Concepts et réalité

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jules
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lausm a écrit :jap_8

Oui, c'est bien cela.
...et une infinité d'autres choses, y compris; "juste cela".

<<metta>>
ted

Dharmadhatu a écrit :
Ted a écrit :Penser à quelque chose qui n'existe pas, même pour nier son existence, c'est déjà lui donner un certain accès à la réalité, ne serait-ce qu'en tant que concept...
eveil_333 C'est un point important, mais j'avais peur de faire un HS sur le fil de Fenner.

Dans le Bodhisattvacharyavatara, Shantideva dit qu'on ne peut pas réfuter le soi si on ne l'a pas d'abord déterminé. Donc, il y a un passage obligé: avoir une conception correcte de l'objet de négation pour le réfuter.

Peut-on dire malgré tout que concevoir quelque chose c'est lui donner un certain accès à la réalité ? Est-ce qu'un éléphant rose a une certaine existence dès qu'on le conçoit ?

Chez les guéloukpas, il y a une expression pour parler de ça, mais j'ai oublié. Par contre, lors d'une conception (comme lors d'une perception) il est toujours question de l'aspect appréhendé (soung nam) et de l'aspect appréhendant (dzin nam).

L'aspect appréhendant a bien une existence, sinon l'ignorance n'existerait pas et on serait tous éveillés.

Mais, dans le cas d'un inexistant, l'aspect appréhendé est une pure fabrication qui ne renvoie à rien dans la réalité. Bon, pour l'éléphant rose, ça existe peut-être sans qu'on l'ait encore découvert, ou dans un autre système solaire, pourquoi pas ? Ne pas trouver la présence d'une chose ne revient à en trouver l'absence. Mais quant au soi inhérent, il est toujours possible d'en trouver l'absence, donc il n'existe pas.

On peut dire qu'il y a des concepts faux et des concepts vrais: les premiers ne renvoient à rien dans la réalité tandis que les seconds renvoient bien à leurs objets, c'est pour ça que toutes les écoles bouddhistes s'accordent à dire que l'inférence valide est pramana au même titre que la perception directe valide. Si l'inférence n'est pas valide, il n'y a pas cognition probante ou avérée (pramana). Il s'agit donc de concepts faux, des coquilles vides, sans contenu factuel.

Bref, déterminer l'objet de négation qu'est le soi, ce n'est pas nécessairement lui donner un accès à la réalité si on garde à l'esprit cette distinction entre les deux aspects.

En effet, ça aurait fait tache dans le fil de Fenner ! ::mr yellow:: (quoi que... si tout est lié).

Sources: Recognizong Reality; Knowledge and Liberation; Knowing, Naming and Negation; Connaître l'esprit.

FleurDeLotus
Je te relis et je me dis qu'on a là un raisonnement logique qui présuppose de ce qui existe dans la réalité.

Or, y a t'il une réalité autre que celle de nos états de conscience ?
lausm

Les non-états de conscience, peut-être?
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michel_paix
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exactement Lausm, la réalité du feu rouge est relative, selon le code civile ou selon celui qui s'en moque, qui détiens la vue juste sur le feu de circulation ?? Personne tout dépend de tes objectifs. La loi a pour objectif de sécurité et celui qui s'en moque a des fins différent, la réalité est un mot relatif.

Sa va pas plus loin que cela est dans ce contexte une facon de parler pour dire qu'isoler le mot a lui seul réalité on n'arrive a rien, il faut toujours des soutiens, comme dans le bouddhiste le but est en quelque sorte l'éveil, donc il est logique que la réalité aborde l'interdépendance et l'ultime.

<<metta>>
:)
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michel_paix
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Bonjour Ted ce que Dharmadhatu aborde est logique, c'est effectivement la vue juste selon la doctrine qui s'y lie.

<<metta>>
:)
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Dharmadhatu
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jap_8 Merci à Lausm pour sa réponse.
ted a écrit :
Dharmadhatu a écrit :
Ted a écrit :Penser à quelque chose qui n'existe pas, même pour nier son existence, c'est déjà lui donner un certain accès à la réalité, ne serait-ce qu'en tant que concept...
eveil_333 C'est un point important, mais j'avais peur de faire un HS sur le fil de Fenner.

Dans le Bodhisattvacharyavatara, Shantideva dit qu'on ne peut pas réfuter le soi si on ne l'a pas d'abord déterminé. Donc, il y a un passage obligé: avoir une conception correcte de l'objet de négation pour le réfuter.

Peut-on dire malgré tout que concevoir quelque chose c'est lui donner un certain accès à la réalité ? Est-ce qu'un éléphant rose a une certaine existence dès qu'on le conçoit ?

Chez les guéloukpas, il y a une expression pour parler de ça, mais j'ai oublié. Par contre, lors d'une conception (comme lors d'une perception) il est toujours question de l'aspect appréhendé (soung nam) et de l'aspect appréhendant (dzin nam).

L'aspect appréhendant a bien une existence, sinon l'ignorance n'existerait pas et on serait tous éveillés.

Mais, dans le cas d'un inexistant, l'aspect appréhendé est une pure fabrication qui ne renvoie à rien dans la réalité. Bon, pour l'éléphant rose, ça existe peut-être sans qu'on l'ait encore découvert, ou dans un autre système solaire, pourquoi pas ? Ne pas trouver la présence d'une chose ne revient à en trouver l'absence. Mais quant au soi inhérent, il est toujours possible d'en trouver l'absence, donc il n'existe pas.

On peut dire qu'il y a des concepts faux et des concepts vrais: les premiers ne renvoient à rien dans la réalité tandis que les seconds renvoient bien à leurs objets, c'est pour ça que toutes les écoles bouddhistes s'accordent à dire que l'inférence valide est pramana au même titre que la perception directe valide. Si l'inférence n'est pas valide, il n'y a pas cognition probante ou avérée (pramana). Il s'agit donc de concepts faux, des coquilles vides, sans contenu factuel.

Bref, déterminer l'objet de négation qu'est le soi, ce n'est pas nécessairement lui donner un accès à la réalité si on garde à l'esprit cette distinction entre les deux aspects.

En effet, ça aurait fait tache dans le fil de Fenner ! ::mr yellow:: (quoi que... si tout est lié).

Sources: Recognizong Reality; Knowledge and Liberation; Knowing, Naming and Negation; Connaître l'esprit.

FleurDeLotus
Je te relis et je me dis qu'on a là un raisonnement logique qui présuppose de ce qui existe dans la réalité.

Or, y a t'il une réalité autre que celle de nos états de conscience ?
jap_8 En effet, comme Nagarjuna le dirait: pas de connaissable (jñeya) sans connaissance (jñana) et inversement.

Donc l'important est d'examiner quels sont les connaissables (ontologie) et les perceptions qui s'y rapportent (épistémologie). Dans les traités bouddhiques, un existant est ce qui est observé par une cognition valide. A son tour, la cognition valide doit être définie: pour le Sautrantika, c'est une conscience nouvelle et infaillible. Pour le Prasangika, c'est une conscience infaillible quant à son objet du mode d'appréhension.

On est bien avancés !! ::mr yellow::

Ca veut dire qu'une fois établis les objets de connaissance, on établit les moyens de les appréhender. Les phénomènes produits sont appréhendés principalement au travers des sens. Pour le Prasangika, même un sens mental peut appréhender directement un produit. Il est par contre généralement admis que les phénomènes permanents, et surtout les phénomènes généralement caractérisés (samanya-lakshana) sont les objets des conceptions (et non plus des perceptions directes).

Malgré tout, une perception yogique doit finalement pouvoir réaliser des phénomènes permanents (comme le non-soi), mais de manière directe.

On peut dire qu'il n'y a en effet aucune réalité autre que celle de nos états de conscience. C'est pour ça que Nagarjuna dit que tout ça n'est qu'un nom, que l'esprit lui-même n'est qu'un nom. Un nom apposé en dépendance d'une base (un ensemble de caractéristiques, etc.). Et un état de conscience peut être erroné, il doit pouvoir être infirmé par un état de conscience valide.

FleurDeLotus
apratītya samutpanno dharmaḥ kaścin na vidyate /
yasmāt tasmād aśūnyo hi dharmaḥ kaścin na vidyate

Puisqu'il n'est rien qui ne soit dépendant,
Il n'est rien qui ne soit vide.

Ārya Nāgārjuna (Madhyamakaśhāstra; XXIV, 19).
ted

Si je t'ai relancé la dessus, c'est parce qu'après le repas, lundi, j'ai ressenti une sensation de bien être. Et j'ai eu l'impression que le monde était agréable. Pourtant j'avais pas mangé grand chose.
Et je me demandais, est-ce qu'on cherchait vraiment à résoudre nos problèmes, ou est ce qu'on ne se satisfaisait pas simplement de sensations agréables ? :roll:


- Ca expliquerait pourquoi des gens préfèrent être accrocs à la drogue, au lieu de chercher du travail.
- Ca expliquerait pourquoi on oublie si facilement la misère du monde en prenant un bon repas ou en profitant de ce qu'on a.
- Et aussi pourquoi on s'attache à des états méditatifs apaisants au lieu de creuser vipassana.
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Dharmadhatu
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ted a écrit :Si je t'ai relancé la dessus, c'est parce qu'après le repas, lundi, j'ai ressenti une sensation de bien être. Et j'ai eu l'impression que le monde était agréable. Pourtant j'avais pas mangé grand chose.
Et je me demandais, est-ce qu'on cherchait vraiment à résoudre nos problèmes, ou est ce qu'on ne se satisfaisait pas simplement de sensations agréables ? :roll:


- Ca expliquerait pourquoi des gens préfèrent être accrocs à la drogue, au lieu de chercher du travail.
- Ca expliquerait pourquoi on oublie si facilement la misère du monde en prenant un bon repas ou en profitant de ce qu'on a.
- Et aussi pourquoi on s'attache à des états méditatifs apaisants au lieu de creuser vipassana.
:D C'est vrai qu'on n'a pas trop l'occasion de ressentir la souffrance la plus subtile, celle qui imprègne nos agrégats. On peut se satisfaire de certains plaisirs passagers; mais il est possible aussi que certains d'entre nous finissent par chercher un bonheur qui ne sera plus jamais dépendant de conditions. Ce qui n'empêchera pas de continuer à faire de bons repas, j'imagine.

FleurDeLotus
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Puisqu'il n'est rien qui ne soit dépendant,
Il n'est rien qui ne soit vide.

Ārya Nāgārjuna (Madhyamakaśhāstra; XXIV, 19).
boudiiii !

ce qui fait la différence , c'est la bodhicitta . Elle est comme un feu dévorant qui t'empêche de te satisfaire de ton état , et qui te fait avancer plus loin que le simple contentement passager des plaisirs mondains , comme dit Ted .
L'insatisfaction subtile dù à nos agrégats ne suffit pas à mon avis comme moteur pour sortir du samsara . Si c'était le cas, le samsara se serait vidé rapidement de ses "occupants" .
ted

boudiiii ! a écrit : L'insatisfaction subtile dù à nos agrégats ne suffit pas à mon avis comme moteur pour sortir du samsara .
Sauf peut être si on la perçoit directement pendant un état meditatif ??
Sais pas...
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