Le doute et l'éveil.. l'éveil et le doute...

Robi

Dumè Antoni a écrit :Bon, je ne partage pas vraiment (sans explications complémentaires) le point de vue de Yudo. En fait, l'empathie n'a rien à voir avec la Compassion Infinie : l'empathie est "mondaine", soumise à des hormones (elle est donc "conditionnée"), alors que le Compassion Infinie est "supra mondaine" ou "Incréée" (et ne dépend donc pas de facteurs hormonaux et est donc "inconditionnée). Si l'on ne distingue pas la Compassion Infinie des Boddhisattva de l'empathie, alors on ne peut pas comprendre pourquoi les êtres ordinaires ne connaissent pas la Compassion Infinie. En fait, de mon point de vue, la confusion vient du fait que les Bodhisattvas (ou les Bouddhas) sont aussi des êtres ordinaires (en ce sens qu'ils possèdent un corps "matériel" et, de fait, sont soumis aux décharges hormonales) et donc éprouvent (ou ressentent) de l'empathie comme les autres, mais ils connaissent aussi — ce que ne connaissent pas les êtres ordinaires, bien que ces derniers éprouvent de l'empathie — la Compassion Infinie.
Salut Dumè,
Quel est l'avantage de la Compassion infinie sur l'empathie (ou la compassion mondaine)? Tu m'as dit je crois ailleurs (je ne sais plus dans quel fil) que les Bouddhas ayant la Compassion infinie ne sont plus affectés par la souffrance de l'autre (pour cause, ils n'ont plus d'ego, ils "ne souffrent pas avec" dans le sens où on l'entend ordinairement du mot compassion). Donc c'est bien cela l'avantage ou la différence entre les deux, c'est bien ce que tu m'avais dit et que j'ai essayé de répeter ici, c'est à dire que les Bouddhas ayant la Compassion infinie ne sont pas affectés par la souffrance?

Personnellement une chose continue à me chiffonner: si celui (le Bouddha) qui a de la Compassion infinie pour ma souffrance et qu'en réalité il n'en éprouve pas une miette (il ne compatie pas à ma souffrance au sens mondain) comment puis-je moi admettre une telle Compassion (infinie), une Compassion qui n'affecte pas celui qui est censé m'en donner?
Moi je veux que si quelqu'un prétend m'aider dans ma souffrance, je veux qu'il l'éprouve, qu'il la partage (humainement, même si ce n'est pas vraiment dans sa chair) bref qu'il y compatie au sens mondain du terme. Je n'ai que faire d'une Compassion ( si infinie soi-elle) qui en fait n'en serait pas. Si un médecin bouddha me soigne sans la moindre compassion, si il ne compatie pas à ma souffrance, ça sera peut-être un excellent professionnel mais je ne verrai rien d'humain en lui...
Dumè Antoni

Robi a écrit :Tu m'as dit je crois ailleurs (je ne sais plus dans quel fil) que les Bouddhas ayant la Compassion infinie ne sont plus affectés par la souffrance de l'autre (pour cause, ils n'ont plus d'ego, ils "ne souffrent pas avec" dans le sens où on l'entends ordinairement du mot compassion).
Je n'ai jamais dit une chose pareille ! Ce serait bien que tu retrouves ce fil (ne serait-ce que pour vérifier le contexte). C'est même, pour moi, une contrevérité. J'ai même préciser ailleurs que nier la souffrance (la sienne ou celle des autres), c'est nier la 1ère Noble Vérité.

Il suffit, pour se convaincre du fond de ma pensée, de lire ce que je réponds à Davi dans ce fil : http://www.forum-bouddhiste.com/viewtopic.p ... 3&start=75

De fait, le reste de ton fil résultant d'une mauvaise interprétation de mes propos, je n'y répondrai pas.
Robi

Dumè Antoni a écrit :
Robi a écrit :Tu m'as dit je crois ailleurs (je ne sais plus dans quel fil) que les Bouddhas ayant la Compassion infinie ne sont plus affectés par la souffrance de l'autre (pour cause, ils n'ont plus d'ego, ils "ne souffrent pas avec" dans le sens où on l'entends ordinairement du mot compassion).
Je n'ai jamais dit une chose pareille ! Ce serait bien que tu retrouves ce fil (ne serait-ce que pour vérifier le contexte). C'est même, pour moi, une contrevérité. J'ai même préciser ailleurs que nier la souffrance (la sienne ou celle des autres), c'est nier la 1ère Noble Vérité.

Il suffit, pour se convaincre du fond de ma pensée, de lire ce que je réponds à Davi dans ce fil : http://www.forum-bouddhiste.com/viewtopic.p ... 3&start=75

De fait, le reste de ton fil résultant d'une mauvaise interprétation de mes propos, je n'y répondrai pas.
Avant d'écrire mon post j'ai essayé de retrouver le fil en question rapidement, je ne l'ai pas trouvé. Je vais refaire une tentative.
En attendant je te pose alors la question suivante:
en quoi est l'avantage (ou l'achèvement, la perfection) de la Compassion infinie par rapport à la compassion mondaine? (si ce n'est celle que j'exprime, à savoir la non affectation des Bouddha par la souffrance)

Edit:
J'ai retrouvé le fil, là où tu disais que les Bouddha n'ont pas de passions (la réalisation de sa vraie nature n'est pas de l'ordre des sentiments ou des sensations)...
http://www.forum-bouddhiste.com/viewtopic.p ... 757#p42757
Extrait:
Dumè Antoni a écrit :Ok, alors, je devrais dire que les sentiments n'ont pas grand chose à voir avec le Dharma en ce qu'ils sont de l'ordre des "passions", et en ce sens aussi que les sagesses (Compassion, Omniscience...) sont spontanées dans la réalisation de sa vraie nature et ne sont pas de l'ordre des sentiments ou des sensations. Alors, il ne faut certes pas s'imaginer que quand je dis qu'elle ne sont pas de l'ordre des sensations ou des sentiments, cela signifie que le Bouddha — ou plutôt le Bodhisattva en tant que Nirmanakaya — est privé de sensations et de sentiments. Il ressent les sensations et les sentiments, mais pas comme des passions (elles ne génèrent pas de la souffrance). Le Boddhisattva ne souffre pas de la souffrance (con-pâtir) des autres mais réalise cette souffrance dans la disparition de la dualité sujet/objet (l'autre n'est autre que soi-même en ce que soi-même est non-soi).
Dumè Antoni

Merci d'avoir retrouvé le lien, dans lequel je dis expressément : "il ne faut certes pas s'imaginer que quand je dis qu'elles ne sont pas de l'ordre des sensations ou des sentiments, cela signifie que le Bouddha — ou plutôt le Bodhisattva en tant que Nirmanakaya — est privé de sensations et de sentiments". Mais que signifie ma phrase : "Il ressent les sensations et les sentiments, mais pas comme des passions (elles ne génèrent pas de la souffrance)" ? Le Boddhisattva ne souffre pas de la souffrance (con-pâtir) des autres mais réalise cette souffrance dans la disparition de la dualité sujet/objet (l'autre n'est autre que soi-même en ce que soi-même est non-soi). " Cela signifie que le Bodhisattva n'est pas "un autre", distinct de l'autre, mais il est les autres (en ce sens que s'il n'a pas d'ego, il n'est pas différent des autres)" ? Cela signifie que la Compassion n'est pas la souffrance de l'autre, mais SA PROPRE SOUFFRANCE (c'est ça, la disparition de la dualité "sujet/objet").
Dumè Antoni

Robi a écrit :En attendant je te pose alors la question suivante:
en quoi est l'avantage (ou l'achèvement, la perfection) de la Compassion infinie par rapport à la compassion mondaine? (si ce n'est celle que j'exprime, à savoir la non affectation des Bouddha par la souffrance)
Cette question doit être traitée à part. La différence est que l'empathie (ou la compassion) mondaine distingue les autres de soi-même (même s'il y a "projection", la dualité sujet/objet n'a pas disparu). Le Bouddhisme, tout en reconnaissant le principe de distinction (les autres ne sont pas soi-même), reconnaît aussi le principe de non-atman. Le non atman ne signifie pas seulement qu'il n'y a pas d'ego, en ce sens qu'il n'y a pas d'individualité "en soi", mais que, s'il n'y a pas d'ego, alors je suis le "reste" de l'univers (c'est à dire, aussi, les autres). Sans cette distinction, le Bouddhisme serait alors du nihilisme pur et dur, ce qu'il n'est pas.
Robi

Dumè Antoni a écrit :Merci d'avoir retrouvé le lien, etc...).
Ok, je comprends mieux mais à ce moment-là l'expression
mais pas comme des passions (elles ne génèrent pas de la souffrance)
me parait incongrue (inopportune) si alors sa Compassion est SA PROPRE SOUFFRANCE.
En tout cas c'est cette expression qui me gênait...
Dumè Antoni

Robi a écrit :Ok, je comprends mieux mais à ce moment-là l'expression mais pas comme des passions (elles ne génèrent pas de la souffrance) me parait incongrue si alors sa Compassion génère SA PROPRE SOUFFRANCE.
Je voulais dire que les passions sont mondaines, ce qui n'est pas la cas de la Compassion Infinie. Quand un être souffre d'une blessure (quelle qu'elle soit), sa souffrance est personnelle et nul ne la vit autre que lui-même. Mais ce "lui-même" n'est réel que dans la dualité sujet/objet. En réalité, il n'y a pas de "lui-même". Il y a la souffrance, quel que soit celui qui la subit. Le Bodhisattva, ayant réalisé l'anatman, réalise qu'il est l'autre. Pour autant, la souffrance de l'autre est vécue au niveau karmique, au niveau mondain ; pas au niveau "supra-mondain".
ted

Dumè Antoni a écrit : Le non atman ne signifie pas seulement qu'il n'y a pas d'ego, en ce sens qu'il n'y a pas d'individualité "en soi", mais que, s'il n'y a pas d'ego, alors je suis le "reste" de l'univers (c'est à dire, aussi, les autres).
Bon, ce n'est peut être pas ça que tu as voulu dire ? mais je crois bien que c'est une des 64 vues fausses du Brahmajala sutta ça... :oops: :mrgreen: Faudrait que je vérifie. :roll:
Un éveillé n'est ni ici, ni là.
Dumè Antoni

Bon, je renonce... :neutral:


Je veux dire que "ni ceci, ni cela" c'est du Madhyamaka. Ce n'est pas ni ma pratique, ni ma Vue (la Vue du Zen). Du reste, ce n'est pas une Vue (désolé si ça fait réagir Dharmadhatu).
ted

Dumè Antoni a écrit :Je veux dire que "ni ceci, ni cela" c'est du Madhyamaka. Ce n'est pas ni ma pratique, ni ma Vue (la Vue du Zen). Du reste, ce n'est pas une Vue (désolé si ça fait réagir Dharmadhatu).
Oui, je sais. Tu estimes que la pensée de Nagarjuna est nihiliste.
Vu qu'elle balaie tous les concepts, elle serait nihiliste si et seulement si la réalité ultime était conceptuelle, c'est ce que je me dis. Mais bon, ça c'est une autre histoire.

La question c'est quand tu dis que l'empathie n'est pas nécessaire pour avancer sur le chemin de l'éveil.
Est-ce que le nihilisme, ce ne serait pas plutôt d'oublier qu'il y a vraiment des gens qui souffrent, et que ça leur fait mal (ignorants ou pas) ?
Est-ce que le nihilisme, ce ne serait pas plutôt de voir leur souffrance comme un simple mécanisme à balayer par la compréhension ?
Est-ce que tu ne mets pas en place un mécanisme de défense parce que, en fait, tu es un gars super sympa, qui ne supporte pas de voir les autres souffrir ?
J'ai un cousin qui n'a jamais pu trouver le courage d'aller voir sa mère à l'hôpital. Tout le monde l'a blamé pour son indifférence.
Sa mère a fini par mourir sans le voir.
En fait, il n'a jamais trouvé le courage de faire face à une si grande souffrance. Il l'adorait.

Jusqu'à maintenant d'ailleurs, je ne sais pas vraiment quoi en penser ? :oops: Etait-ce un gros égoïste ou le meilleur d'entre-nous ? :oops:
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