Il faut écouter le maître
Publié : 22 mai 2013, 12:13
Quelques unes de mes vieilles connaissances :
J'avais eu la rougeole
Trois semaines d'absence de l'école
Dix jours à la maison, quinze jours de convalescence chez ma grand mère
Puis le retour dans la classe
Un matin, tombée dedans
J'avais cinq ans et je voyais bien que ce n'était pas la même classe
Que tout le monde avait "muté"
D'ailleurs, maintenant, tout le monde savait lire
Raccrocher les mots, c'était pas dur, je savais déjà lire
Mais j'étais dans une classe inconnue
Je me sentais perdue
Ma mère m'avait dit: tu verras, tu retrouveras tous tes camarades.
C'était pas vrai. Tout avait changé.
Les rythmes n'étaient plus les mêmes
Les pages du cahier de lecture m'avaient carrément oubliée
Je ne reconnaissais plus l'histoire
De nouveaux personnages s'y trouvaient et je lisais leurs mots comme une langue étrangère: que venaient-ils faire dans "mon histoire", dans ce livre que je m'étais appropriée ? Ils étaient tombés dans ces pages comme moi ce matin sur ma chaise...
La maîtresse n'était plus la même: une remplaçante animait la classe
Alors j'ai plus su où j'étais
J'ai oublié
J'avais toutes ces pensées et j'entendais plus rien
A un moment, je me suis dite: il faut que je fasse un effort. Il fallait que je participe et que je raccroche le nouveau train…après, tout irait forcément mieux ! La maîtresse venait de poser une question et mue par cet élan je me suis écriée de tout mon coeur : oui !
Et alors…et alors ça m'est tombée dessus… la question était: " vous faites exprès de ne pas écouter ou quoi ?"
Je l'ai entendue après, en repassant la bande son: il y avait le temps, un déroulement chronologique d'évènements…mes pensées, la question, mon oui qui était un oui à la classe et complètement décalé des évènements, et tous les évènements nouveaux qui venaient percuter ma conscience, et comme j'étais hors du temps, j'avais tout mélangé, la chronologie n'y était plus …
Alors, c'était mon premier jour de "rentrée" et j'étais servie: "pas de récréation, restera dans la classe pendant que les autres joueront,", avait décrété l'inconnue maitresse
Ce fut un couperet dans mon corps…privée de liberté !
J'ai eu le temps de revivre en pensée tout ce qui s'était déroulé, le temps de comprendre que c'était tout un tas d'informations qui s'étaient mélangées ensemble et que j'avais fait un gâteau avec.
Par la fenêtre de la classe, je voyais les autres jouer, et de temps en tant, un curieux venait constater que lui était libre en me voyant coincée
C'est là que j'ai commencé à me regarder dans les yeux.
C'était moi: comme une perturbation dans un flux de choses qui ne m'attendaient plus.
Et là, j'étais encore hors du temps
Celui des autres en mouvement dont j'entendais les cris dans la cour
Et il y avait mon silence et mon immobilité
Une fixité
Et j'avais vraiment plus envie de jouer.
Il faut écouter le maître.
Pas suivre ses pensées.
Mais le maître n'est pas qu'extérieur…il est kaléidoscopique...
Il n'y a pas de maître en dehors des relations que l'on fait sur les choses. C'est intemporel et ça n'a pas d'espace.
D'ailleurs, quelquefois, les choses et les évènements disparaissent: ils ne reste plus que le mouvement qui les relie ensemble, quel qu'il soit...
J'avais eu la rougeole
Trois semaines d'absence de l'école
Dix jours à la maison, quinze jours de convalescence chez ma grand mère
Puis le retour dans la classe
Un matin, tombée dedans
J'avais cinq ans et je voyais bien que ce n'était pas la même classe
Que tout le monde avait "muté"
D'ailleurs, maintenant, tout le monde savait lire
Raccrocher les mots, c'était pas dur, je savais déjà lire
Mais j'étais dans une classe inconnue
Je me sentais perdue
Ma mère m'avait dit: tu verras, tu retrouveras tous tes camarades.
C'était pas vrai. Tout avait changé.
Les rythmes n'étaient plus les mêmes
Les pages du cahier de lecture m'avaient carrément oubliée
Je ne reconnaissais plus l'histoire
De nouveaux personnages s'y trouvaient et je lisais leurs mots comme une langue étrangère: que venaient-ils faire dans "mon histoire", dans ce livre que je m'étais appropriée ? Ils étaient tombés dans ces pages comme moi ce matin sur ma chaise...
La maîtresse n'était plus la même: une remplaçante animait la classe
Alors j'ai plus su où j'étais
J'ai oublié
J'avais toutes ces pensées et j'entendais plus rien
A un moment, je me suis dite: il faut que je fasse un effort. Il fallait que je participe et que je raccroche le nouveau train…après, tout irait forcément mieux ! La maîtresse venait de poser une question et mue par cet élan je me suis écriée de tout mon coeur : oui !
Et alors…et alors ça m'est tombée dessus… la question était: " vous faites exprès de ne pas écouter ou quoi ?"
Je l'ai entendue après, en repassant la bande son: il y avait le temps, un déroulement chronologique d'évènements…mes pensées, la question, mon oui qui était un oui à la classe et complètement décalé des évènements, et tous les évènements nouveaux qui venaient percuter ma conscience, et comme j'étais hors du temps, j'avais tout mélangé, la chronologie n'y était plus …
Alors, c'était mon premier jour de "rentrée" et j'étais servie: "pas de récréation, restera dans la classe pendant que les autres joueront,", avait décrété l'inconnue maitresse
Ce fut un couperet dans mon corps…privée de liberté !
J'ai eu le temps de revivre en pensée tout ce qui s'était déroulé, le temps de comprendre que c'était tout un tas d'informations qui s'étaient mélangées ensemble et que j'avais fait un gâteau avec.
Par la fenêtre de la classe, je voyais les autres jouer, et de temps en tant, un curieux venait constater que lui était libre en me voyant coincée
C'est là que j'ai commencé à me regarder dans les yeux.
C'était moi: comme une perturbation dans un flux de choses qui ne m'attendaient plus.
Et là, j'étais encore hors du temps
Celui des autres en mouvement dont j'entendais les cris dans la cour
Et il y avait mon silence et mon immobilité
Une fixité
Et j'avais vraiment plus envie de jouer.
Il faut écouter le maître.
Pas suivre ses pensées.
Mais le maître n'est pas qu'extérieur…il est kaléidoscopique...
Il n'y a pas de maître en dehors des relations que l'on fait sur les choses. C'est intemporel et ça n'a pas d'espace.
D'ailleurs, quelquefois, les choses et les évènements disparaissent: ils ne reste plus que le mouvement qui les relie ensemble, quel qu'il soit...