Ted a écrit :C'est une façon de dire que l'acte juste n'est pas planifié ni calculé. Qu'il jaillit des tréfonds de l'être comme un comportement naturel, en harmonie avec les événements du moment. De ce fait, on ne peut pas dire qu'il y ait action, ni désir d'agir. La vraie compassion s'écoule sans qu'il y ait prise de décision à ce sujet. Et elle est aussitôt oubliée. Elle est suscitée par les événements et apparait automatiquement. De ce fait, il n'y a pas de processus de perfectionnement volontaire à enclencher.
Ça, c'est de la poésie, mais je ne pense pas que ce soit une pensée juste d'affirmer cela
. Le point de vue taoïste, sur ce plan, diffère grandement du Bouddhisme et le Zen — en tant qu'école bouddhiste — pourtant très influencé par le taoïsme, ne reprend pas à son compte ce point de vue qui est erroné, au moins sur ce point particulier (par rapport au Bouddhisme). Penser qu'une action juste n'est pas calculée ou planifiée, ça revient à installer une dichotomie entre la pensée ordinaire et l'Etat naturel. Si les deux doivent bien être distingués, c'est dans une analyse duelle où effectivement l'Etat naturel n'est pas la pensée ordinaire. Mais l'Etat naturel transcende précisément cette dichotomie en sorte que les personnes qui vivent dans l'Etat naturel (les éveillés) pensent comme les autres et agissent comme les autres. C'est la fameuse différence entre "les montagnes sont des montagnes" avant la réalisation de sa vraie nature et "les montagnes sont des montagnes" après la réalisation. C'est la même chose et ce n'est pourtant pas la même chose. En d'autre termes, un éveillé s'y prendra exactement de la même façon qu'un homme ordinaire s'il veut, par exemple, construire un mur de soutènement. Il devra calculer les contraintes, le volume de béton, celui des terres, la poussée hydrostatique le cas échéant... L'action "construire un mur de soutènement" est une action juste, qu'elle soit réalisée par un être ordinaire ou un éveillé. Je vais même plus loin : si l'éveillé ne fait pas attention à certains calculs, contrairement à l'être ordinaire, c'est l'éveillé qui comment une mauvaise action, que cela vienne du tréfonds de son être ou pas, car le mur pourrait s'écrouler. Bien sûr, un éveillé — qui a atteint la complète et parfaite réalisation, ce qui n'est pas le cas de tous les éveillés — ne commettrait pas d'erreurs en construisant un mur sans prendre certaines précautions, mais c'est autre chose car l'action d'un Bouddha est toujours juste, qu'elle soit calculée et planifiée ou non. Il est très important de comprendre cela, je pense, car quand un maître zen dit que l'esprit de Bouddha est l'esprit de tous les jours, il a raison. Et quand un être ordinaire dit qu'il est éveillé parce qu'il pense et agi exactement comme un éveillé au quotidien, il a tort.