PHENOMENOLOGIE et BOUDDHISME

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Dharmadhatu
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klesha a écrit :Oui Dharmadhatu, pourquoi pas en public.
Mon but n'est pas de m'engager dans une polémique mais de bien cerner les contours de cette problématique délicate.
jap_8 Nous sommes sur la même longueur d'onde. Pourquoi pas ouvrir un fil, car je ne souhaite pas participer au thème récurrent de l'intentionnalité ?

FleurDeLotus
apratītya samutpanno dharmaḥ kaścin na vidyate /
yasmāt tasmād aśūnyo hi dharmaḥ kaścin na vidyate

Puisqu'il n'est rien qui ne soit dépendant,
Il n'est rien qui ne soit vide.

Ārya Nāgārjuna (Madhyamakaśhāstra; XXIV, 19).
klesha

Pourquoi pas, en effet. l'intentionnalité n'est qu'un aspect du problème et parfois on ne voit plus la forêt à cause des arbres qui la cachent ! :D
FA

Bonsoir,

L'intentionnalité correspond à la capacité qu'à un être humain, à poursuivre un objectif.
Comment se positionne le Bouddhisme de ce point de vue ?
Quel serait le juste milieu entre intentionnalité, et non-intentionnalité ( pratiquée pendant la méditation )
L'assise méditative est non-intentionnalité. Quel lien avec la vie quotidienne où s'exprime l'intentionnalité ?
La position Bouddhiste ne vise t-elle pas à faire émerger une intentionnalité altruiste, compassionnelle, dénuée d'égoïsme.
On passe d'une intentionnalité mue par les passions à une intentionnalité mue par la com-passion.
L'intentionnalité exprime l'idée qu'une réponse non-conditionnée est possible.L'intentionnalité est l'expression de notre
créativité et de notre liberté.
Si nous étions de pure mécanismes, nous serions soumis à un déterminisme stricte de la causalité. Mais tel n'est pas le cas
puisqu'en tant qu'entité douée d'intentionnalité nous pouvons générer des causes qui ne résultent pas d'un stricte déterminisme.
Le premier pas vers l'intention altruiste, passe par la découverte, de notre pouvoir de non-intentionnalité.
Ce pouvoir de non-intentionnalité méditative, initie à son tour une forme d'intentionnalité qui n'est pas simple "réaction à..."
Une intentionnalité réactive d'ailleurs n'est pas intentionnalité, mais pure causalité prédéterminée par nos pulsions.
L'intentionnalité née dans la mesure ou elle rompt avec les forces d'habitude, est dans la mesure où l'acte n'enchaine pas l'acte automatiquement.
La non-intentionnalité méditative, qui est réalisation de la vacuité, engendre la pleine conscience, qui a son tour permet l'acte libre, altruiste, répondant parfaitement
aux circonstances.

FleurDeLotus
FA
chakyam

...L'assise méditative est non-intentionnalité.
La position Bouddhiste ne vise t-elle pas à faire émerger une intentionnalité altruiste, compassionnelle, dénuée d'égoïsme.
On passe d'une intentionnalité mue par les passions à une intentionnalité mue par la com-passion.
L'intentionnalité exprime l'idée qu'une réponse non-conditionnée est possible. L'intentionnalité est l'expression de notre créativité et de notre liberté.
Si nous étions de pure mécanismes, nous serions soumis à un déterminisme stricte de la causalité. Mais tel n'est pas le cas puisqu'en tant qu'entité douée d'intentionnalité nous pouvons générer des causes qui ne résultent pas d'un stricte déterminisme...


Absolument d'accord avec cette dialectique qui articule le déterminisme « aveugle » de la Nature et le non-déterminisme cosmique de la liberté que permet de vivre l'état Hischiryo de la méditation zazen, n'en déplaise aux logiciens de la dialectique aristotélicienne et à Baruch de SPINOZA.

S'il en était besoin elle explicite également la vacuité foncière des notions karmiques et leur cortège de causalité simpliste « justifiant » (!!!!) les Renaissances que la simple compréhension lucide sans a-priori dissous instantanément.

Pourquoi ? " Parce que le Voie est fondamentalement parfaite. Elle pénètre tout. Comment pourrait-elle dépendre de la pratique et de la réalisation ? Le véhicule du Dharma est libre et dégagé de toute entrave. En quoi l'effort concentré de l'homme est-il nécessaire ? " - DOGEN – Fukanzazengi -


FleurDeLotus Butterfly_tenryu
existence

chakyam a écrit :Elle dit seulement, comme je l'ai expliqué sur le fil "bouddhisme athée" que l'intentionnalité ouvre le champ "possible" d'un objet à étudier, DEBARASSE de ses oripeaux égotistes liés à une vision naturelle et exclusivement naturelle, donc encombrée de transcendance, de mérites, d'acquisitions de mérites, de récompenses et de renaissances fantasmées.
Je sens des ondes violentes dans cette phrase. Il faudrait savoir si les avis des autres t'intéressent, ou bien seulement dans le cas où ils sont en accord avec ce que tu penses.
FA

En ce qui me concerne je rejette définitivement l'idée de "ré-incarnation" personnalisée car celle-ci contredit l'idée même de vacuité. Par contre dés lors que l'on renonce à une vision égocentrique et personnelle, on peut trouver dans l'idée de renaissance, un concept d'un grand intérêt pouvant générer une grande compassion.
Le concept de "renaissance", liée aux actions cycliques du Karma, permet d'envisager l'éveil d'un point de vue collectif. Car les êtres sont coproduits par la matrice sociale.
Et si l'on injecte la lumière de l'éveil dans cette matrice, c'est toute la société qui peut en bénéficier. Ainsi le concept de Bodhisattva prend tout son sens.
Imaginez une société non plus centrée sur la surconsommation, mais sur l'épanouissement de chacun et tendant à favoriser l'éveil.Un culture orientée vers l'éveil.
Car au fond le plus grand vecteur de l'ignorance des uns et des autres, c'est la société elle-même, et les valeurs qu'elle véhicule. La vacuité nous amène par ailleurs,
à réaliser que les autres sont d'autres "nous-mêmes" desquels notre vie n'est pas séparée. De ce point de vue, la renaissance prend un sens, et je peux concevoir, que mes actions positives,réalisées durant mon existence auront un impact positif sur les vies futures qui sont aussi mes vies futures, si je sais dépasser la vision égocentrique du petit moi.
Au sein de la matrice sociale, l'ignorance transmigre, tout comme la lumière du Dharma.

jap_8
Fa
klesha

Dans tout travail sérieux, on commence par définir les mots qui sont au centre de la problématique. Chakyam, quel sens donnes-tu à intentionnalité ? J'ai l'impression que ce n'est pas celui que lui donne les phénomènologues.
chakyam

existence a écrit :
chakyam a écrit :Elle dit seulement, comme je l'ai expliqué sur le fil "bouddhisme athée" que l'intentionnalité ouvre le champ "possible" d'un objet à étudier, DEBARASSE de ses oripeaux égotistes liés à une vision naturelle et exclusivement naturelle, donc encombrée de transcendance, de mérites, d'acquisitions de mérites, de récompenses et de renaissances fantasmées.
Je sens des ondes violentes dans cette phrase. Il faudrait savoir si les avis des autres t'intéressent, ou bien seulement dans le cas où ils sont en accord avec ce que tu penses.
Chak - Les deux mon général. Comme tout un chacun, j'ai mes préférences mais même et surtout les avis de mes contradicteurs me permettent d'affiner le mien. Il me semble que tu devrais t'en souvenir.

Quant aux ondes violentes, ne te méprends pas! Qualifier et préciser un champ "possible" débarrassé etc etc... n'est que le souhait d'assainir nos réflexions et les épurer de notions parasitaires qui ne sont que sublimations théistes assorties de vie éternelle dans une temporalité sans fin.

Aucune réalité.


FleurDeLotus Butterfly_tenryu
chakyam

FA a écrit :En ce qui me concerne je rejette définitivement l'idée de "ré-incarnation" personnalisée car celle-ci contredit l'idée même de vacuité. Par contre dés lors que l'on renonce à une vision égocentrique et personnelle, on peut trouver dans l'idée de renaissance, un concept d'un grand intérêt pouvant générer une grande compassion.
Le concept de "renaissance", liée aux actions cycliques du Karma, permet d'envisager l'éveil d'un point de vue collectif. Car les êtres sont coproduits par la matrice sociale.
Et si l'on injecte la lumière de l'éveil dans cette matrice, c'est toute la société qui peut en bénéficier. Ainsi le concept de Bodhisattva prend tout son sens.
Imaginez une société non plus centrée sur la surconsommation, mais sur l'épanouissement de chacun et tendant à favoriser l'éveil.Un culture orientée vers l'éveil.
Car au fond le plus grand vecteur de l'ignorance des uns et des autres, c'est la société elle-même, et les valeurs qu'elle véhicule. La vacuité nous amène par ailleurs,
à réaliser que les autres sont d'autres "nous-mêmes" desquels notre vie n'est pas séparée. De ce point de vue, la renaissance prend un sens, et je peux concevoir, que mes actions positives,réalisées durant mon existence auront un impact positif sur les vies futures qui sont aussi mes vies futures, si je sais dépasser la vision égocentrique du petit moi.
Au sein de la matrice sociale, l'ignorance transmigre, tout comme la lumière du Dharma.

jap_8
Fa
Vaste sujet en effet. Tout à fait d'accord avec ta première proposition quant à l'idée de "ré-incarnation" ou de Renaissance personnalisée. J'ai peur par contre de ne pas te suivre dans tes autres développements. J'explicite.

Le point de vue "collectif" implique et suppose que "quelque chose", "quelqu'un", un "soi" ou un "Soi" le désigne ainsi après/en même temps s'être désigné lui-même pour essayer de le vivre collectivement. Comment est-ce possible ? comment est-il possible qu'une telle expérience soit ainsi vécue alors que tu la récuses individuellement, sachant que la collectivité à laquelle on appartient n'a pas d'être, ni d'en-soi, ni de noumène mais n'est qu'une construction statistique d'individus additionnés ?

Que les "autres" soient nous mêmes est une évidence mais l'Eveil ne peut être donné ni apporté et je considère que la Société actuelle le favorise précisément par les valeurs mercantiles et inutiles qu'elle véhicule. Certes le Dharma circule - et non transmigre - et sa lumière implique l'acceptation de son obscurité sans que l'on puisse confondre une causalité technique, organisationnelle, décisionnelle, scientifique avec le concept de Renaissance qui lui-même n'a pas résisté à l'analyse dans les différents posts où il en fut fait état, malgré l'acharnement opiniâtre de Dharmadhatu et son impossibilité à rapporter une quelconque expérience en la matière.

Dans ces conditions comment une entité aussi peu vraisemblable et hypothétique qu'un "collectif" pourrait-il être en capacité de rendre compte d'une expérience qu'un "soi" (petit s) ne peut rapporter ? Comme nous dit le Buddha "ceci est une jungle d'opinions" - A dépasser !


FleurDeLotus Butterfly_tenryu
FA

Bonsoir,

Je n'envisage nullement l'existence d'un "soi" collectif. Les éléments qui renaissent sans cesse sont :
Les gènes, et les mèmes.
http://fr.wikipedia.org/wiki/M%C3%A9m%C3%A9tique
Le Bouddhisme est un méméplexes qui renait depuis 2500 ans. Nos gènes quand à eux jouissent d'une relative immortalité.
Je pense que l'idée de renaissance exprime une réalité relative, mais qu'elle ne s'applique pas comme de nombreux Bouddhistes en sont persuadés, à l'individu.
Dawkins observa que les cultures peuvent suivre une évolution similaire à celle de populations d'organismes vivants. Différents concepts peuvent passer d'une génération de créatures culturelles à l'autre et influencer, en bien ou en mal, les chances de survie de ces créatures culturelles hébergées par les humains. La mort de l'humain porteur est la plus forte contrainte, pour une créature mémétique, mais pas la seule. Par exemple, différentes cultures peuvent concevoir indépendamment des outils uniques et spécifiques, et leur efficacité peut influencer directement les chances de prospérité de leur concepteur, et procurer ainsi des avantages sur les cultures concurrentes. Les méthodes prouvées ainsi meilleures peuvent alors être adoptées par une plus grande proportion de la population. Chaque mème agit de façon similaire à un gène biologique qui peut être présent ou absent dans des populations de solutions culturelles données, la présence et la transmission génération après génération d'un mème sont directement liées à sa fonction. Le mème 'présence d'une chute' dans un contenu audiovisuel, augmentera sa capacité à distraire, et donc à se re-produire (le contenu sera conseillé, ou revu, plus que d'autres).

Une caractéristique clé d'un mème vient de son mode de propagation par imitation, comme l'a montré le sociologue français Gabriel Tarde. Le phénomène d'imitation appliqué à l'homme peut être considéré comme un comportement augmentant la capacité d'un individu à se reproduire et propager son génome. Les imitateurs auraient ainsi réussi à génétiquement accroître la capacité du cerveau à bien imiter. Dans ce sens, imiter signifie la capacité d'absorber des informations en utilisant ses sens pour ensuite les réutiliser. Cette information peut être inanimée, comme un livre, ou plus typiquement animée comme un autre humain dont le comportement va fournir des informations qui pourront être réutilisées. Les sources inanimées d'information ont été appelées systèmes de rétention. Sans le support de cerveaux suffisamment évolués pour évaluer leurs points clés de comportement et l'intérêt de les copier, les mèmes ne pourraient pas se propager. Les mèmes (ou des comportements acquis et propagés par imitation) ont été observés chez d'autres espèces que l'homme telles que les dauphins, les primates ou certains oiseaux. D'autres exemples de transmission de mèmes simples ont été aussi mis en évidence artificiellement chez les céphalopodes ou les rats. Une fois cette couche biologique installée, elle favorise une certaine indépendance du culturel sur le biologique.
Les mèmes et les gènes peuvent survivre plus longtemps que les organismes qui les transportent. Par exemple, un gène fournissant un avantage évolutif tel qu'accroître la force des dents d'une population de lions peut rester inchangé pendant des générations. De même, un mème particulièrement efficace peut se propager par copie d'un individu à l'autre longtemps après sa première apparition.
Bouddha avec ses agrégats n'était-il pas un précurseur ?

jap_8
Fa
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