Merci Ted pour ce sujet de remémoration du dhamma qui peut avoir plusieurs angles de réflexion. En se basant sur un extrait du sutta de la mise en mouvement de la Roue du Dhamma qui dit :
Dhammacakkappavattana Sutta a écrit :
Moines, il existe deux extrêmes qui doivent être évités par quelqu’un qui est arrivé à une vie sans foyer (bhikkhu). Quels sont ces deux extrêmes? S'adonner aux plaisirs des sens, ce qui est inférieur, vulgaire, mondain, ignoble et engendre de mauvaises conséquences, et s'adonner aux mortifications, ce qui est pénible, ignoble et engendre de mauvaises conséquences. Sans aller à ces deux extrêmes, moines, le Tathagata a découvert la Voie du milieu qui prodigue la vision, qui donne la connaissance, qui conduit à la quiétude, à la sagesse, à l'éveil et à l'émancipation.
Comprendre la première noble vérité (
dukkha), dans le sens d'une compréhension vécue, c'est renoncer aux plaisirs mondains, au bonheur mondain (
lokiya-sukha ) que procure la vie de foyer. La compréhension complète est plus à la portée des renonçants, de ceux qui sont arrivés à la vie sans foyer qu'à ceux qui ont des attaches comme vous et moi qui n'auront qu'une compréhension limitée !
Buddhadasa a écrit :Dans le sens du Dhamma, cependant, le bonheur est présent quand il n'y a aucune soif, aucun désir du tout, quand nous sommes totalement libres de toute soif, de tout désir et de toute envie.
Par ailleurs dans le même sutta on remarque qu'il y a trois étapes, trois modalités dans la compréhension de dukkha, à savoir :
Dhammacakkappavattana Sutta a écrit :
Moines, c'est avec la compréhension: "Ceci est la Vérité Noble dite dukkha" que, dans les choses qui n'avaient pas été entendues auparavant, s'est élevée en moi la vision, s'est élevée en moi la connaissance, s'est élevée en moi la sagesse, s'est élevée en moi la science, s'est élevée en moi la lumière[1].
Moines, c'est avec la compréhension: "Cette Vérité Noble dite dukkha doit être comprise " que, dans les choses qui n'avaient pas été entendues auparavant, s'est élevée en moi la vision, s'est élevée en moi la connaissance, s'est élevée en moi la sagesse, s'est élevée en moi la science, s'est élevée en moi la lumière.
Moines, c'est avec la compréhension: "Cette Vérité Noble dite dukkha a été comprise" que, dans les choses qui n'avaient pas été entendues auparavant, s'est élevée en moi la vision, s'est élevée en moi la connaissance, s'est élevée en moi la sagesse, s'est élevée en moi la science, s'est élevée en moi la lumière.
[1] Tous Ces termes – vision, connaissance, sagesse, science, lumière -, sont les synonymes de la compréhension vécue.
Ajahn Sumedho a écrit :
« Il y a la souffrance » constitue le premier aspect de la Première Noble Vérité. Quel est-il ? Il n'est pas utile de compliquer les choses : il s’agit simplement du fait de reconnaître que « Ceci est souffrance, dukkha ». C’est une déclaration fondamentale. Une personne ignorante pense : « Je souffre, je ne veux pas souffrir. Je médite et prends part à des retraites pour ne plus souffrir, mais je continue à souffrir et je ne veux pas souffrir... Comment faire pour échapper à la souffrance ? Que puis-je faire pour m’en débarrasser ? ». Mais ceci n’est pas la Première Noble Vérité qui ne dit pas « Je souffre et je veux que ça s’arrête », mais « Il y a la souffrance » : c’est cela, la révélation.
Dès lors, vous considérez la douleur ou l’angoisse que vous ressentez non plus comme étant « la mienne, celle qui m’appartient », mais plutôt en tant que matière à réflexion : « Ceci est souffrance, dukkha ». Cette perspective est l’attitude de réflexion du Bouddha observant le Dhamma. La révélation est simplement : admettre la présence de la souffrance sans en faire une question personnelle. Ceci est une communication importante : considérer simplement l’angoisse mentale ou la douleur physique et la voir en termes de dukkha plutôt qu’en termes de misère personnelle, la voir simplement comme étant dukkha et ne pas réagir selon son habitude.
La seconde perspective de la Première Noble Vérité est :
« La souffrance doit être comprise ». La deuxième révélation ou facette de chacune des Quatre Nobles Vérités contient le mot « doit » : « Cela doit être compris ». Ce second aspect est donc que dukkha représente quelque chose qu’il s’agit de comprendre. Il faut comprendre dukkha et non simplement essayer de s’en débarrasser.
On pourrait considérer le mot « comprendre » comme « prendre avec soi ». C’est un mot assez banal, mais qui, en Pali, possède un sens plus fort comme « accepter véritablement la souffrance », l’embrasser totalement plutôt que de simplement y réagir. Quelle que soit sa forme, physique ou mentale, nous avons tendance à seulement répondre à la douleur, mais, en usant de compréhension, nous pouvons vraiment observer la souffrance, l’accepter, la saisir et l’embrasser véritablement. Voilà donc la seconde révélation : nous devons « comprendre » la souffrance.
Le troisième aspect de la Première Noble Vérité est :
« La souffrance a été comprise ». Quand vous avez vraiment pratiqué avec la souffrance – en l’observant, en l’acceptant et en arrivant ainsi à une compréhension profonde de sa nature – vous abordez la troisième facette : « La souffrance a été comprise », ou « dukkha a été comprise ». Les trois aspects de la Première Noble Vérité sont donc : « Il y a dukkha, dukkha doit être comprise et dukkha a été comprise! ».
Ceci est le schéma pour les trois aspects de chaque Noble Vérité. Il y a d’abord le diagnostic, puis la prescription et ensuite le résultat de la pratique. On peut également utiliser les termes palis : « pariyatti », « patipatti » et « pativedha ». « Pariyatti » est le diagnostic, la théorie ou la déclaration « Il y a souffrance », « patipatti » décrit la prescription, la pratique, l’action même de pratiquer avec la souffrance et « pativedha » est le résultat de la pratique. C’est ce qu’on peut appeler un modèle de réflexion ; en l’appliquant, vous développez votre capacité mentale à réfléchir, à contempler avec sagesse. L’esprit du Bouddha est un esprit réfléchissant, qui voit les choses telles qu’elles sont.
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