Comprendre la première noble vérité

Dumè Antoni

J'avoue ne pas comprendre votre entêtement à considérer ce qui est pourtant essentiel parce que ça sert de support au Dharma et qui est la 1ère Noble Vérité. Je n'ai jamais parlé de dukkha comme d'un sentiment (j'ai même ouvertement critiqué Ted quand il en faisait du "pathos"). J'ai dit aussi que les 4NV sont indissociables. Mais considérer, comme le fait le bikkhu, que "la vie n'est pas souffrance", est contraire au dharma et il n'y a aucun "agrippement" de ma part à le souligner. La fin de dukkha, c'est Nibbana et point final. Sans Nibbana, il n'y a pas de fin à dukkha et les petites joies des bisounours sont de pitoyables caricatures du dharma.

Cela étant dit, je quitte ce fil.
ted

Dumè Antoni a écrit :Mais considérer, comme le fait le bikkhu, que "la vie n'est pas souffrance", est contraire au dharma et il n'y a aucun "agrippement" de ma part à le souligner.
Si tu dis ça, on régresse dans la traduction de "souffrance". :-(
Je trouve qu'on avait progressé grâce aux définitions plus fines de dukkha que Tirru avait postées :
- dukkha-dukkha
- viparinama-dukkha
- samkhara-dukkha
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tirru...
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Je trouve ce fil très intéressant au contraire car il permet de clarifier le sens des mots. L'un des principaux obstacle à la compréhension du Dhamma c'est souvent les mots qui sont mal rendus et dans le cas présent, il s'agit de définir dukkha or ce qui est dit est que limiter le mot dukkha à sa traduction souffrance est trompeur car son sens est autrement plus large et ne se limite pas uniquement au mot souffrance qui par voie de conséquence laisse croire que le bouddhisme est fataliste et pessimiste.

Même Wikipédia à tout compris et les trois sortes de dukkha évoqués par Ted y sont :
Le mot « dukkha » (duḥkha en sanskrit) est souvent traduit par « souffrance » ou « douleur », ce qui est réducteur. Il revêt bien des significations dans l'enseignement du Bouddha : celles d'insatisfaction, d'imperfection, d'impermanence, de conflit, et de non substantialité. Chaque maître en expose un aspect : ainsi, Ajahn Chah la caractérisait par l'incertitude, tandis que pour Ajahn Brahm c'est "demander à la vie ce qu'elle ne peut nous donner". Le terme pali dukkha est donc couramment employé, faute de traduction adéquate.

Cette traduction « souffrance » vaut au bouddhisme la réputation d’être pessimiste, alors que le message du Bouddha est fondamentalement optimiste puisqu’il dit que l’on peut se libérer de cette insatisfaction ou souffrance.

La souffrance revêt trois aspects : la souffrance physique et mentale ; la souffrance causée par le changement ; la souffrance causée par le conditionnement. La souffrance imprègne tous les niveaux d'existence, des plus inférieurs aux plus élevés, y compris ce que l'on tient habituellement pour des états agréables : « ce que l'homme ordinaire appelle bonheur, l'être éveillé l'appelle dukkha » (Samyutta Nikâya, 35, 136).
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ted

Dumè, on est tous d'accord que sukkha est dukkha. Mais samkhara-dukkha !
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tirru...
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Encore un peu de lecture au sujet de dukkha :
Walpola Rahula a écrit :Il est vrai que dans l'usage courant le mot dukkha a le sens de souffrance, douleur, peine, misère, par opposition au mot sukha qui signifie bonheur, aise, bien-être. Mais le terme dukkha en tant qu'il exprime la première noble vérité qui représente le point de vue du Bouddha sur la vie et le monde, revêt un sens plus profondément philosophique et comporte des significations beaucoup plus étendues. On admet que le mot dukkha, dans l'énoncé de la première noble vérité, comporte évidemment le sens courant de “souffrance”, mais qu'en plus il implique des notions plus profondes “d'imperfection”, “d'impermanence”, de “conflit”, de “vide”, de “non-substantialité”. Il est donc bien difficile de trouver un mot qui embrasse tout ce que contient le terme dukkha. dans l'énoncé de la première noble vérité. Par conséquent, il vaut mieux s'abstenir de le traduire que de risquer d'en donner une notion inadéquate et fausse en le rendant simplement par “souffrance” ou “douleur”.

Le bonheur et la souffrance sont relatifs. La vie ne peut pas être uniquement bonheur ou souffrance. Le Bouddha ne nie pas le bonheur qu'on rencontre dans la vie quand il constate qu'il y a de la souffrance. Il admet au contraire qu'il y a différentes formes de bonheur, matériel et spirituel, pour les laïcs aussi bien que pour les moines. Dans l'anguttara-nikaya qui est l'un des recueils originaux en pali contenant les discours du Bouddha, on trouve une énumération de différentes formes de bonheur (sukhani) tel que le bonheur de la vie de famille, de la vie solitaire, des plaisirs des sens, du renoncement, de l'attachement et du détachement, le bonheur physique et le bonheur mental, etc... Mais tout cela est inclus dans dukkha. Même les très purs états spirituels de recueillement (dhyana) atteints par la pratique de la plus haute méditation, libres même de l'ombre de la souffrance dans le sens ordinaire du mot, décrits comme un bonheur sans mélange ; même l'état de recueillement qui est libéré de toute sensation agréable (sukha) ou désagréable (dukkha) et qui n'est plus que sérénité et attention pure — même ces très hauts états spirituels sont compris dans dukkha. Dans un des versets (sutta) du majjhima-niakaya (un des cinq recueils originaux), le Bouddha, après avoir fait l'éloge du bonheur spirituel de ces recueillements, dit qu'ils sont “impermanents, dukkha et sujets au changement”. Il convient de noter que le mot dukkha est ici employé explicitement. Ces états sont dukkha non pas parce qu'ils comporteraient de la “souffrance” au sens ordinaire, mais parce que “tout ce qui est impermanent est dukkha”.

Le Bouddha était réaliste et objectif. Il a dit qu'en ce qui concerne la vie et les plaisirs des sens, trois choses devraient être comprises clairement : 1. l'attraction ou jouissance (assada), 2. les conséquences mauvaises, le danger, l'insatisfaction (adinava) et 3. la libération (nissarana).

D'après cela il est évident que ce n'est pas une question de pessimisme ou d'optimisme, mais que nous devons tenir compte des plaisirs de la vie aussi bien que de ses douleurs et de ses peines, et également de la possibilité de s'en libérer afin de comprendre la vie objectivement. C'est ainsi seulement que la libération véritable deviendra possible. Le Bouddha dit à ce sujet :

— Ô bhikkhus, si les solitaires ou brahmanes ne comprennent pas objectivement de cette manière la jouissance des plaisirs des sens comme jouissance, leur insatisfaction comme insatisfaction, la libération à leur égard comme libération, il n'est alors pas possible qu'ils comprennent par eux-mêmes d'une façon certaine et complète le désir pour les plaisirs des sens, ni qu'ils soient capable d'instruire à cette fin une autre personne, ni que cette personne en suivant leur enseignement complètement le désir pour les plaisirs des sens.
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Dumè Antoni

Ted a écrit :Dumè, on est tous d'accord que sukkha est dukkha. Mais samkhara-dukkha !
Oui, enfin, on joue quand même un peu sur les mots, là. Dukkha est dukkha et je suis globalement d'accord avec ce que dit Walpola Rahula. Du reste, on peut remonter mes posts sur cette question et dans ce fil (dès le début), et l'on verra que je n'ai jamais limité dukkha à des sensations mais que j'ai au contraire spécifié que c'était bien plus que ça.
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tirru...
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Bonjour Ted,
ted a écrit :Pour une personne qui a accumulé des mérites, qui a désamorcé les renaissances inférieures, est-ce que le bonheur spirituel (même impermanent, même marqué de samkhara-dukkha) pourrait être une forme de choix volontaire raisonnable ??? :oops:
C'est un choix volontaire, personnel et raisonnable dans la mesure ou il y a deux voies : la voie de l'accumulation des bons mérites qui mène vers des naissances favorables (voie kammique) et la voie supérieur de la cessation de dukkha, qui est comme dit Wijayaratna, la voie nibbanique.
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ted

tirru... a écrit :Bonjour Ted,
ted a écrit :Pour une personne qui a accumulé des mérites, qui a désamorcé les renaissances inférieures, est-ce que le bonheur spirituel (même impermanent, même marqué de samkhara-dukkha) pourrait être une forme de choix volontaire raisonnable ??? :oops:
C'est un choix volontaire, personnel et raisonnable dans la mesure ou il y a deux voies : la voie de l'accumulation des bons mérites qui mène vers des naissances favorables (voie kammique) et la voie supérieur de la cessation de dukkha, qui est comme dit Wijayaratna, la voie nibbanique.
Bonjour Tirru

Mais les sotapanna, entrés dans le courant, auront bien au maximum 7 renaissances ? Et ça, qu'ils le veuillent ou non ?
Est-ce que le processus n'est pas indépendant de leur volonté ? Ne sont ils pas poussés vers le parinibbana ?

Je n'arrive pas à évaluer la part de libre-arbitre d'un sotapanna qui voudrait se maintenir plus de 7 vies ? :oops:
C'est peut-être là que Mahayana commence ?
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tirru...
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ted a écrit :Je trouve qu'on avait progressé grâce aux définitions plus fines de dukkha que Tirru avait postées :
- dukkha-dukkha
- viparinama-dukkha
- samkhara-dukkha
Encore quelques précisions extraites du Visuddhimagga concernant les trois sortes de Dukkha :
1-Dukkha comme douleur : "Est la sensation corporelle ou mentale de la douleur effectivement ressentie."

2- Dukkha comme transformation : "Est le fait que tout, même les plus grands plaisirs et états de bonheur, contient un germe de la douleur et de la souffrance, étant sujet à l'impermanence et aux transformations."

3-Dukkha comme formations : "Est la nature oppressive de toutes les formations d'existence par suite de leur continuelles apparitions et disparitions."Cf. Vis.XVI.2
<<metta>>
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ted a écrit :Mais les sotapanna, entrés dans le courant, auront bien au maximum 7 renaissances ? Et ça, qu'ils le veuillent ou non ?
Est-ce que le processus n'est pas indépendant de leur volonté ? Ne sont ils pas poussés vers le parinibbana ?

Je n'arrive pas à évaluer la part de libre-arbitre d'un sotapanna qui voudrait se maintenir plus de 7 vies ? :oops:
C'est peut-être là que Mahayana commence ?
C'est une question que je ne me suis jamais posée Ted et qui mérite d'être posée ! :?:
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