PHENOMENOLOGIE et BOUDDHISME

chakyam

A tous ou à quelque-uns!

Par le simple fait que notre forum est devenu « autogéré », il nous appartient de proposer un certain nombre de critères de fonctionnement en garantissant le devenir correct afin que chaque position pratique, expérimentale ou philosophique puisse non seulement s'exprimer mais recevoir une réponse à sa problématique propre ou une critique, y compris virulente si le besoin s'en fait sentir.

Tel n'est malheureusement pas le cas. Dans le cadre général d'un échange sur le post : Phénoménologie et Bouddhisme j'ai cité le 13 Octobre une formulation que chacun d'entre nous connaît : la forme est vide, le vide est forme qui donne dans le zen soto : Shiki Soku ze Ku et Ku Soku ze Shiki soit : les phénomènes en soi sont l'essence et l'essence en soi est les phénomènes. Dans la logique du zen, KU est la VACUITE qui est SATORI qui est ZAZEN qui est NATURE de BUDDHA qui imprègne tout et en ce sens est UNIVERSELLE.

Je me suis attiré, évidemment, les foudres de Dharmadhatu le même jour sous la forme suivante :
" Si c'est bien la vue du Zen soto, il s'agit d'une traduction qui rend l'opposé de ce qu'enseigne le Hridaya Sutra."

J'ai donc comparé les deux textes et demandé à Dharma de vouloir bien justifier ses dires dans la mesure où les deux textes ne m'apparaissaient pas contraires. Voici ce qu'enseigne le Hridaya Sutra :

« La forme est vide. La vacuité est la forme. La vacuité n'est pas autre que la forme et la forme n'est pas autre que la vacuité. De même, la sensation, l'identification, les facteurs composés et la conscience sont-ils vides.
Sharipoutra, ainsi tous les phénomènes sont-ils vacuité ; ils sont sans caractéristique ; ils ne naissent ni ne cessent ; ne sont ni souillés ni non souillés ; ni déficients; ni parfaits.

En conséquence, Sharipoutra, dans la vacuité il n'y a ni forme, ni sensation, ni identification, ni facteurs composés, ni conscience ; ni œil, ni oreille, ni nez, ni langue, ni corps, ni mental ; ni forme, ni son, ni odeur, ni saveur, ni objet du toucher, ni phénomène mental. De l'élément de l'œil et ainsi de suite, jusqu'à l'élément de la conscience du mental, il n'y a pas d'élément. Il n'y a ni ignorance ni élimination de l'ignorance et ainsi de suite, jusqu'il n'y a ni vieillissement et mort, ni élimination du vieillissement et de la mort. Et à l'avenant, il n'y a ni souffrance, ni origine de la souffrance, ni cessation, ni voie ; il n'y a ni sagesse transcendante, ni obtention, ni non-obtention. »


Une autre traduction précise : Ici Sāriputra, forme est vacuité (sūnyatā) et vacuité est forme ; forme n’est autre que vacuité, vacuité n’est autre que forme ; là où il y a forme, il y a vacuité, là où il y a vacuité, il y a forme ; ainsi en est-il des sensations, des notions, des facteurs d’existence et de la connaissance discriminative.

Le 16 Octobre réponse Dharma : Désolé, mais je ne parle pas japonais et ne peux donc vérifier tes dires, le sujet du débat ne me concerne donc plus.

Ce même jour, je m'étonne et réitère ma demande de précision. En vain et pour m'entendre dire : Disons alors que je ne suis aucunement d'accord avec la traduction de Deshimaru car elle trahit le propos originel du Hridaya Sutra.

Ce qui nous ramène au point de départ et n'explique rien.

Je considère donc que d'atermoiements en reculades et prétextes, mon interlocuteur ne joue pas le jeu du dialogue. Il a, comme tout un chacun, le droit de ne pas répondre mais une fois la discussion entamée, il se doit et nous doit d'aller au bout de ses arguments afin d'éclairer les participants et les lecteurs. Ne pas le faire est un manquement grave aux obligations implicites de Nangpa ; c'est en outre faire preuve d'une prétention au savoir impossible à justifier, en raison, et donc d'une incapacité à argumenter responsable de débats sans fin.

Faute de justifications expérimentales et philosophiques, j'estime donc que le débat est clos et que mon interlocuteur défaillant n'en sort pas grandi. Sous des formulations relativement semblables/différentes les deux textes renvoient à la réalité de la forme-vacuité et de la vacuité-forme, sans inférence qui n'est qu'une généralisation conceptuelle insusceptible quant à elle d'une quelconque réalité autre que fantasmée.

Quant à moi, je continuerai à surveiller (puisque c'est le terme consacré) les propos de celui qui est tellement « certain » qu'il ne condescend même pas à dialoguer jusqu'au terme du discours par crainte d'étaler au grand jour son ignorance des fondements de ce dont il nous entretient.


FleurDeLotus Butterfly_tenryu
ted

chakyam a écrit : d'autant qu'un bouddha, quand il l'est ne le sait pas car dans le cas contraire il ne le serait pas.
Dans ce cas, comment le Bouddha Gautama a t'il pu annoncer son éveil ? ;-)
Katly

Excusez-moi, mais le Bouddha su qu'il s'était éveillé, et ce n'est qu'en racontant ce qu'il avait vécu et découvert, en commençant à l'enseigner, qu'il fût nommé Bouddha. Alors en effet quelque part, il ne le savait pas, car il ne connaissait pas son nom. jap_8 Nom qui lui a été donné par ceux qu'il a rencontré, qui signifie, si je ne me trompe pas, " Celui qui s'est éveillé".

jap_8
chakyam

Tu n'es pas sans savoir que le bouddhisme est transmis à de multiples niveaux correspondant au degré de compréhension d'un auditoire donné. En foi de quoi, ta remarque est tout à fait justifiée et il est bien clair que les premiers sermons du bouddha impliquait qu'il savait qu'il l'était devenu.

Mais le principe de bouddhéité explicité dans les sectes « ultimes » nous apprend que la Nature de Bouddha est englobante et inclut l'Eveil et l'ignorance dans une même réalité au-delà des mots et raisonnements qui ne font qu'en montrer l'existence d'où l'antagonisme a été transcendé. Il en découle que selon ce principe, affirmer sa propre nature de bouddha réalisée rejette ceux qui ne le sont pas encore dans un no-man's-land idéologique et pratique qui contrevient par ailleurs à l'affirmation expérimentée selon laquelle chaque homme est bouddha... en puissance seulement.

A contrario je te rappelle l'injonction de LIN T'SI « si tu rencontres le bouddha, tue-le ! » qui précise que reconnaître Buddha risque d'enfermer dans l'adoration celui qui le reconnaîtrai... et donc d'empécher sa libération.


FleurDeLotus Butterfly_tenryu
Katly

Il semble que dans l'histoire cela se soit passé ainsi et qu'il faut bien donner un nom aux choses, simplement.
Il y a eu plus d'un Bouddha...
Chaque humain est bouddha quand il s'éveille, au moment où il s'éveille.
Il y a Bouddha le nom pour nommer, appelez un humain par son nom.
Il y a bouddha pour dire la nature éveillé de l'être humain.

Après proclamation, adoration, il ne s'agit plus d'éveil ou d'éveillé.

Les uns et les autres nous ne nous appelons pas et nous ne nous proclamons pas Bouddha, mais nous en avons tous la "graine".
Katly

Le Bouddha aurait dit je suis monté au ciel en lotus, on l'aurait appelé " Celui qui est monté au ciel en lotus", avec de grands yeux écarquillés comme des enfants. :D

On dit que c'est un Bouddha qui reconnait un autre Bouddha.
Un être humain éveillé reconnait un autre être humain éveillé.
Le germe de l'éveil reconnaît la fleur de l'éveil, la fleur de l'éveil reconnaît le germe de l'éveil.

jap_8
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Dharmadhatu
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Inscription : 02 juillet 2008, 18:07

Dhatu a écrit :Le flux est une caractéristique générale des objets impermanents, tu ne perçois pas ce flux, tu l'infères.
:D Quand je relis cette phrase adressée à Fa, je me dis qu'en fait il est possible que ce flux soit réalisé implicitement par une perception directe.

Dans les textes sur Lorig (les Types de cognition), un exemple est utilisé:

quelqu'un perçoit un endroit sans vase: il réalise explicitement cet endroit vide et réalise implicitement l'absence du vase dans cet endroit.

Dans ce cas, l'absence est une négation (et même une négation non-affirmative), c'est un phénomène généralement caractérisé (samanya-lakshana).

On peut donc bien réaliser une généralité (samanya; en l'occurrence, un phénomène généralement caractérisé: samanya-lakshana) implictement et par perception directe.

FleurDeLotus
apratītya samutpanno dharmaḥ kaścin na vidyate /
yasmāt tasmād aśūnyo hi dharmaḥ kaścin na vidyate

Puisqu'il n'est rien qui ne soit dépendant,
Il n'est rien qui ne soit vide.

Ārya Nāgārjuna (Madhyamakaśhāstra; XXIV, 19).
Sourire

chakyam a écrit : d'autant qu'un bouddha, quand il l'est ne le sait pas car dans le cas contraire il ne le serait pas.
C'est tout le paradoxe dans la notion de "Bouddha"
ted a écrit :
chakyam a écrit : d'autant qu'un bouddha, quand il l'est ne le sait pas car dans le cas contraire il ne le serait pas.
Dans ce cas, comment le Bouddha Gautama a t'il pu annoncer son éveil ? ;-)
C'est tout le paradoxe dans l'existence même du bouddhisme

Et si on unit ces deux paradoxes, on peut même se demander si Bouddha a existé en tant que Bouddha, s'il a atteint l'Eveil, s'il ne s'est pas contenté d'en inventer (ou répandre) la notion, etc. etc. etc.
On peut aussi, plus simplement se demander s'il n'a pas atteint l'Eveil sans jamais s'en être rendu compte et tout ce qui est relatif à son état d'Eveil ne serait pas dû à des ajouts postérieurs à sa prédication.
( :mrgreen: vais me faire lyncher, moi ! )
Mais que ça soit lui-même qui se soit déclaré "Eveillé" ou bien qu'il l'aie été par ceux qui l'écoutaient, ou bien qu'il l'aie été par des personnes ne l'ayant pas connu, le résultat est le même.
Pour nous, ça ne change rien.
Le dharma a été enseigné.
Le paradoxe du Bouddha qui n'est plus un Bouddha dès lors qu'il sait être un Bouddha... C'est très intéressant, mais au fond, on s'en tape un peu. Ca ne nous changera pas grand-chose aux enseignements qui ont été laissés, ni à ce que nous en faisons. Sauf si, bien sûr, nous décidons de nous prendre la tête avec ça.

Bonne journée jap_8
FA

Dharmadhatu a écrit :
Dhatu a écrit :Le flux est une caractéristique générale des objets impermanents, tu ne perçois pas ce flux, tu l'infères.
:D Quand je relis cette phrase adressée à Fa, je me dis qu'en fait il est possible que ce flux soit réalisé implicitement par une perception directe.
Dans les textes sur Lorig (les Types de cognition), un exemple est utilisé:
quelqu'un perçoit un endroit sans vase: il réalise explicitement cet endroit vide et réalise implicitement l'absence du vase dans cet endroit.
Dans ce cas, l'absence est une négation (et même une négation non-affirmative), c'est un phénomène généralement caractérisé (samanya-lakshana).
On peut donc bien réaliser une généralité (samanya; en l'occurrence, un phénomène généralement caractérisé: samanya-lakshana) implictement et par perception directe.
FleurDeLotus
Non Dathu !

Au niveau de la perception, il n'y a pas de vase, ni de table.
L'endroit vide est déjà une inférence, et tout le raisonnement qui suit.
Et on ne peut pas percevoir un phénomène généralement caractérisé. Il appartient au monde de l'inférence.
Quand tu réalises la vacuité il n'y a plus de vacuité-en-tant-que-phénomène-généralement-caractérisé !

Si tu perçois la vacuité, tu n'infères plus la vacuité.
Si tu infères la vacuité, tu ne la perçois pas.

Ce sont 2 situations mutuellement exclusives.
Le paradoxe du Bouddha qui n'est plus un Bouddha dès lors qu'il sait être un Bouddha... C'est très intéressant, mais au fond, on s'en tape un peu. Ca ne nous changera pas grand-chose aux enseignements qui ont été laissés, ni à ce que nous en faisons. Sauf si, bien sûr, nous décidons de nous prendre la tête avec ça.
Le paradoxe n'est qu'apparent, parceque le Bouddha n'a pas d'autre choix, que de montrer le chemin en partant de la réalité conventionnelle.
La difficulté pour l'enseignant est de libérer le chercheur de l'illusion en utilisant la langage de l'illusionné.

Le réalisé ne cesse pas de l'être, parceque lorsqu'il conceptualise, car il n'y met aucun attachement.
Il réalise donc les 2 vérités simultanément. Il conceptualise pour le bien des autres.

La réalisation simultanée des 2 vérités se concrétise par le non-attachement.
La non-attachement signifie qu'on réalise les 2 vérités simultanément et dynamiquement.
Cela signifie que l'éveil est effectif !

jap_8
Fa
chakyam

Quand je relis cette phrase adressée à Fa, je me dis qu'en fait il est possible que ce flux soit réalisé implicitement par une perception directe.

Dans les textes sur Lorig (les Types de cognition), un exemple est utilisé:
quelqu'un perçoit un endroit sans vase: il réalise explicitement cet endroit vide et réalise implicitement l'absence du vase dans cet endroit.
Dans ce cas, l'absence est une négation (et même une négation non-affirmative), c'est un phénomène généralement caractérisé (samanya-lakshana).


Perception directe ?? L'histoire de la rose est tout sauf une perception directe. C'est purement et simplement une construction mentale à partir de l'absence constatée de quelque chose ; çà c'est la perception directe. Le reste est construit. Un vase ? Pourquoi une vase ? C'est un choix qui pourrait être différent. L'absence est une négation ? Pourquoi ? Parce qu'il devrait y avoir forcement quelque chose issue d'une décision arbitraire ?

Flux réalisé par perception directe ?
Encore NON ! Par construction. Qu'y a t-il de direct dans cet ensemble ? Rien ! Sauf l'absence constatée.

J'invite donc nos amis lecteur à relire cette citation de Dharma du fil : Qu'est-ce que l'ignorance ? du 13 Octobre.

« Voilà ce qui est juste: D'un point de vue épistémologique, le Bouddhisme se fonde sur l'impermanence pour ce qui concerne les perceptions sensorielles (et aussi mentales dans certains cas) directes, et rend compte des surimpositions conceptuelles (illusions), ainsi que des images génériques comme permanentes. »

Sourire,

« C'est très intéressant, mais au fond, on s'en tape un peu »

Pas du tout ! Et ce n'est pas se prendre la tête que de déterminer si le Bouddha est une personne incarnée ou une possibilité de perfectibilité offerte aux humains. Dans le premier cas on risque le culte de la personnalité, d'où le « conseil » de LIN T'SI, et la perpétuation « du même » (!!!!) par le mécanisme illusoire des Renaissances ! alors que dans la seconde hypothèse, c'est la réalisation du Cosmos en Soi (!!!!) qui est possible...


FleurDeLotus Butterfly_tenryu
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