Dharmakaya

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tirru...
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Tout les chemins se rejoignent comme dans un entonnoir, chacun est à l'aise dans telle ou telle tradition et selon ces prédispositions et son affinité avec la culture de la tradition.

Merci pour le lien, d'autant que je suis un invétéré 'farang'. Je signale au passage que ce que j'ai écrit plus haut me donne l'impression de savoir, or je préfère me confronter à l'expérience vécue car si assurance il y a, elle est au pied du mur !
------------------------------------------------------------------------------ Image Sabba danam dhammadanam jinati - Le don du Dhamma surpasse tout autre don ImageDhammapada
ted

shalistamba a écrit : Par exemple lors d'une rencontre inter-bouddhiste l'un d'entre-nous (du dojo où je vais) a dit : "il n'y a pas de voie, nous sommes depuis toujours éveillé, il n'y a rien à faire".
C'est ce qui se passe quand on mélange les deux vues. Du point de vue conventionnel, il y a quelque chose à faire, il y a un chemin et il y a un éveil et un éveillé. Mais du point de vue ultime, les choses sont pures depuis l'origine, il n'y a pas de chemin, ni de voie, ni d'éveillé. Et l'éveil a toujours été là.

C'est donc une question de légitimité. Qui peut parler à partir du point de vue ultime ? :oops: Les éveillés.
Mais un enseignant peut utiliser cette phraséologie pour provoquer le lacher-prise chez l'adepte, shikantaza, "simplement s'asseoir", sans attente ni esprit de profit. Faut juste faire attention à ceux à qui on s'adresse. Ce sont des tournures de phrase qui peuvent être mal interprétées.

Je ne sais plus quel maître zen disait : " Oui. Il n'y a rien à faire. Mais il faut le faire".

En fait, c'est très dur de ne rien faire. C'est une des choses les plus difficiles au monde.
Même quand nous croyons être inactifs, nous entretenons des pensées, des attachements, des émotions, des croyances, qui nous plongent durablement dans le samsara.

Ton ami moine n'a donc pas tout à fait tort. Il a certainement dit cela dans un but didactique, a des personnes supposées le comprendre sans confusion.
Serge Zaludkowski

ted a écrit : En fait, c'est très dur de ne rien faire. C'est une des choses les plus difficiles au monde.
Absolument ted ... en fait, de manière subtile, on ne peut pas "faire" rien. Seulement lorsque la voie est aussi le fruit peut on finalement se reposer à la base. On ne triche pas avec la bouddhéité.

eveil_333
shalistamba

Mais un enseignant peut utiliser cette phraséologie pour provoquer le lacher-prise chez l'adepte, shikantaza, "simplement s'asseoir", sans attente ni esprit de profit. Faut juste faire attention à ceux à qui on s'adresse. Ce sont des tournures de phrase qui peuvent être mal interprétées.
Oui mais c'est justement ce genre de phrase qu' Antoni Dumé trouve consternantes. Et je peux difficilement lui donner tort sur ce point.

Il se trouve que nous étions dans un Centre bouddhiste de la lignée Karma Kagyu. Et que nous étions vraiment curieux des uns et des autres. Le contexte était bienveillant et nous avions médité ensemble donc je ne pense pas que nos propos aient été mal interprétées. Mais, je constate que dans le zen nous avons du mal à parler d'une seule voix.
Dumè a écrit:
Pour moi, c'est tout simplement faux parce qu'un Bouddha ne fait pas de prophéties (du moins dans ma tradition).
Je ne sais pas de quelle tradition il parle. Dogen écrit à propos des pouvoirs miraculeux "... La multitude des éveillés ne s'est jamais lassée de s'en servir jusqu'à nos jours. Parmi ceux-ci, il y a les six pouvoirs miraculeux" La traductrice énonce dans les notes en bas de page la liste des six pouvoirs dont (3) le pouvoir de l’œil céleste. une petite recherche sur internet m'apprend que l’œil céleste "peut voir par delà notre espace d'autre espaces-temps". Mais dans la suite du texte Dogen opère un renversement en considérant que les six pouvoirs sont des petits pouvoirs par rapport au grand pouvoir qui est "celui qui fait réaliser comme présence à la multitude des éveillés l'enseignement, la pratique et l'éveil attesté"
Donc oui un bouddha peut faire des prophéties mais s'il n'en fait pas c'est parce qu'il a mieux à faire.

Et puis il suffit d'écouter cette conférence, par exemple, pour entendre des voix discordantes (côté zen) et un joli dialogue de sourds entre Dominique Trotignon (côté Theravada) et les zennistes

http://www.bouddhismes.net/Conference_DZP_2012-13_1

J'en conclue que nous avons beaucoup à apprendre des uns et des autres.
ted a écrit:
En fait, c'est très dur de ne rien faire. C'est une des choses les plus difficiles au monde.
La contemplation pure ne me semble pas difficile à atteindre mais il est difficile de s'y maintenir plus de deux secondes.
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Dharmadhatu
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Shalistamba a écrit :Mais dans la suite du texte Dogen opère un renversement en considérant que les six pouvoirs sont des petits pouvoirs par rapport au grand pouvoir qui est "celui qui fait réaliser comme présence à la multitude des éveillés l'enseignement, la pratique et l'éveil attesté
jap_8 C'est confirmé dans le BT par les siddhis ordinaires (qui sont habituellement comptés au nombre de 5, bien qu'il y en ait plus dans le Vajrayana) et le siddhi suprême.

FleurDeLotus
apratītya samutpanno dharmaḥ kaścin na vidyate /
yasmāt tasmād aśūnyo hi dharmaḥ kaścin na vidyate

Puisqu'il n'est rien qui ne soit dépendant,
Il n'est rien qui ne soit vide.

Ārya Nāgārjuna (Madhyamakaśhāstra; XXIV, 19).
shalistamba

Si vous n'y voyez pas d'inconvénient j'aimerais revenir au sujet de ce fil.

Lors d'un mondo j'ai posé la question suivante :
Est-ce qu'un monastère bouddhiste est une usine à fabriquer du moine à l'identique?

Le maitre a répondu qu'il suffisait que je regarde autour de moi pour voir qu'il n'y a pas deux moines qui ont un visage identique mais que tous les moines disent la même chose chacun à sa manière.

A l'arrière plan de ma question il y avait l'idée que réaliser sa nature de bouddha revient à réaliser sa nature propre ce qui implique que nous avons un dharmakaya différent... Ce qui est la position d' Antoni Dumé. En critiquant la position d'Antoni Dumé c'était ma propre position que je critiquais. D'où l’intérêt pour moi d'intervenir sur ce fil (et uniquement sur ce fil)

Ma conclusion c'est que notre singularité est inaliénable mais que la voie consiste à s'harmoniser avec le dharma et a minima, avec la tradition. La tradition, que j'ai peut-être trop tendance à réduire à Dogen, nous pousse quand même à lâcher au maximum ce qui nous est propre ("s'oublier soi-même") mais à partir de l'étude de ce que nous sommes ("s'étudier soi-même"). Dogen critique malgré tout l'idée qu'il faudrait rechercher "la vision omnisciente"
"V-06 (p173) Maitre Dôgen nous a expliqué :
Apprentis de l'Éveil , si vous n'appréhendez pas l’Éveil, c'est que vous croyez toujours en vos propres vues erronées. Vous êtes convaincus - sans même savoir qui l'a enseigné à l'origine - que l'esprit est "une activité cérébrale" ou une "vision omnisciente", et vous ne croyez pas que l'esprit est "l'herbe et les arbres". Si je vous dis "bouddha" vous penserez probablement à ses caractéristiques et à son éclat, et si j'explique qu'il est des gravats, vos oreilles seront surprises. (...) Cependant, si aujourd'hui encore l'on vous disait que l'esprit c'est l'herbe et les arbres et que les gravats sont bouddha parce que c'est désormais l'enseignement arrêté par les bouddhas patriarches et que vous changiez immédiatement vos convictions originelles, vous appréhenderiez vraiment l'Éveil authentique."

Maître Dôgen - Les enseignements du maître zen Dôgen [Shôbôgenzô zuimonki]

Pour éclairer les propos de Dogen j'avais retenu une citation d'une philosophe contemporaine qui dit
Cynthia Fleury dans le Telerama du 29 Août au 4 septembre 2015

"Le sujet individué met en place un regard sur le monde extérieur, déploie et assure un socle, une assise, qui lui permet d'entrer en relation avec ce qui l'entoure. L'aventure de l'irremplaçabilité, la voie de l'individuation ressemble sous maints aspects à celle de la dépersonnalisation. Il ne s'agit pas de devenir une personnalité, d'être dans la mise en scène de l'ego. L'enjeu est au contraire relationnel: il s'agit de se décentrer pour se lier aux autres, au monde, au sens."
Il y a une tradition philosophique autour de Gilbert Simondon qui dit qu'on s'individue en se trans-individuant.
J'en conclue que par la pratique du bouddhisme on s'individue autant qu'on se desindividue en se transindividuant, d'où l’intérêt du sangha et de la relation maître-disciple ainsi que la transmission des textes.
Dharmadhatu a écrit
le Bouddha fait des prophéties sur le futur Eveil de certains disciples.
Dans le sutra du Lotus, le bouddha dit comment s'appelleront les futurs bouddhas sur la base de caractéristiques qui leurs sont propres. Ils sont donc singuliers mais ont la même nature.
ted

shalistamba a écrit : A l'arrière plan de ma question il y avait l'idée que réaliser sa nature de bouddha revient à réaliser sa nature propre ce qui implique que nous avons un dharmakaya différent... Ce qui est la position d' Antoni Dumé. En critiquant la position d'Antoni Dumé c'était ma propre position que je critiquais.
Comme le résume Dharmadhatu dans un autre fil, conventionnellement, chacun aurait son propre dharmakaya :
Dharmadhatu a écrit :Parce que tout ce qui existe, tout se qui se passe, n'est que le reflet grisâtre ou arc-en-ciel de la base. C'est pour ça qu'elle est désignée "base": elle est le fondement de tout ce qui existe. C'est le roi qui crée tout. Pas comme un Dieu créateur unique car il y a autant de rois que d'êtres.
Cette réponse a l'avantage d'éviter d'assimiler le dharmakaya à un Dieu créateur.
Elle déstabilise aussi les adeptes de l'équation : Dieu=Tao=NonNé=Univers=Brahman=Dharmakaya
Serge Zaludkowski

ted a écrit : Comme le résume Dharmadhatu dans un autre fil, conventionnellement, chacun aurait son propre dharmakaya
Oui ... mais cela ne signifie pas qu'il y ait plusieurs dharmakaya.
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yves
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Inscription : 26 février 2016, 13:01

shalistamba a écrit :...
nous avons une individualité physique indéniable, nous sommes une apparition unique au sein l'unité comme chaque vague est unique dans l'océan.

cela me fait un parallèle avec mon métier, un acteur se demandait en quoi son "interprétation" du personnage lui était propre alors que lui tentait de "s'effacer" pour laisser le personnage en avant; le metteur en scène lui à répondu "tu es ce que tu es, tu n'as rien à faire pour cela, ainsi quand tu joues ton personnage plus tu vas "t'effacer" plus tu seras proche de "ton" interprétation"

anjalimetta
oui à ce qui est
tout change
tout est maintenant
être tout
amour
ted

Serge Zaludkowski a écrit :
ted a écrit : Comme le résume Dharmadhatu dans un autre fil, conventionnellement, chacun aurait son propre dharmakaya
Oui ... mais cela ne signifie pas qu'il y ait plusieurs dharmakaya.
Ca m'a l'air contradictoire.
C'est un koan dzogchen ?? :D :oops: :lol:
crysmiley
:roll:
jap_8
:arrow:
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