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Faire tomber la Vue dans la Conduite : une erreur classique

Publié : 24 juillet 2012, 15:18
par ted
Un intervenant a écrit ceci, dans un autre fil que je n'arrive plus à retrouver :
FA nous dit ce qu'il a lu et peut-être entendu d'autres que lui, des êtres éveillés et réalisés et il intègre ça dans son raisonnement. Mais alors qu'est-ce que ça signifie ? Cela signifie qu'il fait tomber la vue dans la conduite ou, autrement dit, qu'il croit naïvement qu'il peut intégrer d'emblée dans sa conduite les principes énoncés par les maîtres, ce qui n'est possible que pour quelqu'un qui les a réalisés, un Bouddha. La conduite se développe par le bas.

Cette erreur de débutant peut paraître anodine mais elle conduit à l'égarement. Pourquoi ? Parce que ce genre de personne n'est pas dans la nature de l'esprit mais dans l'idée qu'ils ont de la nature de l'esprit. Donc, en plein dans l'esprit ordinaire. Et ça peut durer très longtemps.
J'ai trouvé ce conseil extrêmement précieux.

Nous avons tous lu un bouquin, par ci, par là, qui nous paraissait lumineux.
Persuadés d'être en complet accord avec les idées de l'auteur, nous avons peut-être cru que cette adhésion était suffisante ?
Mais on ne guérit pas d'une infection en lisant les ingrédients du médicament ou en en faisant la publicité, même si c'est motivant pour nous.
On guérit en "avalant" le médicament.

Le Dharma est avant tout une pratique, enseignée par le Bouddha, relayée par les maîtres des différentes écoles.
Dans de nombreux suttas, le Bouddha encourage ce passage à l'action. Oui, la conduite se développe par le bas.

Les propos sages et raisonnables, autoritaires ou intellectuellement brillants, s'ils ne sont pas construits sur les fondations du Noble Sentier Octuple, ne sont que gesticulations pour repeindre le monde à l'image de nos projections mentales. Je crois qu'on a tous fait cette erreur un jour ou l'autre.

Avant hier matin, au réveil, j'expliquais la bienveillance à mon fils. Et le soir même, j'ai piqué une grosse colère parce qu'il faisait du bruit après minuit. :D Bien sur, on ne fait pas de bruit aussi tard, ça dérange les voisins. :) Mais je le lui ai dit d'une façon brutale qui a clairement provoqué de la souffrance chez lui. Le bouddhisme n'est pas un dogme.

Faut-il éviter, dans un premier temps, de lire certains enseignements trop spécifiques ? Si oui, lesquels ? :D

Re: Faire tomber la Vue dans la Conduite : une erreur classi

Publié : 24 juillet 2012, 15:45
par Dharmadhatu
:D Les Tantras et le Dzogchen. Il y a pas mal de gens qui oublient d'étudier les fondements du Dharma et qui sont encore plus perturbés qu'avant en lisant des trucs sur les chakras ou sur rigpa.

Je parle en général bien sûr, car pour certains étudiants, ce genre d'enseignement pourra faire mouche.

FleurDeLotus

Re: Faire tomber la Vue dans la Conduite : une erreur classi

Publié : 24 juillet 2012, 17:21
par tongra
FA nous dit ce qu'il a lu et peut-être entendu d'autres que lui, des êtres éveillés et réalisés et il intègre ça dans son raisonnement.
N'y a t-il pas le moindre doute, dès le départ, sur la personne qu'on stigmatise dans ce post ?
Est-ce que cette affirmation ne va pas déjà un peu loin ?
Peut-on la prouver ?
Est-ce que c'est fondé sur l'aveu de l'intéressé ou est-il déclaré coupable avant consultation puis jugement ?

C'est juste pour la jouer attitude ... comment dit-on déjà ... Ah oui :
BOUDDHISTE.

Re: Faire tomber la Vue dans la Conduite : une erreur classi

Publié : 24 juillet 2012, 18:20
par Flocon
Je suis d'accord avec toi.
Pour les enseignements à éviter dans un premier temps, c'est difficile à dire... Certains textes du Chan et du Zen, mal compris, peuvent probablement avoir des conséquences néfastes sur leurs lecteurs en entraînant le type d'erreur décrite par Klesha.

Re: Faire tomber la Vue dans la Conduite : une erreur classi

Publié : 24 juillet 2012, 18:41
par ardjopa
Pour revenir sur le "bouddhisme pur et dur" ;-) , il me semble en effet que ceux qui d'emblée cherchent des enseignements "supérieurs" ou subtils, sans apprendre à maitriser un tant soit peu "les bases" les plus simples, sont dans l'attitude de celui qui veut voler, mais ne sait pas encore marcher
Si par exemple, quelqu'un entends dire que les "enseignements dzogchen ou mahamudra", sont les plus "élevés", et rapides pour aller vers sa réalisation, (voir les "seuls véritables", ce qui à mon sens est un danger, surement erroné), il prends le risque de vouloir faire l'impasse sur des bases plus "modestes" de pratique, et de finalement être désorienté, ne rien pratiquer du tout, ou mal;
Un bouquin dont j'ai posté la couverture recemment ("la liberté naturelle de l'esprit" de Longchenpa) est un des seuls que j'avais lu il y a longtemps sur l'enseignement dzogchen, mais il a l'avantage d'être très progressif, et de parler des véhicules d'origine,theravada, sutras, mahayana, jusqu'aux tantras, vajrayana, yogas, pour finir par les enseignements dzogchen (Ati-yoga, il me semble) sur Rigpa; et autres sujets;
Au final, il décrit que tous les véhicules se rejoignent voire se recoupent sur l'essentiel, et correspondent à des niveaux, évolutions ou temperaments de pratiquants différents, en faisant le parallèle entre le "samatha-vipassana" enseigné dans le theravada, le dhyana-observation du mahayana, et le chine-lakhtong du vajrayana, puis de la réalisation de sunyata dans le zen, correspondant à celle du dzogchen;
En fait le sujet est plus de dire, qu'il s'agit d'aborder différemment la voie, le theravada mettant plus l'accent sur l'éthique, le mahayana sur la vacuité, et le vajrayana sur les "moyens habiles" des tantras, pour finir par la réalisation non-duelle, ou auto-réalisation du dzogchen, mais qu'au niveau de la pratique, même dans le satipatthana, l'anapanasati, des premiers tours de roue, si la pratique est bonne, l'esprit dans la bonne "attitude", la vue du dzogchen y est déjà;

Re: Faire tomber la Vue dans la Conduite : une erreur classi

Publié : 24 juillet 2012, 19:46
par Dharmadhatu
:D Qu'entends-tu par "vue du dzogchen", Arjopa ?

FleurDeLotus

Re: Faire tomber la Vue dans la Conduite : une erreur classi

Publié : 24 juillet 2012, 20:53
par Katly
ted a écrit :Un intervenant a écrit ceci, dans un autre fil que je n'arrive plus à retrouver :
FA nous dit ce qu'il a lu et peut-être entendu d'autres que lui, des êtres éveillés et réalisés et il intègre ça dans son raisonnement. Mais alors qu'est-ce que ça signifie ? Cela signifie qu'il fait tomber la vue dans la conduite ou, autrement dit, qu'il croit naïvement qu'il peut intégrer d'emblée dans sa conduite les principes énoncés par les maîtres, ce qui n'est possible que pour quelqu'un qui les a réalisés, un Bouddha. La conduite se développe par le bas.

Cette erreur de débutant peut paraître anodine mais elle conduit à l'égarement. Pourquoi ? Parce que ce genre de personne n'est pas dans la nature de l'esprit mais dans l'idée qu'ils ont de la nature de l'esprit. Donc, en plein dans l'esprit ordinaire. Et ça peut durer très longtemps.
J'ai trouvé ce conseil extrêmement précieux.

Nous avons tous lu un bouquin, par ci, par là, qui nous paraissait lumineux.
Persuadés d'être en complet accord avec les idées de l'auteur, nous avons peut-être cru que cette adhésion était suffisante ?
Mais on ne guérit pas d'une infection en lisant les ingrédients du médicament ou en en faisant la publicité, même si c'est motivant pour nous.
On guérit en "avalant" le médicament.

Le Dharma est avant tout une pratique, enseignée par le Bouddha, relayée par les maîtres des différentes écoles.
Dans de nombreux suttas, le Bouddha encourage ce passage à l'action. Oui, la conduite se développe par le bas.

Les propos sages et raisonnables, autoritaires ou intellectuellement brillants, s'ils ne sont pas construits sur les fondations du Noble Sentier Octuple, ne sont que gesticulations pour repeindre le monde à l'image de nos projections mentales. Je crois qu'on a tous fait cette erreur un jour ou l'autre.

Avant hier matin, au réveil, j'expliquais la bienveillance à mon fils. Et le soir même, j'ai piqué une grosse colère parce qu'il faisait du bruit après minuit. :D Bien sur, on ne fait pas de bruit aussi tard, ça dérange les voisins. :) Mais je le lui ai dit d'une façon brutale qui a clairement provoqué de la souffrance chez lui. Le bouddhisme n'est pas un dogme.

Faut-il éviter, dans un premier temps, de lire certains enseignements trop spécifiques ? Si oui, lesquels ? :D
Pour le bouddhisme tibétain, la tradition Gelugpa offre une bonne base des fondements comme le Noble sentier Octuple, ou le karma... Quelques lectures d'enseignements Dzogchen peuvent faire mouche, mais il ne faut pas s'y engagé trop rapidement, dans l'enthousiasme, sous l'effet du ravissement. D'ailleurs, on sent bien qu'on ne peut pas, qu'il y a des petites choses qui nous frêne, frêne "je voudrais descendre de là, cascadeur...", des trucs pas encore avalés ou digérés. Un peu le mal de mer, quoi.
Ou bien pour d'autres c'est peut-être parfois, comme un nouveau continent à explorer, fascinant, et cela peut générer de l'avidité de connaissances encore inutiles ou superflus à la pratique pas suffisamment mûre ou imbus de ses acquis. L'accumulation d'un savoir, comme l'or dans les bateaux ou sur les chameaux.
On peut tomber dans l'illusion, dans l'imitation, devenir faussaire de son cheminement spirituel, en fait du matérialisme spirituel, d'autant plus tentant s'il peut s'afficher sur tous supports médias, communications.
Personnellement, j'ai d'abord lu les ouvrages de SS le Dalaï-Lama, quand j'ai découvert le bouddhisme, il y a sept ans. Mais je me suis égarée à la croisé des chemins ( l faut être un peu guidée dans ses lectures au début, il y en a tellement. Et si on est très curieux(se)... ) En suite au carrefour, donc, l'éventail des pratiques s'élargissant... on se cherche... ça peut faire mouche, oui. Mais faut pas appuyez sur l'champignon. Comme a dit Ajhan chah à Jack Kornfield :« J’espère que vous n’avez pas peur de souffrir. » – « Que voulez vous dire par là ? » lui demande Kornfield étonné. « Il y a deux sortes de souffrance » lui répond le méditant, « la souffrance que vous essayez de fuir, qui vous suivra partout, et la souffrance que vous acceptez de regarder en face, trouvant la libération que le Bouddha nous a enseignée. »
Mais heureusement en route, il y a des signaux, si on est encore lucide. Et il faut se connaître bien soi-même déjà...
Bref, en gros ne pas pratiquer non plus, au-dessus de ses moyens, même si les autres ne nous trouvent pas à la hauteur, tanpi. Il vaut mieux s'en tenir à sa pratique telle qu'elle est et sincère, honnête avec soi-même, ce sera beaucoup plus sûrement fructueux.

Re: Faire tomber la Vue dans la Conduite : une erreur classi

Publié : 24 juillet 2012, 21:35
par ardjopa
Qu'entends-tu par "vue du dzogchen", Arjopa ?
Quand je dis "vue du dzogchen" ou autres expressions plus ou moins l 'arrache, je me comprends
C'est déjà pas mal ;-)
Je n'ai pas lu des tonnes de livres hypers techniques sur le bouddhisme, d'ici ou d'ailleurs;
Mais pour faire simple, je dirais que ça rejoint la façon d'aborder la méditation en réalisant que notre nature éveillée est déjà présente, que tout est déjà "parfait"; Voir ce qui est, c'est tout; Que samsara et nirvana ne font qu'un; Ce qui peut rejoindre d'ailleurs la pratique du zen, qui enseigne que notre nature de bouddha est toujours présente, qu'il n'y a rien à "modifier" ou changer, qu'il suffit de laisser passer les pensées, et revenir à notre condition naturelle, normale.
De ce que je connais le dzogchen enseigne dès le début pour pratique, ce que dans le theravada on considère parfois comme le but final : la libération; Que la nature de la réalité, telle qu'elle est, est déjà éveillée; Rigpa qui est l'énergie pure de l'esprit, est déjà partout, ou plutot tous les kleshas, les pensées, sensations, "soi et le monde", sont de la nature de l'éveil (non-dualité, sans but, rien à chercher, rien à supprimer)
Mais à mon sens, vipassana entre autre,comme les méditations du mahayana,sont déjà une forme de méditation directe dans la réalité : ne rien chercher, ni rien repousser, seulement observer, voir la réalité éphémère passer...
Tu trouveras surement des érudits pour en redire mieux, mais j'ai toujours considéré qu'une mauvaise définition venant d'une expérience même imparfaite, vaut toujours mieux qu'une excellente définition sans aucune expérience ;-)

Re: Faire tomber la Vue dans la Conduite : une erreur classi

Publié : 24 juillet 2012, 22:09
par Katly
Image

Retirer sa flèche, regarder sa plaie, panser, soigner, passer à l'action. Les expériences profondes, la méditation c'est intime. Et d'esprit à esprit. Mais cela n'empêche pas de communiquer avec les autres, au contraire. Et notre pratique est vivante, confrontée au quotidien, c'est le quotidien, pas toujours facile mais très riche.
Simplement suivre le sentier...
Quand au raisonnement il est important pour la compréhension, pas plus, le raisonnement lui-même est un cheminement intérieur, la pluie qui donne la source...

FleurDeLotus

Re: Faire tomber la Vue dans la Conduite : une erreur classi

Publié : 24 juillet 2012, 22:37
par tongra
Hélas, 3 X hélas.
Le dzogchen peut être parfaitement abordé dès le tout début et par n'importe qui car son enseignement est une voie complète et comprend tous les outils pour ouvrir à la reconnaissance de sa véritable nature. La version nyingma progresse à travers les 9 yanas, mais le dzogchen "pinacle" a ses propres vue, pratique et comportement qui se suffisent à eux-mêmes.

Les trois séries du dzogchen sont des approches complètes.

Avec un maître compétent, rien ne manque au dzogchen.

Donc le reste n'est pas inutile mais est loin d'être indispensable.