Tendances lourdes, d'ou cela vient ?

Compagnon

Question posée à ceux qui sont peut être mieux informés et plus avancés que moi sur la voie (qui "voient mieux"/comprennent mieux parce qu'ils voient mieux justement, grâce au couple connaissance intellectuelles livresque + méditation).

Question :

Arrivé approximativement à la moitié de cette vie (en gros), je peux maintenant savoir en gros quelles sont certaines "tendances lourdes" de mon caractère (ou si vous préféré du caractère du "pseudo-moi" illusoire dans la manifestation physique - ma forme actuelle - du flux de conscience "karmique" qui m'est propre... bon suis pas sûre que ce soit très clair...).

Donc que, en langage conventionnel, je commence à me connaître assez bien et a voir quels sont les traits de caractère, "bons" ou "mauvais" qui se manifestent de la manière plus fréquente, récurrente et puissante (que ce soit pour mon bonheur ou mon malheur).

Est ce que ces "tendances lourdes" de ma "personnalité" actuelle (langage conventionnel), sont les "effets" ou les "conditionnements" issus du karma passé de mes vies antérieures ? Est ce que la "cocktail" , la "composition" du cocktail de ma personnalité actuelle s'explique comme une production issue du karma de mes vies passées ?


Exemple concret : il y a des problèmes sérieux de troubles nerveux dans la famille, troubles de l'humeur, dépression etc... En ce qui me concerne, j'ai par le passé (mais je me soigne - merci la méditation !) eu une tendance nette à l'anxiété envahissante, à m'inquiéter constamment pour plein de choses futiles (à m'en rendre malade physiquement). Cette tendance lourde à l'angoisse, à l'anxiété, est ce par exemple le fruit d'une vie passée ou j'aurais suscité chez d'autres l'angoisse et l'anxiété ? Par exemple en étant un brigand terrorisant des gens, faisant régner la peur, ou un père de famille agissant en tyran domestique etc... ?

Est ce donc que ces tendances lourdes relèvent du karma passé ? De la conditionnalité ? Des la 3ème et la plus subtile forme de dukkha ? Samkhara-dukkha (être conditionné et conditionner à son tour) ?

PS : surtout s'il vous plait prenez le temps de bien lire la question (les questions), et d'être certain de bien comprendre ce que je demande, si vous avez un doute, dites le moi, vérifiez d'abord que vous avez bien compris la question, et que donc vous allez répondre à la question et non pas à ce que vous "croyez être la question". J'ai mis en gras le coeur de la question pour que ce soit bien visible.

Merci
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chercheur
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Bonjour Compagnon,

Je ne suis pas un expert, alors je ne pourrai que parler de ma petite vie et de ma propre réflexion au sujet d'elle.

On connait tous les tenants et aboutissants de la loi du karma, en tout cas dans les grandes lignes. Nous avons tous, je crois, cette vision, que notre vie actuelle est le fruit de notre vie passée. Mais pas que ! Et c'est là d'où vient notre salut.

Je pense que les karmas passés nous donnent aussi les circonstances karmiques, le contexte dans lequel on évolue actuellement. Et à ce qu'il parait on "choisit" nos parents. L'astrologie (c'est bouddhiste ça?)donne pas mal d'éléments sur les contextes et les influences karmiques.

Mais heureusement il y a le libre-arbitre. Tout n'est pas une histoire de conditionnement (quoique). Je peux dès maintenant faire un choix. Et quand j'ai commencé à méditer je me suis aperçu que cette espace de choix s'ouvrait. Par exemple, je ne suis plus qu'énervement mais maintenant je vois cette irritation, et là j'ai un choix : soit je continue soit je m'arrête là. Après ce qui est bien dans la loi du karma, c'est qu'en m'habituant à m'arrêter là, il me devient beaucoup plus facile de m'arrêter d'être en colère à l'avenir.

Après, je crois que beaucoup de choses se passent lorsqu'on est enfant et ado. Déjà, quand il vient au monde un enfant n'est pas une page blanche , je crois que tout parent a pu remarquer cela. Et puis, mine de rien, un enfant ça enregistre énormément de choses. Et notamment, des perceptions et des sensations. "Ca me fait mal quand papa me crie fort dans les oreilles", "son visage n'est vraiment pas beau quand il est comme ça"... Puis à un moment il reliera des émotions à des actions : 'quand je veux un gâteau, je suis en colère et quand je crie ou pleure très fort, maman va me donner mon gâteau." et là une trame se tisse... Il peut notamment imiter les comportements de ses parents dans certaines situations. Y a les fameux neurones miroirs aussi... Tout ça on l'enregistre.

Quand j'ai peur ( je suis un angoissé, à tendance parano ), je me demande pourquoi ai-je peur ? j'essaye d'explorer ce sentiment, d'où il vient, quelle partie de moi a besoin d'être rassurée, d'être en sécurité. Tiens, ça me fait penser à l'enfant intérieur de thich naht hahn ( voir son livre sur la colère ). Voir un psy ça m'a fait du bien, pour parler mais aussi pour couper avec papa et maman ( et ça prend toute une vie ) mais là je glisse dans le hors-sujet. Tout ça pour dire que quand tu as 40 ans, tes 40 dernière années sont aussi des vies passées en quelque sorte.

On peut parler des vies passées, mais n'oublions qu'on vit dans le présent ! Quand nous sommes maintenant, nous sommes une somme de choses passées mais aussi un avant-goût de notre futur. Si tu étais un brigand, (tu ne le sauras que quand tu seras à un stade avancé), la meilleure manière de réparer les actes mauvais c'est maintenant ! on ne peut plus retourner dans le passé changer les faits de toute façon.

En espérant avoir répondu un peu à ta question... Difficile d'y répondre sans faire de digressions ni donner des conseils.

PS: j'ai édité plusieurs fois ma réponse c'est trop mal écris !
Dernière modification par chercheur le 08 juin 2017, 15:18, modifié 1 fois.
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chercheur
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Bon en fait ça irai plus vite de dire que je ne sais rien :lol:, bref mon analyse reste mon analyse, désolé !

En lisant light of wisdom de Pa auk sayadaw ( voir thread ou se trouve notre mémoire ? ) je suis tombé là-dessus :
Are the Nàma and Rupa of
present life produced by Avijjà, Tanhà, Upàdàna, Sankhàra, Kamma
accumulated in the present life? No,they are not. The Avijjà, Tanhà,
Upàdàna, Sankhàra, Kamma of the present life is the cause of future
life
. Only the Avijjà, Tanhà, Upàdàna, Sankhàra, Kamma
accumulated in the past life are the cause of Nàma and Rupa in the
present life
. Without discerning the past can one be able to realize that
the present Nàma and Rupa arise because of past Avijjà, Tanhà,
Upàdàna, Sankhàra, Kamma? It is necessary to realize it in the
Paccaya Pariggaha Mina stage.
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jules
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Compagnon : Arrivé approximativement à la moitié de cette vie (en gros), je peux maintenant savoir en gros quelles sont certaines "tendances lourdes" de mon caractère (ou si vous préféré du caractère du "pseudo-moi" illusoire dans la manifestation physique - ma forme actuelle - du flux de conscience "karmique" qui m'est propre... bon suis pas sûre que ce soit très clair…).
Je voulais juste réagir à cette explication qui à mon sens justement est très claire, et dire que c’est justement cette clarté qui à mon sens, en se diffusant petit à petit par la pratique, induira de plus en plus de détachement vis à vis de ce que tu appelles le « pseudo-moi ». C’est ta véritable nature qui en quelque sorte parle dans cette analyse, en tous les cas, il me semble bien que l’oreille si je puis dire, qui s’avère capable de comprendre ce que tu dis ici, soit bien celle de ma véritable nature.
Compagnon

@Chercheur/Jules : merci pour vos réponses.
ted

Compagnon a écrit :
08 juin 2017, 07:21

Est ce que ces "tendances lourdes" de ma "personnalité" actuelle (langage conventionnel), sont les "effets" ou les "conditionnements" issus du karma passé de mes vies antérieures ? Est ce que la "cocktail" , la "composition" du cocktail de ma personnalité actuelle s'explique comme une production issue du karma de mes vies passées ?
Bonjour Compagnon

La réponse est loin d'être binaire.
Il s'agit de savoir si ce que tu appelles "tendances lourdes" sont au niveau du désir ou du passage à l'acte.

Premièrement, je re-cite l'exposé de Zopa sur le développement d'une voie karmique :
Zopa2 a écrit :
28 avril 2017, 21:22
Le Lamrim distingue en effet des actions (karma) complètes aux résultats certains avec des actions non complètes aux résultats incertains. On dit aussi voie karmique complète et voie karmique incomplète. Pour qu'il y ait voie karmique complète, il faut la présence de 4 facteurs :

1-L'intention ( peut être vertueuse, non vertueuse ou neutre )
2-l'objet ( dans mon exemple, la fourmi)
3- l'action proprement dite
4- le résultat de l'action (son aboutissement, le fait qu'elle soit accomplie entièrement et produise un résultat sur son objet) et le fait d'éprouver de la satisfaction (se réjouir de) d'avoir accompli cette action.

Le Lamrim dit que si ces 4 facteurs sont présents, les trois types de résultats karmiques pourront être expérimentés.
Deuxièmement je prends comme exemple une histoire tibétaine (que je cite de mémoire).

Un jeune homme, pratiquant sans histoire apprend, lors d'un entretien de routine avec son Lama, qu'il a un mauvais karma avec l'alcool. Le lama lui recommande de ne jamais mettre les pieds dans un bar. Ca amuse le gars, parce qu'il ne boit pas et n'est pas du tout tenté par les bars. Mais ayant confiance en son Lama, il applique le conseil et évite soigneusement les bars, même pour accompagner un ami ou pour demander son chemin.

Devenu un homme d'âge mûr, marié, ayant plusieurs enfants devenus grands, il passe un jour devant un bar et se souvient de cette interdiction ancienne que lui avait faite son Lama. Ca l'amuse. Il repense à sa vie, qui a été plutôt vertueuse et se dit en lui même qu'il n'a plus rien à craindre.

Sur de lui, il pousse la porte du bar et y pénètre. Le premier bar où il entre depuis 40 ans ! Le bar est presque vide. Il s'approche du comptoir et demande un verre. La dessus, un ivrogne surgit du fond de la salle et le bouscule en passant, lui faisant renverser son verre. Instinctivement, l'homme proteste : "Vous pourriez faire attention !".

L'ivrogne revient sur ses pas. Une brève altercation a lieu. Subitement, il sort un couteau et poignarde l'homme mortellement.

Moralité : Même si on mène une vie vertueuse et irréprochable, on n'échappe pas au fruit d'un karma, mais à condition que toutes les conditions soient réunies.

La pratique bouddhiste va développer chez nous une intuition qui nous permettra de sentir, de deviner, que des situations anodines, des actes apparemment inoffensifs, vont être les déclencheurs de conséquences karmiques en attente.

Tant pis si les gens vous prennent pour un maniaque : suivez vos intuitions ou suivez les conseils du maître. Vous éviterez peut être des karmas négatifs.

C'est valable aussi pour les karmas positifs : sachez tenter votre chance même si, apparemment, aucun espoir ne subsiste.


Troisièmement
J'aimerais bien remplacer le terme "tendances lourdes " par empreintes karmiques lourdes.
Dans ce cas, la vie n'est pas facile. C'est comme une voiture au parallélisme mal réglé et qui "tire à gauche". Tant qu'on garde les mains fermement sur le volant, elle va tout droit et reste sur la route. Mais si on lâche le volant quelques secondes, elle part progressivement à gauche et va s'encastrer sur le véhicule qui arrive en face. Une telle voiture demande une vigilance permanente.

La pratique bouddhiste, en développant l'observation et la connaissance de nous même, nous permet de mettre en place les antidotes à ces empreintes parfois héritées de constellations familiales. Donc, rien n'est inéluctable pour celui qui reste vigilant. Aussi lourdes que soient ses empreintes.

Les non-vigilants sont emportés par les vents du karma, par le déterminisme. Par la force des habitudes.


Quatrièmement
Pour répondre à ta question, tes actions actuelles sont peut être "amorcées" par des empreintes karmiques (le démarreur électrique) mais c'est toi qui avec l'intention, va leur donner le carburant thermique nécessaire pour les réaliser jusqu'au bout (voie karmique complète).

Il faut simplement que tu réalises que le coup de démarreur électrique, ce n'est pas toi, ce n'est pas ta personnalité, ni ton caractère. C'est un héritage qui te vient d'une vie antérieure. C'est la programmation du stream qui pénètre le citta où tu te trouves.

A toi de t'y abandonner ou pas. Suivant que le coup de démarreur de cette empreinte soit kusala ou akusala.

Nous avons hélas tendance à considérer que ce qui surgit dans notre conscience est nôtre et que "nous ne pouvons pas nous en empêcher". C'est pas vrai. En calmant l'esprit, avec le calme mental stable de samatha, on voit très bien la génération spontanée de la coloration mentale.

En fait, elle est issue du stream qui coule dans le citta, en provenance du citta précédent qui vient de disparaître. C'est le constructeur. Et ça ne devient la construction que si nous l'alimentons avec notre intention, notre action délibérée et notre pleine satisfaction.
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davi
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Ted a écrit :Les non-vigilants sont emportés par les vents du karma, par le déterminisme. Par la force des habitudes.
Tenzin Wangyal Rinpoché a écrit :Les empreintes karmiques résultent des actions, restent dans la conscience mentale et influencent notre avenir. Nous pouvons comprendre en partie ce qu'elles sont en les rapprochant de ce qu'on appelle en Occident les tendances inconscientes. Ce sont des penchants, des schémas de comportement intérieur et extérieur, des réactions invétérées, des manières de penser habituelles. Ces tendances régissent nos réactions émotives aux événements et notre compréhension intellectuelle, de même que les émotions habituelles qui nous caractérisent, et nos rigidités mentales. Elles créent, et conditionnent, chacune des réponses que nous donnons normalement à chacun des éléments de notre expérience.
http://www.clairelumiere.com/index.php? ... ivre_id=49
S'indigner, s'irriter, perdre patience, se mettre en colère, oui, dans certains cas ce serait mérité. Mais ce qui serait encore plus mérité, ce serait d'entrer en compassion.
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davi
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Ted a écrit :A toi de t'y abandonner ou pas. Suivant que le coup de démarreur de cette empreinte soit kusala ou akusala.

Nous avons hélas tendance à considérer que ce qui surgit dans notre conscience est nôtre et que "nous ne pouvons pas nous en empêcher". C'est pas vrai. En calmant l'esprit, avec le calme mental stable de samatha, on voit très bien la génération spontanée de la coloration mentale.

En fait, elle est issue du stream qui coule dans le citta, en provenance du citta précédent qui vient de disparaître. C'est le constructeur. Et ça ne devient la construction que si nous l'alimentons avec notre intention, notre action délibérée et notre pleine satisfaction.
Tenzin Wangyal Rinpoché a écrit :Il est utile de comprendre que le karma est la loi de causalité, car cela conduit à reconnaître que les choix faits en réponse à n'importe quelle situation, extérieure ou intérieure, ont des conséquences. Lorsque nous comprenons vraiment que chaque empreinte karmique porte en germe une action future régie par le karma, nous pouvons utiliser ce savoir pour éviter de créer la négativité dans notre vie et pour créer, au contraire, les conditions qui l'orienteront positivement. Ou bien, si nous savons comment faire, nous pouvons laisser les émotions s'auto-libérer dès qu'elles surviennent; aucun nouveau karma n'est plus créé.
http://www.clairelumiere.com/index.php? ... ivre_id=49
S'indigner, s'irriter, perdre patience, se mettre en colère, oui, dans certains cas ce serait mérité. Mais ce qui serait encore plus mérité, ce serait d'entrer en compassion.
Compagnon

@Ted : La façon dont je l'entendant c'est l'inclination comme préprogrammé à certains types de comportements en ayant tendance à les manifester de manière spontanée et quasi par réflexe ou automatisme selon les situations. Un conditionnement quoi.

Vous connaissez le procédé dit du "chien de Pavlov" ? Eh bien c'est comme d'être un chien de Pavlov mais en ayant oublié qu'on a été conditionné, on réagis automatiquement a certaines situations d'une certaine manière.

Sachant que l'on est aussi bien conditionné par notre entourage, notre culture, notre époque, par nous même, mais je pensais aussi en terme de karma passé se réalisant dans le présent. Un peu comme des "programmes" ou des "logiciels" automatiques préprogrammés, rentrés dans le disque dur de notre flux de conscience, et dont on a oublié qu'ils ont été implantés, résultat ils se déclenchent automatiquement et nous font réagir d'une telle façon plutôt qu'une autre. On réagis d'une certaine façon mais on ne sait pas pourquoi on le fait.

C'est plus explicite là ?

Est ce que ma question initiale est plus claire éclairée ainsi. Cela ne relève t'il pas de samkara-dukkha ? On "naît" (du verbe naître) et on est (du verbe être) conditionné dés la naissance et en plus on conditionne les autres.
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Moi j'y crois mais qu'à moitié, je trouve ça effrayant.

Quelque part ça repose l'éternelle question du libre-arbitre. Eric Baret disait que c'est terrible de vivre avec l'idée de choix, car ca veut dire qu'on peut se tromper et avoir des regrets. Il dit aussi que le libre-abritre ça n'a qu'une valeur juridique :)
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