Telle est la sentence prononcée par le 6ème Patriarche chinois HUI-NENG (né en 683, mort en 713) à la suite de la composition de la gatha qui l'opposait à SHEN-HSIU pour la remise de la robe d'autorité et succéder ainsi au 5ème Patriarche HUNG-JEN.
Il y a tout lieu de penser que l'enseignement du 5ème Patriarche reposait sur la surveillance incessante du Mental telle que le reflète la gatha de SHEN-HSUI :
Le corps est l'arbre de la bodhi
Le mental est comme un miroir brillant
Prends soin de le garder toujours net
Et ne laisse pas la poussière s'y amasser.
La gatha qui finalement va l'emporter est beaucoup plus radicale.
Il n'y a pas d'arbre de la Bodhi
Aucun miroir brillant n'existe là
Puisque tout est vide
Où la poussière peut-elle se déposer ?
Cette différence rédactionnelle, outre sa forme, révèle deux approches fondamentales de la réalité également valides mais qu'il s'agit de comprendre clairement pour justifier sa propre réflexion.
La première gatha repose sur la certitude de la pureté originelle du mental dont émane l'univers avec ses aspects multiples et qui, en lui même est simple, non-souillé, lumineux comme peut l'être le soleil derrière les nuages. Il s'agit donc pour le pratiquant de veiller à cette pureté et en conséquence de «prendre soin de la garder toujours nette »
La seconde considère que dans la mesure où le miroir est pur et non-souillé originellement « prendre soin de le garder toujours net » est un artifice inutile. Si le monde surgit de ce mental, pourquoi ne pas le laisser surgir à sa guise ? S'efforcer d'y faire échec n'est-ce pas le contrarier ? Ainsi HUI-NENG va t-il considérer que « chérir la notion de Pureté c'est s'y attacher et changer la pureté en fausseté »
Ainsi donc la formulation selon laquelle « dès le commencement aucune chose n'est » détruit concrètement l'erreur qui s'attache à l'idée de pureté. Pureté signifie en réalité Vacuité, un état d'inexistence absolue qui exclut quelque chose à voir par quelqu'un y compris une quelconque conceptualisation. C'est quand il y a non-vision qu'il y a réelle vision ; c'est quand il n'y a rien à entendre qu'il y a réelle audition. Telle est l'intuition de la Prajnaparamita.
Amitiés

