terminé son repas, il s’approcha d’un puits. Or, une jeune fille malanga (paria), nommée Prakrti, se trouvait au puits pour tirer de l’eau.
Et le vénérable Ananda dit à la jeune fille : « Donne moi de l’eau, ma soeur, car j’ai soif. »
Elle répondit : « Je suis une matanga, ô révérend Ananda ».
« Ma soeur, je ne t‘ai pas questionnée sur ta famille ou ta caste ; je t’ai demandé, s’il te restait de l‘eau, de m’en donner car j’ai soif ».
Alors elle donna de l’eau à Ananda.


Non seulement les moines et les nonnes, mais aussi les laïques, doivent pratiquer la compassion. Les stances ci-après, que récitent fréquemment, aujourd‘hui encore, les bouddhistes laïques, donnent une idée de ces sentiments :

Que tous les êtres vivants,
faibles ou forts, Longs ou grands, moyens, petits, courts ou gros,
Visibles ou invisibles, vivant près ou vivant loin, Nés ou à naître,
Que toutes les créatures soient heureuses.
Que nul ne trompe, que nul ne méprise qui que ce soit, où que ce soit,
Que nul ne souhaite du mal à qui que ce soit, par colère ou ressentiment.
De même qu’une mère, au risque de sa vie, veille sur son seul enfant,
De même que chacun cultive un esprit d’infinie bienveillance à l’égard de tous les êtres.

Il est impossible d’éprouver des sentiments de ce genre si l’on a des préjugés ou des haines d’ordre racial. Les disciples laïques sont invités à ne jamais s’enorgueillir de leur naissance, à renoncer à toute vanité de race ou de caste.


Dans un sermon où sont énumérées les caractéristiques de l’homme qui progresse et de celui qui dégénère, la vanité est considérée comme l’une des causes de la déchéance : « L’homme fier de sa naissance, de sa fortune ou de sa famille qui méprise son semblable est dégénéré »



Parmi les métiers "interdits" aux bouddhistes figure le commerce des esclaves, « le trafic des êtres humains » celui-ci n’étant pas compatible avec « le mode de vie juste » que doit suivre chaque bouddhiste.

Chacun doit respecter la dignité humaine des serviteurs vivant à son foyer:
« ne pas les accabler de travail, leur donner de bons repas et de bons gages, les soigner quand ils sont malades, partager avec eux les aliments et les friandises, leur donner assez de congés et de loisirs ».


Ainsi, le bouddhisme améliore le sort d’une classe de gens dont les textes brahmaniques disent qu’ils sont nés ou créés pour servir, qu’ils peuvent être chassés ou tués à volonté.

(...)

Dès l’origine, le bouddhisme a eu ses « missionnaires », chargés d’apporter à toute l’humanité un message de vérité et d‘amour :

« Allez, dit le Bouddha à ses disciples, je suis délivré de toutes les chaînes, humaines et divines. Et vous aussi vous êtes délivrés de toutes les chaînes humaines et divines. Allez, parcourez le monde pour le profit de la multitude, pour le bien-être de la multitude, par compassion pour l’univers, pour le bien, pour le profit et pour le bien-être des dieux et des hommes... »

Et ils devaient aller ainsi, pour tenter de comprendre .... toutes sortes de peuples et de tribus, sans se soucier des périls du voyage ou du danger de leur mission, armés des seules armes de la vérité et de l’amour. Ils devaient pratiquer la compassion.(...)


(...) D’après les livres bouddhiques, les brahmanes appelaient le Bouddha « Gautama le reclus, qui proclame le salut possible pour toutes les castes. »(...)

Cependant, (certains auteurs) qui n’ont étudié qu’une partie des Jatakas et négligé la majorité des textes du Canon- déclarent : « C’est une erreur de considérer le Bouddha comme un réformateur social et le bouddhisme comme une révolte contre le régime des castes. » Ils admettent toutefois que « l’influence générale du Bouddha s’est exercée dans le sens du libéralisme. »


On peut donc admettre que le mouvement bouddhiste a, pour le moins, contribué dans une grande mesure à l’assouplissement du système des castes


Au cours des deux mille cinq cents ans de son histoire, le bouddhisme s’est répandu dans de nombreux pays, peuplés de races diverses, mais son rayonnement a été dans l’ensemble limité à l’Orient. C’est peut-être à son influence prolongée que les races de l’Asie doivent d’être si étroitement unies par l’esprit et, dans la meusre OU cet esprit se caractérise par la non-violence et la tolérance - si audacieuse que soit une telle généralisation - cette influence s’étend à l’univers entier. L‘unité dont il s’agit n’est certes pas une unité stricte de doctrine, car le bouddhisme n’a jamais cherché à imposer une orthodoxie ou a refréner la liberté de pensée.


« L’absence d’agressivité est l’un des traits les plus remarquables du bouddhisme Il y a chez le bouddhiste une sorte de douceur à laquelle tout le monde doit être sensible, me semble-t-il. Mais cette douceur et cette absence d’agressivité ne sont pas de la faiblesse. Elles ne sont pas inspirées par la peur. La non-agressivité du bouddhiste dissimule une réserve de force. C’est la douceur de l’homme fort qui refuse de se frayer brutalement un chemin dans la foule, ou celle de l’homme réfléchi qui est convaincu que l’enjeu n’en vaut pas la peine. Parce qu’ils sont doux, parce que les exhortations du Fondateur sont toujours présentes à leur mémoire, et parce qu’ils subissent l’influence de sa personnalité et veulent suivre son exemple, les bouddhistes n’ont jamais cessé, dans tous les pays où ils ont vécu, de prêcher et de pratiquer (l’amour) universel et la sympathie pour tous les êtres doués de sensibilité. »

(...)
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axiste
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Inscription : 09 mai 2008, 05:39

Merci pour cette synthèse et le rappel de l'humilité jap_8 love3
Cinq clefs pour la parole correcte :
- dire au bon moment, prononcer en vérité, de façon affectueuse, bénéfique et dans un esprit de bonne volonté."
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davi
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Merci Tirru.
Le Bouddha montre ensuite que les distinctions faites entre les hommes ne répondent pas à des différences biologiques fondamentales, mais à des classifications conventionnelles.
D'où l'importance fondamentale de savoir distinguer conventionnalité et réalité. jap_8
S'indigner, s'irriter, perdre patience, se mettre en colère, oui, dans certains cas ce serait mérité. Mais ce qui serait encore plus mérité, ce serait d'entrer en compassion.
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