Pourquoi ?

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jules
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Dumè : Ben, en fait, je ne suis pas certain que nous disions la même chose.


Nous ne disons pas la même chose effectivement, mais peut-être éclairons-nous la même chose chacun depuis notre angle. Et cette chose serait notre véritable nature, cette chose qui nous serait à tous commune.

Pour le reste,
Au temps pour moi anjalimetta
Dumè Antoni

Jules a écrit :Et cette chose serait notre véritable nature, cette chose qui nous serait à tous commune
Il faut faire très attention avec ce genre de phrase : "cette chose qui nous serait à tous commune", car elle peut laisser penser, à tort du point de vue Bouddhique, à l'existence d'une sorte de conscience commune. Ce n'est pas du tout le cas car, ainsi que je le disais ailleurs, nous avons tous notre propre Dharmakaya. C'est à dire qu'on parle bien de nature propre lorsqu'il est question de la nature de Bouddha et non de nature commune. Ce point est souvent très mal compris car la nature propre (parfois appelé "Vrai Soi" ou "Vraie Nature") n'a rien à voir avec le Soi des religions monothéistes, ou pour le dire simplement, de l'éternalisme. Le Vrai Soi est le Non-Soi, ou plus souvent appelé le "Non-né". Le Non-né n'est pas commun à tous. Quand Bankei dit que "le Non-né est ce qui nous vient de nos parents", on comprend bien que l'éveil, qui est la caractéristique fondamentale du Non-né, n'est pas un éveil commun. Ce point est très important.
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jules
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Mais notre nature propre n'est-elle pas ce que nous avons tous en commun en tant que nous sommes des êtres humains et même des êtres tout court, et que nous expérimentons tous spontanément l'existence ?

Par ailleurs
Il est facile d'être un humain.
Il est plus difficile d'exprimer ce qu'est être un humain.
C'est dans ce contexte que je parle de perte d'informations, lorsqu'il s'agit d'essayer de rendre significatif ce qui est de l'ordre d'une expérience spontanée.
Dumè Antoni

Mais notre nature propre n'est-elle pas ce que nous avons tous en commun en tant que nous sommes des êtres humains et même des êtres tout court, et que nous expérimentons tous spontanément l'existence ?
Tous les êtres ont la nature de Bouddha. Mais cela ne veut pas dire que la nature de Bouddha est propre (commune) à tous les êtres. Pour donner un exemple un peu trivial : tous les êtres humains ont une tête, deux bras et deux jambes. Cela ne veut pas dire qu'il existe une tête, deux bras et deux jambes communs à tous les êtres.
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jules
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Tu veux dire par là que deux personnes étant en quête de leur nature de Bouddha, sont deux personnes qui cherche quelque chose de différent ?
Dumè Antoni

Jules a écrit :Tu veux dire par là que deux personnes étant en quête de leur nature de Bouddha, sont deux personnes qui cherche quelque chose de différent ?
Je veux dire que si nous partageons tous la nature d'êtres humains et que nous sommes tous confrontés au samsara et donc à la souffrance, nous ne partageons pas tous la même souffrance. Un homme qui souffre, souffre seul, et personne ne peut ressentir ce qu'il ressent. L'empathie nous permet de comprendre jusqu'à un certain point la souffrance de l'autre et, par projection (ou par expérience, car nous savons tous ce qu'est la souffrance), ressentir la souffrance de l'autre comme notre propre souffrance. Mais ça n'est pas celle de l'autre et n'aide pas l'autre à souffrir moins. De la même façon, celui qui s'éveille à sa nature de Bouddha est seul à s'éveiller et personne n'est éveillé à sa place. Sauf que l'empathie, dans ce cas-là, contrairement à la souffrance, n'intervient pas, parce que l'éveil n'est pas de l'ordre des sensations. On ne peut pas ressentir l'éveil comme une expérience propre à chaque être humain. Et cela se conçoit aisément parce que les êtres ne naissent pas éveillés (et encore moins libres), même si, fondamentalement, tous les êtres ont la nature de Bouddha. En d'autres termes, si la souffrance est commune, l'éveil ne l'est pas. Si l'on peut se réjouir, par empathie ou sympathie, qu'une personne s'éveille à sa vraie nature et en éprouve du bonheur, la projection sur l'autre de notre propre idée du bonheur est illusoire. Sur ce plan-là au moins, on comprend que le phénomène empathique qui nous ferait ressentir le bonheur de l'autre comme le bonheur de l'éveil est un égarement. Il importe que les maîtres soient très clairs avec leurs élèves sur ce point.

Par ailleurs, quand on recherche sa nature de Bouddha, on n'a pas une idée précise de ce qu'on recherche vraiment avant de l'avoir trouvée. Les projections intellectuelles ne sont d'aucune utilité dans ce domaine, hélas ; elles sont même néfastes car nous sommes conditionnés par notre culture et donc par l'idée de la libération et de l'éveil. Avec l'aide d'un maître qualifié (je devrais dire "authentique") nous avons une chance de ne pas nous égarer dans des représentations erronées ou des expériences de calme mental qui sont si voluptueuses qu'il est très difficile d'en sortir et qui nous font prendre ce bonheur des sens (bien supérieur à celui de l'émoi amoureux) pour la manifestation de l'éveil bouddhique. Donc, pour te répondre : deux personnes en quête de leur nature de Bouddha sont deux personnes qui cherchent à se libérer de la souffrance. On peut considérer que, parce que chaque personne sait ce qu'est la souffrance, la volonté d'en sortir est commune, mais elle ne va pas nécessairement conduire à l'éveil, au sens bouddhique. Les musulmans, les chrétiens, les hindous... ont tous la volonté de ne plus souffrir, mais la fin de la souffrance pour un chrétien ou un musulman ou un hindou... diffère de celle d'un bouddhiste. Pour un bouddhiste, il n'y a qu'une seule fin à la souffrance, et cette fin est le Nirvana.
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jules
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Certes tu ne peux ressentir qu'indirectement la souffrance de l'autre. Mais la souffrance n'est pas la sensation primordiale propre à tous les êtres, je veux dire que souffrir est une expérience sensorielle dépendante de conditions, il arrive parfois des moments où tu ne souffres pas par exemple, en revanche exister...

Il est facile d'exister.
Il est plus difficile de parler de l'existence.
Par ailleurs, quand on recherche sa nature de Bouddha, on n'a pas une idée précise de ce qu'on recherche vraiment avant de l'avoir trouvée. Les projections intellectuelles ne sont d'aucune utilité dans ce domaine, hélas ; elles sont même néfastes car nous sommes conditionnés par notre culture et donc par l'idée de la libération et de l'éveil. Avec l'aide d'un maître qualifié (je devrais dire "authentique") nous avons une chance de ne pas nous égarer dans des représentations erronées ou des expériences de calme mental qui sont si voluptueuses qu'il est très difficile d'en sortir et qui nous font prendre ce bonheur des sens (bien supérieur à celui de l'émoi amoureux) pour la manifestation de l'éveil bouddhique. Donc, pour te répondre : deux personnes en quête de leur nature de Bouddha sont deux personnes qui cherchent à se libérer de la souffrance. On peut considérer que, parce que chaque personne sait ce qu'est la souffrance, la volonté d'en sortir est commune, mais elle ne va pas nécessairement conduire à l'éveil, au sens bouddhique. Les musulmans, les chrétiens, les hindous... ont tous la volonté de ne plus souffrir, mais la fin de la souffrance pour un chrétien ou un musulman ou un hindou... diffère de celle d'un bouddhiste. Pour un bouddhiste, il n'y a qu'une seule fin à la souffrance, et cette fin est le Nirvana.
Complètement d'accord avec ça.
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jules
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Il est plus difficile de parler de l'existence que d'exister, car exister est une chose spontanée.

Je dirais même plus qu'à partir du moment où on parle d'existence, on sépare le ciel de la terre.
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jules
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Tous nous faisons l'expérience spontanée de l'existence, mais lorsqu'il s'agit d'en parler, nous sommes comme dans l'histoire ; semblables aux aveugles cherchant à décrire l'éléphant.

http://www.marhba.com/forums/philosophi ... 56496.html
Dumè Antoni

Jules, ne considère pas que tous les êtres sont comme les aveugles de cette fable. Il existe des personnes capables de conduire des aveugles vers la lumière.
1) Le 1er tableau du dressage du buffle met en scène des aveugles, ceux de la fable, toutefois :
2) Le 2ème tableau met en scène des aveugles, mais qui ont rencontré quelqu'un qui peut les amener vers la Vue.
3) Le 3ème tableau du dressage du buffle met en scène des aveugles qui, menés par leurs guides, découvrent un point brillant au bout du tunnel : ils n'étaient pas aveugles ; ils vivaient seulement dans l'obscurité totale.

Je pourrais décrire ainsi tous les tableaux, mais ça n'est pas important. L'important, c'est la confiance en soi : nous ne sommes pas des aveugles mais simplement des êtres qui vivons dans l'obscurité. Si nous avons confiance en nous-mêmes et en ceux qui peuvent nous conduire, alors non seulement nous réaliserons que nos yeux sont intacts, mais qu'il existe bien une issue. Et cela nous le saurons dès le 3ème tableau. Une fois cette étape atteinte, alors, même si nous continuons à souffrir, sous l'emprise de notre karma, nous ne sommes cependant plus égarés.
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